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Les autocritiques du Parti
communiste d'Indonésie:
- Déclaration du Bureau politique
du Comité central du PKI,
17 août 1966
- Autocritique du Bureau politique
du Comité central du Parti communiste d'Indonésie,
Septembre 1966
Des extraits de ces autocritiques ont été publiés en 1968 par
le Parti communiste chinois, en langue française, dans une brochure intitulée
Peuple indonésien, unissez-vous et luttez pour renverser le régime
fasciste. En présentation de ces documents le journal Hongqi
rédigeait un long texte, reproduit ici.
Les coupures effectuées sont de différente nature, comme le
lecteur pourra s'en rendre compte.
La version la plus conforme [en français, 321ignition] au
texte de l'Autocritique du mois d'août 1966, publiée en anglais par le PKI, a
été éditée par l'Union des Jeunesses communistes (m‑l) (UJC‑ml)
dans le cours du premier trimestre 1967. C'est cette version qui est
reproduite ici.
La version intégrale [en français, 321ignition] de
l'Autocritique de septembre 1966 (publiée également par le PKI en anglais) a
été diffusée dans le journal belge que dirigeait Jacques Grippa, la Voix du
Peuple (numéros 29‑33) en 1967. C'est cette traduction que nous
reproduisons ici.
Les traductions pourraient être utilement revues sur le texte
en anglais. Nous ne sommes intervenus que quand il s'agissait d'incohérences
notoires.
Nous avons indiqué les coupures effectuées par le PCC en
les mettant en caractères gras.
Édifier le PKI suivant
la ligne marxiste-léniniste pour diriger la révolution démocratique populaire
Autocritique du
Bureau politique du Comité central du Parti communiste d'Indonésie,
Septembre 1966
Dans la Résolution du Bureau politique éditée
en commémoration du 46e anniversaire de la fondation du Parti, il est
dit entre autres que "le fait que les forces contre-révolutionnaires ont
réussi dans leurs attaques et ont infligé un tort aussi considérable au PKI
exige de nous, qui sommes encore capables de poursuivre la lutte
révolutionnaire, d'user de la critique et de l'autocritique comme seule voie
correcte permettant de trouver nos insuffisances et nos défauts dans les
domaines théorique, politique et organisationnel, dans le but de les
corriger".
Le désastre qui a causé une aussi sérieuse perte
pour le PKI et le mouvement révolutionnaire du peuple indonésien, après le
déclenchement et la défaite du mouvement du 30 septembre [1965] a levé
le voile qui pendant une longue période a caché les graves faiblesses du PKI.
La direction du PKI s'était engagée dans l'aventurisme. Violant les règles
organisationnelles, elle s'était engagée à la légère dans le mouvement du 30 septembre
qui ne reposait pas sur le haut degré de conscience et de conviction des
masses. C'est pourquoi ils avaient isolé le Parti des masses populaires. Au
contraire, après l'échec du mouvement du 30 septembre, la
direction du Parti développa une ligne opportuniste de droite, en confiant au
président Sukarno le sort du Parti et du mouvement révolutionnaire. Ce furent
là les points culminants des graves défauts et faiblesses du PKI dans les
domaines idéologique, politique et organisationnel.
Le Bureau politique est conscient du fait qu'il
porte la plus lourde responsabilité en ce qui concerne les sérieuses
faiblesses et erreurs au cours de la période envisagée. C'est pourquoi le Bureau
politique accorde toute son attention et apprécie grandement toutes les
critiques faites par les cadres et les membres du Parti dans un esprit
marxiste-léniniste, aussi bien que les critiques honnêtes de la part de
sympathisants du Parti qui ont été exprimées de différentes manières, en
différentes occasions. Le Bureau politique est résolu à faire son
autocritique dans un esprit marxiste-léniniste, mettant en pratique les
enseignements de Lénine et l'exemple du camarade Musso dans le développement
de la critique et de l'autocritique marxistes-léninistes. Lénine nous a
appris que "l'attitude d'un parti politique envers ses propres erreurs
est l'un des principaux et des plus sûrs moyens pour juger du sérieux de ce
parti et comment en pratique il remplit ses obligations envers sa classe et
les masses laborieuses. Reconnaître franchement une erreur, en rechercher les
raisons, analyser les conditions dans lesquelles elle s'est produite et
discuter à fond les moyens de la corriger, telle est la marque distinctive
d'un parti sérieux; tel est le moyen qui lui permettra de venir à bout de ses
obligations, tel est le moyen qui lui permettra d'éduquer et d'entraîner sa
classe et les masses." (Lénine, La Maladie infantile du Communisme,
le “gauchisme”.)
En août 1948, le camarade Musso a posé un
exemple devant le Bureau politique du Comité central sur la manière de mener
la critique et l'autocritique de façon franche, marxiste-léniniste, à propos
des sérieuses erreurs et faiblesses du PKI au cours des années de la
Révolution d'août 1945[1].
Grâce à la critique et à l'autocritique sans pitié contre les faiblesses et
les erreurs, une solution a été trouvée pour rétablir le PKI dans son rôle
d'avant-garde de la classe ouvrière indonésienne, pour restaurer la bonne
tradition du PKI dans la période précédente, pendant et succédant à la
deuxième guerre mondiale et pour rendre le PKI capable d'arracher l'hégémonie
dans la direction de la révolution. (La nouvelle voie pour la République
d'Indonésie, Résolution du Bureau politique du Comité central du PKI, août
1948.)
La lutte interne dans le Parti qui s'est
déroulée au cours de la reconstruction du Parti, après le terrible coup de la
“Provocation de Madiun”[2]
et au cours de la réalisation de “La voie nouvelle” (Résolution du Bureau
politique du Comité central du PKI, août 1948), a donne naissance au nouveau Bureau
politique en 1951. L'expérience du Parti jusqu'au déclenchement du Mouvement
du 30 septembre a montré que le Bureau politique élu en 1951 et réélu
par le 5e et le 6e Congrès a non seulement failli dans
l'accomplissement de la grande rectification du camarade Musso, qui avait été
établi dans “La voie nouvelle”, mais il a également commis de sérieuses
déviations du marxisme-léninisme. En conséquence, le PKI fut incapable de
remplir sa mission historique d'avant-garde de la classe ouvrière et
dirigeant de la lutte de libération du peuple indonésien.
Vu la gravité des faiblesses et des erreurs
englobant l'ensemble du Parti, le Bureau politique estime nécessaire de faire
une analyse complète, afin de rendre à même chaque membre du Parti d'en faire
l'étude la plus approfondie, de sorte que le retour de ces mêmes erreurs et
faiblesses puisse être évité à l'avenir. Cependant, dans les
circonstances actuelles, alors que la terreur blanche la plus criminelle et
la plus cruelle est déchaînée par la dictature militaire Nasution-Suharto des
généraux de droite, il n'est pas facile de faire la critique et
l'autocritique la plus complète possible. Pour remédier à l'urgente
nécessité, nous croyons nécessaire de définir les principales erreurs et
faiblesses du Parti dans les domaines idéologique, politique et
organisationnel, en vue de faciliter l'étude des erreurs et des faiblesses du
Parti durant le mouvement de rectification en cours.
C'est en toute modestie et en toute sincérité que
le Bureau politique présente cette autocritique. Le Bureau politique invite
tous les membres à prendre une part active dans la discussion des faiblesses
et des erreurs de la direction du Parti, à en faire une analyse critique et à
faire le maximum pour améliorer cette autocritique du Bureau politique en
tirant les leçons de leur propre expérience, collectivement et
individuellement. Le Bureau politique attend de tous les membres qu'ils
tiennent ferme le principe “unité-critique-unité” et “apprendre des erreurs
du passé pour les éviter dans l'avenir, et guérir la maladie pour sauver le
patient, dans le but de mener à bien le double objectif de clarté idéologique
et d'unité parmi les camarades” (Mao Tsé-toung, Notre Étude et la
situation actuelle). Le Bureau politique est convaincu que, tenant
fermement ce principe correct, chaque membre du Parti prendra part au
mouvement pour étudier et surmonter ces faiblesses et ces erreurs avec la
détermination de reconstruire le PKI selon la ligne marxiste-léniniste, pour
renforcer l'unité et la solidarité communistes, pour accroître la vigilance
idéologique, politique et organisationnelle et pour élever l'esprit combatif
en vue de remporter la victoire.
Les principales faiblesses dans le domaine idéologique
La résolution sur “La nouvelle voie”,
soulignant la cause majeure des principales erreurs faites par le PKI dans
les domaines organisationnel et politique durant la période de la Révolution
d'août, déclare:
"Le Bureau politique considère que ces
principales erreurs sont essentiellement dues aux faiblesses idéologiques du
Parti."
Les sérieuses faiblesses et erreurs du Parti dans
la période d'après 1951 avaient certainement pour source, également, les
faiblesses dans le domaine idéologique, spécialement à la direction du Parti.
La source de ces faiblesses idéologiques se trouve dans l'origine de classe
petite-bourgeoise et le manque de connaissances du marxisme-léninisme à la
direction du Parti. Lénine nous enseigna que "sans théorie
révolutionnaire, il ne peut y avoir de mouvement révolutionnaire" et que
"le rôle de combattant d'avant-garde ne peut être rempli que par un
parti guidé par la théorie la plus avancée" (Lénine, Que faire?).
L'expérience des communistes indonésiens témoigne pleinement de la vérité des
enseignements de Lénine. Les sérieuses faiblesses et erreurs qui avaient
rendu le PKI incapable de remplir son rôle d'avant-garde de la classe
ouvrière indonésienne étaient dues non seulement à l'incapacité de la
direction du Parti à intégrer la théorie révolutionnaire à la pratique de la
révolution indonésienne, mais également au fait qu'elle avait adopté une voie
divergente de la conduite des théories les plus avancées. Cette expérience
montre que le PKI n'avait pas réussi à établir un noyau de direction composé
d'éléments prolétariens, ayant réellement la compréhension la plus correcte du
marxisme-léninisme, compréhension systématique et non fragmentaire, pratique
et non abstraite.
Les faiblesses idéologiques de notre Parti ont
de profondes racines historiques. Le subjectivisme est à la source de ces
faiblesses. La classe de la petite bourgeoisie constitue la base sociale de
cette idéologie subjectiviste. L'Indonésie est un pays de petite bourgeoisie
où l'on trouve un grand nombre d'entreprises de petits propriétaires, en
particulier des fermes individuelles. Notre Parti est entouré d'une large
classe petite-bourgeoise et de nombreux membres du Parti en sont issus.
Inévitablement, des idées et des habitudes petites-bourgeoises pénètrent dans
le Parti. La méthode de pensée petite-bourgeoise dans l'analyse des problèmes
est subjective et unilatérale. Elle ne procède pas de la réalité objective ni
de la connaissance du rapport objectif des forces de classes, mais de
connaissances subjectives, de sentiments subjectifs et d'une imagination
subjective. Le subjectivisme est la racine idéologique du dogmatisme et de
l'empirisme dans le domaine théorique, de l'opportunisme de droite ou de
“gauche” dans le domaine politique, et du libéralisme ou du sectarisme dans
le domaine organisationnel; tels sont les maux qui ont affligé notre Parti.
Au cours de la période où nous procédions à la
mise en exécution de la résolution sur “La nouvelle voie”, une lutte intense
se déroula à l'intérieur de notre Parti contre le subjectivisme. Mais de la
façon dont elle a tourné, la lutte n'a pas réussi a extirper complètement
cette idéologie subjectiviste. Cela s'est prouvé au Ve Congrès National
du Parti. Au cours du Congrès, de violentes critiques furent dirigées contre
le subjectivisme, pierre d'achoppement dans la réalisation de la résolution
sur “La nouvelle voie”. Mais en même temps, le Congrès commit la même erreur
en adoptant le Manifeste du PKI sur les élections générales, mettant en avant
le programme pour l'établissement d'un pouvoir de démocratie populaire par
les élections générales. Ce fut là une manifestation simultanée
d'opportunisme de droite et de “gauche”. Vu en tant que programme qui allait
trop loin et hors de portée des conditions objectives existantes, c'était une
erreur “gauchiste”. Mais, vu sous l'angle de sa ligne de pensée, comme quoi
un pouvoir de démocratie populaire pourrait être instauré grâce à des
élections générales, donc par des moyens pacifiques, c'était une erreur de
droite.
Au cours de la période après 1951, le
subjectivisme ne cessa d'augmenter, il prit graduellement des proportions de
plus en plus grandes et donna naissance à un opportunisme de droite qui se
joignit à l'influence du révisionnisme moderne dans le mouvement communiste
international. Ce fut la ligne noire de l'opportunisme de droite qui devint
l'aspect principal des erreurs commises par le PKI au cours de cette période.
L'apparition et le développement de ces faiblesses et de ces erreurs sont
dues aux facteurs suivants:
Premièrement, la tradition de la critique
et de l'autocritique de manière marxiste-léniniste n'était pas développée
dans le Parti, en particulier à la direction du Parti. Un des nombreux
exemples en fut la révocation du Manifeste du PKI pour des élections
générales. Après qu'on eut découvert que le Manifeste était erroné, il fut
rejeté et remplacé par un autre programme, le “Programme pour un gouvernement
de coalition nationale”. Mais cette mesure ne fut pas suivie d'une critique
et autocritique large et approfondie, concernant les racines idéologiques de
cette erreur, simplement parce que “le prestige de la direction doit être
sauvegardé”. En conséquence, le remplacement du Manifeste pour des élections
générales par le Programme pour un gouvernement de coalition nationale
n'avait pas réussi à effacer totalement l'attitude opportuniste envers les
élections générales dans la charpente de la démocratie bourgeoise. Nous
envisageons plus amplement ce problème par après.
Les mouvements de rectification et d'étude qui
furent organisés de temps à autre par le Parti ne furent pas menés
sérieusement et avec persistance, les résultats n'en furent pas
convenablement tires et ils ne furent pas suivis de mesures appropriées sur
le plan organisationnel. Les mouvements d'étude avaient davantage pour but de
vaincre certaines faiblesses, à la base du Parti, et jamais pour déployer la
critique et l'autocritique parmi la direction. Loin d'être soigneusement
écoutées, les critiques venant de la base étaient étouffées.
Le manque de mise en pratique de la critique et
de l'autocritique de manière marxiste-léniniste dans le Parti, spécialement
parmi la direction du Parti d'une part, et le bas niveau théorique des cadres
du Parti en général, d'autre part, avaient émoussé le sens critique et la
vigilance idéologique des cadres du Parti en général, et des cadres
dirigeants en particulier.
Deuxièmement, la pénétration de l'idéologie
bourgeoise par deux canaux, par des contacts avec la bourgeoisie nationale
lorsque le Parti établit un Front Uni avec elle, et par l'embourgeoisement
des cadres du Parti, en particulier de la direction, après que le Parti eut
obtenu certains postes à l'intérieur d'organismes gouvernementaux et
semi-gouvernementaux. Le nombre croissant de cadres du Parti qui occupèrent
certains postes dans des organismes gouvernementaux et semi-gouvernementaux,
au centre et dans les régions, créa "une couche de travailleurs
embourgeoisés" et cela constitua "de véritables voies de
pénétration du réformisme" (Lénine, Impérialisme, stade suprême du
capitalisme). Pareille situation n'existait pas avant la Révolution
d'août de 1945.
Troisièmement, le révisionnisme moderne
commence à pénétrer dans notre Parti lorsque la 4e session plénière du Comité
central, issue du Ve Congrès, approuva sans critiques un rapport
soutenant la ligne du 20e Congrès du Parti Communiste d'Union
Soviétique, et adopta la ligne de “réalisation pacifique du socialisme par la
voie parlementaire” comme ligne du PKI. Cette “voie pacifique”, l'une des
caractéristiques du révisionnisme moderne, fut d'autre part réaffirmée
davantage au VIe Congrès National du PKI qui approuva le passage suivant
dans les statuts du Parti: "Il existe une possibilité pour qu'un système
de démocratie populaire, stade transitoire vers le socialisme en Indonésie,
puisse être réalisé par des moyens pacifiques, dans la voie parlementaire. Le
PKI lutte avec persistance pour transformer cette possibilité en
réalité." Cette ligne révisionniste fut encore soulignée au VIIe Congrès
National (Extraordinaire) du PKI et ne fut jamais corrigée, même pas lorsque
notre Parti eut pris conscience que, depuis le 20e Congrès du PCUS, la
direction du PCUS suivait la voie du révisionnisme moderne.
Face au révisionnisme moderne de la direction
du PCUS, la direction du PKI, étroitement liée à la bourgeoisie nationale par
son alliance avec elle, adopta une attitude dénuée de principes. La
principale considération qui dicta cette attitude ne partait pas des intérêts
propres du prolétariat, mais plutôt de la nécessite de sauvegarder l'alliance
avec la bourgeoisie nationale. Même si, au cours des années suivantes, la
direction du PKI critiqua les différentes lignes révisionnistes de la
direction du PCUS et si, grâce à cette attitude, le PKI conquit une position
dans les rangs des marxistes-léninistes dans le monde, elle n'en continua pas
moins à maintenir ses bonnes relations avec la direction du PCUS, et
l'influence du révisionnisme moderne dans notre Parti ne fut nullement
éliminée.
L'expérience du PKI nous donne la leçon que
critiquer uniquement le révisionnisme de la direction du PCUS ne signifie pas
que le PKI lui-même sera automatiquement libéré des erreurs opportunistes de
droite, les mêmes que celles que commettent les révisionnistes modernes.
L'expérience du PKI nous montre que le révisionnisme moderne, le danger le
plus grand dans le mouvement communiste international, constitue également le
danger le plus grand pour le PKI.
Pour le PKI, le révisionnisme moderne n'est pas
"un danger latent, mais non aigu" (D. N. Aidit, Être un bon
et toujours meilleur communiste), mais un danger concret qui a causé un
grand tort au Parti et de sérieuses pertes pour le mouvement révolutionnaire
du peuple indonésien. C'est pourquoi nous ne devons, en aucun cas,
sous-estimer le danger du révisionnisme moderne et nous devons mener une
lutte résolue et impitoyable contre lui. Nous ne pouvons effectivement
maintenir une attitude ferme contre le révisionnisme moderne dans tous les
domaines, que si notre Parti abandonne la ligne de “préserver l'amitié avec
les révisionnistes modernes”.
C'est un fait que le PKI, tout en critiquant les
révisionnistes modernes de la direction du PCUS commettait lui-même des
erreurs révisionnistes, parce qu'il avait révisé les enseignements du
marxisme-léninisme sur la lutte des classes, l'État et la révolution. De
plus, la direction du PKI, non seulement n'a pas mené la lutte sur le plan
théorique contre d'autres idées politiques “révolutionnaires” qui peuvent
tromper le prolétariat, comme Lénine nous a enseigné de le faire (voir
Lénine, L'État et la Révolution), mais elle a volontairement fait
des concessions sur le plan théorique. La direction du PKI affirmait qu'il y
avait identité entre les trois composantes du marxisme: philosophie
matérialiste, économie politique et socialisme scientifique et les prétendues
“trois composantes des enseignements de Sukarno”. Ils voulaient faire du
marxisme, idéologie de la classe ouvrière, la propriété de la nation entière,
y compris des classes exploiteuses hostiles à la classe ouvrière.
Les principales erreurs sur le plan politique
Les erreurs de l'opportunisme de droite sur le plan
politique, que nous envisageons à présent, englobent trois problèmes:
1. la voie vers la démocratie populaire en
Indonésie;
2. la question du pouvoir d'État;
3. la poursuite d'une politique de front uni
national.
Sur le plan politique, l'opportunisme de droite
se révèle en premier lieu et avant tout dans le choix de la voie à prendre,
la “voie pacifique”, ou la voie de la révolution pour réaliser la démocratie
populaire en Indonésie, stade transitoire vers le système socialiste. Une
des différences fondamentales et un des sujets de controverse entre le
marxisme-léninisme et le révisionnisme tant classique que moderne, consiste
précisément dans le problème de choisir la voie vers le socialisme. Le
marxisme-léninisme enseigne que le socialisme ne peut être réalisé qu'en
suivant la voie de la révolution prolétarienne et que, dans le cas de pays
semi-coloniaux et semi-féodaux comme l'Indonésie, le socialisme ne peut être
réalisé qu'en passant d'abord par l'étape de la révolution démocratique
populaire. Le révisionnisme, au contraire, rêve de réaliser le socialisme par
“la voie pacifique”.
Selon quel processus se sont développées et ont
grandi ces erreurs sur le plan politique?
Pendant 15 années pleines depuis 1951, le
PKI a mené une lutte légale et parlementaire. La lutte sur le plan légal et
parlementaire est une forme de lutte qu'un parti révolutionnaire prolétarien
doit utiliser dans une situation donnée et sous certaines conditions, comme
Lénine l'a expliqué dans son ouvrage Le “gauchisme”, Maladie Infantile du
communisme. C'est une erreur de refuser la lutte sur le plan
parlementaire lorsqu'elle est nécessaire, et de jouer avec la révolution
alors que les conditions ne sont pas encore mûres.
La lutte parlementaire, en tant qu'aspect de la
lutte légale menée par le parti en 1951, était correcte dans l'ensemble et
concordait avec les conditions objectives existant à l'époque. Les conditions
objectives existant à l'époque étaient les suivantes: le flux révolutionnaire
était à marée basse, les forces motrices de la révolution ne s'étaient pas
encore réveillées, et la grande majorité du peuple qui n'avait jamais connu
l'indépendance politique avant la révolution d'août plaçait encore de grands
espoirs dans la démocratie bourgeoise.
Pendant les premières années de cette période [qui
suivit 1951], notre Parti avait obtenu certains résultats tant dans la lutte
politique que dans l'édification du Parti. Une réalisation importante au
cours de cette période fut la définition des principaux problèmes de la
révolution indonésienne. Le stade actuel de la révolution indonésienne fut
défini comme révolution démocratique bourgeoise de type nouveau dont les
objectifs étaient de liquider l'impérialisme et les vestiges du féodalisme et
d'établir un système de démocratie populaire, stade transitoire vers le
socialisme. Les forces motrices de la révolution étaient la classe ouvrière,
la paysannerie et la petite bourgeoisie, avec comme force dirigeante la
classe ouvrière et comme principale force de masse la paysannerie. La
bourgeoisie nationale fut également définie, comme étant une force instable
de la révolution, pouvant y participer jusqu'à certaines limites et à
certaines périodes mais qui, à d'autres moments, trahirait la révolution. De
plus, le Parti établit que la classe ouvrière, en vue de remplir ses
obligations de force dirigeante de la révolution, doit forger avec les autres
classes et groupes révolutionnaires un front uni révolutionnaire basé sur
l'alliance des ouvriers et des paysans et placé sous la direction de la classe
ouvrière.
Cependant, cela comportait une très importante
lacune qui, plus tard, devait se développer en opportunisme de droite ou
révisionnisme, à savoir que le Parti n'était pas encore arrivé à une unité de
vue parfaitement claire concernant les principaux moyens et la principale
forme de lutte de la révolution indonésienne. Le Comité central du Parti
avait un jour abordé ce problème dans ses grandes lignes, mais par après il
n'en a jamais discuté à fond de manière à en avoir une compréhension unique
la plus correcte, condition préliminaire à ce qu'on parvienne à une
compréhension unique la plus correcte de ce problème dans l'ensemble du
Parti.
C'est une grande erreur pour un parti comme le
PKI qui a pour mission de diriger la révolution, de ne pas faire de la
question des principaux moyens et de la principale forme de lutte de la
révolution indonésienne, un problème qui concerne l'ensemble du Parti, mais
de le limiter au contraire à quelques personnes parmi la direction et à
certains cadres du Parti. Cela eut pour conséquence que la majorité des
membres du Parti restèrent passifs devant ce problème capital de la
révolution.
Si la direction de la révolution indonésienne
revient à la classe ouvrière, la paysannerie est son principal soutien de
masse. Vu la faiblesse numérique de la classe ouvrière en Indonésie, les
formes de lutte typiques de la classe ouvrière, telles les grèves générales
qui ont pour but d'éveiller les autres forces motrices de la révolution et
qui se développent en insurrection armée comme dans le cas de la révolution
démocratique bourgeoise de 1905 en Russie (voir Lénine, Leçons de la
Révolution de 1905, éd. anglaise, FLPH, Moscou), ne peuvent jamais
devenir la forme de lutte principale ou la méthode de la révolution
indonésienne.
La révolution chinoise nous montre l'exemple
concernant la forme de lutte principale de la révolution dans les pays
coloniaux, ou semi-coloniaux et semi-féodaux, c'est-à-dire la lutte armée
populaire contre la contre-révolution armée. Compte tenu que l'essence de la
révolution (dans ces pays, NdlR) est une révolution agraire, l'essence de la
lutte armée populaire est la lutte armée des paysans dans une révolution
agraire sous la direction de la classe ouvrière. La pratique de la révolution
chinoise est d'abord et avant tout l'application du marxisme-léninisme aux
conditions concrètes de la Chine. En même temps, elle a établi une loi
générale pour les révolutions des peuples dans les pays coloniaux ou
semi-coloniaux et semi-féodaux.
Pour obtenir une victoire complète, la révolution
indonésienne doit également suivre la voie de la révolution chinoise. Ceci
signifie que la révolution indonésienne doit inévitablement adopter cette
forme de lutte principale, à savoir, la lutte armée populaire contre la
contre-révolution armée qui, dans son essence, est la révolution agraire
armée de paysans sous la direction du prolétariat.
La révolution agraire qui est l'essence de
l'étape actuelle de la révolution indonésienne n'est pas une réforme agraire
à la mode bourgeoise qui ne fait que paver la voie au développement du
capitalisme à la campagne. Cette révolution libérera les agriculteurs, les
paysans pauvres et les paysans moyens de l'oppression féodale exercée par les
propriétaires fonciers indigènes ou étrangers, en confisquant les terres des
propriétaires fonciers et en les distribuant aux agriculteurs et aux paysans
pauvres individuellement en tant que propriété privée. Pareille révolution ne
pourra être victorieuse que si elle est menée par la force des armes sous la
direction de la classe ouvrière. Cette révolution ne peut venir de
l'extérieur. Elle surgira sur la base du haut degré de conscience et de
conviction des paysans eux-mêmes, obtenu à travers leur propre expérience
dans la lutte et grâce à l'action de la classe ouvrière.
Il est clair que dans une situation où les
conditions pour une révolution ne sont pas encore atteintes, la tâche du PKI
devrait être dirigée vers l'éducation des membres du Parti, de la classe
ouvrière et de la paysannerie, par le travail politique, l'agitation et la
propagande ainsi que par le travail d'organisation sur le problème de la
principale forme de lutte de la révolution indonésienne.
Toutes les formes de travail légal et
parlementaire devraient servir les moyens principaux et la principale forme
de lutte, et elles ne doivent en aucun cas empêcher le processus de
maturation de la lutte armée.
Durant les quinze dernières années, l'expérience
nous a appris qu'en échouant dans la tâche politique consistant à rejeter “la
voie pacifique” et à maintenir fermement la loi générale de la révolution
dans les pays coloniaux ou semi-coloniaux et semi-féodaux, le PKI s'est
graduellement enlisé dans la lutte parlementaire et autres formes de la lutte
légale. La direction du Parti considérait même cela comme la forme principale
de la lutte pour réaliser le but stratégique de la révolution indonésienne.
La légalité du Parti n'était pas considérée comme une méthode de lutte à un
moment donné et sous certaines conditions, mais comme un principe et d'autres
formes de lutte étaient appelées à servir ce principe. Même alors que la
contre-révolution non seulement foulait aux pieds l'existence légale du
Parti, mais encore violait les droits humains fondamentaux des communistes,
la direction du Parti tenta de défendre de toutes ses forces cette
“légalité”.
Comme nous l'avions dit précédemment, la “voie
pacifique” était fermement établie dans le Parti lorsque la quatrième session
plénière du Comité central du Ve Congrès en 1956 adopta un document
approuvant la ligne révisionniste moderne du 20e Congrès du Parti
Communiste d'Union Soviétique. Dans de telles conditions, alors que la ligne
révisionniste était déjà solidement établie dans le Parti, il était
impossible d'avoir une ligne stratégique et tactique correcte, marxiste-léniniste.
La formulation des principales lignes de la stratégie et de la tactique du
Parti partait d'une hésitation entre “la voie pacifique” et la “voie de la
révolution armée”, processus au cours duquel “la voie pacifique” finit par
l'emporter.
C'est dans ces conditions que la ligne générale du
PKI fut formulée par le VIe Congrès National (1959). Elle dit:
"Continuons à forger le front uni national et poursuivons la
construction du Parti, afin de remplir les exigences de la révolution d'août
1945.” Sur base de la ligne générale du Parti, le mot d'ordre “Hissez les
trois drapeaux du Parti” fut lancé. C'étaient: 1) le drapeau du front
national; 2) le drapeau de la construction du Parti et 3) le
drapeau de la Révolution d'août 1945. (D. N. Aidit, Rapport à la
seconde session plénière du Comité central du VIe congrès). La ligne
générale était comprise comme la voie vers la démocratie populaire en
Indonésie.
La direction du Parti essaya d'expliquer que les
trois drapeaux du Parti étaient les trois armes principales pour faire
triompher la révolution démocratique populaire qui, comme l'a dit le camarade
Mao Tsé-toung, sont "un Parti bien discipliné, armé de la théorie du
marxisme- léninisme, employant la méthode de l'autocritique et lié aux masses
populaires; une armée placée sous la direction d'un tel parti; un front uni
de toutes les classes révolutionnaires et de tous les groupes
révolutionnaires sous la direction d'un tel Parti" (Mao Tsé-toung, De
la dictature démocratique populaire).
Donc, la seconde arme principale implique la
nécessité d'une lutte armée populaire sous la direction du parti contre la
contre-révolution armée. La direction du Parti essaya de remplacer celle-ci
par le mot d'ordre “Élevez le Drapeau de la révolution d'août 1945”. Il
est vrai qu'elle avait expliqué que "le drapeau de la révolution d'août
établit l'importance d'utiliser les expériences de lutte acquises au cours de
la révolution d'août 1945" et que "dans la défense de la
souveraineté de l'Indonésie, le rôle de la guerre de guérilla est de la plus
grande importance" (D. N. Aidit, Tenons haut le drapeau de la
révolution), mais en pratique, pas le moindre effort n'a été fait en ce
sens.
Pour prouver que la voie suivie n'était pas
l'opportuniste “voie pacifique”, la direction du Parti a toujours parlé de
l'existence des deux possibilités, celle de la “voie pacifique” et celle de
la voie non pacifique. Ils assuraient que mieux le Parti se préparerait à
faire face à l'éventualité d'une voie non pacifique, d'autant plus grande
serait l'éventualité d'une “voie pacifique”. En fait, de telles affirmations
montrent précisément qu'il existait une ambiguïté quant à la définition de la
route suivie par la direction du Parti. En agissant de la sorte, la direction
du Parti entretenait dans l'esprit des membres du Parti, de la classe
ouvrière et des masses du peuple travailleur, l'espoir d'une voie pacifique
qui, en réalité, n'existait pas.
En pratique, la direction du Parti n'a pas préparé
l'ensemble des rangs du Parti, de la classe ouvrière et des masses populaires
à affronter l'éventualité d'une voie non pacifique. La meilleure preuve en
est la grave tragédie qui fit suite au début et à l'échec du Mouvement du 30 septembre.
En très peu de temps, la contre-révolution réussit à massacrer et à arrêter
des centaines de milliers de communistes et de révolutionnaires
non-communistes restés passifs, paralysant l'organisation du PKI et des
organisations de masse révolutionnaires. Cela ne se serait sûrement jamais
produit si la direction du Parti n'avait dévié de la voie révolutionnaire.
La direction du Parti a déclaré que "notre
Parti ne doit pas copier la théorie de la lutte armée de l'extérieur, mais
qu'il doit promouvoir la méthode combinant les trois formes de lutte"
(D. N. Aidit, Levons haut le drapeau de la révolution). Selon
cette théorie, les trois formes de lutte étaient la guerre de guérilla dans
les campagnes (menée spécialement par les ouvriers agricoles et les paysans
pauvres), l'action révolutionnaire des ouvriers (en particulier des ouvriers
du transport) dans les villes, et un travail intensif parmi les forces armées
ennemies. La direction du Parti critiqua certains camarades qui, étudiant
l'expérience de la lutte armée du peuple chinois, étaient accusés de n'en
voir uniquement que les ressemblances avec les conditions de l'Indonésie. La
direction du Parti, au contraire, mit l'accent sur une série de conditions
prétendument différentes dont il fallait tenir compte, jusqu'à ce qu'elle en
arrive à la conclusion que la méthode type de la révolution indonésienne
était “la méthode de combiner les trois formes de lutte”.
C'est une erreur que d'adopter d'une façon
dogmatique l'expérience d'autres pays. Mais refuser d'utiliser l'expérience
d'un autre pays, dont la valeur théorique révolutionnaire est déjà prouvée,
est également une erreur. Lénine nous a appris qu´"un mouvement qui
démarre dans un pays jeune ne peut être victorieux que s'il envisage de
manière critique l'expérience d'autres pays et la met lui-même librement à
l'épreuve" (Lénine, Que faire?).
Les faits ont montré que la “théorie de la
méthode de combiner les trois formes de lutte” n'était pas le résultat d'une
façon d'envisager l'expérience d'un autre pays de manière critique et de la
lier à la pratique concrète de l'Indonésie, afin d'élaborer une théorie
révolutionnaire propre à l'Indonésie. De toute manière, ce n'est pas une
méthode propre à l'Indonésie. La révolution russe de 1905, comme Lénine
l'explique dans ses Leçons de la révolution de 1905, fut la
combinaison de grèves d'ouvriers, de la lutte anti-féodale de la paysannerie
dans les campagnes et de mutineries dans l'armée, combinaison où les grèves
des ouvriers servaient d'avant-garde. La révolution chinoise aussi combina la
guerre révolutionnaire agraire, le travail dans les campagnes et les villes
occupées par l'ennemi et le travail parmi les forces ennemies, avec pour
forme de lutte principale la guerre révolutionnaire.
En Indonésie, ces “trois formes de lutte” qu'il
fallait combiner, au lieu d'être menées dans la voie révolutionnaire, l'ont
été chacune selon la “voie pacifique”. La lutte des paysans contre
l'exploitation et l'oppression des vestiges du féodalisme, si elle avait été
correctement dirigée par le Parti, aurait dû se développer à son plus haut
niveau: c'est-à-dire celui d'une révolution agraire pour libérer les paysans
de l'oppression des propriétaires fonciers. Cette lutte n'aurait pu obtenir
la victoire totale que si elle avait été menée par les armes sous la
direction du PKI. Mais la direction du Parti n'a pas concentré son travail
dirigeant sur le développement toujours plus élevé de la lutte des paysans et
n'a pas préparé le Parti à faire face à chaque éventualité.
Lorsque les paysans ont commencé
unilatéralement à entreprendre des actions contre les propriétaires fonciers
indigènes, ces actions, au lieu d'être encouragées à se développer à un stade
supérieur, furent déviées vers différentes orientations et transformées en
une série d'actions qui n'étaient pas dirigées contre les propriétaires
fonciers, comme par exemple “le mouvement pour une nouvelle culture”, les
“1001 campagnes” pour accroître la production, la “campagne
d'extermination des rats”, etc. Il n'est évidemment pas mauvais qu'un
mouvement paysan révolutionnaire lance des campagnes pour accroître la
production, pour exterminer les fléaux et élever le niveau culturel des
paysans. Mais tout cela aurait dû servir l'objectif principal du mouvement
paysan révolutionnaire, à savoir la révolution agraire anti-féodale. Aussi,
de telles campagnes n'auraient-elles pas dû être surestimées au point que le
mouvement révolutionnaire paysan soit détourné de son orientation correcte et
devienne un mouvement réformiste.
Dans les villes, en dépit de l'accroissement
des lourdes charges pesant sur la vie des travailleurs, les actions ouvrières
à signification politique ont peu à peu disparu, parce que privées d'une
direction propre. Il est vrai que les ouvriers ont mené des actions,
apparemment grandes, et possédant une importante signification politique,
notamment l'expropriation des entreprises appartenant aux impérialistes
néerlandais, anglais, et belges. Mais concrètement, ces actions ne
profitèrent qu'à une poignée de capitalistes et bureaucrates et elles ne
pouvaient en aucune manière améliorer les conditions de vie des travailleurs
concernés. De plus, depuis que la direction du Parti considérait les
anciennes entreprises impérialistes, contrôlées par le gouvernement comme
propriété nationale, les autres actions ouvrières ont été restreintes. Au
contraire, bien trop d'activités furent organisées directement par les
syndicats ou à travers les conseils d'entreprise qui avaient pour but
d'accroître la production, d'augmenter le rendement du travail dans les
entreprises, d'améliorer l'économie, etc., activités qui n'amélioraient pas les
conditions de vie, pas plus qu'elles n'élevaient l'esprit révolutionnaire des
travailleurs.
Partant de l'idée erronée que “les forces
armées de la République ne sont pas des forces réactionnaires” (D. N.
Aidit, Levons haut le drapeau de la révolution), le problème du
“travail à l'intérieur des forces ennemies” était interprété comme
“l'intégration du peuple aux organes importants de l'État”, ou “le
renforcement des relations entre le peuple et les forces armées”. Cela
signifie en fait l'intégration des classes opprimées à l'appareil de
répression des classes oppresseuses. Une erreur aussi grave a pu se produire
parce que la direction du Parti ne considérait pas la République indonésienne
comme un État bourgeois. Elle perdait de vue cette réalité que les forces
armées de la République, en tant que telles, en dépit du fait qu'elles
étaient issues de la Révolution d'août, étaient devenues l'organe de
domination aux mains des classes exerçant le pouvoir d'État, depuis que la
révolution avait échoué et que le pouvoir d'État était tombé entièrement aux
mains de la bourgeoisie réactionnaire. Si l'on considère leur origine de
classe, en tant que fils d'ouvriers et de paysans, les hommes du rang de
l'armée peuvent en effet constituer des éléments qui prendraient le parti du
peuple. Mais cela ne pourrait en aucune manière modifier l'attitude de
l'armée en tant que telle, organe de l'État, servant les intérêts des classes
dominantes.
Pour accomplir sa lourde, mais grande et noble
mission historique, pour diriger la révolution populaire contre
l'impérialisme, le féodalisme, le capitalisme bureaucratique, les
marxistes-léninistes indonésiens doivent fermement rejeter la “voie
pacifique” révisionniste, rejeter la théorie de la méthode de combiner “les
trois formes de lutte”, et tenir haut le drapeau de la révolution populaire
armée. Suivant l'exemple de la glorieuse révolution chinoise, les
marxistes-léninistes indonésiens doivent établir des bases territoriales
révolutionnaires. Ils doivent "transformer les villages reculés en
territoire de bases avancés, consolidés, en grands bastions militaires,
politiques, économiques et culturels de la révolution" (Mao Tsé-toung, La
révolution chinoise et le Parti Communiste Chinois).
Tout en travaillant à la réalisation de ce point
capital, nous devons également élaborer d'autres formes de lutte; la lutte
armée ne progressera jamais sans être coordonnée à d'autres formes de lutte.
La ligne opportuniste de droite suivie par la
direction du Parti s'est également reflétée dans son attitude envers l'État,
l'État indonésien en particulier. Le marxisme-léninisme nous a appris que
"l'État est un organe de la domination de classe, l'organe de
l'oppression d'une classe par une autre", que "les formes des États
bourgeois varient à l'extrême, mais leur essence est la même... la dictature
de la bourgeoisie", et que le remplacement de l'État bourgeois par
l'État (en Indonésie, par l'État de démocratie populaire - Note du Bureau
politique du PKI), est impossible sans révolution violente" (Lénine, L'État
et la Révolution).
Basée sur cet enseignement marxiste-léniniste sur
l'État, la tâche du PKI après l'échec de la révolution d'août 1945, aurait dû
être d'éduquer la classe ouvrière indonésienne et l'ensemble du peuple
travailleur, afin de lui faire comprendre aussi clairement que possible la
nature de classe de l'État indonésien, c'est-à-dire qu'il était un État de
dictature bourgeoise. Le PKI aurait dû faire prendre conscience à la classe,
ouvrière et au peuple travailleur que leur lutte de Libération menait
inévitablement à la nécessité de “remplacer l'État bourgeois” par l'État
populaire sous la direction de la classe ouvrière, par l'intermédiaire d'une
“révolution violente”. Mais la direction du PKI a suivi une ligne
opportuniste qui a semé parmi le peuple des illusions sur la démocratie
bourgeoise. L'évolution de cette ligne opportuniste concernant l'État est
la suivante:
Dans la mise en pratique de sa politique
tactique d'attirer la bourgeoisie nationale dans le front uni, le PKI a
soutenu le gouvernement Wilopo[3]
(au début de 1952) et d'autres gouvernements par la suite ‑ à
l'exception du gouvernement Burhanuddin Harahap[4]
dirigé par le parti Masyumi ‑ qui avaient un programme
relativement progressiste. Cette politique a permis au PKI d'attirer la bourgeoisie
nationale dans un front uni et d'éviter la formation de gouvernements
réactionnaires. Mais cela eut pour conséquence que le PKI adopta des
pratiques qui constituaient un abandon de sa position de parti prolétarien
qui avait à adopter une attitude indépendante vis-à-vis d'un gouvernement
bourgeois. Le PKI commit l'erreur d'esquiver totalement sa tâche d'exposer la
banqueroute de la démocratie bourgeoise. Plus grave encore, le PKI, au lieu
de se servir des élections générales et de la lutte parlementaire pour
accélérer la dégénérescence politique du parlementarisme, avait même renforcé
le système du parlementarisme.
Le PKI participa aux premières élections
parlementaires générales avec un programme pour l'établissement d'un
gouvernement de coalition nationale, un gouvernement de front uni de tous les
éléments démocratiques, y compris les communistes. Avec un tel programme, le
PKI commettait la même erreur que les démocrates petits-bourgeois et les
opportunistes qui, comme le dit Lénine, "distillent dans l'esprit du
peuple la notion fausse que le suffrage universel “dans un État moderne” est
réellement capable d'imposer la volonté de la majorité des travailleurs et
d'en garantir la réalisation" (Lénine, L'État et la Révolution).
Cette revendication de l'établissement d'un
gouvernement de coalition nationale devint le programme tactique du PKI, et
par après prit la forme de la revendication de l'établissement d'un cabinet
de coopération ayant le Nasakom[5]
pour noyau. En posant comme principale revendication politique la formation
d'un gouvernement de coalition nationale, on répandait l'illusion que sous la
dictature de la bourgeoisie, alors qu'il n'existait pas d'armée sous la
direction du Parti, il était possible de mettre sur pied un gouvernement de
front uni de tous les éléments démocratiques, y compris des communistes,
correspondant aux exigences populaires et qui faciliterait l'accomplissement
des buts stratégiques. La campagne revendiquant l'établissement d'un cabinet
de coopération avec pour centre le Nasakom avait relégué à l'arrière-plan la
propagande pour un État de démocratie populaire et empêché ainsi le
développement de la conscience révolutionnaire de la classe ouvrière et de
l'ensemble du peuple travailleur.
Le point culminant de la déviation de l'enseignement
marxiste-léniniste sur l'État fut atteint par la direction du Parti avec la
formulation de la “théorie des deux aspects du pouvoir d'État dans la
République d'Indonésie”. Depuis la naissance de cette “théorie des deux
aspects”, la doctrine marxiste-léniniste ne fut plus respectée que lorsqu'il
était question de l'État en général. Mais dans les discussions où il était
concrètement question de l'État, la doctrine marxiste-léniniste était
totalement abandonnée.
Dans la “théorie des deux aspects”, l'État et le
pouvoir d'État étaient envisagés de la manière suivante:
"La structure économique (base) de la
société indonésienne actuelle est encore coloniale et semi-féodale.
Cependant, en même temps, il existe la lutte du peuple contre ce système
économique, la lutte pour une économie nationale et démocratique." (D. N.
Aidit, Levons haut le drapeau de la Révolution.)
"Les réalités de la base se reflètent
également dans la superstructure, y compris dans le pouvoir d'État, et
spécialement dans le gouvernement. Les forces opposées au système économique
colonial et féodal et les forces qui défendent l'impérialisme, les vestiges
du féodalisme, le capitalisme bureaucratique et le capitalisme compradore, se
reflètent tous deux dans le pouvoir d'État." (D. N. Aidit, Levons
haut le drapeau de la révolution.)
"Le pouvoir d'État de la République, vu comme
une contradiction, est une contradiction entre deux aspects antagonistes. Le
premier aspect est celui qu'il représente les intérêts du peuple (il se
manifeste par les prises de position progressistes et la politique du
Président Sukarno qui sont soutenues par le PKI et d'autres groupes du
peuple). Le second aspect est celui que représentent les ennemis du peuple
(il se manifeste par les prises de position et la politique des forces de
droite et des réactionnaires). L'aspect populaire est devenu à présent
l'aspect principal et assume le rôle dirigeant dans l'exercice du pouvoir
dans la République." (D. N. Aidit, Levons haut, le drapeau de la
révolution.)
La “théorie de deux aspects” constitue
manifestement une déviation opportuniste et révisionniste, parce qu'elle nie
l'enseignement marxiste-léniniste que "l'État est l'organe de l'exercice
du pouvoir d'une classe définie qui ne peut se concilier avec son antipode
(la classe qui lui est opposée" (Lénine, L'État et la révolution).
Il est inimaginable que la République d'Indonésie puisse être gouvernée à la
fois par le peuple et par les ennemis du peuple.
Personne ne niera que, dans la société en
Indonésie, il existe des forces luttant contre le système économique colonial
et semi-féodal. Ce sont la classe ouvrière, la paysannerie, la petite
bourgeoisie et, jusqu à un certain point, également la bourgeoisie nationale.
Mais il est faux de croire que ces forces ont le même concept d'une “économie
nationale et démocratique”. Sur ce point, il existe deux conceptions
différentes, celle de la bourgeoisie nationale et celle du prolétariat. Même
affublée de beaux noms comme “économie nationale et démocratique”, “économie
dirigée”, pour la bourgeoisie nationale, ce concept ne signifie rien d'autre
que le plein développement du capitalisme dans le pays.
L'idée du prolétariat, elle, est de créer une
économie démocratique populaire, ce qui signifie la nationalisation de tout
le capital et de toutes les entreprises appartenant aux impérialistes, aux
compradores et aux autres réactionnaires, et la distribution aux paysans de
terres confisquées aux propriétaires fonciers. Cela ne sera qu'un système
économique de transition vers le socialisme qui ne pourra être accompli
qu'après l'établissement de la dictature démocratique du peuple,
c'est-à-dire, le pouvoir conjoint de toutes les classes anti-impérialistes et
anti-féodales sons la direction du prolétariat. Dans l'économie de démocratie
populaire, le secteur "socialiste, c'est-à-dire les entreprises vitales
détenues par l'État populaire, occupe une place prépondérante dans toute la
vie économique du pays".
Avant la mise en place d'un pouvoir de
démocratie populaire, la lutte du peuple dans le domaine économique ne pourra
jamais donner naissance à une structure économique de démocratie populaire.
La reprise d'entreprises appartenant aux impérialistes et l'existence
d'entreprises du type ancien ne signifient pas l'apparition d'un secteur
socialiste dans l'économie, parce que ces entreprises d'État n'appartenaient
pas au peuple et n'étaient pas gérés par un État populaire, mais qu'elles
étaient tombées aux mains de capitalistes-bureaucrates. De même, la loi
agraire fondamentale ne pouvait, elle, en aucune manière libérer les paysans
de l'oppression et de l'exploitation exercées par les vestiges du féodalisme.
Méconnaissant les différences entre la
conception de l'économie propre à la bourgeoisie nationale et la conception
de l'économie propre au prolétariat et les reprenant en bloc dans
l'expression “économie nationale et démocratique” sans discuter de la
nécessité d'établir d'abord un pouvoir de démocratie populaire, équivalait à
un abandon de la position de classe du prolétariat et à capituler devant la
bourgeoisie.
La naissance de concepts économiques tels que
la “déclaration économique” ne signifiaient évidemment pas que les forces de
la classe ouvrière et l'ensemble du peuple travailleur qui luttaient contre
l'économie coloniale et semi-féodale se reflétaient déjà dans le pouvoir
d'État. Les éléments de démocratie populaire ne se développent jamais à
l'intérieur d'un pouvoir d'État représentant les intérêts de l'impérialisme
et des vestiges du féodalisme.
Il se manifestait une contradiction dans le pouvoir
d'État de la République, à savoir les contradictions entre, d'une part, les
éléments compradores et propriétaires terriens qui représentaient les
intérêts de l'impérialisme et des vestiges du féodalisme, et d'autre part, la
bourgeoisie nationale qui, jusqu'à un certain point, adoptait une attitude
anti-impérialiste et anti-féodale. Mais l'attitude de la bourgeoisie
nationale ne pouvait en aucune manière être interceptée comme représentant
les intérêts du peuple, et c'est pourquoi elle ne pouvait être appelée
“l'aspect populaire” dans le pouvoir d'État.
Même lorsque les dirigeants du Parti ont assumé
certaines fonctions dans le gouvernement, tant dans l'administration centrale
que dans l'administration régionale, cela ne pouvait être interprété comme un
changement qualitatif dans le pouvoir d'État de l'aspect de bourgeoisie
nationale à l'aspect populaire. Et ce parce que les forces communes de la
bourgeoisie nationale et du prolétariat étaient dirigées non par le
prolétariat, mais par la bourgeoisie nationale. La position des dirigeants du
Parti dans le gouvernement qui ne leur donnait aucun pouvoir réel, était
accordée comme concession politique de la part de la bourgeoisie nationale
qui avait besoin du soutien du peuple dans ses contradictions avec la
bourgeoisie compradore et, jusqu'à un certain point, également avec les
impérialistes.
Avec le soutien des masses populaires dirigées
par le PKI, la bourgeoisie nationale pouvait, dans certaines limites, miner
les positions de la bourgeoisie compradore dans le pouvoir d'État. Ceci
ressort d'une série de mesures prises par le gouvernement, telles que
l'abrogation du Traité de la Conférence de la Table ronde[6],
la libération de l'Irian occidental (West-Irian) [7],
la promulgation de la loi agraire fondamentale et de la loi sur le partage
des récoltes, la liquidation des forces armées des contre-révolutionnaires,
comprenant le Darul Islam[8]
et le “PRRI-Permesta”[9],
l'acceptation du Manifeste politique[10],
la Déclaration économique, la politique étrangère anti-impérialiste, etc.
La direction du Parti, qui se roulait dans la
fange de l'opportunisme, surestima beaucoup trop ces développements et
proclama que “l'aspect populaire était devenu l'aspect principal et avait
pris l'hégémonie dans le pouvoir d'État de la République”. C'était comme si
le peuple indonésien approchait de la naissance du pouvoir populaire. Et
depuis qu'ils considéraient la bourgeoisie nationale dans le pouvoir d'État
comme étant réellement “l'aspect populaire”, les dirigeants du Parti avaient
fait n'importe quoi pour défendre et développer cet “aspect populaire”. La
direction du Parti se confondait tout à fait avec les intérêts de la
bourgeoisie nationale.
Il est clair que la direction du parti a
appliqué de manière subjective la théorie de la contradiction dans le pouvoir
d'État. De plus, en considérant la bourgeoisie nationale comme “l'aspect
populaire” dans le pouvoir d'État de la République et le président Sukarno
comme le dirigeant de cet aspect, la direction du Parti reconnut faussement
que la bourgeoisie nationale était capable de diriger la révolution
démocratique de type nouveau. Ceci est contraire aux lois historiques et aux
faits historiques.
La direction du Parti déclara que “la théorie
des deux aspects” était totalement différente de la théorie de “réformes de
structures” développé par la direction du Parti communiste (révisionniste
NdLR) italien. (La direction du PCI affirme que la dictature du prolétariat,
en Italie, peut être établie, non par une révolution prolétarienne détruisant
la machine d'État bourgeois, mais par des réformes graduelles de la structure
de l'État en faisant usage de la Constitution italienne et par la voie
parlementaire). Cependant, le fait est que, tant sur le plan théorique que
sur la base des réalités pratiques, il n'y a pas de différence entre les deux
théories. Toutes deux ont pour point de départ la “voie pacifique” vers le
socialisme. Toutes deux rêvent d'une transformation par étapes dans le
rapport interne des forces dans le pouvoir d'État. Toutes deux rejettent la
voie de la révolution et toutes deux sont révisionnistes dans l'âme.
La “théorie des deux aspects” anti-révolutionnaire
est exposée ouvertement dans l'affirmation que "la lutte du PKI en ce
qui concerne le pouvoir d'État est de promouvoir l'aspect pro- populaire afin
de le rendre plus grand et de le rendre dominant, et les forces
anti-populaires peuvent être chassées du pouvoir d'État" (D. N.
Aidit, Levons haut le drapeau de la révolution).
La direction du Parti avait même trouvé un nom
pour désigner cette voie anti-révolutionnaire: elle appelait cela la voie de
“la révolution d'en haut jusqu'en bas”. Par “révolution d'en haut”, elle
entendait que le PKI "doit encourager le pouvoir d'État à faire des pas
révolutionnaires dans le but de faire les changements voulus dans le
personnel des organismes d'État". Et par “révolution d'en bas”, elle
entendait que le PKI "doit éveiller, organiser et mobiliser le peuple
pour réaliser les mêmes changement". (D. N. Aidit, Levons haut
le drapeau de la révolution.)
Voilà, en effet, une illusion extraordinaire! Le
fait suivant n'avait donc rien appris à la direction du Parti: 8 ans
après l'avoir annoncée, l'idée du président Sukarno de former un gouvernement
de coopération (l'ancien type de gouvernement de coalition nationale),
n'avait toujours pas été mise en pratique. Il n'y avait même pas le moindre
signe permettant de croire qu'elle le serait jamais, malgré l'insistance avec
laquelle on la réclamait. Sans parler d'un changement dans le pouvoir d'État.
Il est vrai que Lénine a un jour parlé des
possibilités d'“actions d'en haut”, c'est-à-dire quand il y avait la
possibilité de prendre part au gouvernement révolutionnaire provisoire, à la
veille de la révolution russe de 1905. À ce moment, la période de
soulèvements politiques et de révolution était entamée. S'il n'y avait pas la
possibilité d'agir d'en haut, selon Lénine, une pression doit être exercée
d'en bas, et dans ce but le prolétariat doit être armé. Il y avait
manifestement une grande différence entre la situation décrite par Lénine, où
existaient les conditions pour la possibilité d'“action d'en haut” aussi bien
que les conditions pour des “actions d'en bas”, et la situation, les
conditions existant en Indonésie “pour une révolution d'en haut et d'en bas”
voulue par la direction du Parti. Dans le premier cas, il s'agit d'une
situation révolutionnaire, dans le deuxième de conditions relativement
pacifiques. De plus, dans ce dernier cas, l'idée est avancée dans une optique
opportuniste.
La théorie des deux aspects est semblable à la
déviation faite par Kautsky de la doctrine marxiste sur l'État. En théorie,
Kautsky ne niait pas que l'État est un organe de domination de classe. Mais
il perdait de vue et passait sous silence que "la libération de la
classe opprimée est impossible, non seulement sans révolution violente, mais
aussi sans la destruction de l'appareil d'État créé par la classe
dominante..." (Lénine, L'État et la révolution).
Pour se laver de la fange de l'opportunisme, notre
Parti doit écarter cette “théorie des deux aspects dans le pouvoir d'État” et
rétablir l'enseignement marxiste-léniniste sur l'État et la révolution.
***
L'une des erreurs graves critiquées dans la
résolution sur “La nouvelle voie” était d'avoir négligé la recherche d'un
front uni national durant la révolution d'août 1945. Les communistes ont
négligé l'établissement du front uni national comme arme dans la révolution
nationale contre l'impérialisme. (Voir La nouvelle voie pour la République
d'Indonésie, Résolution du Bureau politique du Comité central du PKI,
août 1948.)
Après 1951, la question de l'établissement du
front uni national fut considérée comme une des tâches les plus importantes
du Parti. Le Ve Congrès national du PKI alla même plus loin en décidant
que la constitution d'un front uni national était la tâche primordiale et
urgente du Parti. Cette ligne fut maintenue par le VIe Congrès national
du Parti et par après. Le front uni national était mis en tête de la “Ligne
générale” du Parti et devint le premier des trois drapeaux du Parti. Tout
cela montre comment la direction du Parti considérait le front national.
Après l'avoir négligé dans la deuxième moitié des années 40, ils tombèrent
dans une autre extrémité en considérant le front uni national comme le
problème n° 1.
Le Ve Congrès national du Parti avait résolu
théoriquement pour l'essentiel le problème du front uni national. Il établit
que l'alliance des ouvriers et des paysans constituait la base du front uni
national. En ce qui concerne la bourgeoisie nationale, on avait tiré la
leçon, sur la base de l'expérience acquise au cours de la révolution d'août,
que cette classe est de caractère instable. Dans une situation donnée, la
bourgeoisie nationale a pris part à la révolution et l'a soutenue, alors que
dans une situation différente, elle a marché dans les pas de la bourgeoisie
compradore pour attaquer les forces motrices de la révolution et elle a trahi
la révolution (comme le montrent son activité pendant la Provocation de Madiun
et le fait qu'elle a approuvé le Traité de la conférence de la Table ronde).
Se basant sur ce caractère instable de la
bourgeoisie nationale, le Ve Congrès national du Parti a formulé
l'attitude à prendre par le PKI, à savoir, faire des efforts constants pour
gagner la bourgeoisie nationale aux côtés de la révolution, tout en prenant
garde qu'elle pouvait trahir la révolution. Le PKI doit suivre la politique
d'unité et de lutte à l'égard de la bourgeoisie nationale.
Néanmoins, puisque l'idéologie du subjectivisme
dans le Parti, en particulier parmi la direction du Parti, n'avait jamais été
éliminée, le Parti s'enfonçait dans des erreurs toujours plus graves, à tel
point qu'il perdit son indépendance dans le front uni avec la bourgeoisie
nationale. Cette erreur a entraîné une situation telle que le Parti et le
prolétariat furent placés sous la dépendance de la bourgeoisie nationale.
Le processus d'évolution des erreurs dans la
réalisation du front uni national peut être brièvement retracé comme suit:
Au cours du travail de reconstitution du Parti
en 1951, des efforts furent simultanément accomplis pour gagner la
bourgeoisie nationale aux côtés du peuple. En utilisant les contradictions,
les contradictions entre la bourgeoisie nationale et la bourgeoisie
compradore, le Parti réussit à gagner progressivement la bourgeoisie
nationale aux côtés du peuple. Ce processus avait démarré au cours de la
lutte contre l'attaque d'août[11]
déclenchée par le gouvernement Sukiman[12]
et pour le remplacement de ce gouvernement. Cette lutte fut victorieuse et le
cabinet Wilopo[13]
fut formé. À ce moment et dans les années suivantes, le Parti restait faible
et l'alliance des ouvriers et de paysans n'était pas encore établie. Ainsi,
le front uni avec la bourgeoisie nationale n'a-t-il pas été formé et n'a-t-il
pas grandi sur des fondations solides, à savoir, l'alliance de la classe
ouvrière et de la paysannerie sous la direction de la classe ouvrière.
La direction du Parti apprécia énormément
l'établissement du front uni avec la bourgeoisie nationale et considéra que
celle-ci "ouvrait des possibilités pour le développement et la
construction du Parti et pour la réalisation des taches immédiates du Parti,
c'est-à-dire la formation de l'alliance de la classe ouvrière et de la
paysannerie contre le féodalisme" (D. N. Aidit, Leçon de l'histoire
du PKI, discours lors du 40ème anniversaire de la fondation du PKI).
Cette appréciation entraîna la conclusion que la recherche du front uni
national était la première et la plus urgente des tâches du PKI. Cette
formulation indiquait clairement que par front uni national, la direction du
Parti désignait en premier lieu et avant tout le front uni avec la
bourgeoisie nationale.
Alors qu'une alliance solide de la classe
ouvrière et de la paysannerie n'avait pas encore été formée, pourquoi le
front uni avec la bourgeoisie nationale pouvait-il être maintenu? Il y avait
à cela deux raisons. Premièrement, parce que la bourgeoisie nationale, dans
ses contradictions avec la bourgeoisie compradore, avait besoin du soutien de
la classe ouvrière. Deuxièmement, parce que le parti donnait le soutien
nécessaire sans éveiller chez la bourgeoisie nationale l'appréhension que sa
position était en quelque manière menacée.
La formation du front uni avec la bourgeoisie
nationale aboutit à la formation de ces gouvernements qui, jusqu'a un certain
point, poursuivirent une politique anti-impérialiste et accordèrent une
certaine liberté d'action au PKI et aux organisations de masse
révolutionnaires. Il ne fait pas de doute que cette situation était plutôt
favorable au travail de renforcement du Parti, en particulier à la campagne,
en vue d'établir l'alliance ouvriers-paysans. De plus, la formulation du
programme agraire révolutionnaire fournit le préalable politique nécessaire
pour souder l'alliance entre la classe ouvrière et la paysannerie.
Cependant, au cours de la coopération avec la
bourgeoisie nationale, les faiblesses idéologiques dans le Parti ont augmenté
et furent influencées par l'idéologie bourgeoise au travers de cette
coopération. La croissance des faiblesses idéologiques dans le Parti a
progressivement privé le Parti de son indépendance dans le front uni avec la
bourgeoisie nationale. Le Parti a fait trop de concessions à la bourgeoisie
nationale et a perdu son rôle indépendant de direction.
L'évaluation du rôle de Sukarno et l'attitude de
la direction du Parti à son égard constituent une manifestation de cette
perte d'indépendance dans le front uni avec la bourgeoisie nationale. La
direction du Parti n'a pas adopté une attitude indépendante envers Sukarno.
Elle avait toujours évité tout conflit avec Sukarno et, au contraire, elle
avait largement sous-estimé les conséquences et les possibilités d'unité
entre le Parti et Sukarno. Le public voyait qu'il n'y avait aucune mesure
politique qui n'ait été soutenue par le Parti. La direction du Parti est
allée jusqu'à accepter, sans la moindre lutte, de reconnaître Sukarno comme
“le grand dirigeant de la révolution” et le dirigeant de “l'aspect populaire”
dans le pouvoir d'État de la République. Dans de nombreux articles et discours,
les dirigeants du Parti ont souvent dit que la lutte du PKI était basée non
seulement sur le marxisme-léninisme mais également sur les “enseignements de
Sukarno”, que si le PKI réalisait des progrès aussi rapides, c'est qu'il
mettait en pratique l'idée de Sukarno sur l'unité du Nasakom, etc. On alla
même jusqu'à dire que le système de démocratie populaire en Indonésie était
conforme aux principales idées de Sukarno exprimées dans ses discours, La
naissance de Pantjasila (voir D. N. Aidit, Rapport à la IVe session
plénière du Comité central du Ve Congrès national). La direction
du Parti n'a donc pas appris à la classe ouvrière et à l'ensemble du peuple
travailleur que la direction de la révolution doit être aux mains du
prolétariat et de son Parti, le PKI.
La direction du PKI s'est vantée que la naissance
du Manifeste politique signifiait que la lutte persistante du peuple
indonésien dirigée par le PKI avait réussi à amener les larges masses à
reconnaître la justesse du programme du PKI, de telle façon qu´"accomplir
de manière conséquente le Manifeste politique, c'est la même chose que
d'accomplir le programme du PKI" (D. N. Aidit, Levons haut le drapeau
de la Révolution).
La formulation d'un programme commun pour le
front uni est en effet une bonne chose, et, en ce sens, la naissance du
Manifeste politique, également, fut une bonne chose, parce que jusqu'à un
certain point, cela pouvait servir à unir les pensées des différentes classes
et groupes anti-impérialistes, concernant certains points des problèmes de la
révolution indonésienne. Cependant, il n'est pas vrai que la naissance du
Manifeste politique et son élaboration ultérieure signifiaient que les larges
masses avaient reconnu la justesse du programme du PKI. Parce que seules
certaines parties du programme du Parti étaient communes avec le Manifeste
politique.
Les communistes ne doivent pas être naïfs et
considérer que d'autres classes qui n'appartiennent aux forces motrices de la
révolution puissent aisément accepter le programme du PKI. Ils acceptèrent
uniquement les points du programme tactique du Parti qui ne portaient pas
préjudice à leurs propres intérêts. Tandis que les points contraires à leurs
intérêts, tels que ceux sur le rôle dirigeant de la classe ouvrière, sur la
réforme agraire révolutionnaire, etc., étaient rejetés par eux.
Quant aux parties du programme du Parti qu'ils
ratifiaient, il n'y avait pas de garantie qu'elles soient accomplies. En
attendant, les réactionnaires qui occupaient une position dominante dans le
pouvoir d'État, ont accepté hypocritement le Manifeste politique, dans un
effort pour se mettre en position dominante. C'est pourquoi, aussi
conséquente que soit l'application du Manifeste politique, celui-ci ne peut
jamais être le même que le programme du PKI. Par conséquent, dire
qu'accomplir le programme du Manifeste Politique en revenait à accomplir le
Programme du PKI, cela pouvait uniquement signifier que c'était non le
programme du PKI qui était accepté par la bourgeoisie, mais que c'était au
contraire le programme de la bourgeoisie nationale qui était accepté par le
PKI, et qu'il devait remplacer le programme du PKI.
L'abandon des principes dans le front uni avec la
bourgeoisie nationale s'était même développé plus loin dans la prétendue
“Ligne générale de la révolution indonésienne” qui était formulée de la façon
suivante: "Avec le front national ayant les ouvriers et les paysans pour
piliers, le Nasakom pour coeur, et le Pantjasila[14]
pour base idéologique, pour accomplir la révolution démocratique nationale en
vue d'avancer vers le socialisme indonésien." (D. N. Aidit, Rapport
à la 4e session plénière du Comité central du Ve Congrès, mai 1965).
Cette prétendue “Ligne générale de la révolution indonésienne” n'avait même
pas la moindre réminiscence de révolution. Des trois conditions préalables
pour gagner la révolution, à savoir, un puissant parti marxiste-léniniste,
une lutte armée populaire sous la direction du Parti, et un front uni, seul
le front uni était retenu. Même alors, il ne s'agissait pas d'un front uni
révolutionnaire, parce qu'il n'était pas dirigé par la classe ouvrière, pas
plus qu'il n'était basé sur l'alliance de la classe ouvrière et de la
paysannerie sous la direction de la classe ouvrière, mais qu'il était au
contraire basé sur le Nasakom. On y affirmait que "sans le Nasakom
pour centre, le front uni national sera comme une roue sans axe, absolument
incapable de tourner" (D. N. Aidit, Rapport général au VIIe Congrès
national (extraordinaire) du PKI, 1962.)
La direction du Parti a dit que "le slogan
de coopération nationale avec le Nasakom pour centre ne pourra en aucun cas
obscurcir le contenu de classe du front uni national" (D. N. Aidit,
Levons haut le drapeau de la révolution). Cette formulation est
incorrecte, parce qu'ignorant le rôle du parti de la classe ouvrière, des
autres partis politiques dans le Nasakom, représentant principalement les
intérêts de la bourgeoisie nationale, les compradores, les capitalistes
bureaucrates et les propriétaires fonciers. Depuis l'interdiction de partis
compradores, tels le Masyumi et le PSI, les compradores et les propriétaires
fonciers ont toujours cherché à se faire admettre dans d'autres partis
politiques et organisations de tendance nationaliste ou religieuse.
Donc, le contenu de classe du Nasakom était la
classe ouvrière, la bourgeoisie nationale et même des éléments compradores,
capitalistes, bureaucrates et propriétaires fonciers. Manifestement, mettre
le Nasakom au centre signifiait non seulement obscurcir le contenu de classe
du front uni national, mais encore changer radicalement la signification du
front uni national en lui donnant le sens d'une alliance de la classe
ouvrière avec toutes les autres classes du pays, y compris les classes
réactionnaires, en lui donnant le sens d'une collaboration de classes.
Cette erreur doit être corrigée. Le Parti doit
jeter à la poubelle la “ligne générale de la révolution indonésienne” erronée
et en revenir à la conception correcte d'un front uni national
révolutionnaire, basé sur l'alliance des ouvriers et des paysans sous la direction
de la classe ouvrière.
L'abandon des principes dans le front uni avec la
bourgeoisie nationale était également le résultat de l'incapacité du Parti à
faire une analyse juste et correcte de la situation concrète. Dans
l'article La société indonésienne et la révolution indonésienne
(adopté par la 5e session plénière du Comité central du Ve Congrès national
en juillet 1957, en tant que texte pour les écoles du Parti), il est dit que
renverser l'impérialisme était la première des deux tâches urgentes, le
renversement de l'impérialisme et la liquidation des vestiges du féodalisme.
On retrouve diverses variations de ce thème dans d'autres documents du Parti,
telles que "le fer de lance doit aujourd'hui être dirigé contre l'ennemi
principal, l'impérialisme" (D. N. Aidit, Discours à la Première
Conférence nationale du Parti sur le travail parmi les paysans), ou
encore "Actuellement, la principale contradiction en Indonésie est celle
entre le peuple indonésien d'une part, et les impérialistes d'autre
part" (D. N. Aidit, Levons haut le drapeau de la révolution).
De telles vues énoncées sur la situation concrète ont produit un mot d'ordre
comme “subordonner les intérêts de classe aux intérêts nationaux” (D. N.
Aidit, Rapport à la 2e session plénière du Comité central du VIe Congrès.)
C'était là une copie dogmatique du mot d'ordre correct du Parti Communiste
Chinois mis en avant pour la mobilisation de la résistance contre l'agression
des impérialistes japonais.
Cette erreur a rendu impossible pour le Parti
d'édifier une puissante et ferme alliance entre les ouvriers et les paysans,
en dépit de l'influence étendue du Parti dans les zones rurales. Parce que,
sous le mot d'ordre erroné “vaincre l'impérialisme constitue la tâche
primordiale”, toutes les contradictions parmi les classes à l'intérieur du
pays, y compris les contradictions entre les propriétaires fonciers et les
paysans devaient être subordonnées a “la contradiction principale ... la
contradiction entre le peuple indonésien et les impérialistes”.
Depuis l'échec de la révolution d'août 1945, sauf
en Irian occidental, les impérialistes n'ont jamais détenu un pouvoir
politique direct en Indonésie. En Indonésie, le pouvoir politique était aux
mains des compradores et des propriétaires fonciers qui représentaient les
intérêts de l'impérialisme et les vestiges du féodalisme. De plus, il n'y
avait aucune agression impérialiste contre l'Indonésie. La tâche primordiale
de la révolution indonésienne à l'époque actuelle est de renverser la
domination des classes réactionnaires a l'intérieur du pays, classes qui
représentent également les intérêts des impérialistes, en particulier de
l'impérialisme américain. Ce n'est qu'en remplissant cette tâche que peut
être accomplie la véritable liquidation de l'impérialisme et des vestiges du
féodalisme.
Corriger les erreurs faites par le Parti dans le
front uni avec la bourgeoisie nationale, ne signifie pas que le Parti ne doit
pas s'unir avec cette classe. Aussi longtemps que la structure économique de
l'Indonésie reste coloniale et semi-féodale dans sa nature, il y aura
toujours certaines couches de la classe bourgeoise qui souffriront de
l'oppression exercée par l'impérialisme et des vestiges du féodalisme. Ces
couches de la classe bourgeoise constituent la bourgeoisie nationale qui,
jusqu'à un certain point, s'oppose à l'impérialisme et aux vestiges du
féodalisme. Sur la base de l'alliance ouvriers-paysans sous la direction de
la classe ouvrière, notre Parti doit travailler à gagner la classe de la
bourgeoisie nationale aux cotés de la révolution.
*
Telles furent les principales erreurs de
l'opportunisme de droite dans le domaine politique commises par le PKI qui
avaient évolué en révisionnisme et atteint leur apogée à la veille des
évènements du 30 septembre. Lorsque la déviation de droite fut devenue
générale et complète une autre tendance totalement opposée émergea à savoir,
une tendance “gauchiste”. Celle-ci s'est manifestée par une surestimation de
la puissance du Parti, de la classe ouvrière et de l'ensemble du peuple travailleur,
l'appréciation exagérée des résultats de la lutte populaire et la
sous-estimation de la puissance des réactionnaires.
La situation politique dans le pays à l'époque
commençait en effet à révéler l'existence de tensions. Des victoires
politiques venaient couronner les actions déclenchées par le peuple,
confirmant le boycott des films américains, l'expulsion du “Corps de la paix
américain”, la fermeture de l'association cinématographique américaine en
Indonésie, et l'expulsion de son directeur, Bill Palmer, le rejet du
réactionnaire “Manifeste culturel”[15],
la reprise des entreprises britanniques, la dissolution du prétendu “Corps
pour la promotion du Sukarnoisme”[16]
et le parti Murba[17],
les actions contre l'agression américaine au Vietnam, etc. De telles actions
jouissaient d'un soutien populaire de plus en plus large. Dans certains
districts, les paysans entonnèrent des actions spontanées pour faire
triompher leurs revendications de réduction des fermages. En réaction contre
les succès de la lutte populaire, les réactionnaires de l'intérieur, en
collusion avec les impérialistes américains, intensifièrent également leurs
activités, montant des provocations contre les ouvriers et les paysans,
répandant de faux documents, etc.
La “Thèse sur les 45 ans du PKI” proclame
d'une part que "non seulement les capitalistes bureaucrates aggravent
les conditions économiques actuelles en Indonésie, mais ils tentent également
de prendre le pouvoir par un coup d'État". D'autre part, elle affirme
que "la résistance croissante du peuple indonésien contre
l'impérialisme, le féodalisme et les forces contre-révolutionnaires dans le
pays, montre qu'il se développe aujourd'hui dans notre pays une situation
révolutionnaire sans cesse croissante et arrivant à maturation".
Selon Lénine, il y a situation révolutionnaire
ou période révolutionnaire "lorsque l'ancienne superstructure craque de
toutes parts, lorsque l'action politique ouverte des classes et masses en
train de créer pour elles-mêmes une nouvelle superstructure, est devenue un
fait..." (Lénine, Deux tactiques de ta social-démocratie dans la
révolution démocratique). En comparaison avec ce que Lénine a dit, la
situation politique en Indonésie à l'époque, même compte tenu de la reprise
des entreprises britanniques et des manifestations anti-impérialistes et
contre les capitalistes bureaucrates qui se succédaient à un rythme accéléré
dans la capitale et dans les autres grandes villes, ne pouvait pas encore
être considérée comme ayant atteint le stade d'une situation révolutionnaire,
sans parler d'une "situation révolutionnaire sans cesse croissante et
arrivant à maturation". Les revendications apparues au cours des actions
qui atteignirent leur point culminant dans les manifestations n'étaient
essentiellement encore toujours que l'ossature de réformes ou de
revendications partielles. Entre-temps, l'action entreprise par les paysans,
force principale de la révolution indonésienne, n'avaient pas encore atteint
un stade très élevé ni fort étendu.
Les milliers d'actions par jour dans les zones
rurales dont on se targuait n'étaient qu'illusoires, parce que des actions
telles que l'envoi de pétitions écrites, la réparation des canaux
d'irrigation, etc., étaient comptées comme actions paysannes.
Les véritables actions dirigées directement contre
les propriétaires fonciers indigènes n'étaient ni nombreuses, ni étendues.
L'aboutissement sur “la situation
révolutionnaire devenant de plus en plus mûre” n'est rien d'autre que le
résultat d'une méthode de pensée qui prenait ses désirs subjectifs, ses
sentiments et son imagination pour la réalité. Les dirigeants du Parti
avaient peur de voir des réalités qui différaient de leurs désirs subjectifs.
Les dirigeants du Parti étaient mécontents lorsque les comités régionaux ou
d'autres organisations du Parti rapportaient que le degré de développement
des actions de masses était encore bien inférieur aux conclusions tirées.
Conséquence de cela, pour satisfaire les désirs
subjectifs de la direction du Parti, on surestima les actions de masses, en
particulier les actions paysannes.
La direction du Parti essaya d'avancer que la
situation révolutionnaire de plus en plus mûre “allait devenir” une
révolution. Cette idée fut soulignée par la résolution du Bureau politique du
Comité central du PKI du 17 août 1965.
La résolution appelait les communistes à
intensifier leur travail pour "faire progresser la situation
révolutionnaire actuelle vers son point culminant", de sorte que le
peuple puisse "obtenir des victoires non seulement toujours plus grandes,
mais encore des victoires fondamentales". C'était là l'apogée de l'autre
erreur, l'erreur “gauchiste”, qui entraîna la direction du Parti vers
l'aventurisme qui fut la cause d'un tel désastre pour le Parti et le
mouvement révolutionnaire en général.
Les principales erreurs sur le plan de l'organisation
La ligne politique erronée qui a dominé dans le
Parti fut inévitablement suivie d'une ligne organisationnelle tout aussi
erronée. Plus longtemps et plus fortement la ligne politique fausse domina
dans le Parti, d'autant plus graves furent les erreurs sur le plan
organisationnel, et les pertes qu'elles entraînèrent. L'opportunisme de
droite qui constituait la ligne politique fausse du Parti dans la période
après 1951, avait été suivi d'une autre déviation de droite sur le plan
organisationnel, à savoir le libéralisme et le légalisme.
La ligne du libéralisme sur le plan de
l'organisation se manifeste par une tendance à faire du PKI un parti comptant
le plus grand nombre possible de manifestants, parti à organisation lâche, appelé
parti de masse. Le problème de savoir si un Parti communiste doit avoir le
plus de membres possible (Parti de masse), ou pas trop de membres mais d'un
haut niveau (Parti de cadres), est un problème qui se pose aux partis
communistes de plusieurs pays. Au début, le PKI voulut devenir un parti de
masse, en appliquant le plan d'étendre le recrutement et l'organisation. Mais
au cours des dernières années, il était déclaré que le PKI était à la fois un
parti de masse et un parti de cadres. Par parti de masse, on entendait un
nombre de membres élevé et une large et profonde influence parmi les masses.
Par parti de cadres, on entendait un parti dont les membres étaient armés du
marxisme-léninisme et constituant les éléments dirigeants les plus actifs
parmi les masses.
Lénine et Staline ont clairement expliqué
comment un parti marxiste-léniniste devait être organisé et quelles devaient
en être les caractéristiques. Le PKI a adopté l'essence des caractéristiques
d'un parti marxiste-léniniste en établissant dans ses statuts que "le
PKI constitue le détachement avancé et la plus haute forme d'organisation de
classe du prolétariat indonésien".
En fait, savoir si un parti communiste
(marxiste-léniniste) doit devenir un parti de cadres ou un parti de masses,
ne devrait pas être un sujet de contestations. Les deux notions sont
comprises dans les caractéristiques d'un Parti, et leur essence est également
spécifiée dans les statuts du PKI. Le rôle du Parti, en tant qu'avant-garde
de la classe ouvrière, ne peut être accompli que si, d'une part, il constitue
le détachement avancé de l'ensemble de la classe ouvrière, et que, d'autre
part, il ne se trouve pas isolé de l'ensemble des rangs de la classe
ouvrière.
Staline a expliqué ce que signifie le rôle
d'avant-garde du parti dans les termes suivants: "Le Parti doit absorber
tous les meilleurs éléments de la classe ouvrière, leur expérience, leur
esprit révolutionnaire, leur abnégation à la cause du prolétariat. Mais pour
être vraiment un détachement avancé, le Parti doit être armé de la théorie
révolutionnaire, de la connaissance des lois du mouvement, de la révolution.
Sans cela, il sera incapable de diriger la lutte du prolétariat, de guider le
prolétariat... Le Parti doit se trouver à la tète de la classe ouvrière; il
doit guider le prolétariat et non traîner à la queue du mouvement
spontané." (J. V. Staline, Problèmes du Léninisme.)
Ces phrases de Staline délimitent clairement
les conditions qu'un parti marxiste-léniniste doit remplir pour remplir le
rôle de parti d'avant-garde de la classe ouvrière. De plus, ces conditions
montrent clairement qu'un membre du Parti n'est pas simplement n'importe quel
ouvrier, pas même un simple révolutionnaire; il est un des meilleurs éléments
de la classe ouvrière, armé de la théorie du marxisme-léninisme. N'importe
quel membre de la classe ouvrière ne remplit pas les conditions pour devenir
membre du Parti. En ce sens, un parti marxiste-léniniste est un parti de
cadres.
Staline a également expliqué que "le Parti
ne peut pas seulement être un détachement avancé. Il doit être en même temps
un détachement de classe, une partie de la classe ouvrière, être étroitement
lié à elle par toutes les fibres de son être. La distinction entre le
détachement avancé et l'ensemble de la classe ouvrière, entre membres du
Parti et les non-membres ne peut disparaître avant que disparaissent les
classes... Mais le Parti cesserait d'être un parti si cette distinction
devenait une séparation, si le Parti se repliait sur lui-même, et s'isolait
des masses non-membres du Parti. Le Parti ne peut guider la classe ouvrière
s'il n'est pas lié aux masses de non-membres, s'il n'y a pas de liens entre
le Parti et les masses de non-membres du Parti, si ces masses n'acceptent pas
sa direction." (Staline, Problèmes du Léninisme.)
Les explications de Staline montrent la
nécessité pour un parti marxiste-léniniste d'avoir un caractère de masse.
Parce que le Parti ne pourra remplir son rôle de détachement avancé que s'il
est indissolublement lié aux masses des non membres du Parti et s'il est
soutenu par elles. Le Parti gagnera la confiance des masses s'il est capable
d'adopter une attitude juste envers le peuple et de le guider de manière
juste, et s'il est capable de détendre les intérêts du peuple dans tous les
domaines, en premier lieu et par dessus tout dans le domaine politique.
Il est clair à présent que le caractère de masse
du Parti ou la caractéristique de Parti de masse n'est pas déterminée
essentiellement par le nombre élevé des membres, mais avant tout par les
liens étroits qui le rattachent aux masses, par la ligne politique du Parti
défendant les intérêts des masses, ou en d'autres termes par l'implantation
de la ligne de masse du Parti. Et la ligne de masse du Parti ne peut être
maintenue que si les conditions préliminaires au rôle d'avant-garde du Parti
restent fermement maintenues, si les membres du Parti sont parmi les
meilleurs éléments du prolétariat, armés du marxisme-léninisme. Par
conséquent, il est impossible de construire un Parti marxiste-léniniste à
caractère de masse sans accorder une importance primordiale à l'éducation
marxiste-léniniste.
Au cours de ces toutes dernières années, le PKI
avait élaboré une ligne d'édification du Parti qui déviait des principes du
marxisme-léninisme dans le domaine de l'organisation. Après le succès de
plans à court terme pour étendre le nombre de membres et développer
l'organisation, le Parti avait élaboré successivement le 1er plan
triennal (Organisation et Éducation), et le 2e plan triennal (Éducation
et organisation), et entamait le plan quadriennal (culture, idéologie et
organisation). En menant à bien les plans à court terme, le 1er et le 2e plan
triennal, le PKI s'était étendu aux quatre coins du pays, à toutes les îles
et parmi tous les groupes ethniques de l'Indonésie, avec plus de trois
millions de membres. C'était là une grande réalisation.
Mais en même temps, le libéralisme s'étendait
dans le Parti. Même si le second plan triennal mettait expressément l'accent
sur l'éducation idéologique, en pratique, cependant, l'expansion du nombre de
membres et de l'organisation avait toujours été exagérée. Le plan pour le
recrutement de nouveaux membres était élaboré sans tenir aucun compte des
possibilités pour l'organisation de s'occuper de l'éducation des nouveaux
membres. Depuis que les organisations du Parti concentraient leurs efforts
uniquement sur la manière d'atteindre les chiffres fixés comme objectif du
plan, le recrutement de nouveaux membres était fait en violation des
conditions fixées dans les statuts du Parti. L'organisation du PKI avait été
à ce point relâchée que pratiquement tous ceux qui exprimaient leur accord
avec le programme du Parti, pouvaient être acceptés comme membres. Il n'y
avait plus moyen de distinguer un membre du Parti d'un membre d'une
organisation de masse dirigée par le Parti. Les conditions pour être membre
du détachement avancé de la classe ouvrière étaient également ignorés.
Ce libéralisme dans le recrutement des membres du
Parti ne peut être séparé de la ligne politique de la “voie pacifique”. Le grand
nombre de membres avait pour but d'accroître l'influence du Parti dans le
front uni de la bourgeoisie nationale. L'idée était de réaliser un changement
progressif dans le rapport des forces qui devait permettre de défaire
totalement les forcés réactionnaires grâce à un Parti devenant de plus en
plus grand, joint à la politique d'unité avec la bourgeoisie nationale. Les
intérêts de la “voie pacifique” se reflétaient encore plus dans le domaine de
l'organisation par la formulation du plan quadriennal du Parti.
Dans ce plan, l'accent n'était plus mis sur
l'éducation et la formation des cadres marxistes- léninistes pour qu'ils se
préparent à la révolution, pour le travail parmi les paysans afin d'établir
des bases révolutionnaires, mais sur l'éducation des intellectuels pour
qu'ils répondent aux besoins du travail dans le front uni avec la bourgeoisie
nationale et pour fournir des cadres aux différents postes des institution de
l'État, obtenus grâce à la coopération avec la bourgeoisie nationale. À la
lumière de cette politique, le mot d'ordre d'“intégration totale aux paysans”
avait perdu toute signification. Dans la pratique, on transplantait des
cadres de la campagne dans les villes, des régions dans le centre, au lieu
d'envoyer les meilleurs cadres pour travailler dans les zones rurales.
Dans le but d'accroître le prestige du PKI aux
yeux de la bourgeoisie, et de le faire respecter en tant que parti
d'intellectuels, le plan quadriennal stipulait que tous les cadres de rang
élevé devaient obtenir une formation universitaire, les cadres moyens une
formation moyenne du degré moyen supérieur et les plus petits cadres une
éducation moyenne du degré inférieur. C'est dans ce but que le Parti avait
mis sur pied un grand nombre d'universités, d'écoles et de cours. L'intellectualisme
qui s'était emparé de la direction du Parti, était à ce point enraciné, que
tous les dirigeants du Parti et toutes les figures connues des mouvements
populaires étaient obligés d'écrire quatre thèses en vue d'obtenir le titre
des “hommes de science marxistes”.
Plus le Parti s'enfonçait dans la fange de
l'opportunisme, plus grand était son manque de vigilance organisationnelle,
et plus le légalisme s'étendait dans l'organisation. La direction avait perdu
sa prévention de classe à l'égard de la tromperie et de la démocratie
bourgeoise. Toutes les activités du parti faisaient ressortir la “voie
pacifique” comme une certitude inévitable. La direction du Parti n'a pas
éveillé la vigilance de la masse des membres du Parti envers le danger d'être
attaqué par les réactionnaires qui restaient constamment à l'affût d'une
occasion pour frapper. C'est à cause de ce légalisme dans le domaine
organisationnel que la contre-révolution à réussi en un bref laps de temps à
paralyser le PKI sur le plan de l'organisation.
Le libéralisme dans l'organisation avait détruit
le principe de la démocratie interne dans le Parti, il avait détruit la
direction collective et donné naissance à la direction et à la domination
d'une personne, à l'autonomie qui créait un terrain fertile au développement
du culte de la personnalité. Le centralisme démocratique, une démocratie
centralisée qui doit être exercée sur la base de la ligne de masse et qui
doit lier la direction aux masses, n'était plus pratiquée, et était remplacée
par l'autoritarisme basé sur les désirs subjectifs et les intérêts subjectifs
de la direction. Formellement, les principes de démocratie interne dans le
Parti et ceux de direction collective n'étaient pas totalement écartés. Et
pour la forme, toutes les décisions des organismes dirigeants étaient prises
à l'unanimité. Mais en même temps, il n'était pas rare que des décisions
étaient prises en dehors des organismes dirigeants compétents du Parti. Cette
méthode erronée qui allait à l'encontre des principes du marxisme-léninisme,
s'est manifestée à cause des facteurs suivants:
Premièrement, les erreurs dans le domaine
organisationnel, en particulier celles concernant le style de travail qui
donne à la direction du Parti le pouvoir de mettre sur pied leurs propres réseaux
organisationnels, au-dessus du contrôle du Bureau politique et du Comité
central. Ceci avait donné naissance à une situation telle que l'organisme
dirigeant compétent du Parti, le Bureau politique, ne remplissait pas sa
fonction propre et n'était pas non plus considéré comme le seul endroit
propre à résoudre toutes les affaires du Parti et de la révolution. À travers
ces réseaux autonomes, la direction du Parti était capable de prendre des
mesures politiques et organisationnelles, y compris la disposition de cadres;
et il n'était pas rare que le seul travail laissé au Bureau politique
consistait à entériner les mesures prises par la direction, ou que le Bureau
politique n'avait qu'une connaissance fragmentaire et superficielle des
problèmes à discuter.
Deuxièmement, l'absence d'attitude critique
envers la direction, qui existait au Bureau politique, au Comité central et
dans les autres organisations du Parti. La tradition était établie que tout
ce que la direction disait était d'office considéré comme juste et mis en
pratique sans être au préalable analysé et discuté à fond. Cette absence
d'esprit critique était due entre autres choses au bas niveau théorique, au
fait que les cadres n'étaient pas armés de saines bases théoriques qui leur
auraient permis de réfuter les vues de la direction quand ils les sentaient
fausses. Au cours des dernières années, après que le Parti ait réorganisé le
groupe de travail théorique, les dirigeants du Parti en général, s'étaient de
plus en plus détachés des problèmes théoriques. Les théoriciens étaient
pratiquement les seuls à prendre une part active aux discussions mettant en
cause des problèmes théoriques. En plus de cela, il y avait aussi le manque
de courage à exprimer un point de vue qui ne concordait pas avec la ligne
suivie par la direction.
Troisièmement, la croyance qu'on mettait dans
l'esprit des membres du Parti qui exagéraient l'existence d'une unité
monolithique dans le Parti. Elle était fréquemment surestimée comme s'il
n'existait plus du tout de différences d'opinion sur des questions de
principe. Par conséquent, lorsqu'il existait en fait une divergence
d'opinions avec la direction du Parti sur des questions de principe, elle
apparaissait comme quelque chose d'anormal. Cette atmosphère faisait que les
cadres du Parti répugnaient à expliquer librement et ouvertement leur opinion
concernant la ligne suivie par la direction et qu'ils jugeaient fausse. En
fait, il y avait une certain nombre de cadres qui n'étaient pas d'accord avec
les lignes politique et organisationnelle opportunistes et révisionnistes
suivies par la direction du Parti, quoiqu'il n'osaient manifester leurs vues
ouvertement et librement dans les assemblées du Parti. De toute manière, les
vues et les sentiments de ces cadres ne recevaient aucune réponse
encourageante de la part de la direction. Le manque de liberté d'expression
et de pensée des cadres était également influencé par la politique suivie par
la direction dans la promotion des cadres qui était empreinte de favoritisme.
D'un autre coté, dans une certaine mesure, certains cadres étaient
délibérément isolés.
Alors que le libéralisme dominait la ligne
organisationnelle du Parti, il était impossible de respecter le style de
travail du Parti consistant à combiner la théorie et la pratique, de se lier
étroitement aux masses et à faire preuve d'autocritique. Il était également
impossible de respecter la méthode de direction dont l'essence est l'unité de
la direction et des masses; pour la mener à bien, la direction doit donner
l'exemple aux militants de base.
Ce qui se faisait en réalité, ce n'était pas
l'intégration de la vérité universelle du marxisme-léninisme à la pratique
concrète de la révolution indonésienne, mais des tentatives de concilier
l'enseignement du marxisme-léninisme et les vues de la bourgeoisie, de
systématiser et de développer les vues et les théories de la bourgeoisie et,
sous le mot d'ordre d'“indonéisation du marxisme-léninisme”, “développements
créateurs du marxisme-léninisme” de faire la révision du marxisme-léninisme.
La ligne de se lier étroitement aux masses et
d'unir la direction et les masses, ne peut être réalisée que si le Parti
s'intègre de la manière la plus résolue aux masses populaires, en particulier
aux ouvriers, ouvriers agricoles et paysans pauvres. Dans la mise en
application de cette ligne, la direction doit donner l'exemple aux militants.
Mais ce n'était pas le cas. De nombreux cadres du Parti, en particulier ceux
de rang élevé, et plus précisément encore ceux qui possédaient certaines
aptitudes à remplir un poste dans l'un ou l'autre service gouvernemental ou
supra-gouvernemental, avaient atteint un niveau de vie incomparablement plus
élevé que celui des ouvriers et des autres travailleurs. Ils jouissaient des
mêmes facilités que les officiels de haut rang reconnus du gouvernement.
La tradition s'était même établie dans le Parti
que les dirigeants du Parti et des organisations révolutionnaires de masses,
à l'échelon central ou régional, devaient occuper une fonction officielle
dans le gouvernement, en vue d'accroître leur prestige, afin de devenir non
seulement des vedettes du Parti mais également des personnalités officielles,
sur le plan national ou régional. Cette tradition amena de nombreux
dirigeants du Parti et des organisations de masses, de consacrer le meilleur
de leurs activités au travail pour les organismes gouvernementaux ou
para-gouvernementaux. Ceci les entraînait évidemment à négliger la vie du
Parti, tant sur le plan idéologique qu'organisationnel.
Dans les régions, et particulièrement dans le centre,
le genre de vie adopté par certains dirigeants du Parti n'était plus conforme
au mode de vie des masses qui restaient dans la misère, mais s'apparentait au
mode de vie de la bourgeoisie. Tout cela se faisait sous couvert de mots
d'ordres insensés tels que “agir en concordance avec la grandeur du Parti”,
“rehausser le prestige du Parti”, “se débarrasser du style traditionnel”,
etc. Certains dirigeants du Parti s'enlisèrent même dans le marais de la
morale bourgeoise décadente et salirent la moralité communiste.
Dans ces conditions, comment s'intégrer aux
masses les plus exploitées du peuple? Les appels à “combattre la
condescendance”, à “être un bon et toujours meilleur communiste”, à “créer
une famille communiste”, etc., n'étaient qu'un écran de fumée pour cacher
l'hypocrisie et la dégradation morale parmi la direction du Parti; c'était
comme si seuls les cadres du Parti, sauf la direction, étaient capables de
commettre des méfaits, de ne pas se conformer à la morale communiste. Tout en
lançant ces appels, la direction du Parti continuait imperturbablement à
mener un genre de vie bourgeois.
Lorsque les cadres des régions levaient les yeux
vers le centre, au lieu d'y trouver des exemples de simplicité communiste,
tant dans la vie du Parti que dans la vie privée, ils y trouvaient des
exemples d'“extravagance”, de “modernisme” et de “grandeur” tant dans la vie
privée que dans la vie du Parti. La direction du Parti faisait la sourde
oreille aux critiques honnêtes faites par certains camarades, et lançait des
critiques telles que “esprit rétrograde”, “mauvaise volonté à profiter au
maximum des facilités utiles dans l'intérêt du Parti et du peuple”, “refus de
rehausser le prestige du Parti”, etc.
De manière générale donc, la ligne politique
fausse qui dominait dans le Parti avait pour conséquence une ligne fausse
dans le domaine de l'organisation, ligne qui violait les principes d'un Parti
marxiste-léniniste, détruisait les fondements organisationnels du Parti, à
savoir le centralisme démocratique, et foulait aux pieds le style de travail
et les méthodes de direction du Parti.
Pour édifier le PKI en Parti marxiste-léniniste,
nous devons déraciner à fond le libéralisme dans le domaine organisationnel,
ainsi que sa source idéologique, il faut reconstruire le PKI en Parti de type
léniniste, un parti qui sera capable de remplir son rôle de détachement
avancé et de former la plus haute organisation de classe du prolétariat
indonésien, un parti ayant la mission historique de diriger les masses du
peuple indonésien pour faire triompher la révolution anti-impérialiste,
anti-féodale et anti-capitaliste bureaucratique, et de progresser vers le
socialisme. Un tel parti doit remplir les conditions suivantes:
Idéologiquement, il est armé de la théorie
du marxisme-léninisme, libre de tout subjectivisme, opportunisme et
révisionnisme moderne;
Politiquement, il possède un programme
correct comprenant un programme de réforme agraire révolutionnaire, il
possède une compréhension approfondie des problèmes de la stratégie et de la
tactique de la révolution indonésienne; il maîtrise la principale forme de
lutte, à savoir la lutte armée des paysans sous la direction du prolétariat;
il maîtrise également les autres formes de lutte, il est capable d'établir un
front uni révolutionnaire de toutes les classes anti-impérialistes et
anti-féodales, basé sur l'alliance des ouvriers et des paysans sous la
direction de la classe ouvrière;
Organisationnellement, il est puissant et a
de profondes racines parmi les masses populaires, il se compose des membres
les plus éprouvés, les plus expérimentés et les mieux forgés qui sont un
exemple pour la réalisation des tâches nationales.
Actuellement, nous reconstruisons notre Parti sous
le règne déchaîné de la plus cruelle et la plus féroce des terreurs blanches
contre-révolutionnaires. La légalité du Parti et les droits humains les plus
élémentaires des communistes ont été allègrement violés. Le Parti se voit
obligé de travailler dans l'illégalité la plus complète et la structure
organisationnelle du Parti doit par conséquent être adaptée à ces conditions
nouvelles. Tout en travaillant dans l'illégalité totale, le Parti doit être
apte à utiliser pleinement toutes les possibilités de mener des activités
légales adaptées aux circonstances, de choisir des voies et des moyens
acceptables par les masses, dans le but de mobiliser les masses pour la lutte
et d'élever par après, le niveau de cette lutte.
Naturellement, dans une situation où le Parti doit
travailler dans une complète illégalité, le centralisme démocratique, en
particulier la démocratie interne, ne peut être pleinement appliquée dans le
Parti. Dans de telles conditions, chaque organisme dirigeant du Parti mettra
en oeuvre toute son énergie pour mieux comprendre et traiter correctement
toutes les voies et tous les sentiments des membres du Parti. Dans ce but, le
style de travail du Parti, la méthode de direction et le principe
marxiste-léniniste de direction collective doivent être appliqués fermement.
Dans la reconstruction du PKI selon la ligne
marxiste-léniniste, il faudra accorder la plus grande attention à
l'édification d'organisations du Parti dans les zones rurales, à
l'établissement de bases révolutionnaires.
La tâche de reconstruire un Parti
marxiste-léniniste comme il est écrit plus haut, exige un travail acharné et
de longue haleine, rempli de dangers et doit par conséquent, être mené avec
courage, persévérance, soin, patience et ténacité.
La voie à suivre
Une fois connues les erreurs et les faiblesses du
Parti au cours de la période postérieure à 1951 comme déjà expliqué,
faiblesses et erreurs qui ont entraîné de sérieux dommages pour le PKI et le
mouvement révolutionnaire du peuple indonésien, il est évident que notre
devoir est de réaliser les tâches les plus urgentes auxquelles se trouvent confrontés
les marxistes-léninistes indonésiens à l'époque actuelle, la première étant
de refaire du PKI un Parti marxiste-léniniste, débarrassé du subjectivisme,
de l'opportunisme et du révisionnisme moderne.
Pour refaire du PKI un tel Parti marxiste-léniniste,
les cadres du Parti à tous les niveaux, et ensuite tous les membres du Parti
doivent parvenir à une unité de vues sur les erreurs faites par le Parti dans
le passé, ainsi que sur la nouvelle voie a prendre.
Suite aux attaques de la troisième terreur blanche,
le Parti a perdu de nombreux cadres qui avaient de longues années
d'expérience dans le travail du Parti et dans le travail parmi les
organisations révolutionnaires de masses. Cependant, lorsqu'une unanimité de
vues aura été atteinte concernant les principales erreurs commises par le
Parti dans le passé et concernant la nouvelle voie à prendre, alors, une
direction stable sera progressivement établie à tous les niveaux, à partir
des cadres encore en vie. Ceux-ci seront capables de remplir leur rôle de direction
du Parti et du peuple indonésien pour surmonter les difficultés l'une après
l'autre au cours de la période où sévit la contre-révolution et où la marée
de la révolution est à son niveau le plus bas, faisant progresser pas à pas
la lutte populaire et dirigeant finalement le nouveau raz-de-marée
révolutionnaire qui se produira inévitablement.
Pour parvenir à une unité de vues, il faut
développer un mouvement de rectification dans tout le Parti. À travers ce
mouvement de rectification, nous remplacerons les idées fausses du passé par
des idées correctes. Pour avancer dans la nouvelle voie, il est absolument
nécessaire d'abandonner la voie fausse. Il ne sera pas possible de suivre la
nouvelle voie sans avoir auparavant abandonné complètement la fausse.
Dans les circonstances actuelles il ne sera pas
facile d'atteindre une unité de vues concernant toutes les erreurs du passé
jusque dans leur moindre détail. Mais ce qui est absolument nécessaire, c'est
une unanimité de vues sur les problèmes fondamentaux soulevés dans cette
autocritique. Si l'on ne comprend pas ces problèmes fondamentaux, on ne
sera jamais capable de se joindre à la réalisation de cette lourde, mais
grande tâche de construire un parti marxiste-léniniste en Indonésie, garantie
sûre de l'existence d'une direction éprouvée de la révolution démocratique
populaire en Indonésie.
On a analysé plus haut que les erreurs
opportunistes et révisionnistes faites par notre Parti dans les domaines
politique et organisationnel, soumises à cette critique, n'étaient pas
simplement le résultat des conditions sociales et historiques au cours de la
dernière décennie, mais pouvaient être recherchées plus loin dans les
conditions sociales et historiques existant depuis la fondation de notre
Parti. C'est pourquoi nous devons nous débarrasser de l'idée que tout ira
pour le mieux une fois que nous aurons fait cette critique et autocritique.
Aussi longtemps que l'idéologie subjectiviste ne sera pas complètement
extirpée du Parti, ou, plus grave encore, si elle se retrouve encore parmi la
direction du Parti, le Parti sera incapable d'éviter d'autres erreurs
opportunistes de “gauche” ou de droite, parce que, si tel est le cas, notre
Parti ne sera pas capable d'analyser correctement la situation politique, ni,
par conséquent, d'assurer une direction juste. C'est avant toute chose la
tâche de la direction et des cadres centraux, et ensuite de la direction
régionale et des cadres à tous les niveaux, de combattre le subjectivisme
avec persistance et acharnement.
Le subjectivisme peut effectivement être combattu
et liquidé lorsque tous les membres du Parti auront la possibilité de
distinguer l'idéologie prolétarienne de l'idéologie petite-bourgeoise, et
lorsque on encourage la critique et l'autocritique. Donner la possibilité à tous
les membres du Parti de distinguer l'idéologie prolétarienne de l'idéologie
petite-bourgeoise ne pourra se faire qu'en intensifiant l'enseignement du
marxisme-léninisme. Le Parti doit éduquer ses membres à appliquer la méthode
marxiste-léniniste d'analyse de la situation politique et d'évaluation des
forces des classes existantes, afin de pouvoir éviter l'analyse et
l'estimation subjectives. Le Parti doit attirer l'attention des membres sur
l'importance de l'investigation et sur l'étude des conditions sociales et
économiques, afin d'être capables de définir la tactique de lutte et la
méthode de travail qui y correspondent. Le Parti doit aider les membres à
comprendre que sans une investigation des conditions actuelles ils
retomberont dans l'illusion.
Garder à l'esprit les erreurs faites par le
Parti dans le passé est une condition excellente pour maîtriser l'âme
révolutionnaire du marxisme-léninisme. Aussi les marxistes-léninistes
indonésiens ne doivent-ils épargner aucun effort ni énergie pour surmonter
les difficultés qu'entraîne l'actuelle terreur blanche dans l'étude du
marxisme-léninisme.
L'expérience de la lutte menée par le Parti dans
le passé a montré à quel point il est indispensable pour les
marxistes-léninistes indonésiens, résolus à défendre le marxisme-léninisme et
à combattre le révisionnisme moderne, d'étudier non seulement les
enseignements de Marx, Engels, Lénine et Staline, mais également de consacrer
une attention particulière à l'étude de la pensée de Mao Tsé-toung, qui a
réussi à continuer, défendre et développer le marxisme-léninisme à son point
culminant à l'époque actuelle.
Le PKI ne sera capable de tenir haut le drapeau du
marxisme-léninisme, que s'il adopte une attitude résolue dans la lutte contre
le révisionnisme moderne, qui a pour centre aujourd'hui le groupe dirigeant
du PCUS. La lutte contre le révisionnisme moderne ne peut être menée
résolument si l'on sauvegarde en même temps l'amitié avec les révisionnistes
modernes. Le PKI doit abandonner l'attitude fausse qu'il a eue par le passé
sur la question des relations avec les révisionnistes modernes. La loyauté
envers l'internationalisme prolétarien ne peut se manifester que par une
prise de position sans concessions dans la lutte contre le révisionnisme
moderne, parce que le révisionnisme moderne a détruit l'internationalisme
prolétarien et trahi la lutte du prolétariat et des peuples opprimés partout
dans le monde.
Dans la reconstruction du Parti, les
marxistes-léninistes indonésiens doivent accorder leur attention à la
création des conditions permettant de diriger la révolution agraire armée des
paysans qui deviendra la principale forme de lutte pour faire triompher la
révolution démocratique populaire en Indonésie. Cela signifie qu'il faut
accorder la plus grande attention à la reconstruction des organisations du
Parti dans les zones rurales. La plus grande attention doit être accordée à
résoudre le problème d'éveiller, d'organiser et de mobiliser les paysans dans
la révolution agraire anti-féodale. L'intégration du Parti à la paysannerie,
en particulier parmi les ouvriers agricoles et les paysans pauvres, doit être
effectuée correctement. Parce que c'est uniquement à travers une telle
intégration que le Parti sera capable de diriger la paysannerie et que la
paysannerie, de son côté, sera capable de devenir le rempart invincible de la
révolution démocratique populaire.
Suite aux attaques de la troisième terreur
blanche, les organisations du Parti dans les zones rurales ont en général
subi de plus grands dommages. Le fait a rendu le travail dans les campagnes
plus ardu et plus difficile. Mais cela ne change en aucune manière la loi
inexorable que la principale force de la révolution démocratique populaire en
Indonésie est la paysannerie, et sa zone de base la campagne.
Avec la détermination la plus résolue de servir
totalement les masses populaires, les marxistes- léninistes indonésiens
seront certainement capables de surmonter les pires difficultés. En ayant la
confiance la plus absolue dans les masses, en faisant confiance aux masses,
les marxistes- léninistes indonésiens seront assurément capables de
transformer les villages indonésiens arriérés en de grands et solides
bastions militaires, politiques, économiques et culturels de la révolution.
Les paysans indonésiens sont les plus intéressés
par la révolution démocratique populaire. Parce que seule cette révolution
peut les libérer de la voie arriérée et victimes d'injustices par la
suppression de la féodalité. Seule cette révolution peut leur apporter ce
dont ils ont rêvé toute leur vie et qui est: la terre. Voilà pourquoi les
paysans prendront sûrement la voie de la révolution pour la terre et la
libération, et ceci quelles que soient les difficultés, les tours et les
détours de cette voie.
Évidemment, la deuxième tâche des marxistes-léninistes
indonésiens à l'heure actuelle est de créer les conditions nécessaires pour
la révolution agraire armée des paysans sous la direction du prolétariat.
Pourvu que les marxistes-léninistes indonésiens réussissent à éveiller,
organiser et mobiliser les paysans pour mener une révolution agraire
anti-féodale, la direction de la classe ouvrière dans la révolution
démocratique populaire et la victoire de cette révolution seront assurées.
Cependant, le Parti doit poursuivre ses efforts
pour établir un front uni révolutionnaire avec les autres classes et groupes
anti-impérialistes et anti-féodaux. Sur la base de l'alliance de la classe
ouvrière avec la paysannerie sous la direction du prolétariat, le Parti doit
s'efforcer de gagner à sa cause la petite bourgeoisie urbaine et les autres
forces démocratiques, ainsi que la bourgeoisie nationale en tant qu'allié
d'appoint dans la révolution démocratique populaire. Les conditions
objectives actuelles offrent la possibilité pour l'établissement d'un large
front uni révolutionnaire.
La dictature militaire des généraux de droite
dirigée par Nasution et Suharto est l'expression de la domination des classes
les plus réactionnaires du pays, à savoir, la bourgeoisie compradore, les
capitalistes bureaucrates et les propriétaires fonciers. Les classes
réactionnaires de l'intérieur sous la direction de la clique des généraux de
droite, exercent leur dictature sur le peuple indonésien, et agissent en tant
que chiens de garde des intérêts de l'impérialisme en Indonésie, en particulier
de l'impérialisme américain. Par conséquent, l'arrivée au pouvoir de la
dictature militaire des généraux de droite servira certainement à intensifier
l'oppression et l'exploitation du peuple indonésien par l'impérialisme et le
féodalisme.
La dictature militaire des généraux de droite ne
représente les intérêts que d'une très petite minorité qui opprime l'infinie
majorité du peuple indonésien. C'est la raison pour laquelle la dictature
militaire des généraux de droite se heurtera inévitablement à la résistance
des larges masses populaires. La dictature militaire des généraux de
droite ne représente pas davantage la masse des soldats des Forces Armées de
la République d'Indonésie. C'est pourquoi la résistance à la dictature
militaire des généraux de droite se manifestera aussi parmi les soldats. Il
est clair par conséquent que dans la lutte pour écraser la dictature
militaire des généraux de droite, il existe la possibilité d'établir le front
le plus large possible.
La situation actuelle est différente de celle
existant durant la deuxième terreur blanche (Provocation de Madiun).
Actuellement ce ne sont pas toutes les forces moyennes qui rejoignent la
contre-révolution pour attaquer les forces motrices de la révolution. L'aile
gauche des forces moyennes, ayant également été prise pour cible par la
contre-révolution, participe à la résistance. Le nombre de ces forces
moyennes qui résistent à la dictature militaire des généraux de droite croît
de jour en jour. Le Parti doit travailler sans relâche à renforcer le front
uni avec ces forces.
Donc, la troisième tâche urgente qui se pose aux
marxistes-léninistes indonésiens est d'établir un front uni révolutionnaire
avec toutes les classes et tous les groupes anti-impérialistes et
anti-féodaux basé sur l'alliance des ouvriers et des paysans sous la
direction de la classe ouvrière.
Il est donc clair que pour faire triompher la
révolution démocratique populaire, les marxistes- léninistes indonésiens
doivent tenir haut les trois drapeaux du Parti:
Le premier drapeau, l'édification d'un parti
marxiste-léniniste débarrassé du subjectivisme, de l'opportunisme et du
révisionnisme moderne.
Le deuxième drapeau, la lutte armée du peuple qui
dans son essence est la lutte armée des paysans dans une révolution agraire
anti-féodale sous la direction de la classe ouvrière.
Le troisième drapeau, le front uni révolutionnaire
basé sur l'alliance des ouvriers et des paysans sous la direction de la
classe ouvrière.
Le Bureau politique a par la présente, fait son
autocritique sur les sérieuses faiblesses et erreurs du Parti au cours de la
période postérieure à 1951 qui a entraîné de sérieux dommages pour le Parti
et dans tous les rangs du mouvement révolutionnaire.
Les tâches auxquelles se trouvent confrontés les
marxistes-léninistes indonésiens sont très ardues. Il leur faut travailler
sous la plus sauvage et la plus barbare des terreurs et des persécutions,
sans parallèle dans l'histoire, cependant, les marxistes-léninistes
indonésiens ne doutent pas un instant que s'ils corrigent les erreurs faites
par le Parti dans le passé, ils suivront dorénavant la voie correcte, celle
de la révolution démocratique populaire. Aussi longue, tortueuse, et pleine
de difficultés qu'elle soit, c'est la seule voie qui mène à une Indonésie
nouvelle libre et démocratique, une Indonésie qui appartiendra réellement au
peuple indonésien. Pour cette noble cause, nous devons avoir le courage de
suivre cette longue route.
Les marxistes-léninistes et les révolutionnaires
indonésiens, sur la base de leur propre expérience de lutte, n'ont pas le
moindre doute sur la justesse de la thèse du camarade Mao Tsé-toung,
"les impérialistes, et tous les réactionnaires sont des tigres en
papier. En apparence ils sont terribles, mais en réalité ils ne sont pas si
puissants. À envisager les choses du point de vue de l'avenir, c'est le
peuple qui est vraiment puissant, et non les réactionnaires". La
dictature militaire des généraux de droites qui détient actuellement le
pouvoir est également un tigre en papier. En apparence, ils sont puissants et
terribles. Mais en réalité, ils ne sont pas si puissants parce que loin
d'être soutenus par le peuple, celui-ci leur résiste, parce que les
contradictions abondent dans leurs rangs, parce qu'ils se disputent entre eux
pour avoir une plus grande part du butin et obtenir plus de pouvoirs. Les
impérialistes, les impérialistes américains en particulier, qui sont le
principal appui de la dictature militaire des généraux de droite, sont aussi
des tigres en papier. En apparence ils sont puissants et terribles, mais en
réalité ils sont faibles et approchent de leur effondrement total. La
faiblesse des impérialistes, en particulier des impérialistes américains, est
prouvée de façon vivante par leur impuissance à vaincre l'héroïque peuple
vietnamien et à abattre la marée de la lutte anti-impérialiste menée par les
peuples du monde entier, y compris le peuple américain lui-même, qui assène
des coups furieux à la forteresse de l'impérialisme.
D'un point de vue stratégique, les impérialistes
et les réactionnaires sont faibles, et par conséquent nous devons les
mépriser. En méprisant les ennemis du point de vue stratégique nous pouvons
renforcer notre courage de lutter contre eux et notre confiance de les
vaincre. En même temps nous devons les prendre tout à fait au sérieux, tenir
pleinement compte de leur puissance sur le plan tactique, et éviter de faire
preuve d'aventurisme envers eux.
Nous nous trouvons actuellement à une époque où
l'impérialisme va vers l'écroulement total et où le socialisme marche de
l'avant triomphalement partout dans le monde. Aucune force sur terre ne peut
empêcher la ruine totale de l'impérialisme et de tous les réactionnaires, et
aucune force ne peut arrêter le socialisme à travers te monde. La dictature
militaire des généraux de droite, chiens de garde des intérêts de
l'impérialisme en Indonésie, est également incapable d'évaluer sa propre
destruction. Les massacres criminels et sauvages et la torture infligée à des
centaines de milliers de communistes et de démocrates, qui se poursuivent
encore actuellement ne pourront empêcher le peuple et les communistes de
lever la résistance.
Au contraire, toutes ces brutalités et cruautés ne
serviront qu'à intensifier la lutte de résistance populaire rendant coup pour
coup. Les communistes vengeront l'assassinat de leurs dizaines de milliers de
camarades avec la résolution de servir toujours mieux, le peuple, la
révolution et le Parti.
Les marxistes-léninistes qui subissent les
attaques de la troisième terreur blanche expriment leur gratitude la plus
profonde pour la solidarité des marxistes-léninistes du monde entier. Cette
solidarité a renforcé la conviction des révolutionnaires indonésiens dans les
liens indéfectibles qui unissent leur lutte de libération nationale à la
lutte internationale du prolétariat pour le socialisme. Les
marxistes-léninistes indonésiens n'épargneront ni leurs efforts, ni leur
énergie pour remplir les voeux chaleureux, les espoirs des
marxistes-léninistes dans le monde, en défendant résolument le
marxisme-léninisme et en luttant contre le révisionnisme moderne, en
travaillant toujours mieux pour la libération de leur peuple et du pays, et
pour la révolution prolétarienne mondiale.
Les marxistes-léninistes indonésiens qui sont unis
en esprit et déterminés à emprunter la voie de la révolution en mettant leur
foi la plus totale dans le peuple, en faisant confiance au peuple, en
travaillant avec courage, persévérance, conscience, patience, persistance et
vigilance, seront certainement capables d'accomplir leur mission historique,
pour guider la révolution démocratique populaire, pour écraser la dictature
militaire des généraux de droite et édifier un pouvoir complètement nouveau,
la dictature démocratique populaire. Avec la dictature démocratique du
peuple, le pouvoir conjoint des classes et groupes anti-impérialistes et
anti-féodaux sous la direction de la classe ouvrière, le peuple indonésien
liquidera totalement l'impérialisme et les vestiges du féodalisme, construira
une société nouvelle, libre et démocratique, et progressera vers le
socialisme où l'oppression et l'exploitation de l'homme par l'homme seront
supprimés.
Unissons-nous étroitement pour prendre la voie de
la révolution qui est illuminée par les enseignements du marxisme-léninisme,
la voie menant à la libération du prolétariat et du peuple indonésien, la
voie menant vers le socialisme.
Java central, septembre 1966
Bureau politique du Comité central du
PKI
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