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1933‑1945 : Le KPD dans la lutte contre la dictature national-socialiste
1918‑1933 : SPD et fascisme

 

 

Tout au longue de la période allant de l'éclatement du mouvement insurrectionnel en novembre 1918 jusqu'à la prise du pouvoir par les national-socialistes, les sociaux-démocrates n'agissent nullement en faveur d'une démocratie authentique bénéficiant au masses travailleuses. Pour sauver la domination de la bourgeoise, ils ont eux-mêmes recours à l'exercice brutal du pouvoir armée, pour réprimer les travailleurs en lutte. Et en ce qui concerne les forces politiques ouvertement fascistes, la social-démocratie, au lieu de les combattre de façon conséquente, est surtout préoccupée à faire obstacle à l'action des communistes. C'est que la social-démocratie est consciente du fait que la seule façon de vaincre le fascisme consiste à renverser la dictature de la bourgeoisie ‑ et cela, la social-démocratie ne le veut pas, bien au contraire.

 

 

 

 

 

 

Écrit: janvier 2013

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1933 1945: Le KPD dans la lutte contre la dictature national-socialiste - Sommaire

 

 

 

 

 

 

Introduction

L'enjeu central: l'exercice du pouvoir en faveur de la bourgeoisie

L'orientation du KPD face au renforcement des national-socialistes

La caractérisation fondamentale du fascisme

Ennemi principal

 

Introduction

Un des angles d'attaque choisis avec prédilection par les propagandistes anticommunistes est celui de rendre l'Internationale communiste et en particulier le KPD responsables du fait que les national-socialistes ont réussi à prendre le pouvoir en Allemagne en 1933. En développant toutes sortes de raisonnements autour de cette allégation, ils partent en premier lieu d'un présupposé idéologique qui leur est propre, celui que le KPD aurait dû, dès l'apparition sur la scène de Hitler et du NSDAP, s'allier avec le SPD. Du point de vue du marxisme-léninisme, il était pourtant légitime d'analyser la question de l'attitude à adopter vis-à-vis du SPD sans poser d'office comme principe pseudo-logique qu'il fallait être “contre les national-socialistes, donc avec le SPD”.

En outre, les interprétations hostiles formulées rétrospectivement déforment la signification des arguments tels qu'ils étaient employés à l'époque des évènements en question. Aujourd'hui, en référence à l'histoire de l'Allemagne et de l'Italie, le terme “fascisme” désigne un État de dictature dans sa globalité comprenant le gouvernement, les institutions, la force ouverte exercée contre l'ensemble de la population ainsi qu'une certaine idéologie qui se définit explicitement en opposition à la démocratie bourgeoise parlementaire. Si l'on se base sur un tel schéma d'interprétation, on peut être tenté de penser que premièrement, lorsqu'on est confronté à un mouvement fasciste, celui-ci constitue forcément l'ennemi principal; et que deuxièmement, dans une telle situation, pour les social-démocrates la perspective de participer aux sphères du pouvoir s'éloigne et les communistes pourraient ainsi renoncer à les considérer comme des rivaux.

Or, lorsque le KPD traversait les périodes que nous traitons ici, les évènements qui pour nous, aujourd'hui, constituent un passé achevé, étaient en train de se dérouler comme actualité immédiate.

En mars 1919, en Italie, Mussolini participa à la création des “faisceaux italiens de combat” (“fasci italiani di combattimento”). En novembre 1921, il transforma ces groupes en “Parti national fasciste” (“Partito nazionale fascista”, PNF). En octobre 1922 il fut désigné comme premier ministre, en novembre le parlement accorda au gouvernement les pleins pouvoirs jusqu'à fin 1923, en juillet 1923 il introduisit une loi électorale assurant au parti majoritaire aux élections les deux tiers des sièges au parlement. C'est ce qui s'appliqua au PNF en avril 1924. En janvier 1925, Mussolini acheva la liquidation du régime parlementaire, en 1926 fut prononcé l'interdiction de tous les partis autres que le PNF.

En janvier 1919, en Allemagne, fut créé le “Parti allemand des travailleurs” (“Deutsche Arbeiterpartei”, DAP), lequel en février 1920 change son nom en “Parti allemand national-socialiste des travailleurs” (“Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei”, NSDAP). En 1920 également fut constitué la “Section d'assaut” (“Sturmabteilung”, SA). Adolf Hitler entra au NSDAP en septembre 1919 et fut désigné comme président du parti en juillet 1921. En novembre 1923 il entreprit une tentative de putsch qui échoua. En juillet 1932 le NSDAP devint le plus fort parti à l'Assemblée nationale [Reichstag]. En janvier 1933 Hitler fut désigné comme chancelier de l'Empire, en juillet le NSDAP fut déclaré seul parti autorisé.

Les discussions menées au sein du KPD et de l'Internationale communiste autour de la caractérisation du fascisme et de la social-démocratie jusqu'en 1933 se situaient dans ce contexte. Nous allons en évoquer quelques aspects, dans la mesure où ils sont directement liés à la question de la démocratie populaire. Quoi qu'il en soit, en vue de soumettre les orientations du KPD et de l'Internationale communiste sur ce sujet à une analyse critique, il faut en tout cas se garder d'interprétations faisant abstraction de la situation réelle dans laquelle étaient placées à la fois l'expérience pratique et l'observation théorique des militants de l'époque.

La bourgeoisie se tourne vers le fascisme, la social-démocratie lui prête secours

Du 5 novembre au 5 décembre 1922 se tient le 4e Congrès de l'Internationale communiste. Grigori Zinoviev, président de l'IC depuis sa fondation en 1919, souligne qu'il y a des points de contact entre la social-démocratie et le fascisme. Au sujet du syndicalisme fasciste il note[1]:

Un dirigeant des syndicats fascistes, Rossoni, dit ce qui suit: "Les classes moyennes ont toujours payé la note, car elles n'ont jamais pu se résoudre à surmonter toute scrupule et à ruiner la nation  cause de leurs propres intérêts. Les classes moyennes sont le cerveau de la nation, la classe de la culture et du talent. Le syndicalisme national, qui veut être un syndicalisme de la “sélection”, compte avant tout sur ces classes moyennes qui, alors que la guerre était livrée par les paysans et les travailleurs comme masse, fournissaient les cadres de nos admirables officiers. La situation actuelle du gouvernement se caractérise par le fait que le nombre des adhérents dépasse un million. Nous avons vaincu, mais la révolution n'est pas achevée. Notre révolution doit être complète, afin de pouvoir édifier l'harmonie nouvelle de la nation au nom du travail, tout en assurant la reconnaissance de la valeur du syndicalisme. Le juste profit doit être réparti entre les industries et les travailleurs." Ici vous voyez, camarades, l'idéologie du syndicalisme fasciste. C'est une idéologie petite-bourgeoise qui à vrai dire n'est pas aussi éloignée comme on le pense parfois, de celle de la social-démocratie. L'idéologie est au fond la même sous une autre forme. C'est plutôt, pourrait-on dire, la forme à la Noske de la social-démocratie dans les conditions italiennes. On pourrait assez bien formuler et argumenter cette thèse. Le fascisme moderne en Italie n'est pas si éloigné de la social-démocratie de Noske, adaptée à la situation régnant en Italie. Ce n'est pas un hasard que les réformistes, les Noskes italiens, fraternisent avec les fascistes.

[Citation dans l'original .]

Le rôle joué par les Fasci était complexe et fluctuante, suite aux rivalités entre différents courants du mouvement fasciste au cours des premières années de son développement. En 1919, Mussolini cherchait à s'associer ‑ en opposition au Parti socialiste italien (Partito socialista italiano, PSI)‑  aux luttes menées par les ouvriers: grèves, occupations d'usines, expropriations imposées localement. Lorsque le 17 mars des fascistes occupèrent l'usine “Franci e Gregorini” à Dalmine près de Bergamo, Mussolini se présenta sur les lieux, le 20 mars, et dit entre autre[2]:

Vous vous placez sur le terrain de votre classe, mais vous n'avez pas oublié la nation. [...] Vous donnez des leçons à certains industriels, en particulier ceux qui ignorent tout ce qui s'est passé ces quatre dernières années dans le monde, que la figure de l'industriel ancien, avide et exploiteur doit céder la place au capitaine d'industrie qui peut exiger le nécessaire pour lui mais n'a pas le droit d'imposer la misère aux autres créateurs des richesses.

[Citation dans l'original .]

En aout-septembre 1919 se déroula une grève importante des ouvriers de la métallurgie. Les Fasci adoptèrent une attitude de soutien. Mussolini exigea la socialisation des usines et le transfert de leur direction aux syndicats, tout en critiquant le PSI et la Confédération générale italienne du travail (Confederazione Generale Italiana del Lavoro, CGIL) comme étant des freins à la lutte de classe. En janvier 1920, Mussolini, en alliance avec d'autres dirigeants fascistes, opéra un changement de tactique, se tournant vers l'alliance avec la gauche réformiste en vue d'un socialisme national intégrant l'ensemble des "producteurs". Les “escadrons d'action” (“Squadri d'azione”) constitués par les Fasci s'attaquèrent maintenant par la violence aux travailleurs en lutte et aux militants de gauche. La police et l'administration toléraient en général les agissements des fascistes, considérant qu'ils contribuaient au maintien de l'ordre bourgeois. Finalement, en juin 1921, Mussolini, estimant que la force de la gauche était désormais brisée, préconisa des négociations avec le PSI, et le 3 aout les fascistes signèrent un accord officiel de réconciliation avec ce parti. Par ailleurs, en octobre le PSI et le Parti populaire italien (Partito popolare italiano, PPI) constatèrent leur refus d'une coopération mutuelle, ce qui écartait l'éventualité d'une alliance entre eux contre les fascistes.

Les fronts étaient clairement établis au moment de la grève générale déclarée en été 1922. Le 1er aout, le PNF annonça que, si la grève ne serait pas terminée en 24 heures, les Squadri interviendrait pour y mettre fin, et les fascistes passèrent effectivement à l'action. En janvier, les syndicats liés au PFN s'étaient regroupés dans la “Confédération nationale des corporations syndicales” (“Confederazione nazionale delle corporazioni sindacali”), dont le programme était basé sur le corporatisme, sur l'idée du dépassement des conflits de classe. Le 16 novembre 1922, Mussolini explique à ce sujet dans un discours au parlement[3]:

Qui dit travail dit bourgeoisie productive et classes travailleuses des villes et de la campagne. Ni privilèges pour la première, ni privilèges pour les dernières, mais protection de tous les intérêts qui s'harmonisent avec ceux de la production et de la Nation.

[Citation dans l'original .]

À diverses reprises, G. Zinoviev aborde le sujet de la comparaison entre fascistes italiens et social-démocratie allemande. Dans un article publié en décembre 1923 il écrit[4]:

Si on veut parler non pas de détails mais à grande échelle, c'est à dire de la victoire de la bourgeoisie sur la révolution prolétarienne mûrissante en Allemagne et sur la consolidation de la dictature bourgeoise, alors les fascistes, Seeckt et Ebert font une seule et même chose, seulement avec un certain partage du travail. Non seulement Seeckt, mais aussi Ebert et Noske sont des variantes du fascisme.

[Citation dans l'original .]

En janvier 1924, au cours des discussions entre le présidium du Comité exécutif de l'IC et des représentants du KPD concernant les évènements d'octobre 1923 (cf. dans le texte "1923‑1932: réaction et contre-attaque", les sections "“Gouvernements ouvriers” et actions insurrectionnelles"  et "Hambourg" ), G. Zinoviev s'exprime au sujet du rôle de la social-démocratie (le 11)[5].

La révolution bourgeoise est venue contre la volonté de la social-démocratie. Celle-ci était jusqu'au dernier moment pour la monarchie. La révolution bourgeoise en Allemagne a eu lieu malgré la social-démocratie et contre elle. [...]

Cinq années que dure cette démocratie bourgeoise, la social-démocratie a tout fait pour remettre progressivement à la bourgeoisie tout le pouvoir ou la plus grand part du pouvoir. En Allemagne gouvernait un bloc. Au sein de celui-ci, maintenant, le rapport des forces a changé un peu. [...] Pour parler tout à fait précisément: les choses ne sont pas aussi simples que si le fascisme régnait, mais la social-démocratie participe au règne. [...]

La situation est ainsi. Nous devons exiger de nuancer notre tactique en Allemagne, parce que la social-démocratie, c'est désormais complètement clair, est devenue une aile fasciste. C'est une social-démocratie fasciste. [...]

La social-démocratie internationale est devenue maintenant une aile du fascisme.

[Citation dans l'original .]

À l'issue de ces discussions, le Comité exécutif de l'IC adopte le 19 janvier une résolution, qui entre autre traite aussi de la social-démocratie[6]:

À l'heure actuelle les couches dirigeantes de la social-démocratie allemande ne sont rien d'autre qu'une fraction du fascisme allemand sous un masque socialiste. Elles ont remis le pouvoir d'état aux représentants de la dictature capitaliste, afin de sauver le capitalisme de la révolution prolétarienne. Le ministre de l'intérieur Sollmann a instauré l'état de siège, le ministre de la justice Radbruch a réorienté la justice “démocratique” vers la justice d'exception contre le prolétariat révolutionnaire. Le président du Reich Ebert a remis y compris formellement le pouvoir gouvernemental à Seeckt, le groupe social-démocrate au Reichstag a couvert tous ces actes, il a approuvé les lois sur les pleins pouvoirs qui ont suspendu la constitution et remis le pouvoir aux généraux blancs. Toute la social-démocratie internationale dégénère progressivement en un bras armé officiel de la dictature capitaliste. Les Turati et Modigliani en Italie, les Sakasov en Bulgarie, les Pilsudski en Pologne et les dirigeants du SPD du genre de Severing en Allemagne sont des participants directs au pouvoir gouvernemental de la dictature capitaliste. Cinq années durant les social-démocrates allemands de toute tendance ont effectué la descente progressive vers le camp de la contrerévolution. Maintenant le processus est proche de son achèvement. Le successeur légitime du gouvernement "révolutionnaire" Scheidemann-Haase est le général fasciste Seeckt. Certes il y a aussi des différences au sein du camp de la dictature capitaliste, même que peuvent se produire des différends d'importance telle que nous pouvons les mettre à profit dans notre lutte de classe. Entre Ebert, Seeckt et Ludendorff il y a des nuances. Mais les nuances au sein du camp des ennemis ne doivent pas faire oublier aux communistes allemands que la chose principale est de faire prendre clairement conscience à la classe ouvrière de ce qui est l'aspect essentiel de la chose: que dans la lutte entre capital et travail les dirigeants du SPD sont unis au général blanc pour la vie et la mort. Ce n'est pas seulement aujourd'hui que ces dirigeants de la social-démocratie allemande sont passés du côté du capital. Au fond ils se sont toujours placés près des ennemis de classe du prolétariat. Seulement maintenant cela s'est avéré de façon flagrante devant les masses, après qu'ils ont effectué le passage de la démocratie capitaliste à la dictature capitaliste.

[Citation dans l'original .]

Cette question prend une place importante dans les discussions au 5e Congrès de l'Internationale communiste, tenu du 17 juin au 8 juillet 1924. G. Zinoviev dit[7]:

Dans les pays européens les plus importants existe un problème du pouvoir, la bourgeoisie ne peut pas gouverner comme avant. Un pouvoir bourgeois nu, ouvert, pur ‑ c'est-à-dire au contraire sale ‑, classique, est actuellement impossible. Dans tout un ensemble de pays la bourgeoisie doit avoir recours à des combines, de là le "gouvernement ouvrier" en Angleterre, de là le bloc de gauche avec les socialistes en France. [...]

La bourgeoisie en Europe est contrainte à s'accrocher tantôt au fascisme, tantôt à la social-démocratie. Les fascistes sont la main droite, les social-démocrates la main gauche de la bourgeoisie. C'est cela le trait nouveau de la situation. [...]

Le plus important dans ce contexte est que la social-démocratie est devenue une aile du fascisme. [...] La II. Internationale est l'aile gauche de la bourgeoisie, un parti de la bourgeoisie amené à gouverner lui aussi.

[Citation dans l'original .]

Et les Thèses sur la tactique adoptées par le congrès expliquent[8]:

II. Le problème du pouvoir

1. Le relâchement de l'ordre bourgeois.

Malgré le fait que la première guerre mondiale impérialiste, dans sa phase finale, a déclenché une éruption énorme de mécontentement élémentaire de la part des masses, l'ordre bourgeois a quand même pu maintenir son existence pour un certain laps de temps. Les forces du prolétariat international se sont avérées comme insuffisamment organisées, les partis de la révolution prolétarienne internationale comme insuffisamment forts, par conséquent la victoire de la révolution prolétarienne à la fin de la guerre impérialiste comme impossible. Néanmoins la première guerre mondiale impérialiste a suscité des ébranlements profonds. [...]

2. Deux orientations dans la politique de la bourgeoisie mondiale.

Au cours des dernières années d'après-guerre et partiellement déjà avant la guerre ont pris forme avec toute netteté deux orientations de la politique de la bourgeoisie mondiale: une ouvertement réactionnaire et une démocratique-réformiste. [...] Dès que le sol commence à se dérober sous les pieds, que les époques “normales” de la domination assurée de la bourgeoisie menacent de se clore, que des tempêtes révolutionnaires s'annoncent visiblement et que les forces prolétariennes du renversement du pouvoir revêtent une dimension menaçante, ne peuvent manquer de se faire jour parmi les dirigeants de la classe dominante, deux systèmes: une politique qui veut briser et écraser les forces révolutionnaires en les combattant ouvertement, acharnement, avant même qu'elles aient pris consistance, et une autre politique conçue à plus long terme qui s'efforce à changer les rapports de forces en faveur de la bourgeoisie par des petites concessions et à travers la corruption des groupes se trouvant en tête de la classe ouvrière, bref, par les méthodes de la "démocratie", du pacifisme et du réformisme.

3. Entre social-démocratie et fascisme.

La bourgeoisie ne peut déjà plus gouverner par les méthodes antérieures. En cela se manifeste l'un des symptômes de la croissance lente mais certaine de la révolution prolétarienne. La bourgeoisie se sert tantôt du fascisme, tantôt de la social-démocratie. Dans les deux cas elle s'efforce de masquer le caractère capitaliste de sa domination, de la revêtir de traits plus ou moins populaires. Aussi bien les fascistes (la première période du régiment Mussolini) que les social-démocrates (la première période du régiment Noske) se mettent à disposition de la bourgeoisie au moment voulu, comme organisations de combat ouvertes de la contrerévolution, comme bandes armées, comme gardes-matraqueurs contre l'armée prolétarienne de renversement du pouvoir. En même temps la bourgeoisie cherche à procéder, avec l'aide du fascisme et de la social-démocratie, à un réarrangement des forces sociales, en produisant l'apparence d'une victoire politique de la petite-bourgeoisie et d'une participation du "peuple" à l'exercice du pouvoir.

4. La social-démocratie comme "troisième" parti de la bourgeoisie.

[...] Depuis un certain nombre d'années la social-démocratie est engagée dans un processus de transformation, d'une aile de droite du mouvement ouvrier vers une aile de la bourgeoisie, par endroits même vers une aile du fascisme. [...] Le fascisme et la social-démocratie sont (pour autant qu'il s'agisse des couches dirigeantes) la main droite et la main gauche du capitalisme moderne, qui a été ébranlé par la première guerre impérialiste et les premières luttes de la population travailleuse contre lui.

5. La social-démocratie de nouveau au pouvoir.

[...]

6. Entre terreur blanche et "gouvernements ouvriers".

Malgré la consolidation apparente du régime bourgeois son pouvoir en réalité se trouve de plus en plus sapé. La situation d'ensemble est extrêmement incertaine. Le parlementarisme va vers sa fin. De jour en jour croit pour la bourgeoisie la difficulté de se créer une position à peu près solide sur les ruines du parlementarisme ancien. [...] La bourgeoisie devra forcément jeter tantôt d'un côté tantôt de l'autre, tantôt avoir recours à la terreur blanche ouverte, tantôt tenter de s'appuyer sur un soi-disant gouvernement ouvrier.

[Citation dans l'original .]

Hermann Remmele, délégué du KPD au congrès (sous le pseudonyme de Freimuth), parle dans son intervention de "deux méthodes différentes pour atteindre le même objectif"[9]:

Social-démocratie et fascisme sont deux méthodes différentes visant à obtenir le même but. Les deux mouvements, social-démocratie comme fascisme, durant la période de la dictature capitaliste implacable, ont à remplir la même tâche, à savoir la sauvegarde et la défense de la dictature de la grande bourgeoisie sur le prolétariat, social-démocratie et fascisme sont des moyens de combat de la dictature du grand capital contre le prolétariat révolutionnaire qui lutte pour le pouvoir politique. Socialisme et fascisme ne sont donc pas des contraires, mais malgré leur dispute apparente ils sont de la même chair. [...] La nature et le rôle de la social-démocratie, la mission historique qu'elle a à remplir dans l'époque de la révolution prolétarienne, la force à se placer aux côtés du fascisme. [...]

Ce sont les ministres et préfets de police social-démocrates, qui autorisent les manifestations fascistes et interdisent les contremanifestations communistes. Ce sont les Severing, Ebert, Richter [préfet de police de Berlin à l'époque des affrontements de 1921 en Allemagne centrale], Hörsing, et comme s'appellent tous ces protecteurs social-démocrates de la dictature capitaliste, qui mobilisent en grande masse leurs troupes de police, la Reichswehr etc. pour réprimer dans le sang les contremanifestations des travailleurs, protéger les fascistes, manifester ensemble avec les fascistes.

[Citation dans l'original .]

La comparaison des textes de G. Zinoviev cités plus haut avec les thèses adoptées par le 5e congrès peut inspirer quelques remarques. Les analyses figurant dans les thèses sont pertinentes, notamment les formulations de synthèse: "La bourgeoisie se sert tantôt du fascisme, tantôt de la social-démocratie"; "Le fascisme et la social-démocratie sont (pour autant qu'il s'agisse des couches dirigeantes) la main droite et la main gauche du capitalisme moderne". Il importe de noter certains points de ces thèses, en premier lieu qu'elles mettent en parallèle les fascistes italiens et les social-démocrates allemands en tant que "bandes armées", "gardes-matraqueurs", et non pas comme incarnant un régime étatique de dictature fasciste. C'est-à-dire elles se situent dans le contexte politique du moment, et ne procèdent pas à une anticipation concernant un aboutissement hypothétique de ce qui n'était encore qu'une étape du cheminement des fascistes vers le pouvoir (y compris en Italie, bien que Mussolini ait pris une forte avance sur Hitler). Par ailleurs, le raisonnement vise à juste titre à mettre en garde contre l'idée qu'en tant qu'instrument utilisé par la bourgeoisie, le fascisme servirait l'objectif d'évincer la social-démocratie.

Quant à G. Zinoviev, il a tendance à s'égarer. "Non seulement Seeckt, mais aussi Ebert et Noske sont des variantes du fascisme." (Article de décembre 1923.) L'affirmation est entachée d'un certain manque de clarté en ce qu'il n'est pas approprié de caractériser Seeckt comme "fasciste" au sens spécifique du terme. Seeckt est l'exécutant ‑ momentanément et partiellement ‑ de la forme ouvertement dictatorial du pouvoir de la bourgeoisie; il ne représente pas un mouvement fasciste à l'instar de Mussolini et de ses semblables. Dans son discours au 5e congrès de l'IC, Zinoviev utilise la formulation figurant aussi dans les thèses adoptées par le congrès: "Les fascistes sont la main droite, les social-démocrates la main gauche de la bourgeoisie." Mais il dit aussi dans ce même discours: "la social-démocratie est devenue une aile du fascisme."

L'État instauré en Allemagne sur la base de la Constitution adoptée le 31 juillet 1919 par l'Assemblée siégeant à Weimar et entrée en vigueur le 11 aout était une république bourgeoise parlementaire. Un tel État, bien que réputé “démocratique”, exerce habituellement une répression plus ou moins accentuée, appuyée sur les forces de police, voire l'armée, contre la classe ouvrière, contre les représentants politiques de celle-ci, contre ceux qui luttent dans la défense des intérêts des travailleurs. Il serait donc erroné d'employer le qualificatif de fasciste dès qu'apparait la moindre intervention policière contre des grévistes, manifestants, militants politiques. Cependant, il est certain que la répression mise en oeuvre par l'appareil d'état contre le mouvement ouvrier en Allemagne, dans les années consécutives à la révolution de novembre 1918, dépasse largement ce cadre du “maintien de l'ordre républicain” tel qu'il est associé à la conception couramment admise de la république bourgeoise parlementaire. Il ne s'agit pas d'une simple différence quantitative dans la fréquence et l'ampleur des actions répressives. Pour la bourgeoisie le spectre de la révolution constitue à ce moment-là une menace précise, concrète, à court terme, et elle se met en ordre de bataille pour l'affronter en établissant des structures de pouvoir passant outre le régime officiel de la démocratie bourgeoisie. L'utilisation du terme fasciste à cet égard est tout à fait justifiée ‑ y compris à l'encontre des responsables du SPD qui étaient à la tête de l'exercice du pouvoir ‑ et ne peut être réfutée en faisant valoir les différences considérables que présentait, par comparaison, l'État national-socialiste instauré ultérieurement.

Voici un extrait d'un discours à l'Assemblée nationale d'Ernst Thälmann d'aout 1924, qui illustre le contexte de l'époque et les aspects qui motivaient concrètement les jugements portés par le KPD[10]:

Je me contenterai d'attirer l'attention sur un cas particulier, quelque chose qui a été prononcé à l'occasion de la foire de commémoration concernant la constitution de Weimar par un représentant de la social-démocratie, ‑ de Noir-rouge-or, cet appareil complémentaire bien connu du SPD ‑, et qui signale clairement que maintenant la social-démocratie ne rechigne pas à faire alliance avec Noir-blanc-rouge. À Breslau se tint récemment une parade du Reichsbanner Schwarz-rot-gold, où le colonel de la police Lange, un représentant de la social-démocratie, autrefois à Mecklenburg, s'est exprimé comme sui dans son discours sur la bataille de la Marne: [...] Le colonel de police Lange dit ensuite encore:

Je ne me gêne pas à dire ouvertement que moi aussi, en tant que républicain fidèle m'incline devant les drapeaux Noir-blanc-rouge, qui si souvent ont été le signe de la liberté. Quand la patrie nous appelle, alors nous serons présents, et si nous sommes unis, alors nous ne perdrons pas la prochaine bataille de la Marne. Pour ce qui est des communistes, nous en finirons avec eux. Quelques unités d'intervention de notre Schupo suffisent, pour mettre un terme à ce cauchemar.

Je pense qu'aucun représentant de la social-démocratie ne peut parler plus clairement. Ce n'est que la preuve de ce que la social-démocratie jouera le même rôle que celui que le fascisme joue déjà dans l'état capitaliste-bourgeois.

[Citation dans l'original .]

Enfin, en septembre 1924, Josef Staline dans un texte au sujet de la situation internationale traite entre autre des rapports entre la social-démocratie et le fascisme, lesquels sont désignés comme "frères jumeaux". Sachant que des références, plus ou moins fragmentaires, à cette formulation reviennent fatalement dans les débats sur la question, nous reproduisons ici l'intégralité des passages concernés[11].

Plus d'un pense que la bourgeoisie serait venue au “pacifisme” et au “démocratisme”, non pas en obéissant à la nécessité, mais par une impulsion propre, pour ainsi dire de son propre gré. En cela il est supposé que la bourgeoisie, après avoir battue la classe ouvrière dans des luttes décisives (Italie, Allemagne), se sentirait comme vainqueur et pourrait maintenant se permettre le “démocratisme”. En d'autres mots; tant que des luttes décisives étaient en cours, la bourgeoisie aurait eu besoin d'une organisation de combat, le fascisme, mais maintenant que le prolétariat est vaincu, la bourgeoisie n'aurait plus besoin du fascisme et pourrait le remplacer par le “démocratisme” comme la meilleure méthode de la consolidation de sa victoire. De là on tire la conclusion que le pouvoir de la bourgeoisie se serait stabilisé, qu'il faudrait considérer l'“ère du pacifisme” comme prolongé, la révolution en Europe par contre comme remise aux calendes grecques.

Cette supposition est complètement erronée.

Premièrement il n'est pas exact que le fascisme soit seulement une organisation de combat de la bourgeoisie. Le fascisme n'est pas seulement une catégorie de technique militaire. Le fascisme est une organisation de combat de la bourgeoisie qui s'appuie sur le soutien active de la part de la social-démocratie. Objectivement la social-démocratie est l'aile modérée du fascisme. Il n'y a pas de raison pour la supposition que l'organisation de combat de la bourgeoisie pourrait obtenir des succès décisifs dans les luttes ou dans l'administration du pays, sans le soutien active de la part de la social-démocratie. Ces organisations ne s'excluent pas mutuellement, mais se complètent mutuellement. Ce ne sont pas des antipodes, mais des frères jumeaux. Le fascisme est le bloc politique informel de ces deux organisations fondamentales, qui s'est réalisé dans les conditions de la crise d'après-guerre de l'impérialisme et est orienté vers la lutte contre la révolution prolétarienne. La bourgeoisie ne peut se maintenir au pouvoir sans la présence d'un tel bloc. C'est pourquoi ce serait une erreur de croire que le “pacifisme" signifie la suppression du fascisme. “Pacifisme” dans les conditions actuelles signifie consolidation du fascisme, tout en plaçant à l'avant-scène son aile social-démocrate, modérée.

[Citation dans l'original .]

L'enjeu central: l'exercice du pouvoir en faveur de la bourgeoisie

Rappelons que le 5e Congrès de l'Internationale communiste se tint dans une période où la bourgeoisie avait réussi à mettre un terme relatif aux affrontements de classe ouverts tels qu'ils étaient survenus périodiquement auparavant. À partir de 1928, les manifestations des contradictions s'accentuèrent de nouveau ‑ confirmant les mises en garde formulées par J. Staline dans le texte cité ci-dessus ‑ et le KPD fut amené à réévaluer constamment son orientation à la lumière de l'évolution dramatique de la situation. En ce qui concerne la prise en compte du contexte concret quant aux évènements politiques, signalons que désormais, B. Mussolini avait achevé l'instauration de la dictature fasciste en Italie, par l'élimination du parlement et la mise en place d'un système à parti unique.

Le 6e Congrès de l'Internationale communiste se tient du 17 juillet au 1er Septembre 1928. Dans une intervention, Thälmann insiste sur les agissements des "commandos" social-démocrates contre les communistes[12].

Il est intéressant et caractéristique que les contradictions internes et externes de stabilisation capitaliste relative se reflètent également dans la nature et l'évolution de la social-démocratie. L'évolution du réformisme vers le social-fascisme est un phénomène qu'on peut illustrer dans différents pays par différents exemples. Par exemple en Allemagne, où le réformisme est le principal appui de la bourgeoisie et le sera aussi dans les prochaines années, si le mouvement communiste ne se renforce pas plus encore. Des commandos, des dénommées troupes de choc, du Reichsbanner sont intervenus quotidiennement au cours de la campagne électorale contre la Ligue rouge des combattants du front et contre les communistes. En Pologne nous pouvons constater le même fait. À Varsovie le 1er Mai, à l'occasion du grand défilé héroïque des travailleurs, la police fasciste a été soutenue par les troupes de choc du PPS, en tuant et blessant durant cette bataille contre les travailleurs révolutionnaires plusieurs centaines de manifestants travailleurs. Selon un article de la “Correspondance internationale” ils ont même visé les cadres révolutionnaires de la classe ouvrière en faisant irruption dans les usines et là ils ont tabassé les communistes.

[Citation dans l'original .]

Thälmann conclut[13].

La bourgeoisie se sert de deux méthodes pour l'oppression et l'asservissement de la classe ouvrière: du réformisme et du fascisme. Avec la croissance du mouvement communiste et l'influence en baisse du réformisme les moyens de la démocratie bourgeoise aussi ne suffiront plus pour l'oppression de la classe ouvrière. Alors elle emploiera des méthodes fascistes renforcées.

[Citation dans l'original .]

Le programme adopté par le 6e congrès analyse les positions respectives du fascisme et de la social-démocratie, et ceci d'une façon qui met en lumière une différence essentielle entre le contexte politique de l'époque et celui auquel nous sommes habitués plus récemment[14].

À côté de la social-démocratie, qui aide la bourgeoisie à opprimer la classe ouvrière et à endormir la vigilance des prolétaires, se dresse le fascisme. [...] En fonction de la conjoncture politique du moment, la bourgeoisie utilise autant les méthodes fascistes que les méthodes de la coalition avec la social-démocratie, alors que la social-démocratie elle-même joue, en particulier aux heures critiques pour le capitalisme, un rôle fasciste. Au cours de son développement la social-démocratie manifeste des tendances fascistes, ce qui ne l'empêche pas, en cas de changement de la conjoncture politique, de se poser comme parti d'opposition face au gouvernement bourgeois. Fascisme et coalition avec la social-démocratie sont tous les deux des méthodes inusitées pour le capitalisme normal. Elles sont des symptômes de l'existence d'une crise générale du capitalisme, et sont utilisées par la bourgeoisie pour entraver l'avance de la révolution.

[Citation dans l'original .]

Si l'on se réfère aux successeurs actuels des partis social-démocrates de l'époque, tels que le Parti socialiste en France ou le Labour Party en Grande-Bretagne, un gouvernement de coalition, voire homogène, incluant ces partis n'a évidemment rien d'inhabituel. C'est qu'aujourd'hui ce sont des partis bourgeois tout court, alors qu'à l'origine c'étaient des partis ouvriers au service de la bourgeoisie, ce qui change les données du problème. Ce fait motive aussi l'insistance avec laquelle le KPD souligne l'aggravation de l'orientation réactionnaire de ces partis et leur implication croissante dans les instances gouvernementales.

Au 12e congrès du KPD tenu du 8 au 15 juin 1929, est adoptée une résolution "sur la situation politique et les tâches du KPD". Voici des extraits d'un passage concernant le rôle de la social-démocratie[15]:

V. Le rôle du réformisme et la crise du SPD

18. La social-démocratie en tant que parti dirigeant du gouvernement de coalition joue un rôle largement plus réactionnaire que dans le temps passé. En ce qui concerne autant la masse des électeurs que les organisations du parti, son centre de gravité se déplace de plus en plus du prolétariat vers la petite-bourgeoisie, vers l'aristocratie ouvrière et la bureaucratie ouvrière de ka république bourgeoise, lesquels déterminent le cours du réformisme. Sur la base des profits monopolistiques des trusts, des profits extra résultant de l'exportation de capitaux ainsi que de la division du travail changée dans les entreprises rationalisées, ces dernières années s'est formée une nouvelle aristocratie ouvrière. Cette couche supérieure corrompue, embourgeoisée d'indicateurs, surveillants, fonctionnaires d'état et syndicaux bien payés etc. joue un rôle hostile à la révolution important. Dans la mesure où les contradictions de la stabilisation capitaliste s'accentuent, où les luttes de masses prennent de l'ampleur, où le prolétariat se radicalise, la politique de la social-démocratie, conformément aux besoins de la bourgeoisie impérialiste, devient plus hostile aux travailleurs et plus contrerévolutionnaire. En Allemagne le processus d'imbrication de la direction réformiste dans l'appareil d'état connu des progrès plus grands que dans n'importe quel autre pays. Les banques ouvrières social-démocrates deviennent une partie constitutive des trusts du capital financier. La machine réformiste du parti et des syndicats s'est fondue avec l'appareil d'état bourgeois par des formes de transition innombrables. Les dirigeants social-démocrates occupent les postes gouvernementaux les plus divers, manient le système de conciliation, commandent la police etc. [...] La fusion du réformisme avec le pouvoir d'état bourgeois trouve son expression suprême dans la politique du social-impérialisme (programme de défense du SPD qui, sous couvert de la "neutralité", de la "défense nationale" et de la "protection des frontières", de la "démocratisation et républicanisation de la Reichswehr", de la prévention de guerres au moyen de sentences arbitrales de la Société des Nations, se prononce inconditionnellement en faveur de la Wehrmacht bourgeois-capitaliste et de la guerre d'intervention contre l'Union soviétique) et du social-fascisme (application de méthodes de terreur fasciste contre le prolétariat révolutionnaire, empêchement de grèves par la violence à l'aide de la police et des employeurs, commandos et sections d'assassins du Reichsbanner, bain de sang du 1er mai à Berlin, mesures d'interdiction de la police et justice de classe).

[Citation dans l'original .]

Et des thèses adoptées au 10e Plenum du Comité exécutif de l'IC tenu en juillet 1929, reprennent une appréciation similaire[16]:

Toutes les conquêtes sociales que la classe ouvrière a imposées par des décennies de lutte et en particulier dans le période de l'essor de la vague révolutionnaire 1918/20, ont été ou bien abolies ou il menace le danger qu'elles soient abolies (la journée de huit heures, l'assurance sociale, les allocations pour les sans-emploi, la législation de travail, le droit de coalition et de grève). Dans quelques pays le démantèlement des conquêtes sociopolitiques du prolétariat s'effectue sous le masque hypocrite de nouvelles "réformes" [...] avec l'aide de la social-démocratie. La politique de la strangulation économique de la classe ouvrière va de pair avec le renforcement de la réaction politique: la fascisation de l'appareil d'état de la bourgeoisie, l'accentuation des représailles et de la terreur blanche, des coups d'état fascistes avec le soutien du capital mondial [...] sont à l'ordre du jour. Au vu des contradictions impérialistes qui s'approfondissent et de l'accentuation de la lutte de classe, le fascisme devient dans une mesure croissante une méthode de domination toujours plus répandue de la bourgeoisie. Une forme particulière du fascisme dans les pays avec des partis social-démocrates forts est le social-fascisme, qui de plus en plus souvent est employé par la bourgeoisie comme moyen de paralyser l'activité des masses dans la lutte contre le régime de la dictature fasciste.

[Citation dans l'original .]

Au 12e Congrès du KPD, E. Thälmann développe concrètement cette question[17].

Il n'y a aucun doute sur la perspective que le gouvernement MacDonald continuera la politique du gouvernement conservateur avec d'autres méthodes, mais selon la même ligne de base. Alors que le premier gouvernement en 1924 n'était à la barre que pendant quelques mois et pouvait se constituer une situation relativement favorable grâce à l'absence de grandes luttes économiques et à la conclusion du traité avec l'Union soviétique, le gouvernement Labour actuel, comme conséquence des contradictions et difficultés accrues continuera l'orientation des conservateurs en l'accentuant et se démasquera ainsi d'autant plus rapidement aux yeux des masses travailleuses. Par ses mesures réactionnaires elle contribuera à l'intensification ultérieure de la lutte de classe en Angleterre et ouvrira à notre Parti communiste la perspective d'une conquête sérieuse des masses de travailleurs déçues par la pratique du gouvernement MacDonald.

Le gouvernement de coalition social-démocrate en Allemagne, non seulement continue l'orientation du bloc bourgeois, mais il a renforcé encore dans différents domaines l'activité réactionnaire du bloc bourgeois, amplifié encore l'offensive contre le prolétariat. L'évolution en Angleterre se déroulera de la même façon. Nous pouvons déjà constater le fait que maintenant plusieurs représentants du Parti libéral sont passés au Parti travailliste, et naturellement ils l'ont fait parce qu'ils espèrent mieux faire aboutir l'oppression du prolétariat dans ce parti plutôt que dans le Parti libéral.

[...]

Depuis lors, les rapports économiques se sont décalés. Les rapports entre les classes sont également devenus différents, et ainsi la social-démocratie ne joue plus un rôle passif comme cela ressortait encore des Thèses d'Essen au sujet de la question de la participation de la social-démocratie[18], mais elle constitue la pionnière la plus active de l'impérialisme allemand, de sa politique de guerre contre l'Union soviétique, sa politique d'oppression vis-à-vis de la classe ouvrière.

[Citation dans l'original .]

Devant le présidium élargi du Comité exécutif de l'IC, en février 1930, E. Thälmann résume les positions du SPD de la manière suivante[19].

À chaque accentuation révolutionnaire la social-democratie entre au gouvernement. En 1919 elle est entrée au gouvernement pour réprimer la révolution; en 1923 elle est entrée au gouvernement pour mettre en oeuvre, par la loi d'habilitation, la répression du prolétariat en Saxe, Hambourg et d'autres régions d'Allemagne. Maintenant que le plan Young et sa mise en oeuvre sont à l'ordre du jour, la social-démocratie constitue le facteur le plus actif de la bourgeoisie dans la lutte contre le prolétariat révolutionnaire et dans les préparatifs de guerre contre l'Union soviétique. Il y a quelques jours le "Vorwärts" a écrit qu'on devrait enclencher la rupture des relations diplomatiques entre l'Allemagne et l'Union soviétique. Ces jours-ci une lettre a été adressée à la commission de droit pénal du Reichstag allemand, par le ministre de l'intérieur du Reich, le social-démocrate Severing, dans laquelle il attirait l'attention sur le renforcement des troubles communistes, mentionnait le cassage de vitre chez le "Vorwärts" et exigeait l'adoption immédiate d'une loi de protection de la république. Je pense, ces deux exemples montrent que la social-démocratie d'un côté soutient de la façon la plus véhémente les nouveaux préparatifs de guerre contre l'Union soviétique et d'un  autre côté tente de réprimer le front de classe révolutionnaire par tous les moyens brutaux.

[Citation dans l'original .]

E. Thälmann, dans l'intervention au 6e congrès de l'IC citée plus haut, dénonce les prises de positions de certains dirigeants social-démocrates, explicitement favorables aux fascistes italiens[20].

Et le dernier fait qui prouve à quel point les dirigeants de la social-démocratie s'accommodent du fascisme, est l'apparition de Thomas au congrès syndical fasciste en Italie cette année. Thomas, qui n'est pas n'importe quel un social-démocrate mais une des personnalités les plus représentatives de la 2nd Internationale et de l'Internationale syndicale d'Amsterdam, et qui en tant que tel est président du Bureau international du travail, a dit entre autre que l'Italie fasciste est "un pionnier de la justice vis-à-vis de tous les ouvriers". De plus il a affirmé que le gouvernement fasciste assure aux ouvriers les bienfaits de réformes justes" et que les expériences fascistes italiennes "peuvent devenir très utiles aussi pour les autres pays". En outre il a dit que pour Mussolini "il n'y a qu'une seule passion: assurer du travail aux travailleurs, augmenter leur bienêtre et leur situation morale et spirituelle". Et enfin il affirma que le socialisme et le fascisme se distinguent simplement par la méthode, mais que les deux défendent les intérêts des travailleurs. Ces quelques faits illustrent de la façon la plus nette, à quel point ces dirigeants se sont déjà abaissés.

[Citation dans l'original .]

Dans le même sens, E. Thälmann dans l'intervention au 12e Congrès du KPD citée plus haut, le 10 juin 1929, analyse le Congrès du SPD tenu du 26 au 31 mai à Magdeburg. Il faut noter que juste avant s'étaient produits les affrontements à l'occasion du 1er mai, à Berlin. (Pour le contexte, cf. dans le texte "1922‑1932: réaction et contre-attaque", la section "Le KPD cible du SPD" .) Thälmann cite le discours prononcé par le président du SPD, Otto Wels, à l'ouverture du congrès. Celui-ci dit[21]:

Non, notre tâche est de renforcer la démocratie et de protéger la république. Si les ennemis de la république réussissaient à infliger à la démocratie en Allemagne des dommages graves à tel point qu'un jour il ne resterait plus d'autre issue que la dictature, alors, camarades du Parti, que Stahlhelm, que les national-socialistes, que leurs frères communistes de Moscou sachent une chose: la social-démocratie et les syndicats en tant que représentants de la grande masse du peuple allemand, solidement uni dans leurs organisations, conscients de leurs responsabilités dans l'action, et en maintenant une discipline inébranlable, sauraient aussi manier la dictature malgré leur position fondamentalement démocratique. Le droit à la dictature leur incomberait à eux seuls, et à personne d'autre, et c'est chez eux et eux seuls que se trouverait la garantie pour un retour à la démocratie après avoir surmonté des difficultés que nous n'appelons pas de nos voeux.

[Citation dans l'original .]

Thälmann cite également des paroles de Wilhelm Dittmann. Il rapporte des propos de celui-ci de la manière suivante[22]:

Dans l'état ancien nous vivions vis-à-vis de la police dans une guerre de guérilla constante, non pas parce que nous considérions comme révolutionnaire d'attaquer la police mais parce que la police était dressée en opposition à la classe ouvrière. Aujourd'hui nous avons des ministres de la police et préfets de police social-démocrates et de nombreux fonctionnaires comme membres du Parti. Donc, aujourd'hui, est-ce que la justification est encore valable selon laquelle la police est un instrument de la domination de classe capitaliste?

[...]

Nous ne vivons plus dans le capitalisme pur [...] Par conséquent la pouvoir d'état émane du peuple, et le peuple a toutes les chances, dans la mesure où sa vision soit éclairée, d'empêcher que l'état ne défende unilatéralement que les intérêts de la classe capitaliste.

[Citation dans l'original .]

Et voici comment Thälmann commente la signification de ce congrès du SPD[23]:

Au congrès de Magdeburg, les dirigeants de la social-démocratie se sont déclarés ouvertement en faveur du social-fascisme. [...] Chaque ouvrier doit réaliser [...] que le social-fascisme consiste à frayer le chemin à la dictature fasciste sous couvert de la soi-disant démocratie pure.

[...]

Nous en tant que parti communiste devons donner aux masses prolétariennes une réponse claire par rapport à cela. Il faut déployer une agitation intensive au plus haut point relative au fait que cette dictature social-fasciste ne sera qu'une dictature de la bourgeoisie contre la classe ouvrière aux fins de l'oppression économique et politique la plus accentuée des masses travailleuses. Sous la dictature social-fasciste, Wels et la social-démocratie défendront les intérêts de la bourgeoisie tout comme sous la démocratie bourgeoise, qui n'est rien d'autre que la dictature voilée de la bourgeoisie. La différence résidera seulement en ce qu'ils le feront par les moyens beaucoup plus brutaux du régime fasciste de bourreaux, ce qui cependant ouvrira les yeux aux travailleurs et les poussera à renverser sous la direction du Parti communiste la dictature social-fasciste et à instaurer leur propre dictature prolétarienne, c'est-à-dire la véritable démocratie prolétarienne.

[...]

Le congrès de Magdeburg signifie pour nous une confirmation de la fascisation du Parti social-démocrate. Le trait caractéristique du congrès de Magdeburg était que pas une seule voix de protestation ne s'est levée contre les assassinats perpétrés par Zörgiebel à l'encontre de la classe ouvrière de Berlin, ni contre l'interdiction du RFB et de la presse communiste. Nous devons voir qu'au moment actuel ‑ et particulièrement durant l'évolution prochaine ‑ la social-démocratie n'est pas seulement le plus grand ennemi du communisme dans le mouvement ouvrier, mais le levier le plus fort du mouvement social-fasciste, des mesures réactionnaires dans tous les domaines de la vie sociale.

[Citation dans l'original .]

Le KPD a raison de dénoncer le fait que l'orientation du SPD comporte des aspects social-fascistes. Il est juste de considérer que la social-démocratie au gouvernement ne serait pas un élément favorable à la démocratie, mais un facteur de mise en oeuvre de la fascisation. Cependant les analyses du KPD sont parfois marquées par une certaine surévaluation de la perspective concernant une éventuelle instauration d'un gouvernement de dictature fasciste en alliance avec le SPD. Ainsi la tournure affirmative dans la citation ci-dessus: "Sous la dictature social-fasciste, Wels et la social-démocratie défendront les intérêts de la bourgeoisie...".

De l'intervention d'E. Thälmann au 12e Congrès du KPD, nous avons extrait jusqu'ici quelques passages mettant en lumière certaines caractéristiques réelles de la situation que devait affronter le KPD. Pris dans son ensemble, l'exposé n'est pas exempt de confusions dans l'argumentation. Il inclut par exemple l'affirmation suivante[24]:

Partout, la social-démocratie est devenue le levier le plus fort du développement fasciste, cela, non seulement, est prouvé par la pratique des gouvernements de Severing et Zörgiebel en Allemagne, l'action du gouvernement de MacDonald en Angleterre le prouvera aussi.

[Citation dans l'original .]

En toute rigueur la caractérisation de la social-démocratie comme "plus fort levier" est pour le moins ambigüe, sinon contestable. En Allemagne, il y a bien une tendance de la bourgeoisie à s'orienter vers un régime fasciste, et ceci selon le double axe de l'appui sur le mouvement fasciste déclaré, incarné par le NSDAP, et du recours à la social-démocratie ‑ à la fois complice et acteur direct ‑ pour camoufler ses projets. Cependant, il semble que dans l'analyse développée par Thälmann il y ait ici une tendance à généraliser abusivement le cas précis de l'Allemagne.

Toujours est-il qu'E. Thälmann a doublement raison quand il réitère le rejet des positions qu'avaient été défendus au 11e Congrès du KPD tenu en mars 1927 et après, par le groupe désigné comme “conciliateurs” [“Versöhnler”][25]:

Déjà lors du congrès d'Essen nous avons dans différents documents attiré l'attention sur l'évolution social-fasciste de la social-démocratie. Dans les débats avec les conciliateurs à l'occasion des élections de mai, ceux-ci ont soutenu la conception que la social-démocratie au gouvernement fournit une certaine garantie contre le fascisme et qu'au stade actuel la démocratie bourgeoise serait le danger principal. Je cite le document devenu “historique”, la plateforme des conciliateurs au congrès, qu'ils n'ont pas retirée jusqu'ici. Là il est dit entre autre:

Le trait caractéristique de la situation actuelle consiste à ce que la bourgeoisie pour l'instant s'efforce à imposer sa politique impérialiste non pas par des méthodes fascistes ni dictatoriales, mais en liaison étroite avec la social-démocratie sur le terrain de la démocratie capitaliste.

[Citation dans l'original .]

Une partie importante du rapport d'E. Thälmann au Comité central du KPD, au sujet du présidium du Comité exécutif de l'IC de février 1930, est consacrée à une critique de ce qu'il décrit comme la "tendance de vouloir qualifier tous les phénomènes de la vie politique comme “social-fascisme”", survenue depuis le 12e Congrès du KPD de juin 1929[26]:

[...] Au sujet de cette problématique il est nécessaire de faire état de ces exagérations ou ‑ je vais un pas plus loin ‑ des “théories” les plus récentes sur le social-fascisme, telles qu'elles s'expriment dans le Parti.

Le congrès de Wedding du Parti n'a-t-il pas donné sur cette question par ces résolutions une formulation claire et précise? En particulier vis-à-vis de ceux qui ‑ comme les conciliateurs ‑ à l'époque niaient encore les tendances fascistes au sein de la social-démocratie et qui contestaient même l'évolution de la social-démocratie vers le social-fascisme. Nous avons le plus sévèrement combattu sur le fond cette théorie erronée. Malheureusement cette position opportuniste de droite a trouvé un pendant dans nos propres rangs, avec la tendance de vouloir qualifier tous les phénomènes de la vie politique comme "social-fascisme".

Certes, le social-fascisme est le fantassin de la dictature fasciste. Or le social-fascisme n'est pas seulement une théorie mais correspond aussi à une vie politique pratique où aux côtés d'une direction contrerévolutionnaire on peut observer des cadres d'entreprise et des travailleurs social-démocrates en tenant compte de spécificités variées du contexte dans l'entreprise, des sans-emploi etc. Un parti qui nie ces faits et mettrait une théorie particulière à la place des résolutions du congrès, ne pourra pas remplir sa mission historique de la lutte pour conquérir la majorité du prolétariat. Une telle direction aussi devra ultérieurement rendre des comptes devant l'ensemble des membres et devant la situation historique.

Nous sommes contraints de soumettre au Comité central quelques faits, afin de montrer jusqu'où les déviations ont déjà pénétré dans nos propres rangs. Ce dernier temps a paru toute une série d'articles dans l'ensemble de la presse du Parti, des appels et informations du Parti, des notices etc., qui sont totalement intenables.

Par exemple dans un article "Nous et les travailleurs social-démocrates", qui ces derniers jours a circulé dans la presse du Parti, il est dit entre autre ce qui suit:

"Il est clair que notre confrontation avec le social-fascisme ainsi qu'avec la bourgeoisie, dont il est le valet le plus fidèle, ne peut terminer à une quelconque table de négociation, mais uniquement sur les champs des batailles décisives et devant les tribunaux révolutionnaires de la république allemande. Et naturellement cela vaut du petit membre de conseil d'entreprise qui dans son entreprise dénonce à l'entrepreneur des travailleurs communistes pour être nommé contremaitre à titre de récompense, exactement pareil que pour ses grands frères Severing, Zörgiebel etc."

Camarades! La question pour nous n'est quand même pas aussi simple que certains camarades se l'imaginent dans leur tête. Dans cet article les social-démocrates, qu'ils soient  ministres, préfets de police, directeurs de banque, fonctionnaires communaux, bonzes syndicaux, contremaitres, maitres-artisans et membres de conseils d'entreprises appartenant aux syndicats libres dans l'industrie, etc., forment une couche sociale unifiée, homogène. Les modifications des conditions sociales de classe dans la situation actuelle ne sont pas abordées; c'est pourquoi aussi il n'y a pas la compréhension des décalages que subit la structure sociale, et auxquels la social-démocratie non plus n'échappe pas. De là aussi la grande impuissance conduisant à reporter la "confrontation avec le social-fascisme ainsi qu'avec la bourgeoisie" à des batailles décisives ultérieures et aux tribunaux révolutionnaires. Unr négation de notre travail de masse en direction d'une partie du prolétariat aurait fatalement aussi des conséquences graves pour notre politique révolutionnaire.

Et ensuite il est dit dans un autre article "Des fronts clairs, en bas comme en haut":

"Le petit cadre est un élément important, voire le plus important, de l'appareil social-démocrate, qui s'est transformé en un composant essentiel de l'appareil d'état social-fasciste. Il peste, mais justement en pestant, il aide à faire tourner la boutique. [...]

C'est pourquoi notre feu roulant visant les grands Zörgiebel a du succès seulement s'il est relié en même temps à une attaque prenant d'assaut les cadres inférieurs embourgeoisés. Sans la moindre hésitation nous devons nettoyer les rangs prolétariens dans l'entreprise et dans le syndicat et les autres organisations de masse, de tous les éléments pourris. Qui est encore au SPD est pourri et doit dégager ‑ aussi radical qu'il puisse tenter d'apparaitre."

Par là, toute notre application de la tactique de front uni d'en bas, nos résolutions du congrès de Wedding se trouvent carrément jetées par-dessus bord.

[...] Puis il y avait différents articles, dans lesquels est posé le slogan: "Chassez les social-fascistes des fonctions dans les entreprises et les syndicats!" Dans l'article suivant la chose était encore accentuée et il était dit: "Chassez les social-fascistes des entreprises et des syndicats!" Avant: "Chassez-les des fonctions", et maintenant: "Chassez-les des entreprises et des syndicats", et finalement la "Jeune Garde" trouve le slogan "Chassez les social-fascistes des entreprises, des agences pour l'emploi et des écoles professionnelles!" Comment voulez-vous les chasser des entreprises et des agences pour l'emploi? Malheureusement la bourgeoisie et très souvent avec elle, les membres social-fascistes des conseils d'entreprise chassent les communistes des entreprises, quand ceux-ci n'ont pas assez de base de masse et pas assez d'autorité parmi les masses, parmi le personnel.

Dans un autre article sur les élections des conseils d'entreprise, qui a fait le tour de toute la presse, les membres social-démocrates des conseils d'entreprise sont assimilés à Noske, Severing et Zörgiebel.

Un tel langage est vraiment absurde. Cela signifie faire bénéficier les Zörgiebel, Severing, Noske grâce à nous d'une décharge par rapport à leurs actes et procédés sanguinaires et contrerévolutionnaires, c'est-à-dire, donc, dans les questions de la vie pratique, du développement politique général. Cela signifie ignorer tout simplement la diversité des conditions relatives aux différentes fonctions que les social-démocrates ont au sein de l'état, dans les entreprises et les organisations de masse. Aujourd'hui, où cinq millions se trouvent dans les syndicats, des millions dans les organisations sportives et des millions d'hommes dans d'autres organisations, nous devons employer les méthodes de mise à profit de la légalité, de la souplesse, de l'approche au cas par cas, d'étape en étape, selon ce que chacun a dans la tête, pour gagner les travailleurs à nous. La composante de la social-démocratie que nous désignons comme aristocratie ouvrière sera perdue pour la révolution en majeure partie.

[...] Camarades! Si dans nos résolutions, que nous soumettrons, nous reprenons les formulations des décisions du présidium élargi du CEIC, c'est parce que des divergences et différences d'opinion existaient dans nos propres rangs et parce qu'il est de notre devoir de traiter les causes des erreurs ayant été commises. Je donnerai lecture de la formulation peut-être la plus importante ‑ non pas pour effectuer un nouveau tournant dans notre tactique, mais pour établir la garantie que le tournant du congrès de Wedding soit mis en oeuvre dans la pratique avec des méthodes nouvelles et une énergie nouvelle:

"Le plénum du CC constate la nécessité d'oeuvrer beaucoup plus fortement que jusqu'ici pour la réalisation du front uni révolutionnaire par en bas, pour l'isolement des dirigeants social-fascistes et l'intégration étendue des travailleurs social-démocrates dans le front de lutte révolutionnaire. Pour remplir cette tâche il est requis de faire la distinction entre les dirigeants contrerévolutionnaires du SPD, les cadres inférieurs dans les entreprises et les simples travailleurs dans les entreprises ainsi que les sans-emploi."

[...] Je mentionnerai la brochure qui vient de paraitre sous le titre: "Qu'est-ce que le social-fascisme?" Ici la question est formulée correctement. Il est dit entre autre dans la brochure:

"Pour tenir en échec les efforts en faveur de la division parmi les travailleurs, les travailleurs ayant une conscience de classe doivent comprendre leur tâche en tant que dirigeants des masses d'exploités et opprimés. Ils ne doivent ni se laisser bâillonner par les statuts syndicaux réactionnaires ni éluder le combat contre le social-fascisme au sein des syndicats. Ils doivent faire tous les efforts pour intégrer dans le front de la lutte de classe révolutionnaire justement les couches les plus exploitées. Contre l'aristocratie ouvrière et la bureaucratie corrompues nous exhortons justement les couches inférieures du prolétariat qui souffrent le plus sous l'exploitation capitaliste, les travailleuses, jeunes travailleurs, les sans-emploi etc. Les communistes mènent une lutte obstinée pour chaque position dans les syndicats, afin de s'en servir contre la bureaucratie social-fasciste dans l'intérêt des masses travailleuses."

[Citation dans l'original .]

Néanmoins, il faut bien dire que les "exagérations" critiquées par Thälmann sont liées directement au 12e Congrès du KPD, puisqu'elles apparaissent déjà dans le "Manifeste aux masses travailleuses en Allemagne" adopté à cette occasion[27]:

Terminez-en avec le parti de la trahison et de l'assassinat envers les travailleurs, avec le SPD! Chassez les agents du social-fascisme de tous les postes de cadre dans les entreprises et les syndicats!

[Citation dans l'original .]

Ce qui ressemble tout de même fortement à certaines des formulations que Thälmann cite pour les critiquer, par exemple "Chassez les social-fascistes des fonctions dans les entreprises et les syndicats!"

L'orientation du KPD face au renforcement des national-socialistes

Les accusations portées par le KPD contre le SPD ne relèvent nullement d'une vision unilatérale de la situation. Ainsi par exemple E. Thälmann, en mars 1927, souligne également les agissements accrus des national-socialistes[28]:

Les groupements fascistes se réorganisent et renforcent et pénètrent dans les entreprises sous les formes les plus diverses de ce qu'on appelle fascisme d'entreprise. Aujourd'hui le Stahlhelm ‑ sans parler des différents autres groupements nationalistes comme par exemple le Kyffhäuserbund etc. ‑ comme organisation la plus importante du fascisme, non seulement avance vers la diffusion d'une idéologie national-socialiste dans des rassemblements d'agitations, mais il va dans les usines pour atteler les travailleurs au processus de la rationalisation capitaliste, pour les rendre malléables vis-à-vis de la politique de la bourgeoisie, pour exploiter plus sévèrement les travailleurs avec des méthodes fascistes. C'est cela la ligne du fascisme d'entreprise.

[Citation dans l'original .]

Et en juin 1929[29]:

Nous voyons aussi un mouvement fasciste croissant en Allemagne, un développement renforcé du fascisme d'usine, des organisations de “défense” fascistes, l'apparition active des national-socialistes dans toutes les parties d'Allemagne, leurs succès lors des élections en Sachsen. Les formes et méthodes comment le fascisme dans les différentes régions cherche à arriver au pouvoir, sont différentes, mais partout il n'apparait pas seulement comme un instrument puissant au plus haut point de l'oppression des travailleurs, mais aussi comme précurseur pour la guerre contre l'Union soviétique.

[Citation dans l'original .]

Parlant du “fascisme d'usine” [“Werkfaschismus”], E. Thälmann se réfère aux efforts déployés par les national-socialistes pour s'implanter dans les entreprises. Dans cet objectif, ils mirent en oeuvre la “HiB-Aktion” (“Hinein in die Betriebe!”, c'est-à-dire “Allons-y, entrons dans les entreprises”) et créèrent des groupes dans les entreprises (NSBO) pour contrecarrer l'action du mouvement révolutionnaire dans les lieux de travail. Parallèlement les employeurs favorisèrent dans les entreprises l'action d'autres organisations liées à de degrés divers aux national-socialistes (Casque d'acier [Stahlhelm], Secours technique [Technische Nothilfe], etc.).

Néanmoins, le KPD met constamment en relation le double aspect de ces tendances réactionnaires portées parallèlement par les national-socialistes et les social-démocrates.

Ainsi par exemple E. Thälmann en février 1930[30]:

Naturellement la bourgeoisie elle aussi ‑ comme la bourgeoisie dans tous les autres pays ‑ de se servir de deux méthodes: de la méthode du social-fascisme et de la méthode du fascisme. Nous constatons que ce tout dernier temps en Allemagne, au côté du social-fascisme le national-fascisme s'est accru ‑ le national-fascisme qui fournit des bataillons qui se lancent contre le front de classe révolutionnaire avec des armes meurtrières, le social-fascisme qui, avec les préfets de police social-démocrates et les social-fascistes au gouvernement, au moyen de la police réprime dans le sang les sans-emploi et les travailleurs dans les rues. Je pense que nous voyons ici une imbrication étroite entre le social-fascisme et le fascisme dans le développement général, qui est de la plus haute importance aussi pour les autres pays. Quand par exemple dernièrement un représentant du national-fascisme est entré au gouvernement de Thüringen, cela prouve que progressivement le national-fascisme s'écarte de son agitation effrénée d'origine et est chargé dans le cadre de la constitution de la république allemande de tâches en vue de la mise en oeuvre du plan Young similaires à celles imparties au social-fascisme. En particulier l'évolution la plus récente en Allemagne montre une fusion progressive du social-fascisme avec le national-fascisme. Naturellement le national-fascisme peut gagner du terrain en Allemagne seulement parce que le social-fascisme lui fraye le chemin. Nous avons deux faits caractéristiques qu'on pourrait confronter pour prouver cela: l'interdiction de la Ligue rouge des combattants du front et de l'Antifa et le maintien des organisations fascistes en Allemagne. Non seulement le maintien des organisations fascistes en est une preuve, mais aussi le fait que le gouvernement engage des mesures pour consolider sa propre armée de guerre sur la base des organisations fascistes. On peut dire que le social-fascisme est le fantassin de la dictature fasciste. Je pense que notre parti frère autrichien n'a pas du tout suffisamment prêté attention à ce fait dans le développement du fascisme. Cette fusion du social-fascisme et du national-fascisme, qui en Autriche montre d'autres formes qu'en Allemagne, revêtira aussi dans d'autres pays des formes similaires. À mesure que se renforcent les actions révolutionnaires de masse, qui mènent à l'aggravation de la crise politique, les méthodes de répression social-fascistes contre le prolétariat deviennent massives et agressives.

[Citation dans l'original .]

Au-delà des références factuelles, E. Thälmann souligne que le rôle accru joué par les national-socialistes repose sur des aspects politiques fondamentaux. Voici l'analyse qu'il développe devant le plénum du Comité central du KPD tenu du 15 au 17 janvier 1931[31]:

Non seulement la politique de la social-démocratie a-t-elle frayé le chemin aux nazis, mais le rôle actuel du social-fascisme est vraiment celui d'une police auxiliaire du fascisme. [...] D'un autre côté, en rapport avec toutes les questions de la politique étrangère mais aussi en partie de la politique intérieure, les nazis fournissent la base de masse extraparlementaire décisive pour la bourgeoisie concernant la mise en oeuvre de la politique fasciste. [...]

Avec l'aiguisement révolutionnaire croît l'importance pour la bourgeoisie, de la contrerévolution armée comme mouvement de masse. Or seulement les nazis peuvent apporter celle-ci dans des proportions déterminantes, pas la social-démocratie. En effet même à l'époque de Noske, la contrerévolution armée d'alors était certes politiquement déployée et dirigée par la social-démocratie, mais mise en oeuvre de fait non pas par les organisations social-démocrates, mais par les corps francs, ces embryons du parti nazi actuel. Avec l'accentuation de la lutte de classe et d'un autre côté avec le recul continu de l'influence de masse du SPD s'accroit donc le rôle des nazis. [...]

[...]

Dans l'ensemble, de l'exposé du programme [de l'IC adopté au 6e congrès] résultent des indice dans le sens de parler déjà aujourd'hui en Allemagne de formes de domination fascistes. D'un autre côté le programme ne prévoit pas un contexte où la bourgeoisie gouverne déjà avec des méthodes fascistes, tandis que le parti de masse fasciste se trouve encore en dehors du gouvernement, même dans un faux-semblant d'opposition. Enfin il est clair que dans l'Allemagne industrielle avec sa grande classe ouvrière et son Parti communiste fort, des obstacles sérieux sont opposés au déploiement plein et entier de la domination fasciste.

[...]

En Allemagne nous avons le contexte d'une dictature fasciste murissante bien que pas encore pleinement murie. Le gouvernement Brüning, dans sa phase de développement actuelle est le gouvernement de la dictature fasciste. Contre lui et contre toutes ses forces auxiliaires nous devons mener la lutte la plus résolue des masses.

[Citation dans l'original .]

E. Thälmann, dans le même sens, à la 3e conférence de parti du KPD tenu en octobre 1932[32]:

Nos constats actuels au sujet du gouvernement Papen confirment la perspective adoptée jusqu'ici par le Parti et ce qui a été jusqu'ici notre façon de traiter le problème de la dictature fasciste. Par exemple nous avons effectué un travail d'éducation idéologique sérieux qui se dirigeait contre l'interprétation social-démocrate, que seulement le gouvernement Hitler serait la dictature fasciste. Face à cela nous avons souligné qu'on ne doit pas simplement mettre un signe d'égalité entre gouvernement Hitler et dictature fasciste, qu'au contraire on peut tout à fait envisager l'éventualité d'un gouvernement de dictature fasciste sans participation officielle des national-socialistes. La situation actuelle confirme cette interprétation. À ce sujet il est clair que le gouvernement Papen-Schleicher, aussi, ne constitue pas forcément l'étape ultime et supérieure du fascisme, mais seulement une des formes de la dictature fasciste, cependant qu'il dépend de nous si on aboutit à une consolidation et développement plus poussés de la domination despotique fasciste ou à sa décomposition.

[Citation dans l'original .]

L'analyse développée par le KPD suit de près l'évolution de la situation concrète. Elle met progressivement en avant le danger que représentent les national-socialistes. Mais ceux qui rétrospectivement insinuent que, ce faisant, le KPD rectifia tardivement une prétendue sous-estimation antérieure du national-socialisme, propagent en réalité, à partir de positions erronées, une attaque indirecte contre ce que devaient être à l'époque les orientations marxistes-léninistes face au double ennemi que constituaient le réformisme et le fascisme. Contrairement au présupposé sur lequel repose l'allégation en question, il ne découle pas en soi de la reconnaissance du danger que représentaient les national-socialistes, l'opportunité d'une alliance contre eux avec le SPD.

La résolution adoptée par le 11e plénum du Comité exécutif de l'IC tenu en avril 1931 insiste sur la responsabilité qui retombe sur les social-démocrates en rapport avec l'ascension du national-socialisme[33].

La croissance du fascisme au cours de ce dernier temps était possible seulement sur la base du soutien apporté à la dictature de la bourgeoisie par la social-démocratie internationale durant la période d'après-guerre, indépendamment de ses formes. La social-démocratie, qui par la constitution d'une opposition entre la forme “démocratique” de la dictature de la bourgeoisie et le fascisme endort la vigilance des masses dans la lutte contre la réaction politique montante et contre le fascisme, et qui voile la nature contrerévolutionnaire de la démocratie bourgeoise comme une forme de la dictature de la bourgeoisie, est le facteur le plus actif et le précurseur de la fascisation des états capitalistes.

[...]

La perspective de mener avec succès la lutte contre le fascisme impose aux partis communistes la mobilisation des masses sur la base du front uni d'en bas contre toutes les formes de la dictature bourgeoise et contre l'ensemble des mesures réactionnaires de sa part, qui déblayent la voie pour la dictature fasciste ouverte. Cela exige une correction rapide et résolue des erreurs qui principalement reviennent à la construction libérale d'un opposition entre fascisme et la démocratie bourgeoise, ainsi qu'entre les formes parlementaires de la dictature de la bourgeoisie et les formes ouvertement fascistes, ce qui représente un reflet de l'influence social-démocrate dans les partis communistes.

[Citation dans l'original .]

À ce même plénum, Dimitri Manuilskij analyse en particulier la question de l'attitude de la social-démocratie au sujet du "moindre mal"][34]:

Deuxièmement ce retard dans la question du fascisme se manifeste dans le fait que nous permettons à la social-démocratie de manoeuvrer en rapport avec la question des formes de la dictature bourgeoise. Et cela est maintenant leur manoeuvre principale pour toute un période historique. La social-démocratie s'efforce à détourner les masses de la question fondamentale de la lutte de classe vers une dispute polémique sur la forme de sa propre oppression - vers les questions quant à savoir quelle forme de la dictature de la bourgeoisie serait préférable: celle parlementaire ou celle extraparlementaire. La théorie du soi-disant “moindre mal”, dont aussi bien le camarade Thälmann que le camarade Pollitt ont parlé dans leurs interventions, est actuellement le principal canal dans lequel se meuvent les illusions parlementaires des masses. La social-démocratie manoeuvrera pas seulement aujourd'hui mais au cours de toute une période, au cours d'un temps prolongé à travers leur faux-semblant de lutte contre le fascisme et dissimuleront par tous les moyens imaginables ce fait fondamental que fascisme et social-fascisme sont juste deux tendances d'un seule et même appui social de la dictature bourgeoise.

[Citation dans l'original .]

Dans un article intitulé "Quelques erreurs dans notre travail théorique et pratique et la voie pour les surmonter", publié en décembre 1931, E. Thälmann aussi insiste sur la nocivité de cette théorie du “moindre mal” propagée notamment par le SPD[35]:

Mais pire encore est le fait que dans nos rangs se sont manifestées [...] des tendances conformes à la conception libérale qui oppose fascisme et démocratie bourgeoise, le parti de Hitler et le social-fascisme. [...] Dans les rangs du prolétariat révolutionnaire également, non sans notre faute, étaient présentes du moins inconsciemment des opinions comme si les Braun-Severing seraient peut-être quand même un “moindre mal” en face d'un gouvernement Hitler-Goebbels en Prusse.

[Citation dans l'original .]

Dans ce même article, Thälmann analyse en détail la problématique posée par la montée du mouvement national-socialiste[36].

Nous tous, le Parti dans son ensemble et sa direction, ne pouvons nous déclarer non coupables à ce sujet. Commençons par quelques omissions théoriques. Nous avons (cela est le cas aussi pour le rapport du Parti allemand, que l'auteur de cet article a présenté au 9e plénum. E. Th.) considéré, de façon trop unilatérale et mécanique, le fascisme et y compris le développement croissant du mouvement national-socialiste seulement comme l'antithèse de l'essor révolutionnaire, comme la riposte de la bourgeoisie contre le prolétariat. Cette caractérisation était juste, mais elle n'était pas suffisante à elle seule et est devenu un schéma qui ne permettait pas d'apprécier tout à fait correctement le processus dialectique des rapports respectifs entre les classes. Seulement ce dernier temps ce défaut a été corrigé sérieusement.

[...]

Mais voilà, cette éducation des masses vers la passivité se reflète pareillement aussi dans cette théorie mécanique faisant comme si le fascisme n'était qu'un produit de la crise capitaliste et de la décomposition au sein du camp de la bourgeoisie, contre laquelle le camarade Manuilskij polémiquait. Si nous tolérions donc une telle théorie dans nos rangs ‑ et cela s'est produit, du moins partiellement ‑, cela signifierait de céder à la nouvelle manoeuvre de duperie social-démocrate. Et ainsi nous en venons aux erreurs sérieuses d'une sous-estimation du fascisme dans nos rangs.

Dans un article du camarade Kr. dans le numéro de septembre 1931 du Propagandist se trouve le passage suivant:

Un gouvernement de coalition social-démocrate auquel ferait face un prolétariat inapte au combat, éclaté, désorienté, serait un mal mille fois plus grand qu'une dictature ouvertement fasciste à laquelle s'oppose un prolétariat ayant une conscience de classe, et uni dans sa masse.

Ici se montre une appréciation complètement erronée du fascisme et de ce qu'une dictature fasciste signifie dans la pratique. C'est presque le genre d'appel comme chez Breitscheid, en faveur d'un gouvernement Hitler qui se laisserait bien vaincre facilement. Chez Breitscheid cela sert consciemment à endormir les masses. Chez le Propagandist c'est l'expression d'un certain fatalisme sectaire vis-à-vis du développement fasciste, le pendant de l'attitude de panique opportuniste d'autres camarades. Ici, un combat du Parti sur deux fronts est une nécessité absolue. Déjà auparavant se trouvait une fois dans le Propagandist (numéro de décembre 1930, éditorial du camarade S.) la formulation: "même avant le moment où le fascisme vient au pouvoir, où la dictature fasciste triomphe".

Donc, on s'accommode déjà du “triomphe de la dictature fasciste” comme “inéluctable”. C'est une prise de position purement défaitiste, avec laquelle notre ligne n'a rien en commun.

Au lieu de cela nous devons constater en toute netteté que ce qui est décisif de façon déterminante concernant aussi bien le développement fasciste en général que le développement du mouvement national-socialiste en particulier, c'est la lutte révolutionnaire du prolétariat.

Nous devons réussir à surmonter totalement les attitudes défaitistes dans la classe ouvrière, vis-à-vis du fascisme, telles qu'elles sont cultivées par les dirigeants du SPD. Autrement peut surgir le danger que la bourgeoisie puisse effectuer à froid le passage vers la dictature fasciste, sans devoir craindre la résistance révolutionnaire résolue du prolétariat allant jusqu'aux formes de lutte les plus élevées.

Indubitablement le KPD a pu engranger quelques succès dans la lutte contre le parti de Hitler. Mais c'est un fait aussi indubitable que le développement croissant renouvelé de la vague national-socialiste est dû dans un certain degré à la faiblesse de notre riposte. Certainement, étant donné la vitesse rapide de la décomposition des partis bourgeois anciens nous n'aurions pas pu déjouer le développement croissant rapide du mouvement national-socialiste. Mais le mouvement communiste d'Allemagne est aujourd'hui déjà suffisamment fort pour pouvoir au moins modifier et influencer le développement de façon décisive.

Toutefois, pour cela implique un renforcement significatif de notre lutte de masse idéologique contre le parti de Hitler. Il ne suffit pas de s'occuper de sa terreur meurtrière. Au contraire il est nécessaire ‑ est c'est là un des enseignements les plus importants que nous devons tirer des élections les plus diverses de ce dernier temps ‑ une politique sérieuse contre le Parti national-socialiste afin de dévoiler son caractère hostile aux travailleurs en tant que troupe de protection pour la dictature de la bourgeoisie, troupe de protection pour les entrepreneurs. Par notre politique comme unique parti de la lutte contre Versailles et Young et pour la libération de l'Allemagne travailleuse nous devons au moyen de l'exposition de notre programme de liberté aussi démasquer et mettre e pièces la démagogie "nationale" du parti de Hitler. Nous devons montrer aux masses que dans la question de la lutte de libération nationale également,  les national-socialistes se trouvent de l'autre côté de la barricade et sont des ennemis mortels de cette lutte. Cette question est une partie importante de notre lutte de masse contre le national-socialisme et fait partie des questions les plus importantes de notre politique dans son ensemble.

Cela est le cas dans une mesure encore beaucoup plus grande pour les tentatives des national-socialistes démarrant actuellement en vue de gagner des positions parmi le prolétariat à l'aide de leur “HiB-Aktion” (“Hinein in die Betriebe!”, c'est-à-dire “Allons-y, entrons dans les entreprises”). S'ajoutant à l'accentuation absolument nécessaire de notre lutte de principe contre la social-démocratie, qui constitue le coeur du problème y compris du point de vue de la lutte contre le fascisme en général et contre le national-socialisme en particulier, la lutte la plus résolue contre la pénétration des fascistes dans les entreprises et pour l'épuration des entreprises des cellules fascistes est une nécessité absolue. La même chose est le cas pour le mouvement des sans-emploi et le travail parmi les employés.

Au-delà de cela, s'impose au Parti en toute netteté la lutte pour attirer au prolétariat les couches travailleuses moyennes, lutte que nous devons améliorer et rendre plus vivante, et ceci énergiquement et sans tarder. La façon dont nous devons poser ce problème de l'attachement à nous d'alliés dans la lutte de classe prolétarienne, le problème de la révolution populaire au sens marxiste-léniniste et non pas au sens des déviations libérales du Propagandist (qui à plusieurs reprises apparurent aussi dans la presse du Parti), cela a déjà été montré dans ce qui précède.

[Citation dans l'original .]

En rapport avec ce texte, on peut en passant relever un exemple particulièrement significatif de la façon dont la littérature rétrospective sur le KPD remplit son rôle de déformation de l'histoire dans l'objectif de dénigrer le mouvement communiste. Dans un livre datant de 1960 on trouve la note suivante[37]:

Cf. p. ex. Ernst Thälmann [...] en décembre 1931 (L'Internationale 14, p. 499 et suiv.): "Un gouvernement de coalition social-démocrate auquel ferait face un prolétariat inapte au combat, éclaté, désorienté, serait un mal mille fois plus grand qu'une dictature ouvertement fasciste (!) à laquelle s'oppose un prolétariat ayant une conscience de classe, et uni dans sa masse."

[Citation dans l'original .]

L'auteur reprend ainsi le texte même de Thälmann dont un extrait figure plus-haut. Il en extrait le passage que Thälmann cite et dont celui-ci critique le contenu. Seulement, l'auteur du livre falsifie le contexte en attribuant la citation à Thälmann. Peu importe s'il s'agit d'un mensonge délibéré, ou de la bêtise de la part d'un dilettante qui se laisse piéger par son empressement à trouver des “preuves” de “l'égarement” des communistes. Dans le deux cas l'attitude est symptomatique du caractère de toute une série de productions littéraires.

La caractérisation fondamentale du fascisme

Au-delà des spécificités secondaires de telle ou telle situation, tel ou tel parti de “gauche” ou de “droite”, la question fondamentale est effectivement celle concernant les caractéristiques essentielles des différents régimes politiques, leur contenu de classe.

E. Thälmann, dans son intervention au plénum du Comité central du KPD en janvier 1931[38]:

Qu'en est-il de la question de la dictature fasciste? Quel est le contenu en termes de classe de la notion de dictature fasciste? Quand on examine ce problème il en résulte que le contenu en termes de classe d'une dictature fasciste est sans doute la dictature du capital financier, comme dans la démocratie bourgeoise. Donc ce n'est quand même pas le contenu de classe qui se modifie, mais les méthodes. Les formes de domination changent, pas le contenu de la domination, pour autant que la démocratie bourgeoise soit remplacée par la dictature fasciste.

[Citation dans l'original .]

D. Manuilskij, au 11e plénum du Comité exécutif de l'IC, en avril 1931[39]:

Pour surmonter ses luttes intestines la bourgeoisie a recours, face à la menace venant des masses travailleuses, à la tentative de formation d'un “parti de concentration” ou de l'organisation d'un parti de masse fasciste, qui serve d'organisation de liaison vers les masses petite-bourgeoises tombées dans la misère. La bourgeoisie qui a perdu son ancienne base de masse sociale, est contrainte de cherche un appui dans une nouvelle base sociale, extrêmement floue, fluctuante, instable en rapport avec ses états d'esprit, qu'elle peut dominer seulement par une démagogie sociale dangereuse et pleine de conséquences graves menaçantes.

[...]

Le régime fasciste n'est pas un quelconque nouveau type d'état, c'est une des formes de la dictature bourgeoise de l'époque impérialiste. Le fascisme surgit organiquement de la démocratie bourgeoise. [...] Une démocratie bourgeoise du type qui était caractéristique pour l'ère de la révolution bourgeoise du siècle dernier n'existe aujourd'hui nulle part. En réalité nous avons une forme bourgeois-démocratique de la dictature capitaliste de l'époque de l'impérialisme et de la crise générale du capitalisme, c'est-à-dire une démocratie bourgeoise en voie de fascisation.

[...]

Le fascisme n'est pas une nouvelle méthode de gouvernement, qui se distinguerait du système de la dictature de la bourgeoisie. Qui pense ainsi est un libéral.

[...]

D'une autre nature est l'erreur concevable en théorie, de “gauche”; ici l'approche aboutirait à voir dans le fascisme seulement un produit de la décomposition du capitalisme. Suivant ce point de vue, le mouvement fasciste serait une sorte d'“allié” objectif des communistes qui sape la stabilité du système capitaliste et la base de masse de la social-démocratie pour ainsi dire à partir d'un autre angle. Si les communistes adoptaient une telle position, ils ignoreraient la circonstance la plus importante la circonstance que le fascisme représente une forme de l'offensive du capital. Ils seraient de l'avis que l'émergence du fascisme témoignerait de ce que le capital soit devenu plus faible, et le prolétariat par contre plus fort. Ils attribueraient au fascisme un rôle exclusivement révolutionnaire. Cela impliquerait que l'arrivée du fascisme serait carrément souhaitable, en quelque sorte selon le principe: plus c'est pire, mieux c'est. La croissance du fascisme préparerait le la victoire du communisme. Une telle façon de poser la question du fascisme conduirait à la passivité dans la lutte contre le fascisme. Et évidemment les communistes n'ont pas une telle position et ne peuvent pas l'avoir. En réalité le mouvement fasciste est une des formes de l'offensive du capitalisme, dans les conditions de la crise générale du capitalisme et de l'effondrement de la classe dominante. Or cela fait du fascisme une forme particulière, inhabituelle de l'offensive du capitalisme. Le fascisme reflète la contradiction dialectique du développement sociale. Il renferme les deux éléments, aussi bien l'élément de l'offensive de la classe dominante que l'élément de sa décomposition. En d'autres mots ‑ le développement fasciste peut conduire aussi bien à la victoire du prolétariat qu'à sa défaite. Ce qui tranche ici la question, c'est le facteur subjectif, c'est-à-dire la lutte de classe du prolétariat? Si la classe ouvrière mène une lutte active contre le fascisme - alors les éléments de décomposition se développeront s'autant plus rapidement au sein du fascisme.

[Citation dans l'original .]

E. Thälmann, au 11e plénum du Comité exécutif de l'IC, en avril 1931[40]:

Nous vivons aujourd'hui en Allemagne la mise en oeuvre du régime fasciste de la part du capital financier, alors qu'en même temps le parti de masse fasciste est exclu formellement de l'exercice du pouvoir, voire on peut même dire, est poussé directement dans un faux-semblant d'opposition.

[...]

Aujourd'hui nous avons en Allemagne la situation qu'en rapport avec la mise en oeuvre de la dictature fasciste les dirigeants social-démocrates déploient l'activité la plus forte. Dans tous les domaines ils fournissent les acolytes les plus actives du fascisme. Ils sont pour ainsi dire devenus le bélier d'attaque de la fascisation de l'Allemagne.

[Citation dans l'original .]

Thèses adoptées au 12e plénum du Comité exécutif de l'IC, tenu en septembre 1932[41]:

1. La dictature de la bourgeoisie change continuellement dans le sens d'accentuer encore la réaction politique et la fascisation de l'état, et ce faisant elle révèle en même temps un rétrécissement de la base de la domination bourgeoise ainsi que l'apparition au grand jour de fissures et manifestations de décomposition en son sein. Les dissensions au sein du camp de la bourgeoisie revêtent bien souvent la forme d'une scission entre camps qui se combattent entre eux (Allemagne, Finlande, Yougoslavie), dans quelques cas celle de l'assassinat d'hommes politiques bourgeois (Japon). En règle générale la bourgeoisie a de plus en plus de mal à solutionner les conflits surgissant dans ses rangs. Dans la plupart des pays capitalistes la grande bourgeoisie organise des troupes de guerre civile fascistes, et élève au niveau de système le banditisme politique, la terreur blanche, les tortures infligées aux prisonniers politiques, provocations, falsifications, les grévistes et manifestants abattus, la dissolution et destruction d'organisations ouvrières. Ce faisant, la bourgeoisie ne renonce nullement à l'utilisation du parlement et le service offert par les partis social-démocrates en vue de la duperie envers les masses. En Allemagne a été instauré par le gouvernement von Papen-Schleicher, sous accentuation des oppositions externes et sous tension extrême des rapports de classe internes, à l'aide de la Reichswehr, du Stahlhelm et des national-socialistes, une des formes de la dictature fasciste à laquelle la social-démocratie et le Zentrum ont frayé le chemin.

[...]

3. Le fascisme de même que le social-fascisme (social-démocratisme) prennent fait et cause pour le maintien et la consolidation de capitalisme, de la dictature bourgeoise, mais ils en tirent des conséquences tactiques différentes. Puisque la situation de la bourgeoisie dominante de chacun des pays actuellement est plein à l'extrême de contradictions et la contraint souvent de louvoyer entre le cours vers le déchainement résolu de la lutte contre ses ennemis externes et internes, et un cours plus prudent, ce caractère plein de contradictions se reflète aussi dans la variété des attitudes du fascisme et du social-fascisme. Les social-fascistes préfèrent une application plus modérée et “légaliste” de la violence de classe, parce qu'ils sont contre la réduction de la base de la dictature bourgeoise; ils interviennent en faveur de son camouflage et maintien “démocratiques”, de préférence sous ses formes parlementaires, dont l'absence leur rend plus difficile de remplir leur fonction spéciale de la duperie envers les masses ouvrières. En même temps les social-fascistes, en empêchant les travailleurs à engager des actions révolutionnaires contre l'offensive du capital et le fascisme croissant, forment la couverture sous la protection de laquelle les fascistes ont la possibilité d'organiser leurs forces, et ils frayent le chemin pour la dictature fasciste.

[...]

6. L'influence de masse des social-fascistes a reculé dans presque tous les pays, mais d'autant plus fortement et varié s'avèrent les manoeuvres auxquelles ils ont recours (direction de grèves pour les casser, dans quelques cas appel à des grèves générales ostensibles, faux-semblant de lutte contre le fascisme, pour la paix, pour la défense de l'Union soviétique, etc.) [...] Seulement si les communistes tiennent compte des formes variées de la politique de manoeuvre des social-fascistes dans tout leur caractère concret, ils peuvent effectivement les démasquer et isoler. Seulement si le coup principal est dirigé contre la social-democratie ‑ cet appui social principal de la bourgeoisie ‑, on peut battre et mettre en pièces l'ennemi de classe principal du prolétariat ‑ la bourgeoisie. [...]

[Citation dans l'original .]

Rapport d'Otto Kuusinen à ce même plénum[42]

Ainsi on peut observer aujourd'hui en Allemagne, [...] Là-bas, le fascisme a réussi d'avancer d'un grand pas, et ceci non seulement sous la forme de la croissance du mouvement national-fasciste, mais aussi dans l'instauration de la dictature fasciste dans le régime d'état. Durant un certain temps le KPD a sous-estimé le mouvement national-socialiste et négligé partiellement la lutte contre lui; cependant il serait naturellement inexact d'affirmer que les omissions de la part du KPD aient rendu possible la croissance du fascisme, car cette croissance a eu ces raisons objectives. On ne peut évidemment pas dire en général que la dictature fasciste soit une étape intermédiaire nécessaire sur la voie vers la révolution. Mais ce que nous pouvons constater actuellement en Allemagne sans aucune mise en opposition libérale entre démocratie et dictature, c'est le début de la dictature fasciste. Il ne serait pas exact d'affirmer que le régime actuel en Allemagne soit déjà une dictature fasciste achevée. [...] Cette question de l'instauration définitive de la dictature fasciste n'est pas encore tranchée en Allemagne. Les luttes décisives n'ont pas encore eu lieu. "La tâche principale du fascisme", est-il écrit dans le programme de l'IC, "est la destruction de l'avant-garde révolutionnaire de la classe ouvrière, c'est-à-dire des couches communistes du prolétariat et de leurs cadres dirigeants." Cela ne s'est pas encore produit en Allemagne, et cela n'arrivera pas sans que le prolétariat révolutionnaire d'Allemagne sous la direction du Parti communiste ne se rebelle de toutes ses forces contre cette attaque.

[Citation dans l'original .]

Résolution sur le 12e plénum du Comité exécutif de l'IC et les tâches du Parti, adoptée par la Conférence du KPD tenue du 15 au 17 octobre 1932[43]

IV. La domination du gouvernement Papen-Schleicher en Allemagne, qui a été instaurée à l'aide de la Reichswehr, du Stahlhelm et des national-socialistes, et auquel la social-démocratie et le Zentrum ont frayé le chemin, représente une des formes de la dictature fasciste. [...]

V. Même après que les dirigeants social-fascistes aient été quasiment évincés des fonctions publiques supérieures (20 juillet) les dirigeants du SPD empruntent actuellement de façon toujours plus résolue le cours vers la tolérance envers le gouvernement Papen-Schleicher comme “moindre mal” par rapport à un gouvernement Hitler [...].

Le SPD a en Allemagne porté le fascisme au pouvoir de même que les social-fascistes en Pologne et en Italie, il ne lutte nullement contre le fascisme, mais au contraire a entravé et entrave activement la lutte des masses contre la dictature fasciste (20 juillet). [...]

Tous ces faits confirment le constat du 12e plenum que la social-démocratie remplit sans limités son rôle comme agence de la bourgeoisie dans le camp de la classe ouvrière, qu'elle représente tout comme avant l'appui social principal de la bourgeoisie.

[Citation dans l'original .]

E. Thälmann dans son intervention à la 3e Conférence du KPD, tenue en octobre 1932[44]:

Concernant le rapport entre le fascisme et le social-fascisme le 11e plénum a effectué une charge contre toute position libérale opposant ces deux appuis du système capitaliste. En Allemagne, dans le cadre de l'offensive idéologique du Comité central envers quelques conceptions divergentes et confuses, nous avons fait prévaloir la conception correcte correspondant à la définition de Staline, des jumeaux. On peut dire que tout le développement politique en Allemagne au cours des dernières années constitue vraiment un enseignement parlant pour la justesse de cette thèse de Staline selon laquelle fascisme et social-fascisme ne sont pas des adversaires, mais des jumeaux, qui ne s'excluent pas mutuellement mais se complètent.

[...]

Toute tendance d'un affaiblissement de notre lutte de principe contre les dirigeants du SPD, ou d'une position libérale qui oppose fascisme et social-fascisme est donc complètement inadmissible. Mais pas plus nous devons admettre une position mettant un signe d'égalité entre ces deux ailes du fascisme, comme elle arrivait occasionnellement dans la pratique au cours de la mise en oeuvre de notre ligne générale correcte. Mettre de façon simpliste et schématique un signe d'égalité entre Hitler et Severing, gouvernement de Papen et gouvernement de Brüning, social-démocratie et national-socialisme, est erroné et rend plus difficile la lutte aussi bien contre les nazis que contre le SPD.

[Citation dans l'original .]

Thèses adoptées par le 13e plénum du Comité exécutif de l'IC tenu en décembre 1933[45]

I. Le fascisme et le murissement de la crise révolutionnaire

1. Le fascisme est la dictature terroriste ouverte des éléments le plus réactionnaires, chauvins et impérialistes du capital financier. Le fascisme tente d'assurer au capital monopoliste la base de masse parmi la petite bourgeoisie et s'adresse en cela aux paysans, artisans, employés, fonctionnaires déboussolés et en particulier aux éléments déclassés dans les grandes villes. Il s'efforce à pénétrer aussi parmi la classe ouvrière. La croissance du fascisme et sa prise du pouvoir en Allemagne et une série d'autres pays capitalistes signifient que

[...]

d) le capital est par conséquent contraint de passer à la dictature terroriste, ouverte dans le pays et au chauvinisme sans limites en matière de politique étrangère qui est une préparation directe à des guerres impérialistes. Dans le fascisme, qui surgit de l'organisme-même de la démocratie bourgeoisie, les capitalistes voient un moyen de sauvetage du capitalisme devant la désintégration. Juste pour tromper et désarmer les travailleurs, la social-démocratie nie la fascisation de la démocratie bourgeoise et met les pays de la démocratie en opposition à la dictature fasciste. D'autre part la dictature fasciste ne constitue pas une étape inévitable de la dictature de la bourgeoisie dans tous les pays. La possibilité de la prévenir dépend des forces du prolétariat en lutte, lesquelles sont paralysés avant tout par l'influence sapant de la social-démocratie.

2. [...]

3. L'instauration de la dictature fasciste en Allemagne a exhibé devant le monde entier le visage de la social-démocratie allemande. [...] La social-démocratie continue à jouer le rôle de l'appui social principal de la bourgeoisie, y compris dans les pays de la dictature fasciste ouverte, en luttant contre l'unité révolutionnaire du prolétariat de même que contre l'Union soviétique, et en aidant la bourgeoisie de prolonger l'existence du capitalisme du fait de la scission de la classe ouvrière. [...]

[Citation dans l'original .]

L'un des arguments fréquemment mis en avant pour alléguer qu'il aurait fallu opposer aux forces fascistes une alliance des partis “de gauche”, voire des partis “démocratiques”, consiste à considérer que les national-socialistes risquaient de s'imposer à la société par une volonté et une force propres suivant une dynamique autonome. Ce serait donc en dehors de tout rapport de classe qu'ils auraient constitué le principal danger. Or, ce n'était pas le cas. Nous n'examinerons pas les liens entre les représentants du capital et le mouvement national-socialiste, mais nous citerons néanmoins un fait significatif. Le 20 février 1933 H. Göring reçoit dans son bureau de président de l'assemblée nationale des représentants de l'industrie et de la banque. A. Hitler présente un discours. H. Göring fait miroiter aux invités la perspective que selon l'intention des national-socialistes, les élections à venir en mars seront les dernières pour une longue période. Comme résultat de cette rencontre, le NSDAP reçoit dans les jours qui suivent des fonds importants. Ce même jour Joseph Goebbels note dans son Journal: "Pour les élections nous dégotons une somme toute à fait élevée, qui d'un seul coup nous débarrasse de tout souci d'argent. J'alerte aussitôt tout l'appareil de propagande, et une heure plus tard déjà, pétaradent les rotatives. Maintenant nous allons passer au régime maximum." [Chronologie ]

Ennemi principal

Parallèlement à l'analyse du rôle joué par le SPD en rapport avec les national-socialistes, le KPD devait déterminer sa propre attitude face aux social-démocrates. De la caractérisation qu'il faisait du SPD, évoquée dans ce qui précède, découlaient les éléments principaux à cet égard. Mais des aspects complémentaires nécessitaient des appréciations particulières. Le point qui principalement fait l'objet des critiques rétrospectives, réside dans le fait que le KPD refusait de désigner les national-socialistes comme “ennemi principal”. Nous allons donner ci-dessous quelques indications à cet égard. Il faut en tout cas noter qu'aujourd'hui les anticommunistes appuient fréquemment leurs critiques sur une présentation mensongère selon laquelle prétendument le KPD aurait vu dans le SPD cet “ennemi principal”. Ce qui motive ces attaques, c'est que le KPD, en premier lieu, dénonçait le SPD comme force politique soutenant la domination de la bourgeoisie.

C'est ce que fait par exemple E. Thälmann au 11e Congrès du KPD, tenu du 2 au 7 mars 1927[46]:

Un appui principal pour la politique étrangère et intérieure de la bourgeoisie impérialiste allemande est sans doute le SPD. Déjà au début de mon exposé sur le problème du danger de guerre j'ai mentionné que la social-démocratie allemande dans sa politique étrangère, dans sa position à la Société des Nations, dans sa position au sujet du danger de guerre, de la politique coloniale, le mouvement national-révolutionnaire allemand chinois, l'Union soviétique et l'unité syndicale internationale, coïncide complètement avec la bourgeoisie. Parallèlement à cela la social-démocratie allemande soutient aussi la consolidation du pouvoir capitaliste en Allemagne. Le SPD est le parti de la stabilisation capitaliste, et le KPD est le parti de la révolution prolétarienne. C'est pourquoi dans toutes les questions nous devons mener la lutte la plus résolue contre la social-démocratie.

[Citation dans l'original .]

Concrètement, le KPD dénonce la disponibilité du SPD de servir d'appui à la bourgeoisie à travers la participation à des gouvernements de coalition. Ainsi les Thèses de ce même congrès "sur le SPD sous domination du bloc bourgeois" indiquent[47]:

VI. Le rôle de la social-démocratie

15. Actuellement la social-démocratie est devenue superflue pour la bourgeoisie en tant que parti gouvernemental actif, après qu'elle a réprimée dans le sang la première vague de la révolution prolétarienne allemande (1918 à 1920) et son dernier assaut en automne 1923. Malgré son passage forcé à un faux-semblant d'opposition la social-démocratie reste un des principaux appuis du régime bourgeois. Elle joue le rôle d'un parti gouvernemental passif, d'une garantie supplémentaire pour la domination du bloc bourgeois, auquel elle se résigne, en étant prête à chaque instant d'entrer de nouveau dans une coalition à l'appel de la bourgeoisie, en cas de luttes de classes accentuées et de difficultés révolutionnaires. D'autre part encore aujourd'hui la bourgeoisie ne renonce pas complètement aux services de la social-démocratie, mais continue à leur donner la possibilité [...]

16. La social-démocratie ‑ l'ennemi principal du Parti communiste dans le mouvement ouvrier ‑ est un parti ouvrier bourgeois, et en correspondance avec la situation caractérisée par l'impérialisme allemand renaissant, impérialiste.

[Citation dans l'original .]

La mention du grand industriel Paul Silverberg se réfère au rapport présenté par celui-ci aux assises de l'Union nationale de l'industrie allemande (Reichsverband der Deutschen Industrie, RDI), tenus les 3‑4 septembre 1926. [Chronologie ]

De même E. Thälmann, en juillet 1928, au 6e Congrès de l'Internationale communiste[48]:

Les tendances les plus réactionnaires, qu'incarne la social-démocratie, se renforcent et se réunissent dans la politique de coalition. Là où elle met en oeuvre résolument la politique de la bourgeoisie dans le gouvernement social-démocrate, elle est menacée par la rupture avec les masses prolétariennes et les autres masses travailleuses, qui s'en vont vers le communisme. Là où elle met en oeuvre la politique impérialiste de façon vacillante, elle se trouve chassée au diable à coups de pied par le capital financier. La lutte contre la politique de coalition de la social-démocratie est une de nos tâches principales dans la lutte contre le réformisme. Les gouvernements social-démocrates dans tous les pays mettent en oeuvre sur le plan de la politique intérieure l'oppression et la maitrise du prolétariat. Dans la politique étrangère elles soutiennent les actes de guerre de l'impérialisme dans les gouvernements sous couvert de pacifisme hypocrite.

[Citation dans l'original .]

E. Thälmann à la 3e Conférence du KPD, tenue en octobre 1932[49]

Dans la politique de la bourgeoisie allemande nous avions une mise à profit alternative de la social-démocratie et des national-socialistes, le centre de gravité sous le gouvernement Brüning ayant été du côté du SPD tandis que maintenant sous le gouvernement Papen-Schleicher est intervenu une certaine modification en ce qui concerne la forme selon laquelle les deux appuis sont utilisés. Par le coup d'état du 20 juillet la social-démocratie, dans une mesure considérable, a été écartée de la fonction d'une participation gouvernementale ouverte. Devant les masses elle simule une opposition pseudo-radicale contre le gouvernement Papen. Mais cela est aussi frauduleux que la clameur d'opposition des national-socialistes, sans le soutien active desquels le gouvernement n'aurait pas pu accéder au gouvernail.

Tout comme avant la social-démocratie reste l'appui principal de la bourgeoisie. [...]

[Citation dans l'original .]

Au-delà de la direction du SPD, le KPD dénonçait à juste titre l'influence nocive exercée par les militants qui se situaient à son aile gauche. La seule perspective valable était leur passage au KPD. Faute de franchir ce pas, ils favorisaient ‑ intentionnellement ou malgré eux ‑ la ligne contrerévolutionnaire appliquée par les dirigeants et le parti en général.

J. Staline aborde cette question notamment en avril 1929[50]:

La deuxième question est celle de la lutte contre la social-démocratie. Les thèses de Boukharine disaient que la lutte contre la social-démocratie était une des tâches fondamentales des sections de l'IC. Certes, cela est exact, mais insuffisant. Pour mener avec succès la lutte contre la social-démocratie, il faut aiguiller son attention sur le problème de la lutte contre l'aile dite de “gauche” de la social-démocratie; contre cette aile “gauche” qui, jouant avec des phrases radicales pour duper habilement les ouvriers, entrave l'abandon par ces derniers de la social-démocratie. Il est évident que sans porter un coup aux social-démocrates de “gauche”, il sera impossible de vaincre la social-démocratie. Or, dans les thèses de Boukharine, la question de l'aile “gauche” est entièrement éludée. C'est là, bien entendu, une grosse lacune. Voilà pourquoi la délégation du P.C. de l'U.R.S.S. a dû apporter un amendement aux thèses de Boukharine, que le congrès a ensuite adopté.

[Citation dans l'original .]

E. Thälmann traite ce problème au 6e Congrès de l'Internationale communiste:[51]:

Par leur activité de trahison ils [les gouvernements social-démocrates dans tous les pays] et par l'intervention et le travail des Partis communistes et du mouvement révolutionnaire les partisans social-démocrates aussi deviennent vacillants et peu à peu se tournent vers le communisme. Dans cette situation la social-démocratie “de gauche” entre en scène pour empêcher que les travailleurs social-démocrates ne s'en aillent vers le Parti communiste. La politique de coalition de la social-démocratie a été rendu possible seulement par la prise de position des social-démocrates “de gauche” dans les différents pays. Le fait est connu qu'au congrès de Kiel en Allemagne, où Hilferding avançait cette théorie générale “Heran an den Staat” (Allons-y, côtoyons l'état, ”) en lien avec la politique de coalition, les dirigeants “de gauche” n'ont pas offert de résistance. [...] Plus la guerre approche, le SPD “de gauche” apparaitra de façon plus dangereuse. [...] Justement parce qu'ils travaillent avec des phrases révolutionnaires toutes faites, avec des méthodes d'agitation radicales hypocrites, ‑ dans une situation de contradictions s'intensifiant, où le mouvement communiste aussi apparaitra plus fortement‑ avec leur phraséologie “de gauche” ils servent la politique de coalition et de guerre de la droite. Ce faisant dans toute leur politique ils appuient la lutte contre l'Union soviétique, la lutte contre le communisme et aident à l'oppression de la classe ouvrière. C'est pourquoi notre position à l'égard de la social-démocratie “de gauche” dans la période actuelle est d'une grande importance de principe. Toute vacillation, toute hésitation concernant l'objectif de démasquer la social-démocratie “de gauche” doit être combattue dans nos rangs avec la plus grande netteté. Dans le Parti allemand nous avions avec le groupe de droite des controverses à cause de leur attitude penchant vers le compromis envers la social-démocratie “de gauche”. Le congrès d'Essen a adopté une formulation selon laquelle la social-démocratie “de gauche” est désignée comme l'ennemi le plus dangereux du communisme dans le mouvement ouvrier.

[Citation dans l'original .]

Dans le même discours, Thälmann critique certains arguments employés à ce sujet au sein même du KPD[52]:

Dans l'organe pour cadres de Thüringen, Der Bolschewist, est écrit sur le SPD “de gauche” entre autre ce qui suit:

Les arguments du SPD “de gauche” d'Ostthüringen rencontreront dans de tels domaines une plus grande compréhension de la part des travailleurs SPD, que si dans ces domaines nous exposons aux travailleurs la position communiste “abstraite”. Naturellement nous devrons faire cela, mais les arguments de la “gauche” sont les meilleurs points de départ pour inciter les travailleurs SPD à la réflexion et les amener à bouger contre les politiciens de coalition.

Donc premièrement différenciation au sein du SPD, pour utiliser leurs arguments, et ce faisant nous devrions omettre de mettre en avant le "point de vue communiste “abstrait”". Une confusion complète! Plus la social-démocratie se développe vers la droite, plus grave sont les dangers de telles déviations.

[Citation dans l'original .]

Thälmann signale d'ailleurs au congrès que "la délégation allemande a présenté une demande de modification particulière [concernant la résolution soumise au congrès], afin d'attirer dès aujourd'hui l'attention sur ce danger de la social-démocratie “de gauche”, puis il annonce que "la délégation du PCUS(b), entretemps, a de son côté déposé une demande de complément dans cette question" et que "la majorité de la délégation allemande est d'accord avec cette demande". [Citation dans l'original .] Voici ce texte (extrait) [53]:

Le Parti communiste d'Allemagne, qui est une des meilleures sections de l'armée prolétarienne internationale, se trouve en même temps place en face de la social-démocratie la meilleure organisée, qui a encore des racines extraordinairement fortes dans le pays, ce par quoi un terrain favorable et créé pour des déviations de droite au sein du mouvement communiste lui-même. Par conséquent les tâches actuelles du parti sont: la lutte conséquente contre les déviations de droite contre les déviations de droite (mot d'ordre du contrôle de production au moment actuel, opposition contre les résolutions du 4e congrès de l'ISR, position de compromis vis-à-vis de la social-démocratie de gauche etc.); surmonter le courant qui adopte une position conciliatrice vis-à-vis de ces déviations; recours pour le travail de responsabilité aux meilleures forces du parti qui se placent sur la terrain des résolutions de l'IC et du congrès d'Essen du KPD, cours résolu vers la consolidation du parti, rassemblement de toutes les forces de la présente direction et renforcement de son caractère collectif - avec la subordination inconditionnelle de la minorité à la  majorité.

[Citation dans l'original .]

Et les Thèses adoptées à ce 6e Congrès de l'IC contiennent finalement le passage suivant[54]:

21. Au moment actuel la politique de division de classe à grande échelle des dirigeants réformistes qui suivant le diktat de la bourgeoisie excluent des organisations de masse prolétariennes les meilleurs éléments révolutionnaires, est un composant inséparable de leur politique de groupe de travail et de coalition avec la bourgeoisie, afin de paralyser de cette manière à priori l'unité interne des rangs de lutte prolétariens et leur capacité de résistance contre les attaques du capital. Elle est maillon nécessaire de leur politique social-impérialiste, leur politique d'armement, leur politique anti-soviet et leur politique rapace dans les colonies. Face à ces tentatives des réformistes de décomposer le front de classe prolétarien de l'intérieur, nous communistes devons, en particulier au moment actuel, engager et développer la contre-offensive la plus sévère, afin d'opposer à la politique réformiste de la division des organisations de masse du prolétariat (syndicats, coopératives, organisations culturelles et sportives) la lutte des masses pour l'unité de classe. Un rôle particulièrement ignoble dans la campagne de division de la part réformisme jouent les dirigeants soi-disant "de gauche" de la social-démocratie, qui certes en paroles jurent sur l'unité, mais en réalité soutiennent toujours en permanence, de façon inconditionnelle les méthodes criminelles de division de la IIe Internationale et de l'Internationale syndicale d'Amsterdam.

[Citation dans l'original .]

La résolution du Comité central du KPD adoptée en mai 1931, au sujet des décisions du 11e plénum du Comité exécutif de l'IC s'exprime également dans ce sens[55]:

Actuellement de nouveau les social-démocrates “de gauche” jouent un rôle particulièrement raffiné dans la duperie de masse social-démocrate. Afin de retenir auprès du SPD les masses indignés envers la politique de trahison de classe de ce parti et qui se détachant de lui, ils mettent en oeuvre une opposition démagogique sans aucune conséquence politique [...]

[Citation dans l'original .]

Dans les débats autour de ces questions revient souvent l'accusation vis-à-vis du KPD que celui-ci aurait saboté le combat contre les national-socialistes en écartant toute concrétisation d'un front uni avec le SPD. À cet argument, on peut légitimement opposer les multiples faits qui montrent que le SPD lui-même a toujours refusé dans la pratique un tel rapprochement entre les deux partis. Cependant, sur le fond, ces aspects du problème sont secondaires. La raison principale pour laquelle l'accusation en question n'est pas valable, c'est qu'elle repose sur l'hypothèse qu'une éventuelle alliance avec le SPD aurait pu être dirigée contre le pouvoir de la bourgeoisie. Or compte tenu des orientations du SPD, elle n'aurait pu incarner rien d'autre qu'une alternative au recours aux national-socialistes en vue du maintien du pouvoir de la bourgeoisie. Le KPD avait raison de ne pas s'engager dans cette orientation.

C'est en ce sens que par exemple E. Thälmann, dans l'article déjà cité de décembre 1931, déclare[56]:

Et pourtant la lutte en premier lieu contre toutes les illusions démocratiques, en particulier contre l'idée que la social-démocratie serait un “appui dans la lutte contre le fascisme”, est une condition préalable pour la mobilisation des masses pour la lutte contre les mesures fascistes de la dictature Brüning-Severing et au-delà pour le renversement du capitalisme.

[Citation dans l'original .]

Et E. Thälmann également, dans son intervention à la 3e conférence du Parti en octobre 1932[57]:

Malgré les manoeuvres d'opposition du SPD parmi les travailleurs nous devons susciter la compréhension au sujet du rôle de la social-démocratie comme "aile modérée du fascisme", comme "appui social principale de la bourgeoisie".

Nous voulons conduire les masses prolétariennes à la lutte contre la dictature de la bourgeoisie, qui aujourd'hui est exercée toujours plus nettement dans les formes et les méthodes de la dictature fasciste. Est-ce que nous pourrions réussir cela par un affaiblissement de la lutte contre le SPD, avec une “politique de bloc” vis-à-vis du SPD, avec un “accord de neutralité” vis-à-vis des dirigeants social-fascistes, comme le proposent aux travailleurs révolutionnaires les filiales “de gauche” du social-fascisme, SAP et Brandleriens, ou avant tout le contrerévolutionnaire Léon Trotsky?

Cela est impossible. Justement pour pouvoir conduire les masses vers la lutte contre la dictature fasciste, nous devons faire les plus grands efforts pour tenter de briser l'influence du SPD sur des parties décisives du prolétariat. Sans mener en même temps la lutte la plus sévère contre la social-démocratie, il ne peut y avoir d'inclusion des travailleurs SPD dans les rangs du front de lutte antifasciste et donc pas non plus de lutte couronnée de succès contre la dictature fasciste et ses organisations de terreur, contre le fascisme hitlérien.

[Citation dans l'original .]

Au cours de la réunion élargie du présidium du Comité exécutif de l'IC tenu en février 1930, E. Thälmann développe l'analyse du danger qu'implique la conjonction entre le renforcement des national-socialistes et la complicité que leur offrent les social-démocrates[58].

Aujourd'hui nous pouvons faire un certain bilan de l'activité du gouvernement de coalition social-démocrate. Pour le gouvernement de coalition social-démocrate on peut mentionner pour l'essentiel les trois tâches stratégiques suivantes dans l'intérêt de la bourgeoisie allemande:

1. Mise en oeuvre de l'offensive des entrepreneurs selon la ligne tracée par le plan Young;

2. les préparatifs de guerre contre l'Union soviétique;

3. la répression violente du mouvement révolutionnaire en Allemagne.

Il est aussi indiqué de montrer en référence à ces trois points stratégiques principaux de la politique des gouvernements social-démocrates dans toute l'Internationale, comment l'évolution social-fasciste en Allemagne, la nature du social-fascisme, trouve son expression dans le rôle de la social-démocratie. Aujourd'hui, nous exprimant d'ici, nous pouvons affirmer à juste titre que l'Allemagne fournira en quelque sorte le champ expérimental du social-fascisme pour beaucoup d'autres pays capitalistes.

[...]

De cela résulte aussi la nature différente de la position des national-socialistes. Par exemple ils sont entrés au gouvernement en Thüringen et ont déclaré mettre en oeuvre dans le cadre de la constitution le plan Young ensemble avec les social-fascistes et la bourgeoisie. C'est la raison pour laquelle aussi nous n'entendons plus aucun mot de la part des national-socialistes au sujet de l'oppression nationale en Tyrol du Sud, c'est la raison pour laquelle aussi nous n'entendons plus aucun mot au sujet de guerre de revanche contre la France qui était propagée par les fascistes encore il y a quelques années ‑ c'est oublié depuis longtemps. Pour cela aussi l'intégration absolue ‑ avec les social-fascistes et la bourgeoisie ‑dans le front de guerre contre l'Union soviétique et l'intégration dans la politique intérieure menée dans le cadre de la constitution et des lois républicaines, parce que les fascistes eux-mêmes dans la situation actuelle ne sont de toute façon en mesure de renchérir sur les attaques réactionnaires des social-fascistes.

[Citation dans l'original .]

Au cours du plénum du Comité central du KPD tenu en mars 1930, E. Thälmann reprend ces considérations de la manière suivante[59]:

En Allemagne nous voyons une double imbrication du national-fascisme et du social-fascisme avec l'appareil d'état.

Naturellement elle revêt différentes formes. Cela permet à la bourgeoisie de mettre en scène différentes manoeuvres et coups et de les faire aboutir selon son intérêt. Par exemple le fait que Frick est ministre de l'intérieur en Thüringen, que dans la direction national-socialiste ‑ en particulier par Hitler dans ces dernières déclarations ‑ s'est manifesté à plusieurs reprises un revirement quant au soutien et la reconnaissance de la forme d'état républicaine ‑ ce fait ainsi que d'autres phénomènes dans l'évolution du parti national-socialiste montre une imbrication croissante du national-fascisme avec l'état bourgeois. La raison pourquoi je pose cette question de l'imbrication du social-fascisme et du national-fascisme avec l'appareil d'état républicain, c'est que la concentration de la réaction constitue le danger le plus grave. Si la concentration dans ce domaine venait à s'imposer plus nettement avec une vitesse croissante, alors c'est une évolution grave à laquelle nous devons prêter la plus grande attention.

[...] Pourquoi le national-fascisme peut-il gagner du terrain en Allemagne? Parce que le social-fascisme lui fraye le chemin, parce qu'en Allemagne ‑ en Prusse et dans le Reich ‑ différentes représailles de la part des gouvernements social-démocrates contre le mouvement révolutionnaire étaient fortes à tel point que sur le moment les national-fascistes ne pouvaient renchérir à cet égard. Naturellement nous devons voir que le social-fascisme a aussi des possibilités pour manoeuvrer. J'ai déjà évoqué les raison pourquoi il était possible que Severing a fait emprisonner maintenant deux officiers national-socialistes de la Reichswehr, que deuxièmement il a entrepris une intervention contre Frick et troisièmement en Prusse a fait lever l'interdiction de manifester. Je me permettrai de mentionner deux causes principales pour cela.

La première cause est que nous sous-estimons dans nos propres rangs la rébellion au sein du parti social-démocrate. Le gouvernement social-démocrate était contraint d'effectuer des manoeuvres, d'ouvrir certaines soupapes pour combattre temporairement la rébellion dans les cercles social-démocrates ‑ je ne dis pas pour les étouffer. La deuxième cause est qu'en lien avec l'accentuation générale et le murissement de la crise économique mondiale d'un côté et la construction du socialisme sous la dictature prolétarienne de l'autre, de telles soupapes sont ouvertes par le parti du social-fascisme et le gouvernement, afin de pousser les masses encore plus fortement vers le front contrerévolutionnaire de la guerre contre l'Union soviétique. Ce sont les deux causes principales. Une troisième cause peut encore s'y rajouter, à savoir que la crise serait plus forte que nous même le supposons ‑ ce qui est vraisemblable ‑, et que par notre activité révolutionnaire nous contribuons à ce que de telles manoeuvres soient mises en scène. N'avons-nous pas vu qu'à chaque accentuation révolutionnaire la social-démocratie est entrée au gouvernement, comme en 1919 et 1923? Et n'a-t-elle pas toujours masqué ses actes contrerévolutionnaires par des manoeuvres feintes contre la réaction?

[Citation dans l'original .]

Et dans le même sens, E. Thälmann dans son intervention au plénum du Comité central du KPD en janvier 1931[60]:

D'importance décisive pour l'évolution fasciste de l'Allemagne est le rôle différent que jouent d'un côté le social-fascisme, de l'autre le fascisme, ainsi que leur rapport mutuel.

Nous voyons d'abord l'utilisation alternative des deux forces de la part du capital financier, tel qu'elle se manifeste d'une part dans le gouvernement de Prusse avec la social-démocratie, d'autre part avec le gouvernement de Thüringen et celui de Braunschweig avec les nazis. Non seulement la politique de la social-démocratie a frayé le chemin aux nazis, mais le rôle actuel du social-fascisme est vraiment celui d'une police auxiliaire du fascisme. Quand par exemple la social-démocratie est l'appui du gouvernement Brüning, c'est justement par ce soutien à Brüning qui prétendument devrait contrarier la perspective d'un gouvernement Hitler, qu'en réalité elle offre aux nazis une marge de manoeuvre de sorte que ces derniers tout en maintenant un certain faux-semblant d'opposition peuvent d'autant plus se procurer une base de masse plus large. Le plus important dans le rôle actuel du social-fascisme est son appui extraparlementaire à l'égard de la dictature Brüning à l'aide des syndicats réformistes, dans la mise en oeuvre de la spoliation en matière de salaires et du démantèlement des prestations sociales.

[Citation dans l'original .]

L'article déjà cite d'E. Thälmann, de décembre 1931 traite de façon détaillée certains aspects importants, et nous en donnons ci-dessous quelques extraits[61].

Cette prise de position politique, par rapport à laquelle quelques formulations défectueuses ont été rapidement corrigées après analyse, ont permis au Parti à ouvrir avec un certain succès l'offensive contre le système Brüning et ses appuis social-démocrates. Dans ce contexte le rôle du mouvement national-socialiste a été caractérisé correctement comme celui d'un appui extraparlementaire supplémentaire de la dictature bourgeoise, dont la bourgeoisie se sert alternativement à côté de la social-démocratie. Nos résolutions dans cette question à la session du plénum du comité central du KPD en janvier ont été sans doute confirmées par l'évolution ultérieure.

[...]

Le Zentrum, qui lui-même de par sa structure sociale particulière dispose, seul parmi les partis grand-bourgeois, d'une masse de partisans relativement stable, tente de créer une base de masse large pour sa politique à travers des institutions comme le conseil économique consultatif et le groupement central de travail, dans lesquelles elle réalise son principe "corporatiste" (communauté du peuple) similaire à l'idéologie fasciste et un coopération allant du SPD jusqu'aux nazis.

Le contenu de classe de la politique de Brüning consiste ainsi à affaiblir, à épuiser à l'aide des national-socialistes, le SPD, cet appui principal du capitalisme parmi les masses et à l'utiliser ainsi d'autant plus sans limites (Prusse), d'autre part à l'inverse à mettre un frein aux national-socialistes par certaines manoeuvres et de les mettre dans une plus grande mesure au service de la dictature du capital financier (Hessen!).

L'utilisation alternative du SPD et des national-socialistes pour la dictature de la bourgeoisie, la mise en application croissante de formes fascistes dans l'exercice de cette dictature par les gouvernements Brüning-Severing et le rôle de la social-démocratie comme appui social principal de la bourgeoisie, reconnu et utilisé tout comme avant par la bourgeoisie ‑ ce sont là les faits les plus importants, qui résultent de l'examen concret de l'évolution en Allemagne depuis le XIe plénum. Ces faits ne confirme-t-ils pas totalement les enseignements et résolutions du XIe plénum? Cela est incontestablement le cas.

[Citation dans l'original .]

En apparence, certains indices tendent à montrer que le SPD envisageait favorablement un rapprochement vis-à-vis du KPD, et même le sollicitait. Le KPD réagit négativement, non par un quelconque “sectarisme”, mais parce qu'il avait de bonnes raisons de juger cette option comme étant contraire aux intérêts de la révolution. C'est pourquoi le KPD avait raison de réfuter la prétendue “opposition” du SPD.

Toujours dans le même article, E. Thälmann dénonce notamment les discours démagogiques du SPD en faveur d'un rapprochement avec le KPD[62]:

À quel point le danger est grand, cela résulte entre autre actuellement des manoeuvres les plus récentes du social-fascisme. Le SPD qui, en rapport avec les nouveaux succès électoraux du parti de Hitler et compte tenu de sa connaissance des négociations du centre avec les nazis en vue d'une coalition qui bien sûr n'ont pas été interrompues pour l'éternité, craint pour ses sièges de ministres prussiens, veut d'une part garder attachées les masses de partisans qui se rebellent, d'autre part démontrer à la bourgeoise qu'elle est indispensable. Pour cette raison elle effectue une nouvelle manoeuvre démagogique. Elle “menace” de faire “front uni avec le Parti communiste”. Le discours de Breitscheid à Darmstadt à l'occasion des élections de Hessen et les commentaires sur ce discours dans le Vorwärts montrent qu'avec cette manoeuvre la social-démocratie joue les oiseaux de mauvais augure invoquant le fascisme hitlérien, pour détourner les masses de la lutte véritable contre la dictature du capital financier. Et ce morceau de duperie qui en fait ne constitue qu'une variant de la politique adoptée par ailleurs du "moindre mal", elle veut maintenant l'agrémenter de la sauce d'une prétendue aimable attention soudaine en direction des communistes (“contre l'interdiction du KPD”) et le faire plus appétissant pour les masses.

[Citation dans l'original .]

Et Thälmann formule quelques observations au sujet de l'évolution de la situation en rapport avec le gouvernement Brüning, telle qu'elle montre concrètement cette problématique[63].

Autour de fin 1930, début 1931, lorsque se manifestait dans les mesures du gouvernement Brüning sur le plan politique et économique une accentuation extraordinaire de la réaction politique et de l'attaque sur les conditions de vie des masses travailleuses, le Parti communiste d'Allemagne a stigmatisé le caractère du gouvernement Brüning devant les masses du prolétariat allemand et de tous les actifs comme un gouvernement de la mise en oeuvre de la dictature fasciste.

Quel était le sens de notre politique d'alors? La social-démocratie qui, après avoir été éjectée du gouvernement du Reich au printemps 1930, avait jusqu'aux élections au Reichstag du 14 septembre de l'année dernière mené une opposition “radicale” feinte, avait pris après l'élection au Reichstag un tournant ouvert vers le front de Brüning. Elle couvrait, permettait, et mettait elle-même le plus activement en oeuvre toutes les mesures réactionnaires et hostiles au peuple qui étaient initiées de la part de la bourgeoisie au gouvernement. Pour masquer devant les masses le caractère fasciste, le contenu de trahison de classe de sa politique de tolérance en faveur de Brüning, la social-démocratie a inventé la théorie du soi-disant “moindre mal”. Le gouvernement Brüning serait ‑ ainsi l'assuraient les dirigeants SPD aux masses ‑ un moindre mal comparé à un gouvernement Hitler-Hugenberg, un rempart contre le fascisme. Par conséquent on devrait le soutenir.

[...]

Le KPD a mis en pièces le tissu de mensonges social-démocrate au sujet du rôle du gouvernement Brüning comme “dernier rempart de la démocratie”, a dévoilé devant les masses le fait que ce gouvernement Brüning, et en accord complet avec lui le gouvernement Braun-Severing, effectuent eux-mêmes la transition vers des formes de domination fascistes concernant l'exercice de la dictature de la bourgeoisie, et a stigmatisé par là en même temps comme  la politique de tolérance du SPD et de l'ADGB en faveur de Brüning.

[...]

Le SPD se rend compte que la bourgeoisie ne renoncera pas à son concours concernant l'exercice de la dictature de la bourgeoisie même si à un moment ultérieur elle laissera participer les national-socialistes à la mise en oeuvre des formes de domination fascistes. Ainsi elle se prépare peu à peu au soutien même d'un gouvernement Brüning-Hitler à la place du gouvernement actuel Brüning-Groener.

[Citation dans l'original .]

L'affirmation que "le SPD se rend compte que la bourgeoisie ne renoncera pas à son concours concernant l'exercice de la dictature de la bourgeoisie même si à un moment ultérieur elle laissera participer les national-socialistes à la mise en oeuvre des formes de domination fascistes", n'est pas pertinente en deux points.

D'une part, il n'est pas approprié d'attribuer une certaine attitude à la bourgeoisie en général, comme un tout. Il existe toujours à des degrés variés des nuances, voire des divergences au sein de la bourgeoisie, où se distinguent des fractions selon leur place spécifique dans la structure économique du pays considéré. Le cours des évènements en Allemagne l'a montré concrètement, avant et après la prise du pouvoir par les national-socialistes. Notamment les tentatives conduits entre autre par Kurt von Schleicher, d'inclure les syndicats en même temps que l'aile du NSDAP autour de Gregor Strasser en un front transversal semblait une idée convenable à certains représentants de la grande industrie, tandis que d'autres considéraient une telle tactique comme trop aventurière.

D'autre part, abstraitement parlant il est certes vrai que logiquement “la bourgeoisie” préfère globalement ‑ toutes choses égales par ailleurs ‑ de bénéficier de la collaboration de la part de la social-démocratie, plutôt que de la voir adopter une attitude d'opposition tranchée. Mais en pratique la situation telle qu'elle se présentait à un certain stade ne laissait pas à la bourgeoisie la faculté de manoeuvrer dans le cadre d'une liberté totale de décider selon ses préférences: le choix d'un recours du moins partiel aux national-socialistes produisit comme résultat que ces derniers éjectèrent les social-démocrates de l'éventail des alliés possibles.

Le texte de Thälmann cité ci-dessus poursuit[64]:

Pendant que d'un côté le SPD effectue des “manoeuvres de gauche” par la “menace" de faire alliance avec le KPD, elle invente de l'autre côté déjà une nouvelle édition de la théorie du "moindre mal". Suivant cela, un gouvernement Brüning-Hitler serait quand-même encore un "moindre mal" comparé à un gouvernement Hitler pur. C'est ni plus ni moins que cette théorie fameuse que monsieur Breitscheid a développé à une manifestation publique à Emden, quelques semaines avant sa nouvelle “profession de foi" de Darmstadt. Les nazis au gouvernement du Reich ‑ cela ne serait pas une tragédie, car d'autant plus rapidement cela leur ferait passer leurs bêtises.

Avec cette théorie, de laisser les national-socialistes au gouvernement “courir à leur déconfiture" le SPD veut paralyser la volonté de lutte antifasciste des masses et préparer d'avance aussi la voie pour un gouvernement Brüning-Hitler se profilant éventuellement, de même qu'elle l'a fait jusqu'ici avec le gouvernement Brüning.

[Citation dans l'original .]

La façon dont Thälmann attribue à Rudolf Breitscheid une certaine position, ne permet pas de juger du bien-fondé de l'interprétation qu'il en fait. Néanmoins il visait juste sur le fond, comme le montre l'attitude du SPD le 31 janvier 1933. (Cf. Chronologie .) Et il est vrai aussi que certains dirigeants du SPD, dont Breitscheid, ont eu des contacts avec K. v. Schleicher en vue d'une éventuelle participation gouvernementale ou du moins une politique de tolérance à son égard, alors qu'il était bien connu que Schleicher tentait de mettre en place un gouvernement pouvant compter sur une position favorable à la fois des sociaux-démocrates que des national-socialistes. (Cf. Chronologie  .) Par ailleurs dès 1930 des dirigeants social-démocrates se montraient préoccupés justement par le fait que "autour de nous, plus qu'on ne le pourrait supposer, l'opinion est répandue qu'on devrait laisser arriver la droite au gouvernement, afin qu'elle se retrouve en faillite, y compris les national-socialistes." (Cf. Chronologie .)

Les auteurs bourgeois utilisent parfois des bribes de textes du KPD pour critiquer celui-ci sur ce même point du “courir à leur déconfiture” [“Abwirtschaften”]. Prenons à titre d'illustration un exemple d'époque qui se trouve précisément dans un article de L. Trotsky. Il se réfère à une intervention de H. Remmele à la session de l'Assemblée nationale du 14 octobre 1931. Trotsky écrit[65]:

Le 14 octobre de l'année dernière, Remmele, l'un des trois chefs officiels du Parti communiste, déclarait au Reichstag: "C'est M. Brüning lui-même qui a dit très clairement: quand ils (les fascistes) seront au pouvoir, le front unique du prolétariat se réalisera et balayera tout" (bruyants applaudissements sur les bancs communistes). Que Brüning cherche à effrayer la bourgeoisie et la social-démocratie par une telle perspective, c'est compréhensible: il défend son pouvoir. Que Remmele console les ouvriers avec cette perspective, c'est une honte: il prépare le pouvoir de Hitler, car toute cette perspective est radicalement fausse et témoigne d'une incompréhension totale de la psychologie des masses et de la dialectique de la lutte révolutionnaire. Si le prolétariat d'Allemagne, qui est aujourd'hui le témoin direct de tous les évènements, laisse les fascistes accéder au pouvoir, c'est-à-dire fait preuve d'un aveuglement et d'une passivité absolument criminelles, il n'y a décidément aucune raison de compter sur le fait qu'après l'arrivée des fascistes au pouvoir, le même prolétariat secouera sa passivité et "balayera tout": [...] Le front unique du prolétariat, pour Remmele, n'est réalisable, nous l'avons vu, qu'après l'arrivée de Hitler au pouvoir. [...]

[Citation dans l'original .]

Le contenu de l'intervention de H. Remmele est ici fortement déformé. Voici ce qu'il dit entre autre[66]:

Ainsi toutes les mesures auxquelles vous [le gouvernement] voulez avoir recours, montrent qu'il n'y a pas d'issue. À la bourgeoisie nous déclarons: ce sera encore moins une issu, si là vous laissez arriver au pouvoir les hordes fascistes. Voilà ce que Monsieur Brüning a dit très clairement: Une fois qu'ils [les fascistes] sont au pouvoir, le front uni du prolétariat se réalisera et balayera tout. Cela sera donc pas plus un salut. Aujourd'hui c'est certain: le monde capitaliste mourant, sombrant n'a plus de moyen pour se sauver et maintenir. Plus aucun emploi de la force ne peut l'aider pour y parvenir. Nous sommes les vainqueurs de demain, et la question ne se pose plus dans les termes: qui gagne contre qui? Cette question est déjà tranchée. La question ne se pose plus qu'ainsi: À quel moment nous ferons tomber la bourgeoisie? Ce moment sera venu quand la classe ouvrière aura établi le front uni. [...] Si ce pouvoir capitaliste a pu encore être sauvé jusqu'à maintenant, alors c'est le cas seulement grâce au moratoire accordé par le SPD. C'est pourquoi le front uni ne peut se réaliser dans la lutte la plus sévère contre tous sans exception, des social-démocrates jusqu'aux fascistes. Le pouvoir fasciste, le gouvernement fasciste ne nous effraient pas. Il est en déconfiture plus rapidement que tout autre gouvernement. [...] Aujourd'hui les social-démocrates annoncent qu'il ne reste qu'une issue, à savoir d'appuyer le gouvernement Brüning, pour que Hitler n'arrive pas au pouvoir. Inversement nous pensons que justement le cabinet actuel Brüning est le stade préliminaire immédiat du cabinet Hitler, et que pour cette raison notre lutte vise à l'objectif de forger le front uni de l'ensemble du prolétariat en Allemagne, pour faire tomber le pouvoir capitaliste et ériger une Allemagne soviétique.

[Citation dans l'original .]

L'objectif exprimé le plus directement est bien celui de construire le front uni contre le gouvernement Brüning pour combattre celui-ci et par là-même empêcher la mise en place d'un gouvernement incluant A. Hitler. C'est donc nullement le tour de passe-passe que L. Trotsky insinue pour le dénoncer ‑ qui consisterait à laisser le fascisme s'installer pour provoquer ainsi la formation du front uni que les communistes seraient incapables de réaliser autrement. Et H. Remmele ne suggère pas non plus de laisser venir intentionnellement les national-socialistes au pouvoir, avec l'arrière-pensée qu'ensuite ils se trouveraient démasqués par leur propre incapacité hypothétique de gouverner. Quand il parle de la déconfiture rapide d'un tel gouvernement, il fait cette prévision non pas en fonction d'une hypothétique innocuité intrinsèque qui caractériserait les fascistes mais en rapport avec la force que lui opposerait le prolétariat. Cela dit, c'est effectivement ce triomphalisme tonitruant qu'exhibe Remmele en affirmant l'invincibilité du prolétariat, qui constitue l'aspect sur lequel ses explications méritent d'être critiquées.

C'est sur la base de ces positions que le KPD décida d'appeler à voter contre le gouvernement Braun-Severing en Prusse, comme l'explique Thälmann dans l'article de décembre 1931[67]:

N'est-ce pas un fait que seulement à l'occasion du référendum le Parti est finalement arrivé à définir avec une telle netteté la position frontale vis-à-vis du gouvernement de Prusse, une preuve de ce que jusque-là nous avions négligé la lutte de principe contre cet appui le plus solide du gouvernement Brüning, ce bélier d'attaque de la bourgeoisie pour la mise en oeuvre de la dictature fasciste? Une telle négligence est particulièrement nuisible du point de vue des élections à venir en Prusse. Au-delà de cela, il faut aller plus loin jusqu'au constat que dans les rangs du prolétariat révolutionnaire aussi ‑ et nous n'en sommes pas exempts de responsabilité ‑, étaient présentes des opinions du moins subconscientes comme si les Braun-Severing seraient peut-être quand-même un “moindre mal” en comparaison avec un gouvernement Hitler-Goebbels en Prusse. Que l'idéologie social-démocrate mensongère influence ainsi les travailleurs révolutionnaires, que de tels vestiges de la pensée social-démocrate existent dans nos rangs, sont cependant, comme nous devons le dire en conformité complète avec les résolutions du XIe plénum, le danger le plus grave pour le Parti communiste.

[Citation dans l'original .]

La question de la caractérisation des forces politiques qui constituent à différents titres des ennemis est traitée avec attention.

E. Thälmann au plénum du Comité central du KPD en janvier 1931[68]:

Avec l'accentuation de la situation de classe, la présence d'éléments d'une crise révolutionnaire, nous devons réfléchir pour savoir où nous devons faire porter nos efforts pour faire avancer le développement révolutionnaire. Camarades! À cet égard il est clair que, certes, l'ennemi principal du prolétariat dans le cadre de la lutte de classe contre la bourgeoisie, contre le capitalisme en Allemagne aujourd'hui est le fascisme, mais qu'en même temps l'obstacle principal pour la révolution prolétarienne dans le camp de la classe ouvrière est représenté par le SPD. C'est pourquoi, pour solliciter et gagner des travailleurs dans le camp adverse, nous devons concentrer l'impact principal de notre force justement sur cet obstacle principal, ce qui naturellement ne signifie pas, que nous pourrions nous permettre de négliger notre travail en particulier parmi les non organisés, de même parmi les travailleurs chrétiens et les travailleurs anticapitalistes partisans des nazis.

[Citation dans l'original .]

D. Manuilskij au 11e plénum du Comité exécutif de l'IC, mars-avril 1931[69]:

L'ennemi principal de la classe ouvrière a été, est et restera toujours la bourgeoisie. Nous n'avons pas besoin d'inventer des formules nouvelles. Dans les démocraties bourgeoises en voie de fascisation, dans les états fascistes, partout, dans toutes les étapes de la fascisation de l'état capitaliste, l'ennemi principal de la classe ouvrière est ‑ la dictature du capital, indépendamment de sa forme démocratique ou fasciste. [...]

Or cela signifie [...] qu'en Allemagne aujourd'hui l'ennemi principal est le gouvernement Brüning soutenu par la social-démocratie, le gouvernement de la mise en oeuvre de la dictature fasciste, qui aujourd'hui incarne toute la pression de la dictature bourgeoise sur la classe ouvrière. Selon le choix que fait la bourgeoisie pour s'appuyer sur telle ou telle aile dans la lutte contre le prolétariat, nous aussi devons déterminer vers quel côté le coup principal des communistes doit être porté. [...] Le gouvernement Brüning est maintenant l'ennemi principal aussi, en outre, parce qu'à une arrivée au pouvoir de Hitler s'opposent maintenant des résistances accrues. C'est justement une telle façon de poser la question qui nous permet au mieux de démasquer la théorie du "moindre mal". Justement parce qu'en Allemagne les communistes luttent contre la dictature bourgeoise comme leur ennemi principal incarné aujourd'hui par le gouvernement Brüning, ils démasquent la manouevre de la social-démocratie, qui présente le gouvernement Brüning comme le "moindre mal" en comparaison au fascisme de couleur hitlérienne. C'est que toute la théorie du "moindre mal" repose sur l'hypothèse que le fascisme de couleur serait l'ennemi principal, en en partant de cette hypothèse on ne peut pas sans identifier totalement le gouvernement Brüning à un éventuel gouvernement Hitler, démontrer aux travailleurs que le gouvernement Brüning n'est pas un moindre mal. Or nous n'identifions pourtant pas Brüning à Hitler, ni le social-fascisme qui appuie Brüning, au fascisme hitlérien.

[Citation dans l'original .]

D. Manuilskij au 11e plénum du Comité exécutif de l'IC, mars-avril 1931[70]:

Derrière tous ces efforts théoriques obstinés qui ne font qu'embrouiller la question, voire sèment la confusion dans leur propre esprit et ce qui est pire, sèment la confusion chez d'autres, se cache en réalité une façon de présenter le fascisme comme “type nouveau” de l'état bourgeois par opposition à l'ancien type démocratique, de ce dernier. Toute l'accentuation de la lutte de classe témoigne de ce que la différence des méthodes de domination de classe entre la soi-disant démocratie bourgeoise et le fascisme s'estompera de plus en plus, respectivement s'est déjà estompée en pratique. [...] Pour duper consciemment les masses, la social-démocratie annonce que l'ennemi principal de la classe ouvrière serait le fascisme, afin de retirer ainsi de l'ordre du jour la question de la lutte contre la dictature du capital en tant que telle.

[Citation dans l'original .]

Le SPD n'est donc pas défini comme la force qui serait, de façon exclusive, l'ennemi principal tout court. Mais compte tenu du rôle d'auxiliaire de la bourgeoisie qu'elle joue, tout en étant fortement implantée dans la classe ouvrière, elle constitue l'obstacle qu'il est primordial d'éliminer.

Thèses adoptées par le 12e plénum du Comité exécutif de l'IC, tenu en aout-septembre 1932[71]

Seulement si le coup principal est dirigé contre la social-démocratie, cet appui social principal de la bourgeoisie, on peut battre et briser avec succès l'ennemi de classe principal du prolétariat, la bourgeoisie.

[Citation dans l'original .]

Kommunistische Internationale (Heft 25/26 1931)[72]:

Toutes les forces du parti doivent être engagées dans la lutte contre la social-démocratie. Dans aucun pays autre que l'Allemagne, le tempo du développement de la crise révolutionnaire dépend d'une telle mesure du tempo de la destruction de la base de masse de la social-démocratie.

[Citation dans l'original .]

Symétriquement, les national-socialistes ne sont pas non plus considérés comme ennemi principal, mais il n'en découle pas pour autant que le KPD sous-estime le danger émanant d'eux. Derrière les particularités du SPD et du NSDAP, le KPD voit à juste titre le même ennemi qu'ils représentent chacun à sa manière.

Résolution du Comité central du KPD adoptée en mai 1931, au sujet des décisions du 11e plénum du Comité exécutif de l'IC[73]:

Dans la période actuelle la bourgeoisie passe à employer de façon toujours renforcée des méthodes de pouvoir fascistes. Or il est inexact de supposer que la dictature fasciste devienne dans toutes les circonstances et dans tous les pays, inévitablement, l'unique forme du pouvoir capitaliste. La dictature fasciste ne représente nullement une opposition de principe vis-à-vis de la démocratie bourgeoisie, sous laquelle est mise en oeuvre aussi la dictature du capital financier. Dans la transition des méthodes de pouvoir démocratiques vers celles fascistes s'exprime plutôt juste une transformation dans les forme, une transition organique de la dictature voilée et cachée vers celle ouverte et non voilée, non pas un changement de son contenu de classe.

En Allemagne le SPD, en tant qu'appui social principal de la bourgeoisie, tente de présenter le gouvernement de la mise en oeuvre de la dictature fasciste, le cabinet Brüning, comme un "moindre mal" vis-à-vis du gouvernement nazi, pour dissimuler par là le caractère fasciste des méthodes de pouvoir du gouvernement Brüning. Ici toute tendance vers une mise en opposition libérale de fascisme et de démocratie bourgeoise, en tant que systèmes par principe opposés, signifierait dans une mesure particulière un soutien à la duperie social-démocrate envers les masses ouvriers et un affaiblissement de la lutte de masse contre la mise en oeuvre de la dictature fasciste.

[Citation dans l'original .]

E. Thälmann, dans son article de décembre 1931[74]:

La conclusion décisive qui devait résulter des résolutions du XIe plénum pour la Parti allemand était, comme nous l'avons vu: diriger l'impact principal contre la social-démocratie en tant qu'appui principal de la bourgeoisie!

[...]

Vis-à-vis de ces positions erronées nous devons donc constater avec toute netteté: les fascistes ne peuvent en aucun cas être battus autrement qu'en démasquant devant les masses de travailleurs le SPD, son alliance avec le fascisme, ses services pour l'ennemi de classe, et en détachant les travailleurs des dirigeants du SPD. Battre le SPD sur le fond, dans les entreprises et les syndicats de l'ADGB, de même que parmi les millions de sans-emploi, démasquer leur politique hostile aux travailleurs ‑ on ne peut le faire en vociférant et en pestant (comme cela est devenu la mode parfois ce dernier temps chez nous), mais seulement par les faits de notre politique révolutionnaire. En réalisant la politique de front uni pour la lutte pour leurs propres intérêts de classe, nous créons chez les travailleurs social-démocrates et la jeunesse prolétarienne une confiance nouvelle envers notre Parti comme le seul dirigeant du prolétariat.

[...] Or quelle déduction en résulte?

La conséquence absolue que, ne serait-ce qu'n vue de gagner la majorité prolétarienne, nous devons diriger l'impact principal contre ce parti qui aujourd'hui encore possède dans le prolétariat la base de masse décisive pour la dictature de la bourgeoisie. Ce n'est pas le parti de Hitler, mais la social-démocratie.

Sans être victorieux dans la lutte contre la social-démocratie nous ne pouvons pas vaincre le fascisme, c'est-à-dire lutter avec succès contre la dictature de la bourgeoisie exercée avec des méthodes fascistes. Sans faire un percée décisive dans la lutte avec le SPD, il est aussi impossible pour nous de venir à bout de tâches consistant à pénétrer de façon décisive dans la base de masse du Zentrum ainsi qu'à prendre d'assaut et à vaincre l'autre appui de la dictature de la bourgeoisie à côté du SPD, le parti de Hitler, dont la base de masse est fournie avant tout par les couches moyennes.

[Citation dans l'original .]

Compte tenu des discours anticommunistes tenus par les dirigeants social-démocrates, ce n'est pas sans raisons que Thälmann affirme que le mouvement ouvrier se trouvait ainsi confronté à un travail de sape mené conjointement par la droite et les social-démocrates et dont le danger particulier résidait dans le fait que ces actions contrerévolutionnaires intervenaient au coeur du mouvement ouvrier. C'est précisément cette situation que vise à caractériser l'emploi du terme de social-fascisme.

Reprenons globalement cette problématique posée en termes d'“ennemi principal”. [“Hauptfeind”]. Fondamentalement, ce qui est commun à toutes les positions erronées en la matière, c'est qu'elles émanent de raisonnements schématiques, faussement “évidents”, non dialectiques. Dans le cadre de ces conceptions, il y a un et un seul ennemi à combattre ‑ l'ennemi principal justement ‑, toutes les autres forces en présence devraient faire cause commune, à part peut-être certaines qui seraient simplement hors-jeu. Pour ce qui est de la notion d'“appui principal” [“Hauptstütze”], les critiques hostiles, dans le but préétabli de combattre le marxisme-léninisme, ne se réfèrent pas au contenu véritable des analyses développées par le KPD, mais prennent pour objet de leurs arguments une interprétation fictive du terme, interprétation conforme à cette même façon de raisonner mentionnée ci-dessus concernant l'“ennemi principal”. Dans leur présentation des choses, parler au sujet du SPD d'appui principal de la bourgeoisie, reviendrait à attribuer au SPD le rôle dominant, situant les social-démocrates au-dessus même des capitalistes, ceci dans un schéma où ces derniers seraient en position subordonnée vis-à-vis des forces politiques. En réalité, les rapports entre la bourgeoisie d'une part, et les forces politiques ‑ notamment les social-démocrates ‑ d'autre part, ne sont pas ainsi, unilatéraux. La bourgeoisie domine de toute façon dans le cadre des rapports sociaux de production. Elle dispose aussi de forces politiques directement liées et contrôlées par elle. Par ailleurs diverses forces politiques défendent des intérêts particuliers, plus ou moins liées, où éloignées, des intérêts des capitalistes. Les fractions du grand capital qui dominent pour l'essentiel l'état capitaliste, s'appuient [stützen sich] à de degrés divers sur certaines de ces forces politiques. Et à leur tour les unes et les autres parmi ces forces politiques, à de degrés divers, appuient [stützen] les détenteurs du pouvoir d'état, c'est-à-dire permettent à ceux-ci de se servir d'elles comme appui [Stütze]. Voilà ce qui constitue le fond des dénonciations formulées par le KPD à l'égard des social-démocrates: leur influence dans la classe ouvrière les met dans une position cruciale pour la bourgeoisie pour laquelle il est vital de maintenir le contrôle sur les masses de travailleurs, et l'orientation de trahison des intérêts de la classe ouvrière adoptée par le SPD permet à la bourgeoisie de s'appuyer effectivement sur la social-démocratie, c'est-à-dire de se servir d'elle comme appui ‑ comme béquille.

Dès lors, pour faire chanceler l'ennemi qu'est la bourgeoisie, il est tout à fait sensé de tâcher à le priver de sa béquille.

Rappelons quelques extraits, clairs et pertinents, des textes cités tout au long de cet exposé:

Thèses adoptées par le 11e congrès KPD, mars 1927:

La social-démocratie ‑ l'ennemi principal du Parti communiste dans le mouvement ouvrier

E. Thälmann au plénum du Comité central du KPD, janvier 1931:

À cet égard il est clair que, certes, l'ennemi principal du prolétariat dans le cadre de la lutte de classe contre la bourgeoisie, contre le capitalisme en Allemagne aujourd'hui est le fascisme, mais qu'en même temps l'obstacle principal pour la révolution prolétarienne dans le camp de la classe ouvrière est représenté par le SPD.

D. Manuilskij au 11e plénum du Comité exécutif de l'IC, mars-avril 1931:

L'ennemi principal de la classe ouvrière a été, est et restera toujours la bourgeoisie. Nous n'avons pas besoin d'inventer des formules nouvelles. Dans les démocraties bourgeoises en voie de fascisation, dans les états fascistes, partout, dans toutes les étapes de la fascisation de l'état capitaliste, l'ennemi principal de la classe ouvrière est ‑ la dictature du capital, indépendamment de sa forme démocratique ou fasciste.

Thèses adoptées par le 12e plénum du Comité exécutif de l'IC, septembre 1932:

Seulement si le coup principal est dirigé contre la social-democratie ‑ cet appui social principal de la bourgeoisie ‑, on peut battre et mettre en pièces l'ennemi de classe principal du prolétariat ‑ la bourgeoisie.

Thèses adoptées par le 13e plénum du Comité exécutif de l'IC, décembre 1933:

La social-démocratie continue à jouer le rôle de l'appui social principal de la bourgeoisie, y compris dans les pays de la dictature fasciste ouverte, en luttant contre l'unité révolutionnaire du prolétariat de même que contre l'Union soviétique, et en aidant la bourgeoisie de prolonger l'existence du capitalisme du fait de la scission de la classe ouvrière.

 

 

 

 

 

Notes



[1]Kommunistischen Internationale - Vierter Weltkongress (5. November‑5. Dezember 1922) - Protokoll, p. 920 (Bibliographie )

[2]. G. Scheuer: Genosse Mussolini - Wurzeln und Wege des Ur-Fascismus, p. 63 (Bibliographie )

[3]P. Gorgolini (Hg.): Benito Mussolini - La rivoluzione fascista, p. 97 (Bibliographie )

B. Mussolini: I discorsi della rivolvzione, p. 92 (Bibliographie )

[4]. G. Zinoviev, "Der deutsche Koltschak". In: Inprekorr 3/48 (22.12.1923), pp. 1123‑1124.

Cf. B. Timmermann: Die Faschismus-Diskussion in der Kommunistischen Internationale (1920‑1935), p. 114 (Bibliographie )

[5]Kommunistischen Internationale - Präsidium des Exekutivkomitee: Die Lehren der deutschen Ereignisse - Januar 1924, p. 67 (Bibliographie )

[6]Kommunistischen Internationale - Präsidium des Exekutivkomitee: Die Lehren..., p. 95-109 (Bibliographie ), ici p. 105.

[7]Kommunistischen Internationale - Fünfter Weltkongreß (17. Juni‑8. Juli 1924) - Protokoll, S. 64‑67 (Bibliographie )

[8]Kommunistischen Internationale - Fünfter Weltkongreß (17. Juni‑8. Juli 1924) - Thesen und Resolutionen, S. 16‑18 (Bibliographie )

[9]. Kommunistischen Internationale - Fünfter Weltkongreß (17. Juni‑8. Juli 1924) - Protokoll, S. 767‑769 (Bibliographie )

[10]"Gegen den Dawesplan", discours au Reichstag, 28 aout 1924. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte der deutschen Arbeiterbewegung - Band 1 - Auswahl aus den Jahren Juni 1919 bis November 1928, pp. 85‑116 (Bibliographie ), ici p. 97.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-016.shtml

[11]. J. Staline: "Zur internationalen Lage", Bolschewik Nr. 11, 20 septembre 1924. In:

J. W. Stalin: Werke - Band 6 - 1924 (Bibliographie ).

http://www.stalinwerke.de/band06/b06-028.html.

[12]. E. Thälmann: "Unter der Führung der Kommunistischen Internationale - für den Sieg des Proletariats!", intervention au 6e Congrès de l'IC, 26 juillet 1928. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 1, pp. 599‑624 (Bibliographie ), ici p. 602.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-073.shtml.

Cf. le texte complet 

[13]. E. Thälmann: "Unter der Führung...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 1 (Bibliographie ), ici p. 605.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-073.shtml.

Cf. le texte complet 

[14]. Programme de l'Internationale communiste, adopté au 6e Congrès de l'IC, le 1er septembre 1928 (Bibliographie ), ici pp. 22‑24

http://www.deutsche-kommunisten.de/Dokumente/1928_09_01_Programm_Internationale.pdf

[15]IML beim ZK der SED (Hg.): Dokumente und Materialien zur Geschichte der deutschen Arbeiterbewegung, Reihe 2, Band 8 - Januar 1924‑Oktober 1929, p. 822 (Bibliographie )

[16]"Die internationale Lage und die nächsten Aufgaben der Kommunistischen Internationale" (thèses concernant les rapports de O. Kuusinen et de D. Manuilskij au 10e Plénum du Comité exécutif de l'IC). In:

Kommunistischen Internationale - Exekutivkomitee - Zehntes Plenum (3‑19 juillet 1929), pp. 887‑902 (Bibliographie ), ici pp. 890‑891.

[17]E. Thälmann: "Die politische Lage und die Aufgaben der Partei", intervention au 12e Congrès du KPD, 10 juin 1929. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 - Auswahl aus den Jahren November 1928 bis September 1930, pp. 44‑128 (Bibliographie ), ici p. 53.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-008.shtml

Cf. le texte complet 

[18]. Il s'agit du congrès du SPD tenu en 1907 à Essen. Cf. notamment les résolutions concernant "les élections et la situation politique":

SPD (Hg.): Sozialdemokratischer Parteitag 1907 (15.‑21. September) - Protokoll, S. 167 (Bibliographie )

http://library.fes.de/parteitage/pdf/pt-jahr/pt-1907.pdf

[19]. E. Thälmann: "Über Probleme der Kommunistischen Partei Deutschlands", intervention au Présidium élargi du CEIC, février 1930. Extraits in:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2, pp. 305‑324 (Bibliographie ), ici pp. 313.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-019.shtml

Cf. tous les extraits 

[20]E. Thälmann: "Unter der Führung...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 1 (Bibliographie ), ici p. 604.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-073.shtml.

Cf. le texte complet 

[21]. http://library.fes.de/parteitage/pdf/pt-jahr/pt-1929.pdf [p. 14]

Cf. Chronologie .

[22]E. Thälmann: "Die politische Lage...", 12e Congrès du KPD. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 (Bibliographie ), ici p. 87.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-008.shtml

Cf. le texte complet 

SPD (Hg.): Sozialdemokratischer Parteitag 1929 (26.‑31. Mai) - Protokoll, S. 109-110 (Bibliographie )

http://library.fes.de/parteitage/pdf/pt-jahr/pt-1929.pdf

[23]E. Thälmann: "Die politische Lage...", 12e Congrès du KPD. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 (Bibliographie ), ici p. 85.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-008.shtml

Cf. le texte complet 

[24]E. Thälmann: "Die politische Lage...", 12e Congrès du KPD. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 (Bibliographie ), ici p. 52.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-008.shtml

Cf. le texte complet 

[25]E. Thälmann: "Die politische Lage...", 12e Congrès du KPD. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 (Bibliographie ), ici p. 83.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-008.shtml

Cf. le texte complet 

[26]. E. Thälmann: "Vorwärts zur Eroberung...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 (Bibliographie ), ici pp. 379‑395.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-021.shtml

Cf. le texte complet 

[27]. IML beim ZK der SED (Hg.): Zur Geschichte der Kommunistischen Partei Deutschlands, pp. 263‑265 (Bibliographie )

Kurt Gossweiler se réfère à ce texte en donnant la citation suivante: "Fascisme et social-fascisme, le NSDAP et votre parti, sont juste deux tendances d'un seule et même appui de la bourgeoisie, sont des jumeaux. Terminez-en...".

(Cf. http://www.kurt-gossweiler.de/index.php/zur-deutschen-und-zur-geschichte-der-sowjetunion/51-zur-strategie-und-taktik-der-spd-und-kpd-in-der-weimarer-republik-april-bis-juni-1957)

Hermann Weber fait figurer le "Manifeste du 12e congrès" dans son recueil Der deutsche Kommunismus: Dokumente 1915-1945 (p. 104, Bibliographie ). En outre, dans son ouvrage Ulbricht fälscht Geschichte (p. 80, Bibliographie ), il cite la phrase " Terminez-en...".

Mais dans les deux cas, la phrase concernant les "deux tendances d'un seule et même appui de la bourgeoisie" ne figure pas. [Citations dans l'original .]

Nous prenons comme référence la 2e édition du recueil Zur Geschichte der Kommunistischen Partei Deutschlands, qui est une édition "revue" ("durchgesehen") par rapport à la 1ère, datant de 1954. Nous n'avons pas pu vérifier si la phrase en question figure dans cette première édition.

[28]. E. Thälmann: "Die politische Lage und die Aufgaben der Partei", intervention au 11e Congrès du KPD, 2 mars 1927. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 1, pp. 438‑489 (Bibliographie ), ici p. 461.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-054.shtml

Cf. le texte complet 

[29]. E. Thälmann: "Die politische Lage...", 12e Congrès du KPD. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 (Bibliographie ), ici p. 52.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-008.shtml

Cf. le texte complet 

[30]. E. Thälmann: "Über Probleme...". Extraits in:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 (Bibliographie ), ici pp. 312.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-019.shtml

Cf. tous les extraits 

[31]E. Thälmann: "Volksrevolution über Deutschland", intervention au plénum du Comité central du KPD, 15‑17 janvier 1931. In

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1 - September 1930 bis Februar 1932, S. 83 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-008.shtml

Cf. le texte complet 

[32]. E. Thälmann: "Im Kampf gegen die faschistische Diktatur", intervention à la 3e conférence de parti du KPD, octobre 1932. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 2, S. 300 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band4/thaelmann-band4-022.shtml

Cf. le texte complet 

[33]. Résolution du Comité central du KPD, au sujet des décisions du 11e plénum du Comité exécutif de l'IC, mai 1931. Citée in:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 227‑228 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-020.shtml

[34]. Intervention de clôture suite à son rapport. In:

D. Manuilskij: "Die kommunistischen Parteien und die Krise des Kapitalismus", rapport au 11e plénum du CEIC (26 mars - 11 avril 1931) (Bibliographie ), ici p. 121.

[35]. E. Thälmann: "Quelques erreurs dans notre travail théorique et pratique et la voie pour les surmonter", "Die Internationale“, Nov.-Dez.1931, Heft 11/12. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 301 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet 

[36]E. Thälmann: "Quelques erreurs...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 312‑315 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet 

[37]. K.‑D. Bracher: Die Auflösung der Weimarer Republik - eine Studie zum Problem des Machtverfalls in der Demokratie - Teil 2, p. 585 (Bibliographie )

[38]E. Thälmann: "Volksrevolution...". In

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 84 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-008.shtml

Cf. le texte complet 

[39]. D. Manuilskij: "Die kommunistischen Parteien und die Krise des Kapitalismus"... (Bibliographie )

[40]. E. Thälmann: "Die Lage in Deutschland und die Aufgaben der KPD", intervention au 11e plénum du CEIC, avril 1931. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-016.shtml

Cf. le texte complet 

[41]. "Über die internationale Lage und die Aufgaben der Sektionen der Kommunistischen Internationale" (thèses concernant le rapport de O. Kuusinen au 12e Plénum du Comité exécutif de l'IC). In:

Kommunistischen Internationale - Exekutivkomitee - Zwölftes Plenum (27. August - 15. September 1932) - Thesen und Resolutionen (Bibliographie )

[42]. "Die internationale Lage und die Aufgaben der Sektionen der Kommunistischen Internationale" (rapport de O. Kuusinen au 12e Plénum du Comité exécutif de l'IC). In:

Kommunistischen Internationale - Exekutivkomitee - Zwölftes Plenum (27. August - 15. September 1932) - O. Kuusinen (Bibliographie ), ici p. 71.

[43]. O. K. Flechtheim: Die Kommunistische Partei Deutschlands in der Weimarer Republik, pp. 285‑294 (Bibliographie ), ici pp. 286‑288, p. 291.

[44]. E. Thälmann: "Im Kampf...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 2, S. 303, 305 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band4/thaelmann-band4-022.shtml

Cf. le texte complet 

[45]. Extrait in: Kommunistischen Internationale (Hg.): Der Faschismus in Deutschland, p. 277 et suiv. (Bibliographie ), ici pp. 277‑279.

[46]. E. Thälmann: "Die politische Lage...", 11e Congrès du KPD. In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 1 (Bibliographie ), ici p. 462.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-054.shtml

Cf. le texte complet 

[47]IML beim ZK der SED (Hg.): Dokumente und Materialien zur Geschichte der deutschen Arbeiterbewegung, Reihe 2, Band 8, p. 457 (Bibliographie )

[48]E. Thälmann: "Unter der Führung...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 1 (Bibliographie ), ici p. 605.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-073.shtml.

Cf. le texte complet 

[49]. E. Thälmann: "Im Kampf...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 2, S. 303 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band4/thaelmann-band4-022.shtml

Cf. le texte complet 

[50]"Über die rechte Abweichung in der KPdSU", discours au plénum du Comité central du PCUS(b), avril 1929, in:

J. W. Stalin: Werke - Band 12 - April 1929 - Juni 1930 (Bibliographie )

http://www.stalinwerke.de/band12/b12-005.html

J. W. Staline: Les Questions du Léninisme - Tome 2 (Bibliographie )

[51]E. Thälmann: "Unter der Führung...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 1 (Bibliographie ), ici p. 606.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-073.shtml.

Cf. le texte complet 

[52]E. Thälmann: "Unter der Führung...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 1 (Bibliographie ), ici p. 619.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band1/thaelmann-band1-073.shtml.

Cf. le texte complet 

[53]. Kommunistischen Internationale - Sechster Weltkongreß (17. Juli‑1. September 1928) - Protokoll - Band 1, p. 315 (Bibliographie )

[54]. Kommunistischen Internationale - Sechster Weltkongreß (17. Juli‑1. September 1928) - Thesen, Resolutionen, Programm, Statuten, p. 22 (Bibliographie )

[55]Résolution du Comité central du KPD, au sujet des décisions du 11e plénum du Comité exécutif de l'IC, mai 1931. Citée in:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 321 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

[56]. E. Thälmann: "Quelques erreurs...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 303 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet 

[57]E. Thälmann: "Im Kampf...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 2, S. 304 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band4/thaelmann-band4-022.shtml

Cf. le texte complet 

[58]. E. Thälmann: "Über Probleme...". Extraits in:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2  (Bibliographie ), ici pp. 311.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-019.shtml

Cf. tous les extraits 

[59]. E. Thälmann: "Vorwärts zur Eroberung...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze zur Geschichte... - Band 2 (Bibliographie ), ici pp. 395.

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band2/thaelmann-band2-021.shtml

Cf. le texte complet 

[60]. E. Thälmann: "Volksrevolution...". In

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 83 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-008.shtml

Cf. le texte complet 

[61]. E. Thälmann: "Quelques erreurs...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 300 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet 

[62]. E. Thälmann: "Quelques erreurs...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 302 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet 

[63]. E. Thälmann: "Quelques erreurs...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 295, S. 296 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet 

[64]. E. Thälmann: "Quelques erreurs...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 313 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet 

[65]. L. Trotsky: Porträt des Nationalsozialismus - Ausgewählte Schriften 1930‑1934 (Bibliographie )

http://www.marxists.org/francais/trotsky/oeuvres/1932/01/320127e.htm

[66]. http://www.reichstagsprotokolle.de/Blatt2_w5_bsb00000130_00034.html

[67]. E. Thälmann: "Quelques erreurs...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 301 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet 

[68]. E. Thälmann: "Volksrevolution...". In

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 91 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-008.shtml

Cf. le texte complet 

[69]D. Manuilskij: "Die kommunistischen Parteien und die Krise des Kapitalismus"... (Bibliographie ), ici p. 123.

[70]. D. Manuilskij: "Die kommunistischen Parteien und die Krise des Kapitalismus"... (Bibliographie ), ici p. 122.

[71]. "Über die internationale Lage und die Aufgaben der Sektionen der Kommunistischen Internationale" (thèses concernant le rapport de O. Kuusinen au 12e Plénum du Comité exécutif de l'IC)... (Bibliographie )

[72]. Cf. http://www.kurt-gossweiler.de/index.php/spd-und-kpd/128-zur-strategie-und-taktik-der-spd-und-kpd-in-der-weimarer-republik-april-bis-juni-1957-2

[73]Résolution du Comité central du KPD, au sujet des décisions du 11e plénum du Comité exécutif de l'IC, mai 1931. Citée in:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 320 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

[74]. E. Thälmann: "Quelques erreurs...". In:

E. Thälmann: Reden und Aufsätze 1930‑1933 - Band 1, S. 303, S. 304, S. 308 (Bibliographie )

http://www.deutsche-kommunisten.de/Ernst_Thaelmann/Band3/thaelmann-band3-026.shtml

Cf. le texte complet .