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Karl Marx

Le Capital - Livre 2e
3e section : La reproduction et la circulation
de l'ensemble du capital social

Chapitre 21 : Accumulation et reproduction élargie

 

 

Source:

Le Capital - Livre deuxième - Tome II
Paris, Éditions sociales, 1974, p. 136‑167

 

 

 

 

 

 

 

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Textes de Karl Marx ‑ Sommaire

 

 

 

 

 

 

[1] Nous avons montré au Livre premier comment se fait l'accumulation pour le capitaliste pris isolément. En monnayant le capital-marchandise, on monnaye en même temps le surproduit représentant la plus‑value. Cette plus‑value ainsi transformée en argent est reconvertie par le capitaliste en éléments naturels additionnels de son capital productif. Au cours du cycle de production suivant, le capital agrandi fournit une production plus grande. Ce qui a lieu pour le capital individuel doit également se manifester pour l'ensemble de la production annuelle; tout comme nous avons vu, en étudiant la reproduction simple, que la précipitation progressive en argent, sous forme de trésor, des éléments fixes usés ‑ qui se produit pour le capital individuel ‑ se manifeste également dans la reproduction sociale annuelle.

Si un capital individuel est égal à 400 c + 100 v et la plus‑value annuelle à 100, le produit-marchandise est égal à 400 c + 100 v + 100 pl. Ces 600 sont transformés en argent. De cette somme, 400 c sont reconvertis en la forme naturelle du capital constant; 100, en force de travail et, en plus ‑ si toute la plus‑value est accumulée, ‑ 100 pl sont transformés en capital constant additionnel par leur conversion en éléments naturels du capital productif. Pour cela, nous supposons: 1. que cette somme, dans des conditions techniques données, suffit, soit à l'extension du capital constant en fonction, soit à l'établissement d'une nouvelle entreprise industrielle. Il peut cependant arriver qu'il soit nécessaire de transformer la plus‑value en argent et d'accumuler ce dernier pendant beaucoup plus longtemps, avant qu'un tel procès puisse commencer, c'est-à-dire avant qu'une accumulation réelle et un élargissement de la production puissent avoir lieu. Nous supposons, 2. qu'en réalité il y a déjà eu auparavant production à échelle élargie; car, pour pouvoir convertir l'argent (c'est-à-dire la plus‑value thésaurisée en argent) en éléments du capital productif, ces éléments doivent pouvoir s'acheter comme marchandises sur le marché. Peu importe qu'ils soient achetés sous la forme de marchandises finies, ou fabriqués sur commande. De toute façon, ils ne seront payés qu'après finition et, en tout cas, qu'après qu'a eu lieu, en ce qui les concerne, une reproduction effective à échelle élargie, une extension de la production jusqu'alors normale. Ils devaient exister virtuellement, c'est-à-dire sous la forme de leurs éléments, puisqu'il suffit de l'impulsion donnée par la commande (qui équivaut à un achat antérieur à l'existence de la marchandise et à une vente anticipée), pour que leur production ait effectivement lieu. L'argent qui se trouve d'un côté fait naître de l'autre côté la reproduction élargie, parce que celle-ci existe en puissance indépendamment de l'argent; l'argent n'est pas, en effet, en lui-même, un élément de la reproduction réelle.

Si le capitaliste A, par exemple, vend pendant une année ou une série d'années les quantités de marchandises qu'il a produites peu à peu, il transforme par là progressivement en argent la fraction de ce produit marchandise, support de la plus‑value (le surproduit), c'est-à-dire la plus‑value produite par lui sous forme de marchandise. Il accumule cet argent petit à petit et se constitue ainsi un capital-argent potentiel nouveau: potentiel, à cause de sa destination et de sa capacité à être converti en éléments du capital productif. En réalité, il n'accomplit qu'une simple thésaurisation qui n'est pas un élément de la reproduction effective. Son activité se borne d'abord à retirer progressivement de l'argent de la circulation. Naturellement, il n'est pas exclu que l'argent circulant qu'il met ainsi sous clef ait été lui-même, avant son entrée dans la circulation, une fraction d'un autre trésor. Ce trésor de A, qui est virtuellement un futur capital-argent, n'est pas une richesse sociale supplémentaire, pas plus que s'il était dépensé en moyens de consommation. De l'argent retiré de la circulation, et qui s'y trouvait donc auparavant, peut déjà avoir été immobilisé comme élément de trésor ou avoir été du salaire sous forme monétaire: il peut avoir servi à monnayer des moyens de production ou d'autres marchandises, à faire circuler des éléments constants du capital ou des revenus capitalistes. Il n'est pas une nouvelle richesse. Pas plus que l'argent, du point de vue de la simple circulation des marchandises, n'est porteur, en dehors de sa propre valeur, d'une valeur décuplée sous prétexte qu'il a accompli dix rotations dans un jour et réalisé dix valeurs différentes de marchandises. Les marchandises existent sans lui et lui-même demeure ce qu'il est (ou plutôt il diminue par usure), qu'il accomplisse une rotation ou bien dix. Ce n'est que dans la production d'or que se crée une nouvelle richesse sous forme d'argent potentiel (pour autant que l'or produit englobe du surproduit, support de plus‑value). C'est seulement dans la mesure où la totalité du nouveau produit-argent entre dans la circulation, qu'il accroît la matière argent de nouveaux capitaux-argent virtuels.

Bien qu'elle ne soit pas une nouvelle richesse sociale supplémentaire, la plus‑value thésaurisée sous forme argent représente un nouveau capital-argent potentiel à cause de la fonction pour laquelle elle est accumulée. (Nous verrons plus tard que du capital-argent nouveau peut naître autrement que par transformation progressive en or de la plus‑value.)

De l'argent est retiré de la circulation et accumulé comme trésor par vente de marchandises, non suivie d'achat. Si l'on conçoit cette opération comme une pratique générale, il ne paraît pas possible de prévoir d'où peuvent provenir les acheteurs. Dans ce procès, en effet, qu'il faut concevoir comme pratique générale puisque tout capital individuel peut se trouver dans sa phase d'accumulation, chacun veut vendre, afin de thésauriser, et personne ne veut acheter.

Si on se représentait le procès de circulation entre les différentes parties de la reproduction annuelle, comme se déroulant en ligne droite (ce qui serait faux, puisque, à quelques rares exceptions près, il consiste en mouvements réciproques s'opérant en sens opposé), il faudrait commencer avec le producteur d'or (ou d'argent) qui achète sans vendre, et supposer que tous les autres lui vendent. Alors la totalité du surproduit social annuel (support de toute plus‑value) passerait entre ses mains, et tous les autres capitalistes partageraient proportionnellement entre eux son surproduit qui se trouve réalisé par nature en monnaie, l'or étant la forme naturelle de sa plus‑value. Car la fraction du produit du producteur d'or qui doit remplacer son capital en fonction est déjà retenue et utilisée en conséquence. La plus‑value produite en or du producteur d'or serait alors le seul fonds d'où tous les autres capitalistes tireraient la matière nécessaire à la conversion en or de leur surproduit annuel. Elle devrait donc égaler la valeur totale de la plus‑value sociale annuelle, qui doit commencer par se changer en chrysalide, sous forme de trésor. Si absurdes que soient ces hypothèses, elles n'ont pas d'autre utilité que d'expliquer la possibilité d'une thésaurisation simultanée générale. La reproduction elle-même, sauf du côté des producteurs d'or, n'en aurait pas avancé d'un pouce.

Avant de résoudre cette difficulté apparente, nous ferons la distinction suivante: l'accumulation dans la section I (production des moyens de production) et dans la section II (production des moyens de consommation). Nous commençons par la section I.

I. - Accumulation dans la section I.

1. Thésaurisation.

Il est évident qu'aussi bien les investissements de capitaux dans les nombreuses branches d'industrie qui composent la section I, que les divers investissements de capitaux individuels à l'intérieur de chacune de ces branches d'industrie (suivant leur âge, c'est-à-dire la durée de leur activité passée, abstraction faite de leur volume, des conditions techniques, des conditions de marché. etc.) se trouvent à des phases diverses du processus de transformation progressive de la plus‑value en capital-argent potentiel. Peu importe que ce capital-argent doive servir à l'élargissement du capital en fonction ou à l'établissement de nouvelles entreprises industrielles qui sont les deux formes d'élargissement de la production Une partie des capitalistes transforme donc sans cesse en capital productif son capital-argent potentiel, lorsqu'il a atteint le volume requis. Ceci veut dire qu'ils achètent, avec l'argent accumulé par la conversion en or de la plus‑value, des moyens de production, des éléments additionnels du capital constant, tandis que d'autres capitalistes sont encore occupés à la thésaurisation de leur capital-argent potentiel. Les capitalistes appartenant à ces deux catégories s'affrontent donc, les uns comme acheteurs, les autres comme vendeurs, chacun se limitant exclusivement à son rôle.

Supposons que A vende à B 600 (= 400 c + l00 v + 100 pl), B pouvant très bien représenter plusieurs acheteurs. A a vendu 600 en marchandises contre 600 en argent, dont 100 représentent la plus‑value qu'il retire de la circulation et thésaurise en argent; mais ces 100 en argent ne sont que la forme monétaire du surproduit qui était le support d'une valeur de 100. La thésaurisation n'est pas du tout une production, ni d'emblée, un accroissement de la production. Le rôle du capitaliste se borne à retirer de la circulation l'argent obtenu par la vente du surproduit, d'une valeur de 100, à le retenir et à le confisquer. Cette opération n'est effectuée non seulement par A, mais en de nombreux points du périmètre de la circulation par d'autres capitalistes A, A´, A´´, qui travaillent tous aussi activement que A à ce genre de thésaurisation. Ces nombreux points, où de l'argent est retiré de la circulation et accumulé sous forme de nombreux trésors individuels ou de capitaux-argent potentiels, semblent être autant d'obstacles à la circulation, parce qu'ils immobilisent l'argent et le privent pour un temps plus ou moins long de son aptitude à circuler. Mais il faut tenir compte que, dans la circulation simple des marchandises, longtemps avant que celle-ci n'ait eu pour fondement la production marchande capitaliste, il y a eu déjà thésaurisation; la quantité d'argent existant dans la société est toujours plus grande que la fraction impliquée dans la circulation active, bien que cette part puisse croître ou décroître suivant les circonstances. Ces mêmes trésors et cette même thésaurisation se retrouvent ici, mais ils sont à présent un facteur immanent du procès de production capitaliste.

On comprendra le plaisir de certains lorsque, à l'intérieur du système de crédit, tous ces capitaux potentiels deviennent de par leur concentration entre les mains des banques, etc., du capital disponible, loanable capital, du capital-argent, qui n'est plus capital passif, perspective d'avenir, mais capital actif, capital usuraire (l'usure signifiant ici accroissement).

A ne réalise cette thésaurisation que s'il se présente seulement comme vendeur (quand il s'agit de son surproduit) et ne joue pas ensuite le rôle d'acheteur. Sa production répétée de surproduit ‑ porteur de la plus‑value, qui sera transformée en or ‑ est donc la condition nécessaire à sa thésaurisation. Dans le cas présent, où nous n'examinons que la circulation à l'intérieur de la section I, la forme naturelle du surproduit, ainsi que du produit total dont le surproduit constitue une fraction, représente la forme naturelle d'un composant du capital constant I. Elle appartient donc à la catégorie des moyens de production servant à la fabrication des moyens de production. Nous verrons, par la suite, à quelle fonction le surproduit est destiné entre les mains des acheteurs B, B´, B´´, etc.

À ce propos, il faut avant tout retenir ceci: Quoique A retire de la circulation de l'argent en échange de sa plus‑value et qu'il le thésaurise, il met également des marchandises dans la circulation sans en retirer en compensation d'autres marchandises, ce qui permet par ailleurs à B, B´, B´´, etc., de jeter de l'argent dans la circulation et de n'en retirer que de la marchandise. Dans notre cas, cette marchandise, d'après sa forme naturelle et sa destination, s'intègre au capital constant de B, B´, B´´, etc., comme élément fixe ou circulant. Nous parlerons de ceci plus en détail, dès que nous nous occuperons de l'acheteur du surproduit: B, B´, B´´, etc.

Faisons ici une remarque en passant: comme précédemment, dans la reproduction simple, nous trouvons à nouveau ici que l'échange des divers composants du produit annuel, c'est-à-dire leur circulation (qui doit englober en même temps la reproduction du capital et, qui plus est, son rétablissement dans ses diverses déterminations: capital-argent constant, variable, fixe et circulant, capital-marchandise), ne suppose nullement un simple achat de marchandises se complétant par une vente ultérieure ou inversement. Dans ce cas, il n'y aurait effectivement qu'un échange marchandises contre marchandises, comme le pensent les économistes et surtout l'école du libre-échange, depuis les physiocrates et Adam Smith. Nous savons que le capital fixe, une fois faits les débours qu'il nécessite, n'est pas renouvelé pendant toute la durée de son activité, mais continue à fonctionner sous son ancienne forme, pendant que sa valeur se dépose peu à peu en argent. Or nous avons vu que le renouvellement périodique[2] du capital fixe IIc (toute la valeur du capital IIc se convertit en éléments d'une valeur égale à I(v+pl)) suppose, d'une part, l'achat pur et simple de la fraction fixe de IIc qui est reconvertie de la forme argent en la forme naturelle et à laquelle correspond la simple vente de Ipl; d'autre part, ce renouvellement suppose une vente pure et simple de la part de IIc, vente de la fraction de valeur fixe (correspondant à l'usure) qui se dépose en argent et à laquelle correspond un simple achat de Ipl. Afin que l'échange se fasse ici normalement, il faut admettre que le simple achat de la part de IIc est égal en valeur à la simple vente de la part de IIc; et, de même, on doit supposer que la simple vente de Ipl à IIc (groupe 1) est égale au simple achat de IIc (groupe 2)[3] (p.112 [4]). S'il en était autrement, la reproduction simple serait altérée; l'achat exclusif d'un côté doit être couvert par une vente exclusive de l'autre. De même, il faut supposer ici que la simple vente de la partie A, A´, A´´ de Ipl appelée à être thésaurisée est équilibrée par le simple achat de la partie B, B´, B´´ de Ipl, qui transforme le trésor des capitalistes en éléments de capital productif additionnel.

Dans la mesure où l'équilibre se rétablit par le fait que l'acheteur se présente ensuite, et pour la même somme de valeur, comme vendeur, et vice versa, il y a reflux de l'argent vers le côté d'où il avait été avancé lors de l'achat, et qui a vendu avant d'acheter à nouveau. Mais l'équilibre réel, par rapport à l'échange de marchandises lui-même, c'est-à-dire l'échange des différentes fractions du produit annuel, est conditionné par l'identité de valeur des marchandises échangées les unes contre les autres.

Mais, pour autant que se font des échanges unilatéraux: un groupe de simples acheteurs d'un côté, un groupe de simples vendeurs de l'autre (nous avons vu que l'échange normal du produit annuel sur la base capitaliste entraîne ces métamorphoses unilatérales), l'équilibre existe seulement si l'on admet que les sommes de valeur des achats unilatéraux et des ventes unilatérales coïncident. Le fait que la production marchande est la forme générale de la production capitaliste implique déjà le rôle joué dans celle-ci par l'argent non seulement comme moyen de circulation, mais comme capital-argent. Il s'ensuit certaines conditions particulières pour l'échange normal dans ce mode de production et, partant, pour le cours normal de la reproduction, que ce soit à échelle simple ou élargie. Elles se convertissent en autant de conditions d'un développement anormal, en possibilités de crises, puisque l'équilibre ‑ étant donné la forme naturelle de cette production ‑ est lui-même fortuit.

Nous avons vu de même qu'au cours de l'échange Iv contre une valeur correspondante de IIc, ce dernier finit bien par remplacer de la marchandise II par une valeur équivalente en marchandise I et que la vente de leur propre marchandise se complète ici ultérieurement, pour l'ensemble des capitalistes II, par l'achat de marchandises I d'une égale valeur. Il y a bien remplacement, mais non échange entre les capitalistes I et II, dans cet échange de leurs marchandises respectives. IIc vend sa marchandise à la classe ouvrière de I; ils se rencontrent, la dernière uniquement comme acheteur de marchandises, les premiers uniquement comme vendeurs de marchandises: avec l'argent ainsi obtenu, IIc se présente uniquement comme acheteur de marchandises au capitaliste collectif I; celui-ci, par contre, ne figure que comme vendeur exclusif de marchandises, jusqu'à concurrence du montant de Iv. Ce n'est que par cette vente de marchandises que I reproduit finalement son capital variable sous forme de capital-argent. Si le capital de I affronte celui de II uniquement comme vendeur de marchandises jusqu'à concurrence de Iv, par contre il affronte sa propre classe ouvrière comme acheteur de marchandises dans l'achat de force de travail. Si la classe ouvrière I se présente au capitaliste II exclusivement comme acheteur de marchandises (moyens de subsistance), elle est exclusivement, vis-à-vis du capitaliste I, vendeur de marchandises: elle vend sa force de travail.

L'offre continuelle de force de travail de la part de la classe ouvrière de I, la reconversion d'une fraction du capital-marchandise I en forme argent du capital variable, le remplacement d'une fraction du capital-marchandise II par des éléments naturels du capital constant IIc sont autant de données indispensables[5] qui se conditionnent mutuellement. Mais elles ont pour intermédiaire un procès très compliqué qui inclut trois procès de circulation indépendants les uns des autres et s'enchevêtrant cependant. C'est précisément la complexité de ce procès qui offre autant d'occasions de déroulement anormal.

2. Le capital constant additionnel.

Le surproduit, porteur de la plus‑value, ne coûte rien à ceux qui se l'approprient, c'est-à-dire aux capitalistes de I. Ils n'ont en aucune manière besoin d'avancer de l'argent ou des marchandises pour l'obtenir. Déjà pour les physiocrates, l'avance est la forme générale de la valeur réalisée en éléments de capital productif. Ce qu'ils avancent n'est donc rien d'autre que leur capital constant et variable. L'ouvrier ne se borne pas à maintenir leur capital constant par son travail, ni à remplacer leur valeur-capital variable par une fraction correspondante de valeur nouvellement créée sous forme marchandise, mais il leur fournit en outre, par son surtravail, une plus‑value existant sous forme de surproduit. Par la vente réitérée de ce surproduit, les capitalistes constituent leur trésor, le capital-argent additionnel en puissance. Dans le cas que nous examinons ici, ce surproduit consiste en moyens de production servant à fabriquer des moyens de production. Ce n'est qu'entre les mains de B, B´, B´´, etc. (I), que ce surproduit fait fonction de capital constant additionnel. Mais, virtuellement, il l'est déjà avant qu'il ne soit vendu, lorsqu'il est encore entre les mains des thésauriseurs A, A´, A´´, etc. (I). Si nous considérons seulement le volume de valeur de la reproduction du côté de I, nous nous trouvons encore dans les limites de la simple reproduction. Aucun capital additionnel n'a été mis en mouvement pour créer ce surplus de capital constant virtuel (le surproduit) et aucun surtravail plus important que celui qui se dépense sur la base de la reproduction simple n'a été accompli. Ici, la différence réside uniquement dans la forme du surtravail employé et dans le caractère concret de son utilité particulière. Ce surtravail a été dépensé en moyens de production pour Ic et non pour IIc. Au lieu d'être dépensé en moyens de production servant à fabriquer des moyens de consommation, il l'a été en moyens de production servant à fabriquer des moyens de production. Dans la reproduction simple, nous avons supposé que toute la plus‑value I était dépensée, comme revenu, en marchandises II. Elle ne se composait donc que des moyens de production, destinés à remplacer le capital constant IIc sous sa forme naturelle. Pour qu'on puisse passer de la reproduction simple à la reproduction élargie, la production dans la section I doit être capable de fabriquer moins d'éléments de capital constant pour II, mais d'autant plus pour I. Cette transition, qui n'ira pas toujours sans difficultés, est facilitée par le fait qu'un certain nombre de produits de I peuvent servir de moyens de production dans les deux sections.

Il s'ensuit donc ‑ compte tenu du seul volume de valeur ‑ que, dans le cadre de la reproduction simple, se trouve produit le substrat matériel de la reproduction élargie. Il consiste simplement en surtravail de la classe ouvrière I, directement consacré à la production de moyens de production et à la création d'un capital additionnel virtuel I. Le capital-argent additionnel virtuel créé par A, A´, A´´ (I) ‑ par vente répétée de leur surproduit obtenu sans dépense de capitaux-argent, ‑ est donc ici simplement la forme argent de moyens de production I, fabriqués en supplément.

Ici (nous verrons qu'il peut en être autrement), la production d'un capital additionnel virtuel[6] n'exprime rien d'autre qu'un phénomène du procès même de production: la production, sous une forme déterminée, d'éléments du capital productif.

La production à grande échelle de capital-argent virtuel additionnel ‑ en de nombreux points du périmètre de la circulation ‑ n'est donc rien d'autre que le résultat et l'expression d'une vaste production de capital productif virtuel additionnel, dont l'apparition elle-même ne suppose aucune dépense supplémentaire d'argent de la part des capitalistes industriels.

La transformation progressive de ce capital productif virtuel additionnel en capital-argent virtuel (trésor) de la part de A, A´, A´´, etc. (I), conditionnée par les ventes successives de leur surproduit ‑ c'est-à-dire par une vente de marchandises unilatérale et répétée, sans achat complémentaire, ‑ s'accomplit par retrait réitéré d'argent hors de la circulation et sa thésaurisation. Sauf dans le cas où le producteur d'or est l'acheteur, cette thésaurisation ne suppose en aucune manière une richesse supplémentaire en métaux précieux, mais seulement une modification de la fonction de l'argent déjà en circulation. Jusqu'à présent, il faisait office de moyen de circulation, maintenant il fait fonction de trésor, de capital-argent virtuel en formation. Il n'y a donc pas de relation causale entre la formation d'un capital-argent additionnel et la masse de métal précieux se trouvant dans un pays.

Il s'ensuit donc encore: plus est grand le capital productif déjà en fonction dans un pays (y compris la force de travail qui lui est incorporée, génératrice de surproduit), plus sont développés la force productive du travail et par conséquent aussi les moyens techniques d'une extension rapide de la production de moyens de production ‑ plus est grande, par conséquent, la masse du surproduit, tant en valeur qu'en masse de valeurs d'usage par lesquelles il est représenté ‑, plus sont donc grands:

1. le capital productif virtuel additionnel sous forme de surproduit entre les mains de A, A´, A´´, etc.;

2. la masse de ce surproduit transformé en argent, donc du capital-argent virtuel additionnel entre les mains de A, A´, A´´, etc. Si donc Fullarton, par exemple, ne veut pas prétendre[7] parler de surproduction au sens ordinaire, mais bien de surproduction de capital, à savoir de capital-argent, ceci prouve une fois encore à quel point même les économistes bourgeois les meilleurs comprennent peu de chose au mécanisme de leur système.

Si le surproduit, directement créé et accaparé par les capitalistes A, A´, A´´ (I), est la base concrète de l'accumulation capitaliste, c'est-à-dire de la reproduction élargie, bien qu'il ne fonctionne effectivement en cette qualité qu'entre les mains de B, B´, B´´, ... (I), il est, par contre, absolument improductif au cours de sa métamorphose en argent ‑ en tant que trésor et capital-argent virtuel se formant petit à petit. Sous cette forme, il est parallèle au procès de production, mais en dehors de lui: c'est un poids mort (dead weight) de la production capitaliste. Le désir de rendre cette plus‑value utilisable, en vue d'obtenir un profit ou un revenu, tandis qu'elle s'accumule comme capital-argent virtuel, trouve son accomplissement dans le système du crédit et dans les "petits papiers" (Papierchen). Par ce fait, le capital financier acquiert sous une autre forme l'influence la plus énorme sur la marche et le prodigieux développement du système de production capitaliste.

Le surproduit, transformé en capital-argent virtuel, sera d'autant plus important en volume qu'a été plus grande la masse totale du capital déjà en fonction et de l'activité duquel il est issu. L'augmentation absolue du volume annuel du capital-argent virtuel reproduit facilite sa fragmentation, de sorte qu'il peut être plus rapidement investi dans une affaire particulière, soit entre les mains du même capitaliste, soit en d'autres mains (par exemple: celles de membres de sa famille, en cas d'héritage, etc.).

La fragmentation du capital-argent signifie ici qu'il est entièrement détaché du capital générateur pour être investi, comme nouveau capital-argent, dans une nouvelle affaire indépendante.

Les vendeurs A, A´, A´´ ... (I) du surproduit l'ont obtenu comme résultat direct du procès de production, qui n'exige aucun acte de circulation nouveau autre que l'avance de capital constant et variable requise même dans la reproduction simple. Ce faisant, ils ont en outre jeté la base concrète d'une reproduction élargie, ils ont effectivement fabriqué du capital virtuel additionnel; mais l'attitude de B, B´, B´´ (I) est différente: 1. Ce n'est qu'entre leurs mains que le surproduit des A, A´, A´´ ... fonctionnera réellement comme capital constant additionnel (pour l'instant, nous laissons de côté l'autre élément du capital productif: la force de travail additionnelle, c'est-à-dire le capital variable additionnel); 2. Pour qu'il parvienne entre leurs mains, un acte de circulation est nécessaire: B, B´, B´´ ... doivent acheter le surproduit.

Au sujet du point l, il faut remarquer qu'une grande partie du surproduit (capital constant virtuel additionnel) produit par A, A´, A´´ ... (I), bien que créée dans l'année en cours, pourra ne faire effectivement office de capital industriel entre les mains de B, B´, B´´ ... (I) que l'année suivante ou encore plus tard; quant au point 2, la question se pose: d'où vient l'argent nécessaire à ce procès de circulation?

Dans la mesure où les produits créés par B, B´, B´´ ... (I) s'intègrent de nouveau en nature dans leur propre procès de production, il va sans dire qu'une fraction de leur propre surproduit est dans cette mesure directement transmise (sans intervention aucune de la circulation) à leur capital productif et y rentre comme élément additionnel du capital constant. Dans la même mesure, ces produits ne servent pas non plus à convertir en or le surproduit de A, A´, A´´ ... (I). Abstraction faite de cela, d'où vient l'argent? Nous savons que les B ont accumulé leur trésor comme le font A, A´, A´´ ..., par la vente de leurs surproduits respectifs. Ils ont maintenant atteint leur but: leur capital-argent accumulé, virtuel pour l'instant, va fonctionner dorénavant effectivement comme capital-argent additionnel. Mais nous tournons toujours en rond. La question subsiste: D'où vient l'argent que les B (I) ont antérieurement retiré de la circulation et accumulé?

Cependant, nous avons appris dans l'étude de la reproduction simple que les capitalistes I et II doivent posséder une certaine quantité d'argent pour pouvoir échanger leur surproduction. Là, l'argent, qui ne servait qu'à la dépense du revenu en moyens de consommation, retournait aux capitalistes, dans la mesure où ils l'avaient avancé pour l'échange de leurs marchandises respectives. Ici, le même argent réapparaît, mais avec une fonction différente. Les A et les B (I) se fournissent tour à tour l'argent destiné à transformer le surproduit en capital-argent virtuel additionnel et remettent alternativement en circulation, comme moyen d'achat, le capital-argent nouvellement formé.

La seule chose qu'il y ait à supposer ici est que la masse d'argent, existant dans un pays donné (la rapidité de la circulation, etc., étant supposée la même), suffit, aussi bien pour la circulation active que pour la réserve thésaurisée. Et nous avons vu que cette même condition préalable devait être remplie lors de la simple circulation des marchandises. La fonction des trésors seule diffère ici. La quantité d'argent existante doit aussi être plus grande: 1. parce que, dans la production capitaliste, toute la production (excepté le métal précieux nouvellement extrait et les quelques produits consommés par le producteur lui-même) revêt la forme marchandise et doit par conséquent passer par la métamorphose en argent; 2. parce que, en régime capitaliste, la masse du capital-marchandise et son volume de valeur ne sont pas seulement plus grands de façon absolue, mais croissent à une vitesse beaucoup plus grande; 3. parce qu'un capital variable de plus en plus étendu doit sans cesse se transformer en capital-argent; 4. parce que la création de nouveaux capitaux-argent allant de pair avec l'élargissement de la production, la matière de leur forme trésor doit aussi nécessairement exister. Ceci, qui est en tout cas valable pour la première phase de la production capitaliste, où même le système du crédit s'accompagne d'une circulation principalement métallique, s'applique également à la phase la plus développée du système de crédit, dans la mesure où il demeure basé sur la circulation métallique. D'une part, la production additionnelle de métaux précieux, par ses alternatives d'abondance ou de rareté, peut ici exercer une influence perturbatrice sur les prix des marchandises, aussi bien pour d'assez longues périodes que pour de très courts intervalles. D'autre part, le mécanisme du crédit, par toutes sortes d'opérations, de méthodes et de dispositifs techniques, est constamment occupé à limiter à un minimum relativement de plus en plus bas la circulation métallique effective, ce qui accroît corrélativement le caractère artificiel de tout le mécanisme et les chances de perturbations dans sa marche normale.

Il peut arriver que les différents B, B´, B´´ ... (I), dont le nouveau capital-argent virtuel entre en activité, aient à s'acheter mutuellement leurs produits (les fractions de leur surproduit) et soient amenés à se les vendre les uns aux autres. Dans ce cas, et la marche étant normale, l'argent avancé pour la circulation du surproduit revient aux différents B, dans la proportion même où ils l'ont avancé pour la circulation de leurs marchandises respectives, Si l'argent circule comme moyen de paiement, il ne sert qu'à équilibrer des comptes dans la mesure où les achats et les ventes ne se compensent pas. Mais, ici, comme partout, il est important de supposer d'abord une circulation métallique dans sa forme la plus simple et la plus primitive, parce que le flux et le reflux, l'équilibre de bilans, bref, tous les éléments qui apparaissent dans le système de crédit comme des opérations consciemment réglementées se manifestent alors comme existant indépendamment du système de crédit: la chose apparaît sous sa forme naturelle primitive et non sous sa forme ultérieure, conventionnelle.

3. Le capital variable additionnel.

Puisqu'il s'est agi jusqu'à présent du seul capital constant additionnel, nous avons maintenant à nous occuper de l'étude du capital variable additionnel.

Au Livre Ier, nous avons longuement expliqué comment, en système capitaliste, il y a toujours de la force de travail disponible et comment on peut mettre plus de travail en mouvement si c'est nécessaire, sans augmenter le nombre d'ouvriers employés, ou encore sans accroître la masse de force de travail. Il n'est donc pas nécessaire, pour l'instant, de nous y arrêter; nous supposons plutôt que la fraction du capital-argent nouvellement constituée, transformable en capital variable, trouvera toujours la force de travail, en laquelle elle doit se convertir. Nous avons aussi expliqué au Livre Ier comment un capital donné peut, à l'intérieur de certaines limites et sans accumulation, étendre sa provision de production. Mais ici il s'agit bien d'accumulation de capital au sens spécifique du terme, de sorte que l'élargissement de la production est conditionné par la transformation de la plus‑value en capital additionnel, par conséquent aussi par un élargissement de la base capitaliste de la production.

Le producteur d'or peut accumuler, comme capital-argent virtuel, une partie de sa plus‑value en or. Dès que ce capital a atteint le volume requis, il peut le convertir directement en un nouveau capital variable, sans être obligé, pour ce faire, de vendre d'abord son surproduit; il peut le transformer aussi en éléments du capital constant. Dans ce dernier cas, il doit trouver les éléments matériels de son capital constant; soit, comme nous l'avons supposé dans l'étude précédente, que chaque producteur stocke sa production pour apporter au marché sa marchandise finie, soit qu'il travaille sur commande. L'élargissement réel de la production, c'est-à-dire le surproduit, est supposé dans les deux cas, dans le premier comme réellement existant, dans le second comme virtuellement disponible.

II. - Accumulation dans la section II.

Nous avons jusqu'ici supposé que les A, A´, A´´ ... (I) vendent leur surproduit aux B, B´, B´´ ... qui appartiennent à la même section I. Supposons cependant que A (I) monnaye son surproduit en le vendant à un B de la section II. Ceci ne peut se faire que si A (I) n'achète pas de moyens de consommation après avoir vendu à B (II) des moyens de production. Il ne doit donc y avoir qu'une vente unilatérale de la part de A. Nous avons vu que IIc ne peut être converti de capital-marchandise en la forme naturelle de capital constant productif que si non seulement Iv mais aussi une partie au moins de Ipl sont échangés contre une fraction de IIc, lequel IIc est composé de moyens de consommation. Mais voici que A ne peut transformer son Ipl en or que si cet échange n'a pas lieu: bien plus, il retire de la circulation l'argent obtenu par la vente de son Ipl à IIc, au lieu d'acheter avec cet argent des moyens de consommation à IIc. Il y a bien alors de la part de A (I) formation d'un capital-argent virtuel supplémentaire, mais il y a d'autre part une fraction d'égale valeur du capital constant B (II) figée sous forme de capital-marchandise, incapable de se convertir en la forme naturelle de capital constant productif. En d'autres termes: une fraction des marchandises de B (II), et c'est une fraction qu'à première vue il doit vendre pour pouvoir reconvertir tout son capital constant en sa forme productive, est devenue invendable. Il se produit donc, en ce qui le concerne, une surproduction qui, pour son compte à lui, gêne la reproduction, même à échelle constante.

Dans ce cas, le capital-argent virtuel supplémentaire du côté de A (I) est bien la forme monnayée d'un surproduit (plus‑value). Mais le surproduit (plus‑value), en tant que tel, n'est encore ici qu'un phénomène de la reproduction simple, non de la reproduction à échelle élargie. Afin que la reproduction de IIc puisse avoir lieu à l'échelle constante, I(v+pl) doit finalement être échangé contre IIc, et ceci est vrai de toute façon, même pour une fraction de Ipl. A (I), par la vente à B (II) de son surproduit, lui a fourni une fraction correspondante de valeur de capital constant en nature; mais en même temps, en retirant son argent de la circulation, en ne complétant pas sa vente par un achat ultérieur, il a rendu invendable une égale fraction de valeur des marchandises de B (II). Donc, si nous considérons la totalité de la reproduction sociale, qui comprend à la fois les capitalistes I et II, la conversion du surproduit de A (I) en capital-argent virtuel entraîne l'impossibilité de reconvertir une égale partie de la valeur du capital-marchandise de B (II) en capital productif (constant). Il s'ensuit donc non pas la virtualité d'une production à échelle élargie, mais un freinage et par conséquent un déficit de la reproduction simple. Puisque la formation et la vente du surproduit de A (I) sont des phénomènes normaux de la reproduction simple, même sur la base de celle-ci nous trouvons les deux phénomènes suivants, qui se conditionnent réciproquement: formation de capital-argent virtuel supplémentaire dans la section I (donc une sous-consommation du point de vue de II); stagnation dans la section II de stocks de marchandises qui ne peuvent être reconvertis en capital productif (donc surproduction relative dans la section II): excédent de capital-argent dans la section I et déficit dans la reproduction de la section II.

Sans nous arrêter plus longtemps sur ce point, nous remarquerons simplement que nous avions supposé, dans l'analyse de la reproduction simple, que la totalité de la plus‑value de I et de II était dépensée comme revenu. Mais, en réalité, une fraction de la plus‑value est dépensée comme revenu et une autre est convertie en capital. Ce n'est qu'à cette condition qu'une accumulation réelle peut avoir lieu. Que l'accumulation puisse se faire aux dépens de la consommation est ‑ sous cette forme générale ‑ une illusion qui contredit la nature de la production capitaliste, puisqu'elle suppose que le but et le moteur de la production capitaliste c'est la consommation, et non pas la course à la plus‑value et sa capitalisation, c'est-à-dire l'accumulation.

Maintenant, regardons de plus près l'accumulation dans la section II.

La première difficulté rencontrée au sujet de IIv, à savoir sa reconversion à partir d'un composant du capital-marchandise II en capital contant II sous sa forme naturelle, concerne la reproduction simple; prenons le schéma déjà utilisé antérieurement:

(1.000 v + 1.000 pl) I s'échangent contre:

2.000 IIc.

Mais si, par exemple, la moitié du surproduit I, égale à 1.000 pl/2 ou 500 Ipl, est à nouveau incorporée à la section I comme capital constant, cette fraction du surproduit retenue en I ne peut pas remplacer une partie de IIc. Au lieu d'être convertie en moyens de consommation, elle est destinée à servir de moyens de production supplémentaires en I. (Ce secteur de la circulation entre I et II comporte effectivement un échange réciproque, avec double changement de lieu, des marchandises; il diffère par là du remplacement de 1.000 IIc par 1.000 Iv, dû aux ouvriers de I.) La fraction de surproduit ne peut pas assumer cette fonction simultanément en I et en II. Il n'est pas possibles que le capitaliste dépense la valeur de son surproduit en moyens de consommation, tout en le consommant en même temps productivement, c'est-à-dire en l'incorporant à son capital productif. Au lieu de 2.000 I(v+pl), ce sont seulement 1.500 à savoir: (1.000 v + 500 pl) I qui peuvent s'échanger contre les 2.000 IIc. 500 IIc ne peuvent pas être reconvertis de leur forme marchandise en capital productif (constant) II. Il y aurait donc en II une surproduction dont le volume correspondrait exactement à celui de l'élargissement de la production qui s'est produit en I. Il se pourrait que la surproduction de II réagit si vivement sur I que même le reflux des 1.000, dépensés par les ouvriers de I en moyens de consommation II, ne s'effectuât que partiellement. Ces 1.000 ne retourneraient donc pas entre les mains des capitalistes I sous forme de capital-argent variable. Même la reproduction à échelle constante serait alors enrayée pour eux, et qui plus est du fait de leur simple tentative d'élargir la reproduction. À ce propos, il faut remarquer qu'il n'y a eu effectivement que reproduction simple en I et que seul le groupage des éléments du schéma a été modifié, pour permettre un élargissement ultérieur, disons l'année suivante.

On pourrait essayer d'éluder ces difficultés de la façon suivante: les 500 IIc restant en magasin chez les capitalistes, et non immédiatement convertibles en capital productif, sont d'autant plus éloignés d'être de la surproduction qu'ils constituent, au contraire, un élément nécessaire à la reproduction que nous avons négligé jusqu'ici. Nous avons vu que des provisions d'argent s'accumulent en de nombreux points: elles doivent donc être retirées de la circulation, en partie pour rendre possible la formation d'un nouveau capital-argent à l'intérieur même de I, en partie pour fixer provisoirement, et sous forme d'argent, la valeur du capital fixe qui est consommé petit à petit. Mais comme, d'après notre schéma, la totalité de l'argent et des marchandises se trouve exclusivement et d'emblée entre les mains des capitalistes I et II et que n'interviennent ni commerçant, ni financier, ni banquier, ni catégories de simples consommateurs non directement intéressés à la production de marchandises, il s'ensuit que la constitution permanente de stocks de marchandises (dans notre cas, de la part de leurs producteurs respectifs eux-mêmes) est indispensable pour entretenir la marche du mécanisme de la reproduction. Les 500 IIc restant en magasin chez les capitalistes II représentent donc la provision en moyens de consommation qui permet la continuité du procès de consommation, inclus dans la reproduction et qui, dans notre cas, assure la transition d'une année à l'autre. Le fonds de consommation que ses vendeurs (qui sont aussi ses producteurs) détiennent encore ne peut pas descendre à zéro cette année, pour recommencer à zéro l'année prochaine; pas plus que cela n'est possible dans le passage du jour au lendemain. Puisqu'une reconstitution constante de tels stocks de marchandises est nécessaire ‑ même si elle varie en volume, ‑ nos producteurs capitalistes II ont besoin d'une réserve de capital en argent qui leur permette de continuer leur procès de production, bien qu'une fraction de leur capital productif soit passagèrement figée sous forme de marchandise. D'après notre hypothèse, ils allient dans leurs fonctions tout le commerce à l'entreprise de production; ils doivent donc aussi disposer de tout le capital-argent additionnel dont disposent les commerçants, lorsque les diverses fonctions du procès de reproduction, devenues autonomes, sont assumées par des capitalistes d'espèces différentes.

Il faut objecter à cela: 1. Cette constitution de provision et sa nécessité valent pour tous les capitalistes, aussi bien pour ceux de I que pour ceux de II. Considérés comme simples vendeurs de marchandises, ils se distinguent seulement parce qu'ils vendent des marchandises de nature différente. La provision en marchandises II suppose une provision antérieure en marchandises I. Si, d'un côté, nous ne tenons pas compte de cette provision, nous devons la négliger aussi de l'autre. Mais si nous la prenons en considération des deux côtés, le problème reste exactement le même. 2. De même que l'année en cours se termine pour II avec une provision de marchandises pour l'année suivante, de même II a commencé l'année avec un stock de marchandises transmises de l'année précédente. Lorsque nous analysons la reproduction annuelle, prise dans son expression la plus abstraite, nous devons donc barrer ce stock dans les deux cas: d'une part, en laissant à cette année toute sa production, c'est-à-dire en y comprenant le stock de marchandises qu'elle laisse à l'année suivante; d'autre part, en lui retirant la provision de marchandises qu'elle a reçue de l'année précédente. Il nous reste alors, comme objet de notre analyse, le produit total d'une année moyenne. 3. Le simple fait que la difficulté à tourner ne nous ait pas frappés dans l'analyse de la reproduction simple prouve qu'il s'agit d'un phénomène spécifique, seulement dû à un arrangement différent (par rapport à la reproduction) des éléments I, modification de groupage sans laquelle aucune reproduction à échelle élargie ne saurait avoir lieu.

III. - Représentation schématique de l'accumulation.

Nous allons examiner maintenant la reproduction d'après le schéma suivant:

Schéma a.

I. 4.000 c + 1.000 v + 1.000 pl = 6.000

II. 1.500 c + 376 v + 376 pl = 2.252

Total: 8.252

Nous remarquons d'abord que la somme totale du produit social annuel (8.252) est inférieure à celle du premier schéma, où elle était égale à 9.000. Nous pourrions prendre une somme bien plus grande, la décupler, si nous voulions. Mais nous avons choisi une somme inférieure à celle du schéma I, pour mettre en évidence le fait que la reproduction à échelle élargie (considérée ici seulement comme une production fonctionnant avec des investissements de capitaux plus grands) n'a rien à voir avec la grandeur absolue du total. Nous montrerons aussi que, pour une masse de marchandises donnée, elle suppose seulement un arrangement autre ou une destination fonctionnelle différente des divers éléments du produit donné; par rapport à la totalité de sa valeur, elle n'est donc d'abord qu'une reproduction simple. Les données de la reproduction simple se modifient non pas en quantité, mais dans leur détermination qualitative. Cette modification est la condition matérielle préalable de l'élargissement ultérieur de l'échelle de la reproduction[8].

Nous pourrions représenter le schéma différemment, en adoptant des rapports différents entre capital variable et capital constant. Par exemple:

Schéma b.

I. 4.000 c + 875 v + 875 pl = 5.750

II. 1.750 c + 376 v + 376 pl = 2.502

Ainsi arrangé, notre schéma semblerait fait pour la reproduction à échelle simple, où la plus‑value serait entièrement dépensée comme revenu, sans être accumulée. Dans les deux cas a et b, nous avons un produit annuel de même valeur, mais, en b, le groupement de ses éléments par fonctions est tel que la reproduction recommence à la même échelle, tandis qu'en a il constitue la base matérielle pour une reproduction à échelle élargie. En b, 875 v + 875 pl = 1750 I(v+pl) s'échangent sans excédent contre 1.750 IIc, tandis qu'en a (1.000 v + 1.000 pl) I = 2.000 I(v+pl) s'échangent contre 1.500 IIc en laissant un excédent de 500 Ipl pour l'accumulation dans la section I.

Venons-en à une analyse plus poussée du schéma a. Admettons qu'en I, aussi bien qu'en II, une moitié de la plus‑value, au lieu d'être dépensée en revenu, soit accumulée, c'est-à-dire transformée en élément du capital additionnel. Comme la moitié de 1.000 Ipl (= 500) doit être accumulée sous l'une ou l'autre forme pour être investie comme capital-argent additionnel, c'est-à-dire transformée en capital productif additionnel - (1.000 v + 500 pl) I seulement sont dépensés comme revenu. La grandeur normale de IIc à faire figurer ici est, par conséquent, 1.500 seulement. Nous n'avons pas besoin d'étudier ici l'échange entre 1.500 I(v+pl) et 1.500 IIc, puisqu'il a été examiné comme procès de la reproduction simple. Nous n'avons pas davantage à considérer les 4.000 I, puisque leur réarrangement, en vue de la nouvelle reproduction (cette fois elle a lieu à échelle élargie), a également été vu dans l'étude du procès de la reproduction simple.

Restent à examiner: 500 Ipl et (376 v + 376 pl) II, en ce qui concerne d'une part les conditions intérieures de I comme de II, d'autre part, le mouvement de l'un à l'autre. Comme nous avons supposé qu'au sein de II la moitié de la plus‑value doit aussi être accumulée, 188 sont à convertir en capital, dont 1/4 en capital variable, ce qui fait 47 (mettons 48, pour faciliter nos comptes); restent 140 à convertir en capital constant.

Nous rencontrons ici un nouveau problème dont la simple existence étonnera l'opinion courante, d'après laquelle des marchandises de natures diverses s'échangent entre elles, de même des marchandises contre de l'argent, et cet argent, à nouveau, contre de nouvelles marchandises. Ce qui permet de transformer les 140 IIpl en capital productif, c'est leur remplacement par une fraction équivalente des marchandises Ipl.

Il va de soi que la fraction de Ipl, à échanger contre IIpl, doit consister en moyens de production pouvant s'intégrer dans la production de I comme dans celle de II, ou exclusivement dans celle de II. Ce remplacement ne peut se faire que par vente unilatérale de la part de II, puisque la totalité du surproduit 500 Ipl, que nous avons encore à étudier, doit servir à l'accumulation à l'intérieur de I; elle ne peut donc être échangée contre des marchandises II; en d'autres termes, I ne peut pas l'accumuler et la consommer en même temps. II doit acheter 140 Ipl avec de l'argent comptant, sans que, toutefois, cet argent lui revienne par vente ultérieure de sa marchandise à I. Et c'est un procès qui se renouvelle tous les ans, pour chaque production nouvelle, pour autant qu'elle est reproduction à échelle élargie. D'où la section II peut-elle tirer son argent?

Il semble, au contraire, que II ne soit pas d'un bon rapport en ce qui concerne la formation d'un nouveau capital-argent. Cette formation, qui, d'abord, n'est qu'une simple thésaurisation, accompagne en effet, et, en production capitaliste, conditionne l'accumulation réelle.

Nous avons d'abord 376 IIv; ce capital-argent 376, avancé pour obtenir la force de travail, retourne constamment au capitaliste II sous forme de capital-argent variable, lorsque la marchandise II a été achetée. L'argent qui fonctionne dans ce cycle n'est nullement augmenté par le fait que sans cesse il s'éloigne de son point de départ ‑ en l'occurrence la poche du capitaliste ‑ et y retourne. Cette opération n'est donc pas l'origine d'une accumulation d'argent. Il n'est pas non plus possible de retirer cet argent de la circulation en vue de constituer un capital-argent thésaurisé, nouveau capital-argent virtuel.

Mais attention! N'y a-t-il pas moyen de faire là quelque petit profit?

Nous ne devons pas oublier que la section II possède, vis-à-vis de la section I, cet avantage que les ouvriers employés par elle sont amenés à lui acheter des marchandises qu'ils ont eux-mêmes fabriquées, La section II est acheteur de force de travail et en même temps vendeur de marchandises à ceux qui possèdent la force de travail qu'elle emploie.

l. La section II, comme d'ailleurs aussi la section I, peut simplement abaisser le salaire au-dessous de son niveau moyen normal, ce qui libère une fraction de l'argent fonctionnant comme capital variable. Constamment répété, ceci pourrait devenir une source normale de thésaurisation et par conséquent de formation, dans la section II, d'un capital-argent virtuel supplémentaire. Comme il s'agit ici de la formation normale d'un capital, nous ne parlerons évidemment pas des profits frauduleux éventuels. Mais il ne faut pas oublier que le salaire normal effectivement payé (qui, toutes choses égales d'ailleurs, détermine la grandeur du capital variable) ne l'est pas par un effet de bonté de la part des capitalistes, mais bien parce que, dans des conditions données, il doit être payé. Cette explication des choses se trouve donc ainsi écartée. Si nous appelons 376, le capital variable dont dispose la section II, nous ne pouvons pas lui substituer 350 v par exemple, en vue d'expliquer un nouveau problème qui surgit.

2. D'autre part, la section II, considérée dans son ensemble, possède, comme nous l'avons déjà dit, l'avantage par rapport à la section I d'être à la fois l'acheteur de la force de travail et le revendeur de leur marchandise à ses propres ouvriers. Tous les pays industriels, par exemple l'Angleterre et les États-Unis, offrent les preuves les plus tangibles de la façon dont cela peut être exploité: en payant nominalement des salaires normaux, mais en en récupérant une partie par un véritable vol, sans équivalait correspondant en marchandises; ce tour peut être réalisé soit par le trucksystem[9], soit par une falsification du moyen de circulation qui peut d'ailleurs ne pas tomber sous le coup de la loi. (Approfondir cela par quelques exemples frappants.) Il s'agit là de la même opération qu'au paragraphe 1, mais camouflée et exécutée par des voies détournées. Il faut donc la rejeter au même titre que la première. Pour nous, il s'agit non pas du salaire nominal, mais du salaire effectivement payé.

Comme nous le voyons dans une analyse objective du mécanisme capitaliste, certaines tares infamantes, qui le marquent encore exceptionnellement, ne peuvent servir de subterfuge pour éluder des difficultés théoriques. Mais, chose étrange, la grande majorité de mes critiques bourgeois pousse les hauts cris comme si j'avais fait tort aux capitalistes (par exemple au Livre Ier du Capital), en admettant qu'ils paient la force de travail à sa juste valeur, ce que, pour la majeure partie, ils ne font pas. (Ici, je pourrais citer Schäffle, avec la magnanimité qu'on veut bien m'attribuer.)

Bref, nous ne pouvons rien tirer des 376 IIv, pour résoudre la question.

Mais il semble bien qu'avec les 376 IIpl l'affaire soit encore plus scabreuse. Ici, les capitalistes d'une même section sont seuls à s'affronter, s'achetant et se vendant mutuellement les moyens de consommation qu'ils ont produits. L'argent nécessaire à ces échanges ne sert que de moyen de circulation, et il doit, dans un déroulement normal, retourner aux intéressés, dans la mesure où ils l'ont avancé à la circulation, pour recommencer toujours le même circuit.

Il semble n'y avoir ici que deux moyens pour retirer cet argent de la circulation, en vue de former du capital-argent virtuel supplémentaire. Ou bien une partie des capitalistes II gruge l'autre et lui vole de l'argent. Nous savons qu'il n'est besoin, pour former un nouveau capital-argent, d'aucune extension provisoire du moyen de circulation; il faut simplement que de l'argent soit retiré de la circulation en certains points et thésaurisé. Cela ne changerait rien que cet argent soit volé, donc que la formation d'un capital-argent additionnel parmi une partie des capitalistes II s'accompagne d'une perte d'argent positive chez les autres. Ceux des capitalistes II ainsi frustrés devraient vivre un peu moins à l'aise et ce serait tout.

Ou bien une fraction de IIpl, sous forme de moyens de subsistance nécessaires, est directement transformée en capital variable nouveau, à l'intérieur de la section II. Nous examinerons, à la fin de ce chapitre (IV), comment cela peut se faire.

1. Premier exemple.

A. Schéma de la reproduction simple:

I. 4.000 c + 1.000 v + 1.000 pl = 6.000

II. 2.000 c + 5.00 v + 5.00 pl = 3.000

Total = 9.000.

B. Schéma de départ pour reproduction sur une échelle élargie:

I. 4.000 c + 1.000 v + 1.000 pl = 6.000

II. 1.500 c + 750 v + 750 pl = 3.000

Total = 9.000.

Supposons que dans le schéma B la moitié de la plus‑value de I est accumulée, ce qui fait 500; nous obtenons d'abord (1.000 v + 500 pl) ou 1.500 I(v+pl) qui doivent être remplacés par 1.500 IIc; il reste alors en I: 4.000 c + 500 pl, ces derniers devant être accumulés. Le remplacement de (1.000 v + 500 pl) I par 1.500 IIc est un procès de la reproduction simple qui a déjà été discuté à propos de cette dernière.

Admettons que sur les 500 Ipl, 400 doivent être convertis en capital constant et 100 en capital variable. L'échange, à l'intérieur de I, des 400 pl destinés à être capitalisés a déjà été étudié. Ils peuvent donc, sans difficulté, être annexés à Ic et nous avons alors pour I: 4.400 c + 1.000 v + 100 pl (ces derniers sont à transformer en 100 v).

De son côté, la section II achète à I, dans un but d'accumulation, les 100 Ipl (existant en moyens de production) qui constituent alors du capital constant additionnel de II, tandis que les 100 argent, avec quoi II les paie, sont transformés en forme argent du capital variable additionnel de I. Nous avons alors pour I un capital de 4.400 c + 1.100 v (ces derniers en argent) = 5.500.

II possède maintenant 1.600 c comme capital constant. Pour les faire fonctionner, il doit avancer en plus 50 v en argent pour acheter de la force de travail, de sorte que son capital variable passe de 750 à 800. Cette extension des capitaux constant et variable de II, au total 150, est prélevée sur sa plus‑value; il ne reste donc que 600 pl des 750 IIpl, comme fonds de consommation des capitalistes II, dont le produit annuel se répartit de la façon suivante:

II. 1.600 c + 800 v + 600 pl (fonds de consommation) = 3 000. Les 150 pl produits en moyens de consommation, qui sont ici transformés en (100 c + 50 v) II, sont entièrement absorbés en nature dans la consommation des ouvriers: 100 en sont consommés par les ouvriers I (100 Iv) et 50 par les ouvriers II (50 IIv), comme nous l'avons expliqué plus haut. En effet, il est nécessaire qu'en II, où le produit total est réalisé dans la forme requise par l'accumulation, une partie de la plus‑value, excédant l'autre de 100, soit reproduite sous forme de moyens de consommation nécessaires. Si la reproduction à échelle élargie en est réellement à son début, les 100 du capital-argent variable de I refluent à II, par l'intermédiaire de la classe ouvrière I; II, par contre, transmet 100 pl, en stock de marchandises, à I et en même temps 50, en stock de marchandises, à sa propre classe ouvrière.

L'arrangement, modifié en vue de l'accumulation, est maintenant le suivant:

I. 4.400 c + 1.100. + 500 pl (fonds de consommation) = 6.000

II. 1.600 c + 800 v + 600 pl (fonds de consommation) = 3.000

Total, comme ci-dessus = 9000

Dont, comme capital:

I. 4.400 c + 1.100 v (argent) = 5.500

II. 1600 c+ 800 v (argent) = 2.400

Total: 7.900

alors que la production a commencé avec:

I. 4.400 c + 1.100 v = 5500

II. 1.500 c + 750 v = 2250

Total: 7.250

Si l'accumulation réelle se fait sur cette base, c'est-à-dire si l'on produit effectivement avec ce capital accru, nous obtenons à la fin de l'année suivante:

I. 4.400 c + 1.100 v + 1.100 pl = 6.600

II. 1.600 c + 800 v + 800 pl = 3.200

Total: 9.800

Admettons que l'accumulation dans la catégorie I continue à la même cadence, c'est-à-dire que 550 pl sont dépensés comme revenu et 550 pl accumulés. D'abord 1.100 Iv sont remplacés par 1.100 IIc, ensuite il faut encore réaliser 550 Ipl en marchandises II d'une même valeur, ce qui fait au total 1.650 I(v+pl). Mais le capital constant de II, qu'il faut remplacer, est seulement égal à 1.600, les 50 restants doivent donc être prélevés sur 800 IIpl. Si nous écartons d'abord l'aspect monétaire, nous avons comme résultat de cette transaction:

I. 4.400 c + 550 pl (à capitaliser); en outre, 1.650(v+pl) en fonds de consommation des capitalistes et des ouvriers, réalisés en marchandises IIc.

II. 1.650 c (dont 50 en excédent tirés de IIpl, d'après ce qui précède) + 800 v + 750 pl (fonds de consommation des capitalistes).

Si l'ancien rapport de v à c subsiste en II, alors 25v supplémentaires doivent être dépensés pour 50 c; il faut les prendre sur 750 pl; nous obtenons donc:

II. 1.650 c + 825v + 725pl.

Dans la catégorie I, 550 pl sont à capitaliser; sur cette somme, si le rapport antérieur est conservé, 440 constituent du capital constant et 110 du capital variable. Il faut éventuellement puiser ces 110 dans 725 IIpl, ce qui veut dire que des moyens de consommation, d'une valeur de 110, sont consommés par les ouvriers de I au lieu de l'être par les capitalistes II; ces derniers sont donc forcés de capitaliser ces 110 pl, qu'ils ne peuvent pas consommer. Des 725 IIpl, il reste donc 615 IIpl. Mais, si la section II transforme ces 110 en capital constant additionnel, elle a besoin d'un nouveau capital variable supplémentaire de 55; celui-ci doit à nouveau être tiré de sa plus‑value; si on le déduit des 615 IIpl, il reste 560 pour la consommation des capitalistes II et nous obtenons, après avoir accompli tous les transferts réels et virtuels, les valeurs-capital suivantes:

I. (4.400 c + 440 c) + (1.100 v + 110 v) = 4.840 c + 1.210 v = 6050

II. (1600 c + 50 c + 110 c) + (800v + 25v + 55v) = 1.760 c + 880 v = 2.640

Total = 8.690

Si les choses doivent se dérouler normalement, l'accumulation doit se faire plus rapidement en II qu'en I, parce que, sinon, la fraction de I(v+pl), qui doit être convertie en marchandises IIc croîtrait plus rapidement que les IIc contre lesquels seulement elle peut s'échanger.

Si la reproduction est poursuivie sur cette base, et toutes choses égales d'ailleurs, nous aurons, à la fin de l'année suivante:

I. 4.840 c + 1.210 v + 1.210 pl = 7.260

II. 1.760 c + 880 v + 880 pl = 3.520

Total: 10.780.

Si le taux de partage de la plus‑value reste invariable, la section I doit d'abord dépenser en revenus 1210 v et la moitié de pl = 605, soit en tout 1815. Ce fonds de consommation est à nouveau supérieur de 55 à IIc; ces 55 doivent être déduits de 880 pl, reste: 825. La transformation de 55 IIpl en IIc implique en outre qu'on déduise 27,5 de IIpl pour du capital variable équivalent; il reste donc à consommer 797,5 IIpl.

La section I a maintenant à capitaliser 605 pl, dont 484 en capital constant et 121 en capital variable; ces derniers sont à déduire de IIpl, qui s'élève encore à 797,5; il reste donc 676,5 IIpl. La section II transforme par conséquent 121 de plus en capital constant, ce qui exige un capital variable supplémentaire, égal à 60,5, lesquels sont encore prélevés sur 676,5. Reste à consommer: 616.

Nous avons alors, comme capitaux:

I. Constant: 4.840 + 484 = 5.324.

Variable: 1.210 + 121 = 1.331.

II. Constant: 1.760 + 55 + 121 = 1.936.

Variable: 880 + 27,5 + 60,5 = 968.

Totaux: I. 5.324 c + 1.331 v = 6.655

II. 1.936 c + 968 v = 2.904

Total général: 9.559.

Ce qui conduit en fin d'année à:

I. 5.324 c + 1.331 v + 1.331pl = 7.986

II. 1.936 c + 968 v + 968pl = 3.872

Total: 11.858

En répétant le même calcul et en arrondissant à l'unité, nous obtenons à la fin de l'année suivante:

I. 5.856 c + 1.464 v + 1.464pl = 8.784

II. 2.129 c + 1.065 v + 1.065pl = 4.259

Total: 13.043.

Et à la fin de l'année suivante:

I. 6.442 c + 1.610 v + 1.610 pl = 9.662

II. 2.342 c + 1.172 v + 1.172 pl = 4.686

Total: 14.348.

Au cours de cinq années de reproduction à échelle élargie, le capital total de I et de II est passé de 5.500 c + 1.750 v = 7.250 [10] à 8.784c + 2.782v = 11.566; il a donc crû dans le rapport de 100 à 160. La plus‑value totale, à l'origine de 1.750 [11], se trouve être maintenant de 2.782. La plus‑value consommée était au début de 500 pour I et de 600 pour II, ce qui fait au total 1.100; dans la dernière année, elle a été de 732 pour I et de 746 pour II, ce qui fait au total 1.478. Elle a donc augmenté dans le rapport de 100 à 134.

2. Deuxième exemple.

Prenons maintenant le produit annuel de 9.000, qui se trouve tout entier comme capital-marchandises entre les mains de la classe des capitalistes industriels, dans une forme où la moyenne générale du rapport entre capital variable et capital constant soit de 1 à 5. Cela suppose, d'abord, un développement déjà important de la production capitaliste et par conséquent de la force productive du travail social; ensuite, un élargissement antérieur déjà de l'échelle de production; enfin, un développement de toutes les conditions qui provoquent une surpopulation relative dans la classe ouvrière. Le produit annuel se répartira alors comme suit, après avoir arrondi les décimales à l'unité:

I. 5.000 c + 1.000 v + 1000 pl = 7.000

II. 1.430 c + 285 v + 285 pl = 2.000

Total: 9.000.

Admettons que la classe des capitalistes I consomme la moitié de la plus‑value (= 500) et accumule l'autre moitié. Il faudrait alors échanger (1000 v + 500 pl) I = 1.500 en 1.500 IIc. Mais comme ici IIc ne s'élève qu'à 1.430, il faudra ajouter 70, pris sur la plus‑value; ces 70 déduits de 285 IIpl laissent 215 IIpl.

Nous avons donc:

I. 5.000 c + 500 pl (à capitaliser) + 1.500(v + pl) (en fonds de consommation pour les capitalistes et les ouvriers).

II. 1.430 c + 70 pl (à capitaliser) + 285 v + 215 pl.

Puisqu'ici 70 IIpl sont directement ajoutés à IIc, un capital variable de 70/5 = 14 est nécessaire, pour mettre en mouvement ce capital constant additionnel. Il faut donc déduire encore ces 14 de 215  IIpl; restent 201 IIpl et nous avons:

II. (1.430 c + 70 c) + (285 v + 14 v) + 201 pl.

L'échange de 1.500 I(v+1/2pl[12] contre IIc est un procès de la reproduction simple; il a donc déjà été étudié. Cependant, il faut faire remarquer quelques particularités qui résultent de ce que, au cours de la reproduction avec accumulation, I(v+1/2 pl) n'est pas remplacé seulement par IIc, mais par IIc plus une partie de IIpl.

Si nous supposons qu'une accumulation a lieu, il va de soi que I(v+pl) est plus grand que IIc, et non pas égal à IIc comme dans la reproduction simple: car, primo, I incorpore une partie de son surproduit dans son propre capital productif et en transforme les 5/6 en capital constant; il ne peut donc pas en même temps remplacer ces 5/6 par des moyens de consommation de II. Secundo, I doit, sur son surproduit, fournir les éléments matériels du capital constant, nécessaires à l'accumulation dans II, tout comme il doit fournir à I les éléments matériels du capital variable qui doit mettre en mouvement la fraction de son surproduit employée par I lui-même comme capital constant additionnel. Nous savons que le capital variable réel consiste en force de travail, par conséquent le capital variable additionnel aussi. Ce n'est pas le capitaliste I qui achète à II des moyens de subsistance ou les accumule en les destinant à la force de travail supplémentaire qu'il compte employer, comme devait le faire le propriétaire d'esclaves. Ce sont les ouvriers eux-mêmes qui traitent avec II. Mais cela n'empêche pas que, du point de vue du capitaliste, les moyens de consommation d'une force de travail supplémentaire ne sont que les moyens de production et d'entretien de la force de travail supplémentaire qu'il emploiera éventuellement. Ils sont donc du capital variable en nature. Quant à I, sa première opération est d'accumuler le capital-argent nouveau nécessaire à l'achat d'une force de travail supplémentaire. Dès qu'il a incorporé cette force de travail à son capital productif, l'argent devient moyen d'achat de marchandises II pour cette force de travail, qui doit trouver sous la main ses moyens de consommation.

Remarquons incidemment que Monsieur le capitaliste ainsi que sa presse sont souvent mécontents de la manière dont la force de travail dépense son argent, ainsi que des marchandises II, dans lesquelles cet argent se réalise. À cette occasion, ils philosophent, parlent culture et philanthropisent, comme par exemple M. Drummond, secrétaire d'ambassade de Grande-Bretagne à Washington: The Nation (un journal) aurait, en octobre 1879, fait paraître un article intéressant dans lequel il serait dit entre autres:

Les ouvriers n'ont pas su élever leur niveau culturel à la hauteur des inventions actuelles. Quantité d'objets leur sont devenus accessibles, mais qu'ils ne savent utiliser. Ils n'élargissent, par conséquent, pas le marché. [Chaque capitaliste a naturellement le désir que les ouvriers achètent sa marchandise.] Il n'y a aucune raison pour que l'ouvrier ne souhaite posséder autant de confort que l'homme d'Église, l'avocat et le médecin, qui gagnent la même somme que lui. [Cette espèce d'avocats, d'hommes d'Église et de médecins doit, en effet, se contenter de désirer tout ce confort!] Mais il ne le fait pas. Reste la question de savoir comment il pourrait être éduqué comme consommateur, par une méthode rationnelle et saine; elle n'est pas facile à résoudre, puisque toute son ambition ne dépasse pas le désir de voir abréger ses heures de travail et que les démagogues l'excitent beaucoup plus dans ce sens que vers l'élévation de sa position et l'amélioration de ses capacités morales et intellectuelles. (Reports of H. M.'s Secretaries of Embassy and Legation on the Manufactures. Commerce, etc., of the countries in which they reside, Londres, 1879, p. 404).

Il semble donc que de longues heures de travail soient le secret de la méthode rationnelle et saine qui doit relever la position de l'ouvrier par une amélioration de ses qualités morales et intellectuelles et en faire un consommateur rationnel. Pour devenir un consommateur rationnel de la marchandise des capitalistes, il doit surtout ‑ mais les démagogues l'en empêchent ‑ commencer par laisser consommer, par son propre capitaliste, sa propre force de travail de façon irrationnelle et malsaine. Ce qu'entend le capitaliste par consommation rationnelle apparaît partout où il daigne se mêler directement du commerce des moyens de consommation de ses ouvriers, avec le "trucksystem", qui inclut également, entre autres choses, la fourniture de logements à l'ouvrier, capitaliste et propriétaire ne faisant qu'un.

Le même Drummond, dont la belle âme rêve des tentatives faites par les capitalistes pour élever la classe ouvrière, parle, entre autres, dans ce même rapport, des fabriques modèles de cotonnades des "Lowell et Lawrence Mills". Les cantines et logements pour les femmes de la fabrique appartiennent à la société par actions qui est propriétaire de la manufacture. Les gérantes de ces maisons sont au service de cette même société, qui leur en prescrit les règlements; aucune des femmes n'a le droit de rentrer après dix heures du soir. Mais voici la perle: une police spéciale de la société parcourt les environs pour empêcher les infractions à la règle; après dix heures du soir, personne n'entre ni ne sort. Aucune femme ne peut loger ailleurs que sur le terrain appartenant à la société, sur lequel chaque maison lui rapporte environ 10 dollars de loyer par semaine; et c'est alors que se découvre dans toute sa gloire le consommateur rationnel:

Mais comme l'inévitable piano se trouve dans beaucoup des meilleures maisons pour ouvrières, la musique, le chant et la danse jouent un rôle important, du moins pour celles qui, après un travail ininterrompu de dix heures au métier à tisser, ont davantage besoin de distraction, après la monotonie de leur travail, que de repos réel. (p. 412).

Le secret principal pour transformer un ouvrier en consommateur rationnel se dévoile maintenant. M. Drummond visite la fabrique de coutellerie de Turner's Falls (Connecticut River) et Mister Oakman, le trésorier de la société par actions, après lui avoir dit que la qualité des couteaux de table américains est supérieure à celle des anglais, poursuit:

Mais nous battrons l'Angleterre également en matière de prix. Nous la dépassons déjà en ce qui concerne la qualité, c'est un fait reconnu; mais nous devons encore baisser nos prix et nous le ferons, dès que nous obtiendrons notre acier et notre main-d'œuvre à meilleur compte! (p. 427).

L'abaissement du salaire et les longues heures de travail, voilà le nec plus ultra de la méthode rationnelle et saine, ayant pour but d'élever l'ouvrier à la dignité d'un consommateur rationnel, pour qu'il crée un marché pour la masse d'objets que la culture et le progrès des inventions lui ont rendus accessibles.

De même que I doit fournir sur son surproduit le capital constant additionnel de II, de même II fournit, dans ce sens, le capital variable additionnel I. Il accumule pour I et pour lui-même, dans la mesure où il s'agit de capital variable, en reproduisant une fraction plus grande de sa production totale, donc aussi de son surproduit, sous forme de moyens de consommation indispensables.

Dans le cas d'une production basée sur l'accroissement du capital I(v+pl) doit être égal à IIc, plus cette fraction du surproduit incorporée à nouveau comme capital, plus la fraction additionnelle du capital constant, nécessaire à élargir la production en II; l'élargissement minimum est celui sans lequel une accumulation réelle, c'est-à-dire une extension réelle de production en I est impossible.

En revenant maintenant au cas étudié en dernier lieu, nous constatons qu'il présente cette particularité que IIc est inférieur à I(v+1/2pl); inférieur donc à la fraction du produit de I dépensée comme revenu en moyens de consommation, de sorte qu'une partie du surproduit de II, égale à 70, est immédiatement réalisée par l'échange de 1.500 I(v+pl). Quant à IIc (= 1430), son remplacement à valeur égale doit être tiré, toutes choses égales d'ailleurs, de I(v+pl), afin que la reproduction simple puisse avoir lieu en II. En tant que tel, nous n'avons pas à l'étudier ici. Il n'en est pas de même pour les 70 IIpl complémentaires. Ce qui est, pour I, un simple remplacement de revenu par des moyens de consommation, un échange de marchandises en vue de la simple consommation, est pour II un procès d'accumulation directe, une transformation d'une fraction de son surproduit en capital constant, à partir de moyens de consommation. Pour II, il ne s'agit pas seulement ici ‑ comme dans la reproduction simple ‑ d'une pure reconversion de son capital constant de la forme marchandise en sa forme naturelle. Si I achète les 70 IIpl avec 70 l. st.-argent (réserve monétaire pour la transformation de plus‑value) et si II, de son côté, n'achète pas 70 Ipl avec cet argent, mais l'accumule comme capital-argent, ce dernier représente, certes, toujours un produit supplémentaire (c'est-à-dire le surproduit même de II, dont il est une partie aliquote), encore qu'il ne s'agisse pas d'un produit devant réintégrer la production. Mais, dans ce cas, cette accumulation d'argent de la part de II signifierait en même temps que les 70 Ipl, en moyens de production, sont invendables. Il y aurait donc surproduction relative dans la catégorie I, correspondant à ce non-élargissement simultané de la reproduction du côté II.

Ceci mis à part, on constate: pendant la période où les 70 en argent venant de I ne sont pas encore (ou sont en partie seulement) revenus vers I par l'achat de 70 Ipl de la part de II, ils figurent en entier (ou en partie) comme capital-argent virtuel supplémentaire entre les mains de II. Ceci est valable pour tout échange entre I et II, tant que le remplacement mutuel de leurs marchandises respectives n'a pas amené le reflux de l'argent vers son point de départ. Lorsque les choses se passent normalement, l'argent ne joue que provisoirement ce rôle. Par contre, dans le système de crédit, où tout l'argent additionnel, temporairement libéré, est appelé à fonctionner immédiatement comme capital additionnel actif, ce capital-argent, libéré de façon seulement temporaire, peut être investi et servir, par exemple, à de nouvelles entreprises en I, bien qu'il y ait encore à faire circuler le produit additionnel encore immobilisé dans d'autres entreprises. Il faut remarquer en outre que l'adjonction de 70 Ipl au capital constant II nécessite en même temps un élargissement du capital variable II s'élevant à 14. Ceci implique que la reproduction en II se fait déjà en vue d'une capitalisation ultérieure et que cette reproduction comporte, par conséquent, un élargissement de la fraction du surproduit consistant en moyens de subsistance indispensables. C'est un fait analogue à ce qui se passe dans l'incorporation directe, en I, du surproduit Ipl au capital Ic.

Comme nous l'avons vu, le total de 9.000 du second exemple doit, en vue de la reproduction, se répartir de la façon suivante, dans le cas où 500 Ipl doivent être capitalisés. Nous n'y tenons compte que des marchandises et négligeons la circulation d'argent.

I. 5.000 c + 500 pl (à capitaliser) + 1.500(v+pl) (fonds de consommation) = 7.000 en marchandises.

II. 1.500 c + 299 v + 201 pl = 2.000 en marchandises.

Total: 9.000 en produits-marchandises.

La capitalisation se fait alors comme suit:

Dans la section I, les 500 pl qui doivent être capitalisés se divisent en 5/6 (= 417 c) + 1/6 (= 83 v). Les 83 v retirent de IIpl une somme d'argent équivalente, qui sert à acheter des éléments de capital constant et s'ajoute donc à IIc. L'augmentation de 83 en IIc entraîne une augmentation d'un cinquième de 83 (= 17) en IIv. Après cette transaction, nous avons:

I. (5.000 c + 417 plc + (1.000 v + 83 plv = 5.417 c + 1.083 v = 6.500

II. (1.500 c + 83 plc + (299 v + 17 plv = 1.583 c + 316 v = 1.899

Total: 8.399

Dans la section I, le capital est passé de 6.000 à 6.500, par conséquent il a augmenté de 1/12. Dans la section II, il est passé de 1.715 à 1.899 donc il a augmenté de presque 1/9.

Sur cette base, la reproduction dans la seconde année donne à la fin de celle-ci les capitaux suivants:

I. (5.417 c + 452 plc + (1.083 v + 90 plv = 5.869 c + 1.173 v = 7.042.

II. (1.583 c + 42 pl + 90 plc + (316 c + 8 pl + 18 plv = 1.715 c + 342 v = 2.057.

Elle donne à la fin de la troisième année le produit suivant:

I. 5.869 c + 1.173 v + 1.173 pl.

II. 1.715 c + 342 v + 342 pl.

Si la section I accumule, comme elle l'a fait jusqu'ici, la moitié de la plus‑value, nous avons: I(v+1/2pl) soit 1.173 v + 587 (1/2pl) = 1.760, somme supérieure de 45 à la totalité de 1.715 IIc. Ces 45 doivent être compensés par le transfert à IIc de moyens de production d'une égale valeur. IIc augmente donc de 45, ce qui entraîne un accroissement de 1/5 (= 9) pour IIv. De plus, les 587 Ipl capitalisés se divisent en 5/6 et 1/6, en 489 c et 98 v; ces 98 entraînent dans la catégorie II une nouvelle adjonction au capital constant de 98: celle-ci, à son tour, entraîne l'augmentation du capital variable II de 1/5, soit 20. Nous avons alors:

I. (5.869 c + 489 plc + (1.173 v + 98 plv = 6.358 c + 1.271 v = 7.629

II. (1.715 c + 45 pl + 98 plc + (342 v + 9 pl + 20 plv = 1.858 c + 371 v = 2.229

Capital total: 9.858.

Le capital de I, dans sa totalité, a donc grandi de 6.000 à 7.629 pendant les trois ans de reproduction croissante: celui de II a augmenté de 1.715 à 2.229 et l'ensemble du capital social est passé de 7.715 à 9.858.

3. L'échange de IIc en cas d'accumulation.

Au cours de l'échange de IIc contre I(v+pl), différents cas peuvent se présenter.

Quand il s'agit de reproduction simple, tous deux doivent être égaux et se remplacer réciproquement, sinon, comme nous l'avons vu plus haut, la reproduction simple ne peut se faire sans perturbation.

En ce qui concerne l'accumulation, c'est surtout son taux qu'il faut considérer. Nous avons supposé, dans les cas précédents, que le taux d'accumulation dans la section I était égal à 1/2pl I et, aussi, qu'il restait constant d'année en année. Nous avons seulement modifié la proportion dans laquelle ce capital accumulé se répartit en capital variable et constant. Trois possibilités en étaient résultées:

1. I(v+1/2pl) est égal à IIc, lequel est donc inférieur à I(v+pl). Il doit toujours en être ainsi, sinon il ne peut y avoir accumulation en I.

2. I(v+1/2pl) est supérieur à IIc. Dans ce cas, le remplacement s'effectue en ajoutant une part correspondante de IIpl à IIc, pour le rendre égal à I(v+1/2pl). Pour II, la transaction n'est pas ici reproduction simple de son capital constant, elle est déjà accumulation, adjonction à ce capital de cette fraction de son surproduit que II échange contre des moyens de production I; cette augmentation implique en même temps que II accroît en outre proportionnellement son capital variable à partir de son propre surproduit.

3. I(v+l/2pl) est inférieur à IIc. Ici II n'a pas reproduit complètement son capital constant par l'échange. Il doit, par conséquent, combler son déficit en achetant à I. Ceci ne nécessite aucune autre accumulation de capital variable II, puisque son capital constant a été, par cette seule opération, reproduit dans toute sa valeur. D'autre part, la partie des capitalistes de I qui accumule seulement du capital-argent additionnel a déjà, grâce à cette transaction, réalisé une partie de cette sorte d'accumulation.

L'hypothèse de la reproduction, à savoir I(v+pl) = IIc, n'est pas seulement incompatible avec la production capitaliste (ce qui, d'ailleurs, n'exclut pas que dans un cycle industriel de 10 à 11 années telle ou telle année puisse comporter une production totale moindre que la précédente, qu'il n'y ait donc même pas simple reproduction, par rapport à l'année précédente). Mais, de plus, pour un accroissement annuel normal de la population, une simple reproduction ne pourrait exister que dans la mesure où les 1.500, qui représentent la plus‑value totale, serviraient à entretenir un nombre proportionnellement croissant de domestiques improductifs. Par contre, l'accumulation de capital, donc la production capitaliste réelle, serait alors impossible. La réalité de l'accumulation capitaliste exclut par conséquent que IIc soit égal à I(v+pl). Cependant, même dans l'accumulation capitaliste, il pourrait arriver qu'à la suite du déroulement des procès d'accumulation, qui ont eu lieu au cours d'une série de périodes de production antérieures, IIsoit non seulement égal, mais même supérieur à I(v+pl). Il y aurait donc en II une surproduction qui ne pourrait être compensée que par un grand krach, après lequel le capital de II serait transféré à I. Le rapport de I(v+pl) à IIc n'est pas modifié non plus, si une fraction du capital constant de II se reproduit elle-même, comme par exemple dans l'emploi en agriculture de semences prises sur la récolte. En ce qui concerne la transaction entre I et II, cette fraction de IIc n'entre pas davantage en ligne de compte que Ic. Il n'y a rien de changé non plus, si une fraction des produits de II est de nature à s'intégrer à I comme moyens de production. Elle est couverte par une fraction des moyens de production fournis par I. Nous devons d'emblée retrancher cette fraction des deux côtés, si nous voulons étudier à l'état pur et sans perturbation l'échange entre les deux grandes sections de la production sociale: les producteurs de moyens de production et les producteurs de moyens de consommation.

Dans la production capitaliste, I(v+pl) ne peut donc pas être égal à IIc, autrement dit ils ne peuvent pas s'équilibrer l'un l'autre au cours d'un échange.

Par contre, si Ipl/x est la fraction de Ipl dépensée comme revenu par les capitalistes, I(v+pl/x) peut être égal, supérieur ou inférieur à IIc; mais I(v+pl/x) doit toujours être inférieur à II(c+pl), la différence entre eux étant cette fraction de IIpl que les capitalistes de la catégorie II doivent en tout cas consommer eux-mêmes.

Il faut remarquer que, dans cette façon de décrire l'accumulation, la valeur du capital constant, en tant que fraction de valeur du capital-marchandise à la production duquel elle contribue, n'est pas présentée de façon exacte. La partie fixe du capital constant nouvellement accumulé n'est transmise au capital-marchandise que progressivement, et à certaines périodes, selon la nature diverse de ces éléments fixes: ce capital-marchandise consiste donc, pour sa plus grande partie, en produits remplaçant les composants constants circulants et le capital variable, chaque fois que des matières premières, des produits semi-finis, etc., entrent en masse dans la production de marchandises. (À cause de la rotation des éléments circulants, on peut néanmoins procéder ainsi; on suppose alors que la partie circulante, jointe à cette fraction de valeur du capital fixe qui lui a été cédée, accomplit, au cours de l'année, un nombre suffisant de rotations, pour que le total des marchandises livrées soit égal à la valeur de tout le capital investi dans la production annuelle.) Mais, chaque fois que le fonctionnement des machines n'exige que des matériaux auxiliaires, et non des matières premières, l'élément-travail v doit réapparaître dans le capital-marchandise comme composant principal. Dans le calcul du taux du profit, la plus‑value est calculée sur le capital total, sans tenir compte de ce que les composants fixes confèrent périodiquement au produit une valeur plus ou moins grande. Mais, dans le calcul de la valeur de tout capital-marchandise périodiquement produit, la partie fixe du capital constant ne doit intervenir que dans la mesure où, par son usage elle confère aux produits eux-mêmes un élément moyen de valeur.

IV. -Addendum.

La source initiale de l'argent de II est v + pl de la production d'or de la section I, échangé contre une fraction de IIc. Ce n'est que dans la mesure où le producteur d'or accumule de la plus‑value ou la transforme en moyens de production I, c'est-à-dire où il élargit sa production, que son (v + pl) ne s'intègre pas à II. D'autre part, dans la mesure où l'accumulation d'argent, de la part des producteurs d'or eux-mêmes, conduit finalement à la reproduction élargie, une partie de la plus‑value de la production d'or, non dépensée comme revenu, s'intègre à II comme capital variable additionnel du producteur d'or. Elle met en train une nouvelle thésaurisation en II ou procure des moyens nouveaux pour acheter à I, sans avoir besoin de lui vendre directement. De cet argent, tiré du I(v+pl) de la production d'or, il faut déduire la part de l'or que certaines branches de production de II utilisent comme matière première, etc., bref, comme élément de remplacement de leur capital constant. Il existe, dans l'échange entre I et II, l'élément d'une thésaurisation provisoire (qui se ferait en vue d'un élargissement ultérieur de la reproduction): pour I, seulement lorsqu'une partie de Ipl est vendue à II unilatéralement, c'est-à-dire sans achat complémentaire, et sert de capital constant additionnel à II; pour II, lorsque la même chose se produit du côté de I relativement au capital variable additionnel; de plus, lorsque IIc ne couvre pas toute la plus‑value, dépensée par I comme revenu, ce qui signifie qu'une fraction de celle-ci sert à acheter une partie de IIpl, ainsi transformée en argent. Si I(v+pl/x) est supérieur à IIc, celui-ci n'a pas besoin de remplacer par de la marchandise I, en vue de sa reproduction simple, ce que I a consommé de IIpl. Il reste à savoir dans quelle mesure, au cours de l'échange entre les capitalistes II (qui ne peut être qu'un échange réciproque de IIpl), une thésaurisation peut avoir lieu. Nous savons qu'à l'intérieur de II une accumulation directe se produit par le fait qu'une partie de IIpl est directement transformée en capital variable (tout comme dans I, une partie de Ipl est directement transformée en capital constant. Étant donné que l'accumulation, à l'intérieur des différentes branches d'industrie de II, et pour les capitalistes individuels de ces différentes branches, remonte plus ou moins loin, les choses s'expliquent, mutatis mutandis, tout comme pour I. Les uns se trouvent encore au stade de la thésaurisation: ils vendent sans acheter; les autres sont à la phase d'élargissement réel de la reproduction; ils achètent sans vendre. Il est vrai que le capital-argent variable additionnel sert d'abord à acheter de la force de travail supplémentaire; celle-ci, à son tour, achète des moyens de subsistance à ceux des thésauriseurs qui détiennent les moyens de consommation supplémentaires, destinés aux ouvriers. Au fur et à mesure qu'ils le thésaurisent, l'argent ne revint pas à son point de départ: il est accumulé.

 

 

 

 

 

Notes



[1].       À partir d'ici et jusqu'à la fin, manuscrit VIII. (N. R.)

[2].       Vient ici dans le manuscrit: des éléments constitutifs du capital, par exemple ... (N. R.)

[3].       [321ignition] Le Capital - Livre deuxième - Tome II, Paris, Éditions sociales, 1974, Chapitre 20: La reproduction simple, p. 109: "[...] nous appelons “groupe 1” cette partie des capitalistes II qui renouvelle son capital fixe en nature et “groupe 2” celle qui accumule en argent la valeur représentant l'usure du capital fixe."

[4].       [321ignition] Le Capital - Livre deuxième - Tome II, Paris, Éditions sociales, 1974, Chapitre 20: La reproduction simple, p. 111‑112:

 

La difficulté résultant de l'échange*

I. 1.000v + 1.000pl

II. 2.000c

a été limitée à la difficulté engendrée par l'échange des reliquats:

I. 400pl

II. (1) 200 en argent + 200c en marchandise + (2) 200c en marchandise

ou, autrement dit, pour rendre la chose plus claire encore:

I. 200pl + 200pl

II. (1) 200 en argent + 200c en marchandise + (2) 200c en marchandise.

Puisque II (1) échange 200c en marchandise contre 200 Ipl en marchandise et que tout l'argent circulant entre I et II, au cours de l’échange des 400 en marchandises, revient à celui qui l'a avancé, soit I, soit II, cet argent, élément de l'échange entre I et II, n'est pas, en fait, un élément du problème qui nous occupe. Autrement dit: si nous supposons que, lors de l’échange entre 200 Ipl (marchandises) et 200 IIc (marchandises de II, groupe 1), l’argent fonctionne comme moyen de paiement et non pas comme moyen d'achat (donc pas non plus comme "moyen de circulation" au sens le plus étroit), il est alors évident, puisque les marchandises 200 Ipl et 200 IIc (groupe 1) sont d’une même valeur, que des moyens de production d’une valeur de 200 s’échangent contre des moyens de consommation d’une valeur de 200. Il est aussi évident que l'argent n'a ici qu'un rôle idéal et qu'il ne doit nullement en être mis en circulation, par l’une ou l’autre partie, pour régler des bilans. Le problème ne sera donc posé clairement que lorsque nous aurons biffé des deux côtés I et II la marchandise 200 Ipl et son équivalent, la marchandise 200 IIc (groupe 1).

Après élimination de ces deux quantités de marchandises d'une même valeur (I et II) qui se soldent mutuellement, il ne demeure que le reste de l'échange, qui fait apparaître nettement le problème, à savoir:

I. 200pl marchandises;

II. (1) 200c argent + (2) 200c en marchandises.

 

* [321ignition] c'est-à-dire l'échange entre éléments de I d'une part, éléments de II d'autre part.

[5].       Vient ici dans le manuscrit: de la reproduction. (N. R.)

[6].       Dans le manuscrit vient ensuite: en argent. (N. R.)

[7].       [321ignition] Dans l'origine en allemand: "Wenn also Fullarton z.B. nichts von der Überproduktion im gewöhnlichen Sinn wissen will". La traduction "ne veut pas prétendre parler" semble inappropriée. La tournure signifie plutôt "ne veut pas entendre parler de"; c'est d'ailleurs en ce sens qu'elle est interprétée dans l'édition an anglais: "does not want to hear of".

[8].       Ceci met fin, une fois pour toutes, à la dispute entre James Mill et S. Bailey sur l'accumulation du capital. Elle fut commentée, d'un point de vue différent, au Livre premier (chap. XXIV, 5 [n. 59 et n. 61]). Il s'agit de la querelle sur les possibilités d'extension de l'action du capital industriel à grandeur constante. Il faudra y revenir plus tard.

[9].       Paiement des ouvriers en marchandises. (N. R.)

[10].     [321ignition] Rappelons le point de départ des calculs en cours est le Schéma B (cf. plus haut):

I. 4.000 c + 1.000 v + 1.000 pl = 6.000

II. 1.500 c + 750 v + 750 pl = 3.000

Donc capital constant I + II = 4.000 + 1.500 = 5.500, capital variable I + II = 1.000 + 750 = 1.750

5.500 c + 1.750 v = 7.250.

[11].     [321ignition] Tout au long des calculs en cours, le taux de plus-value est supposé = 100 %. Au point de départ, plus-value I + II = 1.000 + 750 = 1.750.

[12].     [321ignition] Dans l'expression v + (1/2)pl, le facteur 1/2 provient de l'hypothèse que la classe des capitalistes I consomme la moitié de la plus-value.