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Shyqri Ballvora

L'importance historique de la IIIe Internationale Communiste
et la dénonciation des élucubrations révisionnistes
sur son rôle et sa place dans l'histoire

 

 

Source:

Institut des Études marxistes-léninistes près le Comité central du PTA (Hg.): Studime Politiko-Shoqërore, n° 1, 1981, Tirana.

Reproduit d'après:

Institut des études marxistes-léninistes près le Comité central du PTA (Hg.): Études politiques et sociales (en français), n° 1, 1984, Tirana, pp. 125‑163.

 

 

 

 

 

 

 

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Textes du PTA ‑ Sommaire

 

 

 

 

 

 

La IIIe Internationale communiste (le Komintern) fondée en un temps où "une nouvelle époque s'était ouverte dans l'histoire mondiale" (Lénine) n'est pas un simple événement historique qui appartient au passé. Elle est toujours un brillant exemple à suivre par les générations révolutionnaires actuelles, unies et organisées dans les nouveaux partis communistes marxistes-léninistes, en ce qu'elle leur montre ce que doit faire l'avant-garde du prolétariat pour préparer la révolution socialiste, les luttes et les révolutions de libération nationale. Elle demeurera à jamais un grand exemple de la lutte menée pour la défense de la pureté du marxisme-léninisme et son application créatrice, du combat de principe livré avec esprit de suite contre l'opportunisme de droite et de "gauche". "En son temps, le Komintern, souligne le camarade Enver Hoxha, a mené une vaste activité très bénéfique pour l'organisation et la trempe des partis communistes. Il fut créé à une époque où il était indispensable de faire pénétrer profondément le marxisme-léninisme comme théorie scientifique dans la masse du prolétariat mondial... En formant les jeunes partis marxistes-léninistes et ouvriers dans le monde, le Komintern s'efforçait de les aider à devenir indépendants par rapport aux partis bourgeois, et de les engager dans la lutte contre ces partis et contre les patrons capitalistes. Ainsi, à l'époque de Lénine et de Staline, des partis marxistes-léninistes ont été formés et consolidés, qui sont passés d'un stade en quelque sorte infantile à un stade plus élevé de maturité et d'organisation révolutionnaire... Mais à cette époque, poursuit le camarade Enver Hoxha, le Komintern était un organisme indispensable et il a apporté une contribution importante à la consolidation de la révolution, à la victoire du socialisme[1]."

La IIIe Internationale a prêté un précieux concours à la création des partis communistes dans la plupart des pays et à leur consolidation en tant que partis révolutionnaires conséquents du prolétariat. En sa qualité de centre dirigeant des partis communistes des divers pays du monde, la IIIe Internationale jeta les fondements d'un puissant mouvement organisé, le mouvement communiste international, qui devint non seulement le porteur des idéaux les plus progressistes, les plus révolutionnaires de l'époque, les idéaux marxistes-léninistes, mais aussi la force dirigeante des forces révolutionnaires sociales, du prolétariat, de la paysannerie et des autres forces démocratiques, dans leur lutte pour la libération sociale et nationale, aussi bien dans les pays capitalistes développés et semi-développés que dans les pays coloniaux où les peuples livraient bataille pour secouer le joug, lourd et féroce, des puissances impérialistes. "La IIIe Internationale communiste, a souligné Lénine, a joué dans le monde un rôle historique important. C'est elle qui a commencé à mettre en œuvre le plus important des mots d'ordre de Marx, celui qui dresse le bilan du développement séculaire du socialisme et du mouvement ouvrier, et qui est exprimé par la notion de dictature du prolétariat[2]."

En alliance avec les masses travailleuses opprimées et exploitées et les peuples des pays coloniaux, conduite par son avant-garde, les partis communistes, unis en tant que force politique et mus par des objectifs et buts communs, la classe ouvrière des divers pays devait, sous la direction de la IIIe Internationale communiste, avancer dans la voie frayée par la Grande Révolution socialiste d'Octobre, combattre pour le renversement du système impérialiste, pour le triomphe des révolutions de libération nationale dans les pays coloniaux et opprimés ainsi que des révolutions prolétariennes dans les pays capitalistes développés.

Dans la situation historique créée après le triomphe de la Révolution d'Octobre et la fondation du premier État socialiste dans un grand pays, la transformation révolutionnaire du monde était mise à l'ordre du jour comme la seule alternative capable de sauver l'humanité de la grave crise générale sociale, politique et économique qui tenaillait le système impérialiste, et de libérer les masses travailleuses et les peuples opprimés du joug capitaliste et impérialiste.

Le capitalisme mondial, qui réunissait en un système unique le monde entier, à l'exception de l'État où avait triomphé la révolution prolétarienne, était rongé de contradictions de classe et nationales inconciliables et antagonistes. Seule la lutte révolutionnaire du prolétariat en alliance avec les masses travailleuses des pays capitalistes développés et des peuples opprimés par l'impérialisme pouvait détruire complètement et définitivement ce système.

La théorie léniniste définit le triomphe de la révolution et l'abolition du système capitaliste mondial, non pas comme une action nécessairement simultanée dans tous les pays. D'après cette théorie, le processus révolutionnaire dans le monde est un processus unique et la prise du pouvoir par les forces révolutionnaires, avec à leur tête la classe ouvrière, pouvait se réaliser si dans un pays ou dans un certain nombre de pays les conditions objectives et subjectives étaient mûres pour le triomphe de la révolution. La possibilité de voir triompher la révolution dans un ou plusieurs pays avait comme prémisse fondamentale le fait objectif qu'à l'époque de l'impérialisme, et particulièrement après le triomphe de la Révolution d'Octobre, les conditions étaient réunies pour que, dans le système capitaliste, la révolution éclate et triomphe au plus faible maillon de la chaîne impérialiste. "Il faut parler maintenant, soulignait Staline, de la révolution prolétarienne mondiale, car les différents fronts nationaux du Capital sont devenus les anneaux d'une chaîne unique, appelée front mondial de l'impérialisme, et à laquelle doit être opposé le front commun du mouvement révolutionnaire de tous les pays... Il faut maintenant considérer la révolution prolétarienne avant tout comme le résultat du développement des contradictions dans le système mondial de l'impérialisme, comme le résultat de la rupture de la chaîne du front impérialiste dans tel ou tel pays[3]."

Dans ces conditions historiques, l'élaboration d'une stratégie internationale du mouvement communiste constituait une tâche de premier ordre et revêtait une importance décisive. Le Komintern, s'appuyant sur la doctrine marxiste-léniniste et tenant compte de la nouvelle époque où s'était engagé le monde après la Révolution d'Octobre, a su parfaitement combiner les tâches qui incombaient, sur le plan international, au prolétariat de chaque pays avec les tâches qu'il devait résoudre sur le plan national. Loin d'être en opposition entre elles, ces tâches se complétaient, la solution de l'une aidant à la solution de l'autre. Les tâches et les objectifs stratégiques qu'élabora le Komintern n'avaient rien d'abstrait et ne constituaient pas la quintessence des "illusions révolutionnaires[4]" du prolétariat, comme le prétendent les révisionnistes modernes, qui cherchent à minimiser et à dénigrer le grand rôle historique du Komintern. Le schéma stratégique élaboré par le Komintern dès sa fondation et condensé dans la pensée de Lénine comme quoi la IIIe Internationale a commencé à mettre en œuvre le plus important des mots d'ordre de Marx, celui de l'instauration de la dictature du prolétariat, était l'aboutissement logique de l'analyse profonde et générale que la IIIe Internationale, Lénine en tête, avait faite des nouvelles conditions historiques de la nouvelle époque où s'était engagée l'humanité. Ce schéma stratégique universel, le même, quant au fond, au cours de la période pendant laquelle le Komintern déploya son activité, est allé se perfectionnant dans toutes ses composantes, et ce conformément aux étapes de la réalisation du but stratégique fixé suivant les circonstances historiques crées par intervalles dans le monde. De l'analyse des documents du Komintern et de l'étude de toute son activité depuis son Ier Congrès jusqu'à sa dissolution (en 1943), il ressort que l'Internationale communiste n'a jamais donné aux partis communistes ni recettes toutes faites ni directives d'une valeur absolue pour tous ces partis, leur permettant de résoudre leurs problèmes concrets sans égard aux circonstances et aux conditions historiques dans lesquelles ils menaient leur action révolutionnaire. Les orientations stratégiques générales étaient élaborées après débats libres et détaillés menés par les partis communistes aux instances dirigeantes du Komintern, dans les congrès, les plénums élargis du Comité exécutif de l'Internationale communiste (CEIC), du Présidium du CEIC et dans d'autres réunions où tout parti exprimait librement ses vues; ce n'est qu'après de tels débats qu'étaient adoptées les décisions requises, qui, en tant qu'orientations générales, étaient obligatoires pour tous les partis. Les orientations générales et les principaux objectifs stratégiques du Komintern reposaient sur les principes de base du marxisme-léninisme et reflétaient le contenu fondamental de la nouvelle époque. Quant aux partis communistes, s'appuyant sur ces orientations générales et tenant bien compte des conditions concrètes de leurs pays, du rapport des forces de classe, du niveau de développement économique et social, de la situation politique générale et d'autres facteurs, ils définissaient leurs tâches stratégiques et tactiques, les voies et les étapes par où devait passer la révolution, les méthodes de leur lutte et les formes de son organisation. Mais, dans bien des cas, les réunions communes du Komintern ont porté aussi sur la définition des tâches de tel ou tel parti et, à la lumière de l'expérience mutuelle échangée, y étaient formulées dans les grandes lignes les tâches qui incombaient à ce parti, étant entendu qu'il lui était toujours permis de prendre des initiatives ou de manœuvrer sur le plan tactique, en fonction des situations politiques créées dans son pays.

Au cours de toute son activité politique, le Komintern, en sa qualité d'organe dirigeant du mouvement communiste international, s'en tint avec esprit de suite et fermeté au principe léniniste selon lequel la stratégie politique générale de ce mouvement, fruit d'une élaboration collective dans le cadre de l'Internationale communiste, devait être appliquée par les divers partis suivant les conditions historiques concrètes de chaque pays. "Il faut bien se rendre compte, écrivait Lénine en 1920, qu'un pareil centre de direction ne peut, en aucun cas, bâtir son activité sur le stéréotypage, le nivellement mécanique, l'identification des règles tactiques de lutte. Aussi longtemps que des distinctions nationales et politiques existent entre les peuples et les pays, distinctions qui subsisteront longtemps, très longtemps, même après l'établissement de la dictature du prolétariat à l'échelle mondiale, l'unité de tactique internationale du mouvement ouvrier communiste de tous les pays veut, non pas l'effacement de toute diversité, non pas la suppression des distinctions nationales (à l'heure actuelle c'est un rêve insensé), mais une application des principes fondamentaux du communisme (pouvoir des Soviets et dictature du prolétariat), qui modifie correctement ces principes dans les questions de détail, les adapte et les ajuste comme il convient aux particularités nationales et politiques. Rechercher, étudier, découvrir, deviner, saisir ce qu'il y a de particulièrement national, de spécifiquement national dans la manière concrète dont chaque pays accorde la solution du problème international, le même pour tous: vaincre l'opportunisme et le dogmatisme de gauche au sein du mouvement ouvrier, renverser la bourgeoisie, instaurer la Républiques de Soviets et la dictature du prolétariat, telle est, au moment historique que nous traversons, la principale tâche assignée à tous les pays avancés (et pas seulement avancés)[5]."

Dans ses documents à valeur de programme, l'Internationale communiste refléta d'une façon complète les exigences fondamentales du développement objectif de l'humanité, les intérêts des larges masses prolétariennes, des travailleurs de tous les pays et peuples qui souffraient sous la domination impérialiste. Elle se tint à la tête du prolétariat mondial, des masses travailleuses de tous les pays et leur enseigna qu'il n'y a qu'une voie pour réaliser les idéaux suprêmes de la paix, de la démocratie et du socialisme, celle des puissantes actions révolutionnaires qu'il faut mener jusqu'au bout, jusqu'à l'abolition définitive du système capitaliste et impérialiste, oppresseur et exploiteur, celle de la révolution prolétarienne violente, qui conduit à l'instauration de la dictature du prolétariat. Dans le "Manifeste de l'Internationale Communiste", approuvé à son Ier Congrès, le Komintern se définissait en tant qu´"Internationale des actions de masse ouvertes, Internationale des réalisations révolutionnaires, Internationale d'action[6]".

La IIIe Internationale devint le promoteur et le dirigeant des grands mouvements de masse, comme celui pour le front ouvrier unique, pour la création d'un large front anti-impérialiste, pour le maintien de la paix et contre la guerre impérialiste, pour la défense des libertés démocratiques contre le danger fasciste, pour la libération nationale des peuples opprimés, pour le triomphe de la révolution socialiste et l'instauration de la dictature du prolétariat.

Sous la direction de la IIIe Internationale communiste, le mouvement ouvrier international s'est mué en un mouvement social et politique très puissant, qui donnait le ton à toute la vie politique et sociale dans le monde. C'était précisément la classe ouvrière dirigée par les partis communistes, membres de la IIIe Internationale, qui empêcha l'avènement du fascisme dans nombre de pays d'Europe et du monde.

Au cours de sa lutte pour diriger les mouvements de masse prolétariens dans divers pays et à l'échelle mondiale, la IIIe Internationale a recouru à une tactique très souple, elle a mis à profit des formes d'organisation et des méthodes de combat très variées. Faisant preuve d'esprit créateur et d'initiative, elle n'a cessé d'enrichir l'arsenal de ses méthodes de combat et de ses formes d'organisation en s'en tenant toujours aux principes marxistes-léninistes. En cela, elle a toujours tenu compte de l'orientation de Lénine selon laquelle le passage de la lutte d'une phase à une autre demande aussi que soient suivies des formes d'organisation et des méthodes de combat variées, que soient modifiées les tactiques de lutte, en fonction de la situation concrète qui varie et se développe constamment. Aussi les tactiques utilisées par le prolétariat dans sa lutte doivent-elles, une fois enrichies, varier conformément aux situations concrètes qui se font jour au cours du processus de la lutte révolutionnaire.

L'Internationale communiste devint le promoteur et le dirigeant de puissantes organisations internationales de masse, telles que l'Internationale Rouge des Syndicats et l'Internationale communiste de la Jeunesse, qui ont joué un rôle très important dans la formation politique des ouvriers et de la jeunesse, en leur inculquant l'esprit du combat révolutionnaire et de l'internationalisme prolétarien.

La IIIe Internationale a apporté une contribution extrêmement importante à l'organisation des mouvements de masse des ouvriers, de la solidarité internationaliste, de l'aide et du soutien réciproques des prolétaires de divers pays. Aux travailleurs de tous les pays, elle enseignait à ne pas rester indifférents à leur sort mutuel, mais à se soutenir dans leur lutte de toutes les forces et par tous les moyens, à être solidaires sur toute la ligne, car c'est ainsi qu'ils pourraient déjouer les plans de la réaction et de l'impérialisme mondial.

L'histoire du mouvement ouvrier international de l'entre-deux-guerres est marquée par bien des actions de masse, et par l'activité révolutionnaire qu'a déployée le prolétariat de divers pays en se solidarisant avec les ouvriers et les masses travailleuses qui, dans leurs pays, s'étaient dressés ouvertement contre la réaction impérialiste et le fascisme. Cela apparut surtout dans l'activité révolutionnaire et les actions qu'il a menées pour défendre la Russie soviétique en tant que premier État socialiste du monde, dans l'appui direct qu'il a accordé à la classe ouvrière et aux masses travailleuses en Espagne, qui se battaient contre la féroce réaction fasciste du pays, dans les puissantes actions des prolétaires des pays d'Europe en soutien à la classe ouvrière et aux masses travailleuses d'Allemagne dans leur lutte contre la dictature fasciste, etc.

La IIIe Internationale communiste a le grand mérite historique d'avoir créé des liens étroits entre le mouvement ouvrier des pays capitalistes développés et celui des pays exploités et coloniaux. Elle a également le grand mérite historique d'avoir fondu ces mouvements en un seul processus révolutionnaire et anti-impérialiste mondial, et d'avoir combiné de façon organique leurs tâches révolutionnaires. C'est un fait notoire que les prolétaires d'Europe ont aidé et soutenu par des actions puissantes, les mouvements révolutionnaires de libération en Chine, en Inde, en Afrique et en Amérique latine.

La IIIe Internationale a apporté en outre une très précieuse contribution à la sauvegarde de la pureté de la doctrine marxiste-léniniste ainsi qu'à son développement et à son application créatrice, en dénonçant et liquidant courants et tendances opportunistes, ouvertement antimarxistes, anarchistes et d'extrême "gauche". Elle s'est par ailleurs montrée intransigeante avec les courants antimarxistes partout où ils apparaissaient, au-dedans comme au-dehors de ses rangs. Elle a démasqué sur tous les plans la social-démocratie européenne et en particulier celle de Kautsky, en démontrant qu'elles avaient rejoint complètement et définitivement les positions de la bourgeoisie impérialiste, qu'elles étaient devenues son officine, et par là même le principal point d'appui du capital monopoliste dans ses efforts pour maintenir sous son joug la classe ouvrière et les masses travailleuses.

La IIIe Internationale a dénoncé et annihilé politiquement et idéologiquement les tendances et les courants anti-léninistes, tels que le brandlérisme et les extrémistes allemands de "gauche", les trotskistes et les boukhariniens, ces renégats et ennemis les plus dangereux au sein du Parti bolchevique et dans ses propres rangs, les renégats et les fractionnistes dans divers partis communistes, comme le français, l'Italien, le polonais, le yougoslave, l'anglais et l'américain, en les chassant des rangs du mouvement communiste de la IIIe Internationale en tant qu'ennemis jurés de la révolution et du socialisme.

Par sa lutte conséquente et résolue contre l'opportunisme de droite et de "gauche", menée au-dedans comme au-dehors de ses rangs, la IIIe Internationale est devenue une source d'inspiration et, dans ce sens, elle s'est acquis une très grande expérience de portée historique qui témoigne que la lutte ferme et de principe contre l'opportunisme de toute couleur est, pour les partis communistes, détachements révolutionnaires d'avant-garde du prolétariat et du mouvement communiste international, un facteur décisif de la trempe et du renforcement de leur unité marxiste-léniniste.

Dans la lutte pour dénoncer et démanteler les courants et les tendances opportunistes de droite et de "gauche" au sein de la IIIe Internationale, un mérite particulier revient à Staline, qui, en tant que disciple et continuateur de l'oeuvre de Lénine, a apporté une très importante contribution à la sauvegarde de la pureté de la doctrine marxiste-léniniste face aux attaques de divers opportunistes, comme Trotsky, Brandler, Zinoviev et Boukharine, qui, de concert ou séparément, ont tenté de dénigrer le léninisme et de faire dévier le mouvement prolétarien de la voie de la révolution. Dans nombre de ses écrits, Staline a su non seulement dénoncer et écraser idéologiquement et politiquement les opportunistes de tout acabit, mais aussi concrétiser et enrichir la doctrine léniniste de conclusions et thèses nouvelles, en faisant la synthèse de l'expérience de la lutte révolutionnaire dans le monde et de celle de l'édification socialiste en Union soviétique.

À la différence de la IIe Internationale qui fit faillite, vaincue par l'opportunisme, la IIIe Internationale se consolida et s'aguerrit dans les luttes continues contre les groupes et les fractions opportunistes et révisionnistes. Dans le feu de cette lutte, elle élabora la stratégie et les tactiques du mouvement communiste et ouvrier international, formula les objectifs du programme de ce mouvement, fit avancer la cause de la consolidation et de la bolchevisation des partis du prolétariat, la cause de la révolution et des luttes de libération des peuples opprimés et asservis, elle trempa et raffermit le mouvement communiste et ouvrier international, et l'affirma comme la force dirigeante la plus conséquente et la plus résolue de la révolution et des luttes de libération des peuples, pour abolir le système capitaliste exploiteur par la voie révolutionnaire et faire triompher la révolution et le socialisme.

C'est pour jeter bas ces résultats que l'historiographie révisionniste en général, fondée sur les directives des partis révisionnistes, a entrepris depuis longtemps une attaque éhontée contre la IIIe Internationale communiste. "Les révisionnistes, souligne le camarade Enver Hoxha, attaquent férocement la grande œuvre du Komintern, précisément parce qu'il a créé et développé dans le monde les partis communistes, qui ont éduqué des millions de prolétaires à lutter contre la bourgeoisie de leur pays pour l'empêcher de perpétuer sa domination[7]."

L'historiographie mondiale comporte un nombre relativement important d'ouvrages sur la IIIe Internationale en général, sur ses problèmes et ses divers congrès et plénums en particulier. Une place assez importante revient ici aux auteurs révisionnistes qui ont publié des mémoires et des ouvrages historiques à ce sujet.

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Plusieurs militants et dirigeants du Komintern comme Dimitrov, Kroupskaïa, Marcel Cachin, Yaroslavski, Wilhelm Pieck, Clara Zetkin et Sen Katajama, ont relaté dans leurs mémoires et d'autres écrits, avec objectivité et esprit de parti, la grande activité révolutionnaire, d'une extrême importance historique, qu'a déployée le Komintern afin de tremper le mouvement communiste international, d'élaborer une stratégie révolutionnaire et de justes tactiques, conformément aux conditions concrètes. Ils ont mis en relief la lutte résolue et intransigeante qu'il a menée contre tous les courants et les déviations opportunistes de droite et de "gauche", ils ont fait ressortir le grand rôle qu'a joué Lénine en tant qu'organisateur et dirigeant de cet organe principal du mouvement communiste international et, après sa mort, l'apport de Staline au démantèlement des courants opportunistes apparus au sein du Komintern, comme le trotskisme, l'extrémisme de gauche allemand, le brandlérisme et le boukharinisme. Ils ont aussi relevé les traits léninistes de l'activité organisationnelle des organes dirigeants du Komintern et de son appareil en tant qu'organisation internationale réunissant tous les partis communistes du monde, et ont souligné que toute son activité organisationnelle se fondait sur les principes marxistes-léninistes du centralisme démocratique.

Les mémoires de militants et de dirigeants éminents de la IIIe Internationale, à l'exception, bien entendu, des renégats révisionnistes, revêtent une importance particulière si l'on veut présenter objectivement l'activité déployée par le Komintern et l'étudier scientifiquement, car c'est à travers ces souvenirs que l'on peut combler ce vide si sensible dans la connaissance de nombreux aspects de l'activité du Komintern, qui, pour diverses raisons, n'ont pas été traités dans ses documents ou, même quand ils l'ont été, ne sont pas accessibles aux chercheurs, parce qu'enfermés dans des archives et non encore publiés.

Les historiens et les mémorialistes soviétiques, indépendamment de leurs attitudes et de leurs angles de vision souvent différents dans le traitement des problèmes relatifs au Komintern, se rejoignent tous dans un objectif unique, celui de dénigrer l'Internationale communiste. C'est ainsi que dans leurs écrits et leurs souvenirs, les cadres et les fonctionnaires du Komintern qui ont trahi le prolétariat et le marxisme-léninisme, présentent l'activité révolutionnaire du Komintern sous un faux jour. Ils considèrent les événements qu'ils ont vécus eux-mêmes, et dont parfois ils ont été les protagonistes, sous un angle qui convient à leurs prises de position politiques opportunistes au moment de la rédaction de leurs mémoires.

C'est à partir de positions foncièrement révisionnistes que des renégats du mouvement communiste international, comme Otto Kuusinen et Palmiro Togliatti entre autres, décrivent et analysent nombre d'événements qui se rattachent à l'activité du Komintern sans pour autant ménager leurs critiques à son égard.

À les en croire, les erreurs et les déviations dogmatiques et sectaires, soi-disant fort nombreuses, constatées après la mort de Lénine dans l'activité du Komintern jusqu'à son VIIe Congrès, étaient dues à ce que l'Internationale communiste résolvait, selon eux, tous les problèmes politiques fondamentaux suivant les schémas exposés par Staline, elles se rattacheraient à la propagation de son culte, au prétendu diktat que Staline aurait imposé au Komintern tout au long de son existence.

Dans leurs mémoires et leurs écrits, ces renégats et traîtres au prolétariat et au mouvement communiste sont pris dans un engrenage de contradictions et, par leurs attitudes anti-léninistes et anti-prolétariennes, par leurs falsifications et leurs déformations, ils s'écartent à jamais de la vérité historique, ils sèment le désarroi et rejoignent complètement les positions de l'historiographie bourgeoise réactionnaire. À court d'arguments, les auteurs révisionnistes abondent en absurdités et se couvrent ainsi de ridicule. Ils ne sont point en mesure de montrer en quoi résident les prétendues erreurs dogmatiques et sectaires du Komintern après la mort de Lénine. Togliatti, par exemple, affirme que le Komintern, sous l'influence du culte de Staline, s'est permis nombre d'erreurs sectaires et dogmatiques, voulant dire par là que ces erreurs ont dominé pendant longtemps dans la ligne politique du Komintern. Après quoi, il se demande comment le Komintern a pu se permettre ces "graves erreurs" (sic), alors que sa politique était juste. "La question, dit-il, se pose de savoir (c'est-à-dire que l'on ne saurait expliquer ‑ Sh. B.) comment elles (les prétendues erreurs du Komintern après son VIIe Congrès sous l'influence du soi-disant culte de Staline ‑ Sh. B.) pouvaient coexister avec l'action politique, si vaste, si ouverte et si juste menée par l'Internationale communiste précisément en ces années-là, et à la définition de laquelle participa aussi Staline[8]." Cette attitude de Togliatti, extrêmement contradictoire, découvre le vrai visage de ce renégat, son hypocrisie et son cynisme. Lorsqu'il parle d'erreurs, il ne pense naturellement pas aux simples erreurs commises dans le cadre d'une politique juste dans l'ensemble, mais il entend une ligne politique erronée qui a prétendument coexisté avec les actions politiques, en général plutôt justes, du Komintern. Togliatti rend Staline responsable de cette ligne politique soi-disant erronée du Komintern, alors que le mérite des justes actions politiques de la IIIe Internationale, comme ce charlatan politique le laisse entendre, reviendrait à d'autres et sans nul doute à lui-même. La manipulation et la falsification atteignent ainsi un point tel que tout masque de justification tombe et Togliatti apparaît comme un mystificateur politique à la Kautsky.

Les mémoires et les écrits des auteurs révisionnistes publiés après la mort de Staline, ont un caractère subjectif et conjoncturel. S'ils considèrent les problèmes, la ligne politique et l'activité du Komintern à partir de positions profondément opportunistes, c'est parce qu'ils s'évertuent à "trouver" même dans le passé du mouvement communiste un appui pour justifier l'actuelle politique anti-léniniste et révisionniste de leurs partis. Dans nombre de mémoires des renégats révisionnistes, les événements et les problèmes analysés par le Komintern, en particulier après la mort de Lénine, font l'objet d'une interprétation qui diffère en tout de celle que leur réalité impose. Ces auteurs, tout en chœur, suivant la baguette du chef d'orchestre, expliquent les "erreurs", le "sectarisme", le "dogmatisme", etc., de la IIIe Internationale, par le prétendu régime dictatorial que Staline aurait instauré au sein du Komintern.

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Dans l'historiographie soviétique sur la IIIe Internationale on distingue clairement deux étapes, l'une datant d'avant l'avènement du groupe renégat de Khrouchtchev et de Brejnev, et l'autre, d'après son accession au pouvoir.

Les premiers ouvrages sur le Komintern, naturellement sans prétentions hautement scientifiques, sont certains des livres et brochures consacrés aux différents congrès de la IIIe Internationale, ou des travaux qui en font une étude comparative avec la IIe Internationale.

Des études complètes sur l'activité du Komintern ont été entreprises dans les années '30 et '40. Une place importante y est réservée aux écrits publiés dans la revue L'Internationale communiste à l'occasion des 15e et 20e anniversaires de la fondation du Komintern, ou à certaines monographies, comme "La lutte menée par Lénine et Staline pour la fondation de la IIIe Internationale" (1940), "V. Lénine et J. Staline à propos des relations internationales du Komintern" (1939) et "La fondation de l'Internationale communiste" (1940). Ces écrits analysent plusieurs aspects de l'activité du Komintern, sa lutte contre l'opportunisme au-dedans comme au-dehors de ses rangs, et ils mettent en relief la contribution apportée par Lénine et Staline au traitement des problèmes théoriques de la stratégie et de la tactique révolutionnaires de la IIIe Internationale et des partis communistes.

Afin de noircir la juste politique du Parti bolchévik et notamment la figure de Staline, en tant que dirigeant du Parti bolchévik et éducateur du prolétariat mondial, les historiens révisionnistes modernes ont sorti la thèse selon laquelle, comme ils le disent eux-mêmes ouvertement, "... les ouvrages publiés dans la seconde moitié des années '30 et en particulier des années '40 sur Lénine et le Komintern portent le sceau du culte de la personnalité de Staline. Des brochures de vulgarisation et des articles consacrés à l'histoire du Komintern surestiment le rôle joué par Staline dans sa fondation, dans l'élaboration des problèmes théoriques et tactiques, ils comportent, sous l'influence de Staline, certaines appréciations erronées sur les questions de la stratégie et de la tactique du mouvement communiste. L'influence de son culte de la personnalité empêchait, donc, toujours selon eux, l'analyse scientifique des problèmes de l'histoire de la théorie et de la tactique de l'Internationale communiste[9]." C'est là un exemple typique qui montre la façon dont les révisionnistes soviétiques traitent ce problème en vue de noircir la figure de Staline. Il convient aussi d'indiquer que si l'historiographie soviétique actuelle a tendance à dénigrer l'activité du Komintern, ses principes et sa pratique, c'est parce que ceux-ci sont diamétralement opposées à l'activité révisionniste du PCUS menée depuis le XXe jusqu'au XXVIe Congrès de ce parti.

Toute la littérature historique actuelle en Union soviétique et les mémoires de certaines gens qui ont travaillé au Komintern, de Kuusinen entre autres, sont truffés d'attaques contre Staline, qu'ils rendent responsable de toutes les graves erreurs (sic) que le Komintern aurait commises après la mort de Lénine.

Les prises de positions de l'historiographie soviétique concernant le rôle de Staline au Komintern sont plus que tendancieuses, son objectif étant de falsifier et de déformer ouvertement les faits objectifs, les événements, les orientations et les décisions du Komintern de la période d'avant et d'après la mort de Lénine.

L'historiographie révisionniste soviétique, fondée sur les orientations de la direction renégate soviétique, s'est toujours efforcée d'ignorer et de dénigrer la grande contribution apportée par Staline au renforcement de l'unité du Komintern et, en particulier, le rôle extrêmement important qu'il a joué dans la dénonciation et le démantèlement de l'opportunisme de droite et de "gauche" au sein du mouvement communiste et ouvrier international.

Togliatti, faisant chorus avec eux, lance les mêmes accusations. Il a été l'un des premiers à diviser, en réalité, l'histoire du Komintern en deux périodes, la période du vivant de Lénine, où la IIIe Internationale, selon lui, tâchait, malgré ses flottements, de corriger ses erreurs (c'est là une thèse typiquement révisionniste apparue au lendemain du XXe Congrès du PCUS lorsqu'on dénigrait l'oeuvre de Staline en l'opposant à celle de Lénine), et l'autre période, celle après la mort de Lénine, durant laquelle, toujours au dire de Togliatti, on releva de nombreuses erreurs. Après la mort de Lénine, écrit Togliatti, "les hommes changèrent, et changèrent aussi nombre de méthodes de direction et de travail, les analyses et la solidité des conclusions devinrent moins profondes[10]." Togliatti considère l'attitude intransigeante du Komintern envers la social-démocratie comme l'erreur la plus grave et la plus fatale. "Je pense, écrit Togliatti, qu'il y a eu des hésitations et des erreurs qui se sont traduites essentiellement par une appréciation incomplète et tardive du danger fasciste et, partant, par une façon erronée de poser le problème de l'unité d'action et de la conduite à adopter envers les partis social-démocrates[11]."

L'actuelle historiographie révisionniste soviétique, c'est-à-dire celle du lendemain du XXe Congrès de triste mémoire, se fonde, comme on vient de le dire, sur les directives révisionnistes des sept derniers congrès du PCUS, sur les écrits de Brejnev, Souslov, Ponomarev et d'autres dirigeants du parti révisionniste soviétique, qui, à partir de positions antiléninistes, ont porté leurs jugements sur le Komintern en général et sur la période postérieure à la mort de Lénine en particulier. Prenant pour point de départ leurs directives, divers hommes d'études soviétiques ont cherché à minimiser le rôle du Komintern en tant que centre du mouvement communiste international et ils déforment et faussent la véritable action de celle-ci dans l'esprit de la ligne révisionniste du PCUS, contraire en tous points à la politique, à la stratégie et à la tactique de la IIIe Internationale.

Des hommes d'études et historiens soviétiques, et, dans leur sillage, des historiens d'autres pays où les révisionnistes sont au pouvoir, semblent fonder leurs écrits sur les œuvres de Lénine, et n'hésitent pas parfois à citer force passages, mais une analyse attentive de la façon dont ils manipulent les écrits de Lénine, les citations qu'ils en extraient, fait ressortir leur tendance à la mystification, leur volonté d'utiliser les citations de Lénine dans l'esprit de la politique et de la ligne opportuniste du parti révisionniste soviétique. S'ils citent souvent Lénine, c'est juste pour la forme, pour convaincre le lecteur qu'ils se fondent soi-disant sur ses écrits. Ces auteurs mutilent les citations à leur guise en les détachant de leur contexte, afin de dénaturer ainsi les idées de Lénine dans l'ensemble et de les manipuler à des fins déterminées pour que le lecteur ne tire pas les conclusions logiques qu'impose en fait la lecture des écrits de Lénine.

Un des dirigeants de l'actuelle clique brejnevienne, Ponomarev, membre suppléant du Bureau politique du Comité central du PCUS, nous offre un exemple typique et significatif de falsification éhontée de Lénine lorsqu'il affirme: "Le Komintern a non seulement regroupé les meilleures forces internationalistes du mouvement ouvrier, mais, dès les premiers jours de son existence, à l'initiative de Lénine, il oeuvra à coordonner l'action des courants communistes et social-démocrates du mouvement ouvrier[12]." On connaît publiquement l'attitude intransigeante, conséquente et de principe de Lénine à l'égard de la social-démocratie (des centaines de citations pourraient être extraites de ses œuvres à ce sujet), sa thèse suivant laquelle sans tracer une ligne de démarcation claire et nette entre les vrais communistes et les sociaux-démocrates, entre le communisme et la social-démocratie en tant que courant politique et idéologique, il ne pourrait être question d'un mouvement communiste conséquent, ni de la création des partis communistes dans divers pays et de l'Internationale communiste comme centre dirigeant du mouvement communiste international.

Lorsque, après la Première Guerre mondiale, les opportunistes social-chauvins ranimèrent la IIe Internationale à la Conférence de Berne (février 1919), Lénine s'exprima en ces termes: "L'Internationale “de Berne” est en réalité, de par son rôle historique et politique véritable,... une organisation d'agents de l'impérialisme international, qui agissent à l'intérieur du mouvement ouvrier, et font pénétrer dans ce mouvement l'influence bourgeoise, les idées bourgeoises, le mensonge bourgeois et la corruption bourgeoise[13]." Quant au Ier Congrès du Komintern, son congrès fondateur, il définissait ainsi son attitude envers la social-démocratie européenne en tant que courant et parti politiques: "Malgré la lutte toujours plus dure menée jusqu'ici par les communistes contre la plupart des sociaux-démocrates européens, les ouvriers n'ont pas encore pris conscience comme il se doit du danger que présentent ces traîtres pour le prolétariat international. Dessiller les yeux aux ouvriers afin qu'ils se rendent compte de ce travail de Judas des social-chauvins et annihiler d'une puissante action armée ce parti contre-révolutionnaire, voilà une des tâches les plus importantes de la révolution mondiale[14]."

C'est là la vérité et, en dépit des efforts des révisionnistes soviétiques pour la falsifier, elle ne peut être dissimulée ni oubliée, parce qu'on connaît bien l'attitude ferme et la lutte de principe menée par Lénine contre la social-démocratie et le social-démocratisme.

Ce genre de spéculations utilisées à grande échelle par l'actuelle historiographie révisionniste soviétique constitue l'une des manifestations les plus typiques de la démagogie révisionniste et en même temps l'un des moyens les plus raffinés dont elle se sert pour mettre à profit le nom et l'autorité de Lénine.

Togliatti, non plus, ne considère pas comme juste l'attitude adoptée par la IIIe Internationale dès le début à l'endroit des partis social-démocrates et socialistes de droite et centristes. D'une manière vague et équivoque, il lâcha les mots suivants: "... il était plus facile de rompre avec les dirigeants sociaux-démocrates que de se libérer du social-démocratisme[15]." Cette phrase, prise dans le contexte politique des vues révisionnistes de Togliatti, laisse entendre qu'il ne jugeait pas juste cette distanciation totale par rapport aux partis social-démocrates, comme le recommandait le Komintern et l'enseignait Lénine, parce que, à l'en croire, cela a engendré des manifestations dogmatiques et sectaires prononcées au sein du Komintern et de certains partis communistes.

"La rupture d'avec l'opportunisme, écrivait Togliatti, conduisait facilement à des formes de sectarisme qui isolaient les communistes, souvent peu nombreux, des larges masses organisées ou non dans des syndicats; il y avait même de ceux qui échafaudaient des théories sur cet isolement, en affirmant qu'il s'agissait d'attendre que les masses "viennent à nous" et, finalement, on ne manqua pas de créer aussi une doctrine de l´"offensive", selon laquelle même une petite minorité, bien qu'isolée des larges masses, pouvait prendre d'assaut le bastion du pouvoir[16]."

En fait, Togliatti partage ainsi entièrement le point de vue répandu dans l'historiographie réformiste, social-démocrate, selon lequel le Komintern, par ses attitudes intransigeantes envers les partis sociaux-démocrates et socialistes, a provoqué lui-même la division au sein du mouvement ouvrier international et l'a encore aggravée par la suite. Togliatti voit ici une grave erreur de l'Internationale communiste, aussi met-il davantage l'accent sur la lutte qu'a menée le Komintern contre l'extrémisme du vivant de Lénine. À des fins mystificatrices, il passe sous silence le fait que c'est justement Lénine qui était le promoteur de la politique intransigeante du Komintern en vue de démasquer politiquement et idéologiquement les partis sociaux-démocrates et socialistes, de droite et centristes, que c'était lui qui les a toujours stigmatisés en des termes très violents, les considérant comme des ennemis farouches du prolétariat et des peuples, des agents de la bourgeoisie impérialiste, le soutien principal de l'impérialisme et de la réaction mondiale, visant à perpétuer l'oppression et l'exploitation colonialiste, sociale et nationale, du capitalisme.

Au cours de toute son existence de vingt-quatre années, le Komintern a en fait observé une attitude léniniste, conséquente, nette et tranchante à l'égard des partis sociaux-démocrates, il a toujours considéré le social-démocratisme comme une variante de l'idéologie bourgeoise et les partis sociaux-démocrates comme des partis ouvriers bourgeois, l'appui principal du capital monopoliste pour maintenir les masses travailleuses sous le joug. Partant des enseignements de Lénine et de l'expérience du mouvement ouvrier international, l'Internationale communiste a mis clairement en lumière les objectifs politiques de la social-démocratie en tant que porteuse de l'influence bourgeoise au sein du mouvement ouvrier, objectifs qui visaient à détourner le prolétariat de sa lutte révolutionnaire, à saboter la révolution prolétarienne et à empêcher à tout prix l'instauration de la dictature du prolétariat. Depuis le début jusqu'à la fin de son activité, le Komintern s'en est tenu toujours avec esprit de suite à sa juste ligne marxiste-léniniste. Même quand ont été envisagées des actions coordonnées avec les partis sociaux-démocrates sur divers problèmes, à différentes périodes, il ne s'agissait point de nier cette ligne fondamentale, mais d'oeuvrer dans son cadre dans le seul but de trouver les moyens et les voies adéquates pour éviter la scission dans le mouvement ouvrier, et cela sans fouler aux pieds les principes, mais en les défendant jusqu'au bout. Il ne s'agissait donc pas de réhabiliter idéologiquement et politiquement la social-démocratie, comme les révisionnistes veulent le faire croire et comme ils le font actuellement dans la pratique. C'est bien ainsi qu'a été posée la question par le VIIe Congrès du Komintern également. Son appel à mener des actions communes avec les partis sociaux-démocrates dans la lutte contre le fascisme, contre l'assaut du capital et le danger de guerre ne signifiait nullement la réhabilitation politique et idéologique de la social-démocratie, ce n'était là qu'une action tactique, conditionnée par certaines circonstances historiques concrètes, qui devait aller dans le sens du renforcement de l'unité du mouvement ouvrier, sans sacrifier nullement les principes léninistes révolutionnaires ni s'en écarter tant soit peu. "Il est indispensable de ne pas perdre de vue, soulignait Dimitrov au VIIe Congrès du Komintern, que la tactique du front unique est une méthode qui tend à convaincre dans la pratique les ouvriers sociaux-démocrates du bien-fondé de la politique communiste et de la fausseté de la politique réformiste, ce n'est pas une réconciliation avec l'idéologie et la pratique social-démocrates[17]."

Les divers révisionnistes, togliattiens et titistes, soviétiques et eurocommunistes, considèrent cette attitude léniniste conséquente et résolue du Komintern à l'égard de la social-démocratie comme l'une de ses plus graves erreurs et cela, parce que, selon eux, "cette attitude dogmatique" (sic) a soi-disant gravement nui à l'unité du mouvement ouvrier à l'échelle internationale et dans tel ou tel pays. Sur cette question, ces renégats partagent entièrement le même avis que les sociaux-démocrates, qui se sont toujours efforcés de rejeter sur le Komintern la responsabilité de la scission au sein du mouvement ouvrier dans la période comprise entre les deux guerres mondiales, alors qu'eux et eux seuls en étaient les responsables.

Les révisionnistes modernes, eurocommunistes ou soviétiques, cherchent par là à justifier, entre autres, leur politique de large collaboration non seulement avec les partis sociaux-démocrates et socialistes, devenus actuellement plus que jamais le principal appui du capital monopoliste, mais aussi avec les partis bourgeois, et cela pour sauvegarder les libertés démocratiques bourgeoises et pour réaliser des objectifs stratégiques à long terme, en se livrant à des comparaisons et à des parallélismes avec les directives qu'a soi-disant données le VIIe Congrès du Komintern. C'est ainsi, par exemple, que les révisionnistes tâchent de prouver que l'idée de pluralisme politique, l'idée que l'on peut passer au socialisme sans la direction d'un parti unique de la classe ouvrière, remonterait, selon eux, aux décisions du VIIe Congrès du Komintern.

De même que Dimitrov dans son rapport, la résolution afférente adoptée au VIIe Congrès ne laisse pas subsister la moindre équivoque sur la dite idée de pluralisme politique. Le VIIe Congrès du Komintern ne mit pas en question ni en doute l'idée léniniste du rôle dirigeant du prolétariat et de son parti révolutionnaire communiste marxiste-léniniste dans la révolution et dans l'édification du socialisme. Au contraire, il souligna avec force que le passage du capitalisme au socialisme ne peut aucunement être réalisé en alliance avec diverses couches de la bourgeoisie et leurs partis politiques, fussent-ils sociaux-démocrates, mais dans une lutte à outrance contre leur idéologie et leur activité politique, jusqu'à leur liquidation définitive sur les plans politique, organisationnel et étatique également. Ce passage ne pouvait donc pas être réalisé sans que soient renversés du sommet du pouvoir politique tous les partis bourgeois déclarés, radicaux ou sociaux-démocrates, à travers la révolution prolétarienne violente et l'instauration de la dictature du prolétariat. "Il faut faire clairement comprendre aux ouvriers, soulignait le VIIe Congrès du Komintern dans ses décisions, qu'il est impossible de réaliser le socialisme tant que le pouvoir sera entre les mains de la bourgeoisie."

Aussi l'assertion des révisionnistes selon laquelle le VIIe Congrès du Komintern a soi-disant soulevé la question de la collaboration des partis communistes et de la IIIe Internationale avec les partis sociaux-démocrates et socialistes, sur la base d'une nouvelle stratégie globale du communisme international, n'est que duperie et spéculation. La coordination des actions contre le fascisme et le danger de guerre impérialiste, à laquelle le VIIe Congrès du Komintern appelait les partis sociaux-démocrates, se situait exclusivement sur le plan tactique et, comme nous l'avons déjà évoqué, le Komintern savait fort bien que cette coordination des actions ne deviendrait jamais une base pour la réalisation des tâches stratégiques du mouvement ouvrier international. Cette coordination n'apporta et ne pouvait apporter aucune contribution valable à la lutte des ouvriers. Et le Komintern ne s'était bercé d'illusions à cet égard. C'est ce que démontrent les documents à valeur de programme approuvés par ses instances suprêmes, c'est ce qu'atteste aussi toute son activité pratique. Mais cette tactique était importante parce que les ouvriers, qui étaient encore sous l'emprise des influences social-démocrates, devaient prendre conscience dans la pratique de la lutte politique de tous les jours des agissements antiouvriers et pro-bourgeois des dirigeants sociaux-démocrates.

Ce que les révisionnistes soviétiques disent à mi-voix est traduit dans les faits par les révisionnistes italiens et français qui ont déclaré ouvertement que le VIIe Congrès du Komintern, considéré à la lumière des nouvelles situations, leur a offert la possibilité d'aborder de façon exhaustive certaines idées qui avaient été à peine effleurées ou mal interprétées dans ses décisions, ou qui, pire encore, n'avaient pas été appliquées, du fait du prétendu culte de Staline.

Selon les historiens soviétiques, le Komintern aurait adopté en général, après la mort de Lénine, une ligne politique caractérisée par des déviations et de graves erreurs sectaires et dogmatiques, ses décisions auraient reflété les conceptions erronées (sic) de Staline sur les problèmes de la stratégie et de la tactique révolutionnaires du mouvement communiste international et de chaque parti communiste pris à part, aboutissant ainsi à la conclusion que de son Ve Congrès (1924) à son VIIe Congrès (1935) la ligne politique du Komintern aurait été surtout marquée par des erreurs de "gauche", dogmatiques, extrémistes. Ils ignorent à dessein la lutte résolue et rigoureusement conforme aux principes menée à cette époque par le Komintern contre l'opportunisme de droite et de "gauche", en vue de liquider le trotskisme et l'extrémisme allemand de gauche, le brandlérisme, le boukharinisme, etc., le fait étant que Staline y a joué un rôle déterminant.

À en croire les historiens révisionnistes soviétiques, le schéma universel de la stratégie élaborée par le Komintern après son Ve Congrès aurait été erroné, stéréotypé et dogmatique; il aurait été modifié, en opérant par là, à leur sens, un véritable tournant radical dans toute la ligne politique de la IIIe Internationale, par son VIIe Congrès, dont les décisions auraient, toujours selon eux, été adoptées contre le gré de Staline[18].

Tout d'abord il faut indiquer qu'après la mort de Lénine, le Komintern n'élabora aucun "nouveau schéma stratégique universel" à l'intention du mouvement communiste international. La ligne stratégique de l'Internationale communiste demeura celle qui fut élaborée dans ses congrès précédents sous la conduite directe de Lénine. Sa ligne politique également ne subit aucun changement et il n'est point question d'un quelconque tournant radical dans cette ligne après la mort de Lénine. Le Komintern poursuivit fidèlement cette ligne politique élaborée sous la direction de Lénine en appliquant, naturellement dans les nouvelles conditions créées après 1924, des tactiques, des méthodes de lutte et des formes d'organisation plus variées et plus souples dans le combat quotidien du prolétariat, afin d'attirer autour de celui-ci les larges masses pauvres des campagnes et des villes. Quant à l'historiographie révisionniste soviétique, elle ne fait que dénaturer et falsifier sans scrupules et à des fins déterminées les faits lorsqu'elle prétend que, par les décisions de son VIIe Congrès, le Komintern aurait modifié, bien qu'avec du retard, sa ligne stratégique. D'après las révisionnistes soviétiques, le Komintern s'en serait tenu, jusqu'à son VIIe Congrès, d'une façon erronée et trop strictement à la directive selon laquelle "après la révolution bourgeoise, l'étape stratégique du mouvement ouvrier ne peut avoir qu'un seul objectif direct, la lutte pour l'instauration de la dictature du prolétariat[19]". De l'analyse des documents et de l'activité du Komintern, il ressort qu'il n'a jamais donné de recettes toutes faites et des directives également valables pour tous les partis communistes, qu'il n'a pas ignoré les conditions historiques et les circonstances dans lesquelles ces partis déployaient leur activité révolutionnaire. Les directives générales formulées par le Komintern se fondaient sur les principes de base de la doctrine marxiste-léniniste. En outre, la IIIe Internationale a toujours tenu compte, lors de l'élaboration de sa ligne politique, du contenu fondamental de l'époque nouvelle créée au lendemain du triomphe de la Grande Révolution socialiste d'Octobre et des conditions historiques propres aux divers pays, où les masses prolétariennes, dirigées par leurs partis communistes, menaient leur combat.

Le fait que le VIIe Congrès du Komintern ait recommandé à chaque parti communiste de mettre à l'ordre du jour la lutte pour la paix et contre le danger fasciste comme une tâche immédiate, ne signifie point, comme le prétendent les historiens révisionnistes soviétiques et autres, que le Komintern a renvoyé aux calendes grecques la préparation de la révolution prolétarienne. Ils posent la question comme si le Komintern, après son VIIe Congrès, a considéré la lutte pour la paix et contre le danger fasciste comme une étape particulière du développement du mouvement révolutionnaire, indispensable à chaque pays, fut-il développé ou arriéré, indépendamment de son niveau de développement social et économique, du niveau de développement politique et organisationnel du prolétariat et de son parti d'avant-garde, le parti communiste. Les révisionnistes réduisent en effet toute lutte de classe à une lutte pour la paix et la démocratie parce que, à leur avis, seule la lutte pour la paix et la démocratie ouvre la voie au socialisme. "L'importance de ce tournant effectuée par le Congrès, affirment les historiens soviétiques, réside entre autres dans le fait que c'était bien un tournant par rapport aux schémas et aux illusions révolutionnaires, dans l'analyse des conditions réelles et des conclusions révolutionnaires qui en découlent[20]." Les historiens révisionnistes considèrent toute l'activité antérieure du Komintern, les directives qu'il a données, comme des schémas abstraits et rigides, comme des illusions révolutionnaires, sans faire aucune distinction dans le temps, mais en laissant entendre qu'il en aurait été ainsi avant comme après la mort de Lénine.

Cette "confusion théorique" des hommes d'études révisionnistes est aussi démagogique que contre-révolutionnaire. La lutte pour la paix et la démocratie est, certes, une tâche importante qui incombe à la classe ouvrière. Elle a toujours été et sera contre les guerres impérialistes de rapine, contre les régimes dictatoriaux fascistes du grand capital, elle n'a cessé de combattre pour la défense et la sauvegarde des libertés démocratiques. Mais cela n'a été ni ne sera jamais un but en soi. Même quand la classe ouvrière lutte contre le danger de guerre impérialiste, contre les forces fascistes et pour la défense des libertés démocratiques, elle n'ignore aucunement ses intérêts de classe, elle ne perd jamais de vue ses objectifs de libération sociale en luttant contre l'oppression et l'exploitation capitalistes.

"Chacun sait qu'à l'époque de l'impérialisme, souligne le camarade Enver Hoxha, il ne peut jamais y avoir, dans le cadre de la société bourgeoise, un développement progressif des libertés et de la démocratie pour les masses. Ce qui croît et s'accentue au contraire au cours de cette période, ce sont les forces de la réaction, la militarisation de la production et des autres aspects de la vie, l'oppression du prolétariat et des nations, pour en arriver à la forme la plus féroce et la plus barbare, celle du fascisme. Seule la révolution violente et l'instauration de la dictature du prolétariat assurent les conditions nécessaires pour l'épanouissement de la liberté et de la démocratie pour les larges masses populaires[21]."

Contrairement à ce que prétendent les hommes d'études révisionnistes, le Komintern n'a jamais souscrit à l'idée qu'il faut brûler les étapes, il a toujours posé la question d'une façon claire, à savoir que la définition des tâches et des objectifs stratégiques est fonction de la situation concrète, du niveau de développement économique, social et politique de tel ou tel pays, des tâches que la révolution devait y résoudre historiquement et objectivement. Le Komintern définissait clairement les étapes du développement de la révolution et, en conséquence, il en fixait les objectifs stratégiques, en faisant la distinction entre l'étape démocratique et l'étape socialiste.

Fidèle à cette ligne dès sa fondation, le Komintern l'a suivie jusqu'au bout. Cette ligne a été confirmée aussi dans le programme du Komintern approuvé par son VIe Congrès (1928) ainsi que dans les décisions de son VIIe Congrès (1935).

Le programme approuvé au VIe Congrès du Komintern concevait le processus révolutionnaire mondial comme une combinaison de divers types de révolutions, chacune d'elles devant résoudre ses propres tâches dans des pays d'un niveau de développement social, économique et politique différent. Il soulignait que la diversité des conditions économiques, sociales et politiques suivant les différents pays rend historiquement indispensable dans nombre d'États le passage de la révolution par certaines étapes, lesquelles devaient en fin de compte aboutir à l'instauration de la dictature du prolétariat. Aussi les révolutions dans divers pays pouvaient-elles être de différents types: révolutions prolétariennes, révolutions démocratiques bourgeoises qui se transforment en révolutions prolétariennes, luttes de libération nationale, révolutions coloniales[22]. Plus loin, le programme divisait les pays et les zones au monde selon le niveau de leur développement économique, social et politique, en assignant, conformément à ce niveau, les tâches que devait mener à bien la révolution ainsi que les étapes qu'elle devait traverser. La tâche fondamentale définie dans le programme révolutionnaire du prolétariat des pays capitalistes développés à système politique démocratique bourgeois, était l'instauration de la dictature du prolétariat. Alors que dans les pays d'un niveau de développement capitaliste moyen, comme l'Espagne, le Portugal, la Pologne, la Hongrie et les États des Balkans, où "les survivances semi-féodales dans l'agriculture étaient encore prononcées, mais où il existait encore un minimum de conditions matérielles indispensables pour entreprendre l'édification socialiste bien que les transformations démocratico-bourgeoises n'y eussent pas encore été réalisées[23]", la révolution allait connaître plusieurs étapes, d'abord l'étape de la révolution démocratique bourgeoise, puis l'étape de la révolution prolétarienne. Ce passage, comme on vient de le dire, serait conditionné par le niveau de développement social, économique et politique du pays, le niveau d'organisation de la classe ouvrière et la capacité de son parti de se mettre à la tête du mouvement révolutionnaire. Les pays coloniaux et semi-coloniaux, comme la Chine et l'Inde, ou encore les pays dépendants, comme l'Argentine et le Brésil, constituaient un troisième groupe. C'étaient des pays qui étaient, eux aussi, caractérisés par un développement industriel réduit, par des rapports féodaux moyenâgeux dominants dans leur économie comme dans leur superstructure politique, ainsi que par la concentration des branches principales de leur économie et de leurs finances aux mains des groupes impérialistes. "Dans ces pays, était-il énoncé dans le programme du Komintern, la lutte contre le féodalisme et contre les formes d'exploitation précapitalistes, ainsi que la révolution agraire de la paysannerie appliquée de façon conséquente, d'une part, et la lutte menée contre l'impérialisme étranger et pour l'indépendance nationale, de l'autre, revêtent une importance primordiale. En règle générale, soulignait ce programme, le passage à la dictature du prolétariat dans ces pays n'est possible qu'à travers quelques échelons préparatoires, en tant que résultat de toute une période de la transformation de la révolution démocratique bourgeoise en révolution socialiste[24]."

Quant à des pays très arriérés, comme ceux de quelques régions d'Afrique, par exemple, où la classe ouvrière était quasi inexistante, où la majorité de la population vivait à l'état tribal et où l'impérialisme étranger jouait le rôle d'occupant militaire, leur première tâche à résoudre c'était de se libérer de l'oppression et de la domination impérialiste.

Le VIIe Congrès du Komintern également, dans l'esprit du programme approuvé au VIe Congrès, a défini le problème du développement du mouvement révolutionnaire prolétarien comme un mouvement qui, compte tenu des conditions et des circonstances, peut traverser plusieurs étapes, en définissant clairement leurs limites, le rapport des forces sociales et le rôle dirigeant du prolétariat dans la lutte révolutionnaire qu'il doit mener avec esprit de suite afin d'assurer le passage de la révolution de la première à la seconde étape. Dans cet esprit Dimitrov a déclaré au VIIe Congrès du Komintern : "Les opportunistes de droite ont cherché à délimiter “un stade démocratique intermédiaire” particulier entre la dictature de la bourgeoisie et la dictature du prolétariat en vue de créer chez les ouvriers l'illusion d'une promenade pacifique parlementaire d'une dictature à l'autre. Ce “stade intermédiaire” illusoire, ils l'ont appelé aussi “forme transitoire”, et pour ce faire, ils se sont référés même à Lénine! Mais il n'est pas difficile de voir ce que cache ce tour de passe-passe. Certes, Lénine a parlé de la forme d'organisation de la “révolution prolétarienne” et de son passage direct au renversement de la dictature bourgeoise et non pas de telle ou telle forme de passage de la dictature de la bourgeoisie à celle du prolétariat[25]." Les jugements de Togliatti sur le VIIe Congrès du Komintern, qu'il considère comme un événement à part, quasi détaché de tout le contexte de la ligne politique et de l'activité antérieure du Komintern, ne sont que pure falsification. Dénaturant et faussant les décisions de ce congrès, il est parmi les premiers à avoir lancé l'idée que ces décisions marquent soi-disant un véritable tournant de portée internationale dans la ligne stratégique du Komintern. "Cela, affirme ce falsificateur de Togliatti, se référant toujours aux décisions de ce congrès, a ouvert la voie aux alliances et à la collaboration, à condition toutefois de ne pas mettre dans le même sac tous les sociaux-démocrates et les politiciens de la bourgeoisie, mais de faire une différenciation entre eux... Cette orientation, toujours d'après Togliatti, n'était plus une simple orientation tactique, mais stratégique[26]."

Ainsi, Togliatti créa les prémisses d'une interprétation opportuniste, révisionniste, des décisions du VIIe Congrès du Komintern, prémisses qui sont à la base des positions antiléninistes des divers partis révisionnistes eurocommunistes sur ce sujet.

Par la duperie et des falsifications, Togliatti cherche à écarter le prolétariat de la voie révolutionnaire. C'est également le but de son assertion comme quoi nombre d'idées fondamentales formulées par le XXe Congrès du PCUS, qu'il a lui-même partagées dès le début, ont soi-disant été énoncées à l'origine par le VIIe Congrès du Komintern. Selon lui, ses décisions concernaient non seulement le problème de la sauvegarde de la paix, qui ne se présentait plus comme en 1914 (pour lui, à partir de ce moment-là, la question de la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile ne se posait plus) et le problème de la participation des communistes aux gouvernements du front unique, auxquels Togliatti confère une valeur universelle et permanente, en dépit des conditions concrètes, mais elles concernaient aussi la voie démocratique au socialisme (c'est-à-dire le passage au socialisme par la voie pacifique) qui est portée à l'absolu et, en complète opposition avec ce qu'a décidé le VIIe Congrès du Komintern, présentée par Togliatti et tous les révisionnistes modernes comme un postulat éternel.

Les spéculations et les falsifications des hommes d'études révisionnistes soviétiques et eurocommunistes, leurs efforts pour donner une toute autre interprétation des décisions du VIIe Congrès du Komintern, qu'ils considèrent comme un "tournant dans la politique et la stratégie du Komintern", atteignent leur comble lorsqu'ils affirment que ces décisions contiendraient à l'état embryonnaire l'idée de l'évolution pacifique de la révolution.

En totale opposition avec la vérité historique, déformant sans scrupules les décisions du VIIe Congrès du Komintern et les interprétant dans l'esprit profondément révisionniste du XXe Congrès du P.C.U.S. et en général dans l'esprit de toute sa politique antiléniniste, l'historiographie soviétique tâche de "découvrir" et de fabriquer de prétendus points de rencontre entre les décisions du VIIe Congrès de l'Internationale communiste et celles du XXe Congrès du PCUS. "Il est aisé de constater, déclarent les historiens mystificateurs et falsificateurs révisionnistes qui se disent des scientifiques, que nombre de ces problèmes, en particulier les problèmes fondamentaux (c'est-à-dire ceux qui sont posés et résolus sur des bases foncièrement révisionnistes par le XXe Congrès du PCUS ‑ Sh. B.), étaient traités sous une forme ou sous une autre par le VIIe Congrès du Komintern. Et si 30 ans après ce Congrès, ce sont les mêmes problèmes qui sont au centre de l'attention du mouvement communiste international, cela, loin de montrer que le mouvement n'a pas avancé, témoigne que le VIIe Congrès du Komintern a affronté non seulement des problèmes conjoncturels particuliers, mais encore des questions fondamentales, importantes pour la période de la lutte, pour le triomphe du socialisme à l'échelle mondiale[27]." L'historiographie soviétique vise à dénigrer la IIIe Internationale, sa politique, sa stratégie, ses tactiques, en cherchant à isoler le VIIe Congrès dont les décisions sont déformées et falsifiées à des fins politiques déterminées pour être opposées à la ligne politique antérieure du Komintern.

Le VIIe Congrès du Komintern, contrairement à ce que prétendent actuellement les révisionnistes de tout acabit, a souligné avec force, sans la moindre équivoque, que le passage au socialisme ne peut être réalisé qu'à travers la révolution prolétarienne violente, qui doit annihiler la domination de la bourgeoisie et instaurer la dictature du prolétariat. "L'expérience de la Grande Révolution socialiste d'Octobre, d'une part, soulignait Dimitrov au VIIe Congrès du Komintern, et les leçons amères tirées des événements d'Allemagne, d'Autriche et d'Espagne pendant l'après-guerre, de l'autre, ont confirmé une fois de plus que la victoire du prolétariat n'est possible qu'à travers le renversement révolutionnaire de la bourgeoisie, car la bourgeoisie noierait le mouvement ouvrier dans le sang et ne permettrait pas au prolétariat d'instaurer le socialisme par la voie pacifique. L'expérience de la Révolution d'Octobre, poursuivait Dimitrov, a montré clairement que le contenu essentiel de la révolution prolétarienne est la question de la dictature du prolétariat qui a pour tâche de réprimer la résistance des exploiteurs renversés, d'armer la révolution pour combattre l'impérialisme et de la mener jusqu'au triomphe complet du socialisme[28]."

Depuis cette époque jusqu'à nos jours, on a beaucoup spéculé sur les thèses du Komintern concernant le front unique ouvrier, présentées à son IIIe Congrès et jusqu'au VIIe. Les éléments et les fractionnistes à tendances droitières, à commencer par Brandler, Browder et autres révisionnistes, qui servent d'exemple aux révisionnistes modernes, se sont efforcés d'exploiter ces thèses au profit de leurs spéculations. Afin d'imposer une ligne opportuniste aux partis révolutionnaires du prolétariat, ils déclarent indispensable de collaborer avec les partis sociaux-démocrates et socialistes de droite et centristes cherchant par là à infléchir la stratégie et la tactique des partis communistes et à les conformer à la stratégie et à la tactique réformistes des partis ouvriers opportunistes centristes déclarés.

Dans ses thèses, le Komintern exprimait clairement et sans aucune équivoque sa prise de position sur ce problème, et soulignait que: "Par front ouvrier unique il faut entendre l'unité de tous les ouvriers qui doivent combattre le capitalisme[29]." Le front ouvrier unique était donc conçu par le Komintern comme un front militant en action, qui avait avant tout pour tâche de mobiliser et de dresser les larges masses ouvrières dans la lutte contre le fascisme et le danger de guerre, de leur faire prendre conscience du contenu d'exploitation et d'oppression du régime capitaliste ainsi que de la nécessité de s'unir et d'entreprendre des actions communes à l'échelle nationale et internationale. Cela émanait de la logique même de la lutte à livrer par la classe ouvrière et des grandes tâches historiques, qu'il lui incombait de mener à bien dans des pays distincts comme dans le monde entier. "Le problème clé dans les pays capitalistes, souligne le camarade Enver Hoxha au VIIIe Congrès du PTA, a été et demeure l'unité du prolétariat... L'unité de la classe ouvrière se réalise à travers la lutte et des actions révolutionnaires concrètes pour la satisfaction des revendications économiques et politiques du prolétariat[30]."

Soucieux d'avoir le champ libre et de justifier leur ligne de rapprochement et de collaboration avec les actuels partis sociaux-démocrates et socialistes de droite, les historiens révisionnistes soviétiques, eurocommunistes, titistes et autres interprètent la directive du Komintern en vue de la création d'un front ouvrier unique, surtout et avant tout comme un désir et une tentative de sa part de collaborer avec les partis sociaux-démocrates centristes et de droite, ignorant ainsi l'essence de cette tactique, la lutte menée pour engager les masses ouvrières dans des actions et dans le combat révolutionnaires. Les révisionnistes modernes vont jusqu'à affirmer que la tactique du front ouvrier unique sous-entendait aussi la modification de la stratégie des partis communistes, qui devaient chercher, pour passer au socialisme, d'autres voies, différentes de celles définies dans les documents programme du Komintern. "L'application de la politique du front ouvrier unique par les partis communistes de l'Occident, confirme un historien soviétique, se rattache étroitement à la découverte dans ces pays de nouvelles formes de traitement de la révolution socialiste à travers la lutte pour la satisfaction des revendications générales et démocratiques[31]." Selon la conception des révisionnistes modernes, la réalisation des tâches générales démocratiques par la coalition communiste et social-démocrate créera les conditions nécessaires au passage progressif et pacifique au socialisme. C'est là une position social-démocrate réformiste qui n'a rien à voir avec la tactique léniniste de la IIIe Internationale.

Tout au long de ses 24 années d'existence, le Komintern s'en est tenu jusqu'au bout à sa ligne politique générale, sans jamais renoncer à sa stratégie globale de la lutte pour la révolution prolétarienne et l'instauration de la dictature du prolétariat ; il a considéré cette lutte, nous venons de le souligner, comme un processus révolutionnaire entier, tout en tenant compte, selon les conditions et les circonstances, du fait que le mouvement révolutionnaire peut traverser des étapes données, conformément aux tâches fondamentales que la révolution doit mener à bien dans l'une ou l'autre étape, dans tel ou tel pays.

Les déformations et les spéculations antiléninistes de l'historiographie révisionniste actuelle sur la question de la collaboration avec les partis sociaux-démocrates et socialistes ne sont qu'un aspect des nombreuses tentatives des révisionnistes modernes pour justifier leur politique de trahison et de collaboration avec la bourgeoisie à l'échelle nationale et internationale, politique qui tend à entraver la différenciation des forces révolutionnaires conséquentes, la consolidation du mouvement communiste marxiste-léniniste en tant qu'unique avant-garde révolutionnaire du prolétariat, qui combat pour la réalisation de sa mission historique, pour l'abolition du système capitaliste exploiteur, à travers la révolution prolétarienne et l'instauration de la dictature du prolétariat.

Comment se pose aujourd'hui la question de la collaboration des nouveaux partis communistes marxistes-léninistes avec les autres partis dits de la classe ouvrière, partis sociaux-démocrates ou socialistes, révisionnistes ou trotskistes?

Dans les conditions historiques actuelles, les partis sociaux-démocrates et socialistes ont versé toujours plus dans un opportunisme extrême. Ils sont devenus encore plus les défenseurs résolus du capital financier de l'impérialisme et de la réaction. Historiquement et pratiquement, toute opposition antimonopoliste et anti-impérialiste des partis sociaux-démocrates et socialistes est consumée. L'expérience historique du Komintern et sa tactique en vue d'actions communes dans la lutte contre le fascisme et le danger de guerre ont été, historiquement, la plus récente et la meilleure des preuves qu'à l'avenir, il ne faut nourrir aucune illusion sur des actions menées de concert avec la social-démocratie. Bien que la démagogie des partis social-démocrates exerce encore son influence sur quelques couches d'ouvriers, en particulier dans un certain nombre de pays capitalistes développés, cela ne signifie nullement qu'il faille collaborer avec eux. Au contraire, les partis communistes marxistes-léninistes se doivent de démasquer et d'arracher le masque à la démagogie des partis sociaux-démocrates et socialistes qui se font passer pour des partis ouvriers, de les présenter sous un vrai jour, en tant que partis qui soutiennent le grand capital monopoliste. Par voie de conséquence, la moindre collaboration avec eux ne peut être qualifiée que de trahison des intérêts de la classe ouvrière, car elle fait renaître des illusions réformistes et opportunistes, en un temps où la lutte contre ces partis est devenue plus que jamais une nécessité impérieuse pour la consolidation du mouvement ouvrier sur des bases révolutionnaires, marxistes-léninistes saines, à l'échelle nationale et internationale.

Quant à l'attitude à adopter à l'égard des partis révisionnistes, le problème est clair. Il n'y a pas et il ne faut pas qu'il y ait le moindre doute à ce sujet. "Un véritable parti marxiste-léniniste, écrit le camarade Enver Hoxha, se caractérise par l'attitude nette et résolue qu'il observe à l'égard du révisionnisme moderne, du khrouchtchévisme, du titisme, de la pensée Mao Tsé-toung, de l'eurocommunisme, etc. Établir une nette ligne de démarcation en cette matière revêt une grande importance de principe."

"Si un parti, poursuit-il, permet à ses membres de se faire des illusions et de penser, par exemple, qu´“en Union soviétique, sans égard à l'idéologie khrouchtchévienne, on construit le socialisme”, que dans la direction du Parti communiste de l'Union soviétique existent des “bureaucrates”, mais qu'y existent aussi des “révolutionnaires et marxistes-léninistes”, alors, bon gré, mal gré, un tel parti ne se tient plus sur des positions marxistes-léninistes, il s'est écarté de la stratégie et de la tactique révolutionnaires, et, sinon ouvertement du moins indirectement, il s'est converti en un parti pro-soviétique, même si en paroles il s'oppose aux thèses du XXe Congrès du Parti communiste de l'Union soviétique et au khrouchtchévisme. L'expérience révolutionnaire a démontré qu'on ne combat pas le khrouchtchévisme, si l'on ne combat pas aussi la politique hégémoniste, chauvine et social-impérialiste poursuivie par les dirigeants de l'actuelle Union soviétique capitaliste et impérialiste, Brejnev, Souslov et consorts.

"De la même nature et tout aussi néfastes sont les vues de ceux qui distinguent la ligne réactionnaire et la politique pro-impérialiste de la présente direction chinoise de la ligne et de la politique de Mao Tsétoung, de la pensée-maotsétoung. On ne peut combattre ni dénoncer les prises de position contre-révolutionnaires de Deng Xiaoping et de Hua Guofeng si l'on ne combat ni l'on ne dénonce la base idéologique de leurs menées, qui est précisément la pensée-maotsétoung[32]."

L'actuelle historiographie révisionniste soviétique, eurocommuniste, etc., juge erronées les vues qui considèrent les décisions du VIIe Congrès du Komintern comme un simple tournant tactique dans la lutte contre le danger fasciste et la guerre impérialiste. "L'importance permanente des conclusions du VIIe Congrès du Komintern, affirment les historiens révisionnistes soviétiques, consiste en qu'elles apportaient non seulement des changements sur le plan tactique, mais affirmaient aussi une nouvelle stratégie dans le mouvement communiste international[33]." Cette nouvelle stratégie, d'après eux, a été élaborée plus tard de façon exhaustive au XXe Congrès du parti révisionniste soviétique ainsi que dans les décisions des divers partis, et en particulier des partis révisionnistes d'Italie et de France. "La grande impulsion vivifiante que le VIIe Congrès de l'Internationale communiste a donnée au mouvement ouvrier et communiste international, écrit Togliatti, ne connut pas un nouvel essor après la guerre, comme cela devait se produire. La tentative de ranimer sous une forme masquée cette organisation internationale centralisée, qui cessa d'exister précisément pour affirmer la nécessité du développement indépendant de chaque parti dans la lutte pour la démocratie et le socialisme, était erronée. Ce fut une période de marasme (ce qui n'est pas du tout vrai, du moment que durant cette période le socialisme l'emporta dans les démocraties populaires, le grand et puissant camp socialiste fut créé, le mouvement des masses populaires prit des proportions inouïes dans le monde entier, notamment dans les pays dépendants et coloniaux, le mouvement ouvrier s'étendit et fut porté à un degré supérieur, et le mouvement communiste international se consolida ‑ Sh. B.), qui pouvait se convertir en une période de gel si le XXe Congrès du Parti communiste de l'Union soviétique n'avait pas porté un coup décisif au dogmatisme et au schématisme, si ce congrès n'avait pas considéré ni posé correctement et dans une nouvelle optique ces problèmes qui ne pouvaient plus être reportés ni passés sous silence[34]."

Partant de la plate-forme essentiellement opportuniste, antiléniniste du XXe Congrès du PCUS, les partis révisionnistes ont élaboré tout un système de thèses sur la dite "troisième" voie, la voie européenne, du passage au socialisme, axée sur le pluralisme politique. Pour ces partis ce passage est une simple évolution sociale qui se réalise grâce au jeu des alliances et de l'étroite collaboration entre divers partis politiques, y compris les partis bourgeois. "J'estime, écrit Togliatti, que même la définition de la politique communiste comme une politique de “classe contre classe” (Dans la lutte pour le socialisme, la classe ouvrière s'oppose un tant que classe à la classe de la bourgeoisie. Cette définition a été formulée par le VIe Congrès du Komintern tenu en 1928 ‑ Sh. B.) était dans son essence erronée et constituait une source de dangereux isolements sectaires. Notre politique, poursuit Togliatti, est la politique de la classe ouvrière en lutte pour la démocratie et le socialisme, mais la capacité du parti communiste consiste à savoir isoler, au sein même de la classe bourgeoise, les groupements les plus réactionnaires à travers un système élargi et souple d'alliances, de convergences, de neutralisations et ainsi de suite[35]." C'est justement une telle interprétation antiléniniste, essentiellement réformiste des voies de passage au socialisme qui a amené Berlinguer à lancer son slogan tristement célèbre du "compromis historique", c'est-à-dire de l'alliance du parti révisionniste italien avec le parti démocrate-chrétien, alliance qui est devenue le pivot de toute la ligne politique révisionniste antimarxiste du Parti communiste italien.

En opposition avec les décisions du Komintern et dans le prolongement du cours profondément antiléniniste du XXe Congrès du PCUS, le parti révisionniste français a lui aussi nié ouvertement et sans réserves rôle dirigeant du parti révolutionnaire du prolétariat dans sa lutte pour le passage du capitalisme au socialisme. Ainsi, à leur XXIIe Congrès, les révisionnistes français, comme l'indique le camarade Enver Hoxha, ont jeté bas tous leurs masques, ils ont déclaré publiquement qu'ils abandonnaient la révolution et la dictature du prolétariat, et que l'accession à leur socialisme se réalisera sans lutte de classes, sans que s'affirme nécessairement le rôle dirigeant du parti prolétarien et en alliance avec d'autres partis. En cette question, les révisionnistes français ont à l'esprit non seulement le parti socialiste qu'ils considèrent comme un parti ouvrier, mais encore d'autres partis bourgeois et petits-bourgeois, qui, dans leur prétendu combat contre l'oppression et la domination du grand capital, s'intéressent au passage graduel au socialisme par la voie démocratique, parlementaire. "Selon Marchais, souligne le camarade Enver Hoxha, on accédera au socialisme à travers le développement de la démocratie et des libertés bourgeoises. Sous ce socialisme, tous vivront en paix, les loups comme les brebis. Soutenir la thèse de la démocratie et des libertés bourgeoises, en tant que voie vers le socialisme, c'est mystifier les masses, c'est donner comme un lustre à la société capitaliste[36]."

Analysant l'activité des partis communistes d'Europe occidentale après le VIIe Congrès du Komintern, en particulier pendant la Seconde guerre mondiale et dans les premières années qui la suivirent, le camarade Enver Hoxha souligne que ces partis n'avaient pas compris et appliqué convenablement ses orientations. "Dans les pays d'Europe centrale et sud-orientale, écrit le camarade Enver Hoxha, les partis communistes surent relier leurs tâches de la lutte pour l'indépendance et la démocratie à la lutte pour le socialisme. Ils élaborèrent et mirent en œuvre une politique qui conduisit à l'instauration des régimes de démocratie nouvelle, populaire. Par ailleurs, les partis communistes d'Europe occidentale ne se montrèrent pas capables de mettre à profit les situations favorables créées à la suite de la Seconde guerre mondiale et de la victoire sur le fascisme. Cela prouvait qu'ils n'avaient pas compris et appliqué correctement les orientations du VIIe Congrès de l'Internationale communiste. Ce congrès recommandait aux partis de créer, dans des conditions données, tout en s'opposant au fascisme et en le combattant, les possibilités pour la mise sur pied de gouvernements d'un front unique, qui seraient tout à fait différents des gouvernements sociaux-démocrates. Ils devaient servir à passer de l'étape de la lutte contre le fascisme à l'étape de la lutte pour la démocratie et le socialisme. Mais en France et en Italie la lutte contre le fascisme ne conduisit pas à la création de gouvernements du type recommandé par le Komintern. La guerre finie, on vit accéder au pouvoir des gouvernements de type bourgeois. La participation des communistes à ces gouvernements n'en modifia pas le caractère. Le Parti communiste français lui-même, qui, dans l'ensemble, jusqu'à la fin de la Seconde guerre mondiale, avait eu une ligne juste, ne put corriger et dépasser les erreurs, les faiblesses et les déviations qui s'étaient manifestées sur des problèmes déterminés, et qui étaient imputables entre autres à l'absence d'analyses réalistes des situations intérieures et extérieures[37]."

Un autre courant, comportant quelques traits particuliers, dans la littérature historique sur le Komintern, c'est le courant eurocommuniste.

Ce courant se fonde sur les vues et les considérations de Togliatti, qui, dans son article intitulé "Sur certains problèmes de l'histoire de l'Internationale communiste", publié dans la revue "Rinascita" dans l'été de 1959[38], a été l'un des premiers à lancer l'idée de la révision de toute l'histoire du Komintern à partir de positions révisionnistes opportunistes.

On ne peut nier, déclarait Togliatti, que nombre de prises de position du Komintern ont été erronées et ne correspondaient pas aux situations sociales et politiques créées, qu'il y a eu des oscillations, des retards et souvent beaucoup d'exagérations sur le plan de la propagande, qui exigent, toujours selon Togliatti, un jugement critique." Togliatti, un des représentants les plus en vogue du révisionnisme moderne, cherchait par là à discréditer toute la ligne politique du Komintern.

Or, tout en étant une ligne unique, conséquente et très conforme aux principes, la ligne politique de la IIIe Internationale était une ligne dynamique, qui évoluait et s'enrichissait, se concrétisait et se perfectionnait en fonction du développement social et politique de la lutte révolutionnaire de classe du prolétariat et de l'extension des luttes de libération nationale.

En spéculateur politique bourgeois, Togliatti se cramponne à quelques formules ou prises de position que le Komintern a lui-même modifiées suivant les conditions créées, et il les considère comme des erreurs typiques de toute l'existence du Komintern, comme des erreurs qui ont pesé lourd sur tout le mouvement communiste international et l'ont empêché d'élaborer une stratégie et une tactique souples; il n'hésite pas à lancer même l'idée que tout ce qui se rattache à l'activité du Komintern doit être revu dans l'esprit du XXe Congrès du PCUS. "Qu'il me soit permis d'ajouter, écrit-il, que les critiques formulées au XXe Congrès du PCUS contre toute l'activité de Staline, bien qu'il n'ait jamais été directement responsable de l'activité de l'Internationale communiste, demandent certainement, en ce qui concerne tant les jugements portés sur de hautes personnalités et des groupes dirigeants de divers partis que la justesse et l'opportunité des décisions et des actions principales du Komintern, une nouvelle appréciation attentive, afin de pouvoir présenter les hommes et les choses sous leur vrai jour[39]."

En outre, certains auteurs eurocommunistes occidentaux, dans leurs ouvrages sur le Komintern, suivant les orientations de leurs partis, considèrent, de manière alambiquée, l'expérience historique du Komintern comme une expérience anarchiste qui, en définitive, a fait plus de mal que de bien. Faisant une appréciation de l'activité du Komintern, ils s'évertuent à dénigrer non seulement la stratégie et la tactique léninistes élaborées par le Komintern, les considérant comme anachroniques, mais aussi ses formes de lutte et ses modes d'organisation, en accusant d'avoir jeté les fondements d'une pratique erronée, celle de la création d'un centre dirigeant et d'un centralisme extrêmes. Lorsque l'historiographie eurocommuniste critique le Komintern, elle part de quelques préjugés et idées préconçues qui tendent à jeter bas toute l'expérience révolutionnaire du Komintern. La "critique" qu'elle en fait se convertit en un but en soi et vise à discréditer l'expérience révolutionnaire, historique et mondiale positive de la IIIe Internationale, et cela dans le but d'affirmer les vues profondément révisionnistes des partis eurocommunistes, lesquelles sont en opposition totale avec l'idéologie et la ligne politique marxistes-léninistes du Komintern tout au long de son activité révolutionnaire.

La direction du Parti communiste chinois et Mao Tsétoung en particulier ont eux-aussi adopté une attitude dédaigneuse et dénigrante envers le Komintern et sa politique, surtout sur la question nationale et coloniale.

Jusqu'à la mort de Staline, le PC chinois, Mao Tsétoung et ses tenants ne s'étaient pas, pour des raisons d'opportunité politique, prononcés publiquement contre le Komintern et contre Staline, mais, dans les écrits de Mao Tsétoung et dans les diverses décisions du PCC antérieurs à la mort de Staline, ou bien le Komintern est complètement ignoré, ou bien indirectement toutes les défaites de la révolution chinoise sont imputées à la IIIe Internationale. Typique dans ce sens est le supplément intitulé: "Décision sur certaines questions de l'histoire de notre parti", approuvé le 20 avril 1945 par le 7e plénum élargi du CC du PCC après son VIe Congrès. Ce document a été rédigé par Mao Tsétoung et publié dans ses Oeuvres choisies.

Dans l'esprit de la pensée-maotsétoung, cette décision offre un aperçu sur le développement général de la révolution chinoise, sur l'histoire du PCC, en particulier dans les années qui suivirent la défaite de la révolution en 1925-1927, jusqu'à l'usurpation de la direction du PCC par Mao Tsétoung et son groupe en 1935. Bien qu'on ne s'y prononce pas ouvertement contre le Komintern et Staline, cette décision comprend une critique indirecte contre eux et les accuse d'être responsables de toutes les défaites de la révolution chinoise. Mao Tsétoung et sa clique qualifient la ligne du Komintern de dogmatique, et les orientations marxistes-léninistes du Komintern de "clichés d'outre-mer". "Il faut en finir avec les formules toutes faites de l'étranger, écrivait Mao Tsétoung en octobre de1933, et s'occuper un peu moins de bavardages creux et abstraits. Il faut mettre dans les tiroirs le dogmatisme et acquérir la manière et le style chinois, vivants et pleins de fraîcheur, agréables à l'oreille et à la vue des simples gens[40]."

Ainsi, dans un langage émaillé de sous-entendus, mais visant des objectifs clairement définis, Mao Tsétoung et ses tenants s'opposaient au Komintern et à ses orientations marxistes-léninistes en élaborant une ligne politique qui enfonçait toujours plus le PCC dans l'opportunisme et une activité petite-bourgeoise, antimarxiste.

La direction chinoise a repris ouvertement et sans crainte après la mort de Staline les critiques qu'elle avait formulées dans un langage masqué et indirect contre le Komintern et Staline avant 1953. En se prononçant surtout contre Staline, Mao Tsétoung et son groupe visaient non seulement à rabaisser l'oeuvre de Staline et à légitimer l'affirmation de la "pensée-maotsétoung", mais aussi à rehausser artificiellement l'autorité de Mao Tsétoung comme un dirigeant de stature mondiale, qui n'aurait jamais commis d'erreurs et qui aurait eu toujours raison. "Ces critiques traduisaient aussi, souligne le camarade Enver Hoxha, les rancoeurs accumulées à l'encontre de Staline, à cause des observations et des critiques que celui-ci et le Komintern avaient adressées à la direction du Parti communiste chinois et à Mao Tsétoung, parce qu'ils n'appliquaient pas de manière conséquente les principes du marxisme-léninisme sur le rôle dirigeant du prolétariat dans la révolution, sur l'internationalisme prolétarien, la stratégie et la tactique de la lutte révolutionnaire, etc... Les contradictions entre le PCC, dirigé par Mao Tsétoung, et le PCUS, dirigé par Staline, ainsi que les contradictions entre le PCC et le Komintern, ont été des contradictions de principe sur les questions fondamentales de la stratégie et de la tactique révolutionnaires marxistes-léninistes. Ainsi, par exemple, le Comité central du PCC a ignoré la thèse du Komintern sur le développement correct et conséquent de la révolution en Chine, la directive que celui-ci avait donnée pour une action conjointe de la classe ouvrière dans les villes et de l'armée de libération, les thèses du Komintern sur le caractère et les étapes de la révolution chinoise, etc.[41]"

Mao Tsétoung et sa clique ont toujours exprimé leur mépris pour le Komintern et ses délégués en Chine, les qualifiant d´"ignorants", de "grossiers ", et les accusant de "ne pas connaître la réalité chinoise". Voilà pourquoi, affirment-ils, le Parti communiste chinois jugeait inutile l'aide du Komintern. Dans son discours à la Conférence de travail élargie du Comité central du Parti communiste chinois en janvier 1962, Mao Tsé-toung a dit: "Ce sont les Chinois qui ont connu la Chine en tant que monde objectif, et non pas les camarades du Komintern qui s'occupaient de la question chinoise. Ces camarades ne connaissaient pas ou connaissaient peu la société, la nation et la révolution chinoises. Aussi pourquoi devrait-on parler ici de ces camarades étrangers[42]?"

"Mao Tsétoung, écrit le camarade Enver Hoxha, ne fait pas mention du Komintern quand il est question des succès. Par contre, quand il s'agit des défaites et des déviations du Parti communiste chinois, de l'incompréhension du cours des situations en Chine et du fait qu'il n'en a pas été tiré de justes déductions, il en rejette la responsabilité sur le Komintern ou sur ses représentants en Chine. Lui et d'autres dirigeants chinois accusent le Komintern de leur avoir fait obstacle et de leur avoir compliqué les choses dans la conduite d'une lutte conséquente pour la prise du pouvoir et la construction du socialisme en Chine. Mais les faits du passé, et surtout la réalité chinoise actuelle, prouvent que les décisions et les directives du Komintern pour la Chine ont été en général justes et que le Parti communiste chinois n'a pas agi en se fondant sur les principes du marxisme-léninisme, ni dans leur esprit[43]."

Les quelques livres parus en Chine et consacrés à la révolution chinoise, ne parlent que très peu du Komintern, mais ils s'inspirent tous de la "pensée-maotsétoung". L'historiographie chinoise traite le développement et la perspective de la révolution chinoise sur la base des analyses que Mao Tsétoung a faites de cette révolution et qui sont en complète opposition avec les orientations du Komintern et la critique conséquente marxiste-léniniste de principe de ce dernier à l'adresse du Parti communiste chinois. Pour l'historiographie maoïste chinoise le Komintern aurait soi-disant suivi une ligne erronée dans la révolution chinoise, il n'a pas connu la Chine et a abouti, de ce fait, à des conclusions qui ont nui à cette révolution, dont toutes les défaites sont soi-disant dues aux prises de position erronées du Komintern. L'historiographie chinoise actuelle tend par là non seulement à minimiser et à nier, mais aussi à déformer et à falsifier les efforts continus du Komintern tant pour la création du PCC que pour sa consolidation en tant que parti politique, même si le Parti communiste chinois n'a jamais pu devenir un parti révolutionnaire marxiste-léniniste véritable.

L'historiographie chinoise a tenté de démontrer que les orientations du Komintern, surtout après la mort de Lénine, étaient erronées, qu'elles ne prenaient en considération les particularités du développement politique, économique et social de la Chine et que, pour résoudre les problèmes de la révolution chinoise, le Komintern partait soi-disant de quelques modèles dépassés qui ne pouvaient plus être appliqués dans la réalité chinoise.

L'historiographie révisionniste yougoslave a adopté, elle aussi, une attitude nihiliste et dénigrante à l'encontre du Komintern. Actuellement, elle considère l'histoire du Komintern comme une succession d'erreurs dogmatiques et sectaires. À son avis, loin d'avoir contribué au renforcement des Partis communistes, le Komintern l'a gravement compromis (sic). "Ces conceptions schématiques et sectaires, affirment les révisionnistes yougoslaves, dont les partis communistes ont souffert, se sont reflétées aussi dans le Programme de l'Internationale communiste, approuvé à son VIe Congrès en 1928. Cela explique pourquoi ce document important sur le développement du mouvement communiste international n'a pas servi aux divers partis communistes à concrétiser leur stratégie et leur tactique, et dans certains cas il leur a même fait du tort[44]."

Les révisionnistes yougoslaves et leur historiographie, tout comme l'historiographie révisionniste soviétique et chinoise en général, estiment que "les erreurs du Komintern ont leur origine dans l'influence toujours plus grande de Staline sur la politique du Komintern[45]" et aboutissent à des affirmations aussi absurdes que réactionnaires, suivant lesquelles Staline aurait considéré le Komintern "comme un instrument de sa politique de grand-État". Par ces affirmations, les révisionnistes yougoslaves, loin de découvrir quelque chose de nouveau, transbordent directement dans leurs écrits les points de vue des trotskistes et des autres opportunistes contre lesquels le Komintern a mené une lutte conséquente et de principe. Les révisionnistes yougoslaves actuels imputent au Komintern toutes les erreurs, les déviations et la lutte sans principes, qui ont toujours caractérisé le PCY, l'accusant de les avoir incités à agir de la sorte et d'avoir semé chez eux la confusion idéologique, politique et organisationnelle, cette désagrégation totale qui n'a jamais permis au PCY de se consolider en tant que véritable parti communiste. Loin d'être responsable de cette situation, le Komintern, au contraire, n'a cessé de lutter pour tirer le PCY du chaos et de la crise permanente dus à ce que les dirigeants ne se sont jamais secoués des illusions opportunistes, des hésitations, n'ont jamais renoncé à la lutte fractionnelle, ni jamais cherché à comprendre comme il se doit les orientations du Komintern, ses directives claires sur la nécessité de la trempe révolutionnaire du parti. Le PCY n'a jamais bien accueilli l'aide que l'Internationale communiste n'avait cessé de lui apporter sur tous les plans. Voilà comment les révisionnistes titistes dépeignent la situation dans le PCY au début des années '30 et dont ils rendent responsable le Komintern: "La vie en émigration et l'isolement presque total vis-à-vis du mouvement organisé dans la patrie, ainsi que le fait de dépendre du Komintern, est-il écrit dans l'histoire officielle du PCY, ont influé assez négativement sur l'image politique des hommes de la direction du PCY. Le style bureaucratique au travail et les relations malsaines pénétrées de l'esprit de carriérisme, le souci de s'assurer “une bonne renommée” au Komintern, fût-ce à l'aide de rapports inventés sur le travail de la direction et la situation du mouvement dans le pays, envenimaient l'atmosphère au sein du Comité central, suscitaient des querelles intestines sans principes et des règlements de compte entre camarades, attisaient la lutte entre divers groupements, lutte qui occupait la plupart du temps et de l'activité de la majorité des membres de la direction. Le Komintern a donc été pour beaucoup, lit-on plus loin, dans la création de cette situation qui dominait au Comité central du PCY[46]."

Nous n'avons pas l'intention de nous étendre ici sur la situation dans le PCY, ni d'analyser les raisons qui ont conduit à cette situation désespérée, mais nous tenons à rejeter toutes les calomnies, inventions et falsifications de l'historiographie révisionniste yougoslave qui rend responsable le Komintern de la situation catastrophique créée au sein du PCY.

Les ennemis qui ont combattu et continuent de combattre le Komintern sont de divers acabits, des réactionnaires déclarés et bourgeois radicaux, des petits bourgeois et opportunistes de droite, des révisionnistes et trotskistes extrémistes. Mais de tous ceux-ci, les révisionnistes yougoslaves sont le plus près des trotskistes extrémistes qui ne voient rien de positif ni de révolutionnaire dans l'activité du Komintern. Le nihilisme des révisionnistes yougoslaves en cette question dépasse toutes les bornes, ce qui rend leur "critique" sur l'Internationale communiste une des plus tendancieuses, des plus dénigrantes et, par conséquent, des plus falsificatrices de toutes les "critiques" tant de droite que d'extrême gauche adressées au Komintern.

La littérature trotskiste occupe une place centrale dans la propagande anticommuniste contre le Komintern. C'est Trotsky lui-même qui a jeté les bases de ce courant et il a voulu démontrer que Lénine n'a soi-disant pas bien orienté le Komintern et que les erreurs du Komintern, selon lui, ont leur source dans la fait que "Lénine n'a pas pris en considération ses suggestions[47]".

Les adeptes de Trotsky, en suivant ses traces, ont cherché à surestimer le rôle de leur maître, à le présenter comme l'unique dirigeant de la IIIe Internationale qui aurait toujours adopté de justes attitudes et dont l'écart et plus tard l'exclusion du Komintern et du mouvement communiste ont engagé la IIIe Internationale dans une voie sans issue (sic).

L'historiographie mondiale sur la IIIe Internationale regorge de nombreux livres d'auteurs bourgeois, sociaux-démocrates et réformistes, qui ont répandu et répandent toute sorte d'élucubrations et d'idées fausses. La haine illimitée envers la classe ouvrière et le mouvement communiste international unit tous ces auteurs[48], aussi trouve-t-on dans leurs essais et leurs livres une foule de calomnies, de falsifications et d'interprétations tendancieuses au sujet du Komintern, alors que les arguments et les faits y font entièrement défaut.

Aujourd'hui, il ne s'agit certes pas de copier aveuglement la pratique de lutte du Komintern, mais d'apprécier correctement, à partir de positions marxistes-léninistes de principe, toute l'activité du Komintern, l'esprit militant et révolutionnaire qui l'a caractérisé tout au long de son existence, sa lutte conséquente de principe contre tous les courants et les déviations de droite et de "gauche", sa fidélité sans bornes envers le marxisme-léninisme et la cause révolutionnaire des ouvriers, sa méthode et ses procédés léninistes créateurs, en vue de résoudre les questions les plus importantes et les plus complexes que posaient par intervalles le mouvement révolutionnaire ouvrier et de libération nationale des peuples contre l'impérialisme et la réaction.

Le Parti du Travail d'Albanie, le mouvement communiste marxiste-léniniste international, défendent fermement l'héritage historique et la très riche expérience révolutionnaire du Komintern dans la lutte contre toutes les déviations et les falsifications de tout acabit, trotskistes et révisionnistes, bourgeoises et sociales-démocrates; pour eux, le Komintern offre un brillant exemple de lutte qui montre comment l'avant-garde du prolétariat doit préparer la révolution socialiste, un brillant exemple de la lutte à mener pour défendre la pureté du marxisme-léninisme et l'appliquer de façon créatrice, pour démasquer l'opportunisme de droite et de "gauche".

Actuellement, la situation dans le monde a beaucoup évolué. Les partis communistes marxistes-léninistes sont confrontés à des tâches importantes et très complexes. L'élaboration d'une stratégie et d'une tactique révolutionnaires constitue pour eux une tâche très importante et difficile. De même que pour les autres questions et problèmes, dans ce cas également, il faut étudier l'expérience du Komintern et en profiter tout en tenant compte des particularités de l'étape dans laquelle nous vivons. "La force du mouvement communiste marxiste-léniniste international, a souligné le camarade Enver Hoxha au VIIIe Congrès du PTA, réside dans la justesse des idées pour lesquelles il combat et dans son unité. Les partis marxistes-léninistes sont guidés dans leur lutte par les enseignements de nos grands classiques, ils mettent à profit le riche héritage multiforme du Komintern, ils s'appuient sur l'expérience de leur lutte contre la trahison révisionniste, ils tiennent compte de l'expérience négative des partis qui ont dégénéré vers le révisionnisme. Tous ces enseignements et cette expérience constituent un précieux trésor idéologique, politique, organisationnel, théorique et pratique, pour tremper et renforcer les partis et le mouvement marxistes-léninistes à tous égards[49]."

La IIIe Internationale restera toujours une étoile inextinguible par la contribution colossale qu'elle a apportée à la lutte pour la cause de la classe ouvrière, par la très grande expérience révolutionnaire qu'elle a accumulée et dont les partis communistes marxistes-léninistes ont tiré de très précieux enseignements pour renforcer les rangs du mouvement communiste international dans la lutte contre le révisionnisme et les prises de position dogmatiques et sectaires, pour resserrer aussi les liens avec les larges masses ouvrières et les masses travailleuses des campagnes et des villes, pour préparer l'armée politique nécessaire pour renverser le système capitaliste à travers la révolution prolétarienne et l'instauration de la dictature du prolétariat.

 

 

 

 

 

Notes



[1]. Enver Hoxha, Rapport au VIIe Congrès du PTA., Tirana, 1976, éd. fr., pp. 262‑263.

[2]. V. I. Lénine, La lutte contre l’opportunisme et la fondation de la IIIe Internationale, Tirana, 1978, éd. alb., p. 363.

[3]. J. V. Staline, Oeuvres, éd. alb., t. 6, Tirana, 1932, p. 99.

[4]. B. M. Leibzon. K. K. Shirinia, Povorot v politike Kominterna, Moscou, 1965, p. 345.

[5]. V. I. Lénine, Oeuvres choisies, éd. alb., t. 3, Tirana, 1974, p. 562.

[6]. Komunistitcheskii Internationall v dokumentah, 1919‑1932, Moscou, 1933, p. 60.

[7]. Enver Hoxha, Rapport au VIIe Congrès du PTA, op. cit., p. 262.

[8]. P. Togliatti, Problemi del movimento operaio internazionale, 1956‑1961, Editori Riuniti, Rome, 1962, p. 330.

[9]. V. V. Aleksandrov, Lenin i Komintern, Moscou, 1972, pp. 9‑10.

[10]. P. Togliatti, op. cit., p. 321.

[11]Op. cit., p. 323.

[12]. Ponomarev, À propos de la 60e anniversaire de la fondation de l'Internationale Communiste, la revue Komunist, no 5, 1979, p. 22.

[13]. V. I. Lénine, Oeuvres, t. 20, éd. alb., p. 564.

[14]. Komunistitcheskii Internationall v dokumentah, op. cit., pp. 74‑75.

[15]Op. cit., p. 313.

[16]Op. cit., p. 316.

[17]. G. Dimitrov, Izbrannie prozvedenija, t. I, p. 445.

[18]. B. M. Leibzon, K. K. Shirinia, op. cit., pp. 303‑309.

[19]Op. cit., p. 307.

[20]Op. cit., p. 345.

[21]. Enver Hoxha, Rapport au VIIe Congrès du PTA, op. cit., p. 243.

[22]. Komunistitcheskii Internationall v dokumentah, op. cit., p. 29.

[23]Ibid.

[24]. Komunistitcheskii Internationall v dokumentah, op. cit., p. 30.

[25]. G. Dimitrov, Izbrannie prozvedenija, t. I, p. 435.

[26]. P. Togliatti, op. cit., p. 327.

[27]. B. M. Leibzon, K. K. Shirinia, op. cit., pp. 343‑344.

[28]. G. Dimitrov, op. cit., pp. 447‑448.

[29]. Komunistitcheskii Internationall v dokumentah, op. cit., p. 310.

[30]. Enver Hoxha, Rapport au VIIIe Congrès du PTA, éd. fr., Tirana, 1981, pp. 279‑280.

[31]. K. K. Shirinia, Étude publié dans le livre Iz Istorii Kominterna, Moscou, 1979, p. 101.

[32]. Enver Hoxha, L'Eurocommunisme, c'est de l'anticommunisme, Éditions "8 Nëntori", Tirana, 1980, éd. fr., pp. 265‑266.

[33]. B. M. Leibzon, K. K. Shirinia, op. cit., p. 345.

[34]. Unità, 23.IV.1964. Cité d'après le livre de B. M. Leybzon. K. K. Chirinia, Povorot v politike Kominterna, Moscou, 1965, pp. 339‑340.

[35]. P. Togliatti, op. cit., p. 325.

[36]. Enver Hoxha, Rapport au VIIe Congrès du PTA, op. cit., p. 243.

[37]. Enver Hoxha, L'Eurocommunisme, c'est de l'anticommunisme, op. cit., pp. 67‑68.

[38]. P. Togliatti, op. cit., pp. 299‑335.

[39]Op. cit., p. 305.

[40]. Mao Tsétoung, Oeuvres choisies, t. 2, éd. alb., p. 251.

[41]. Enver Hoxha, L'Impérialisme et la Révolution, Éditions "8 Nëntori", Tirana, 1978, éd. fr., pp. 463‑464.

[42]. Cité par Enver Hoxha, L'Impérialisme et la Révolution, op. cit., p. 463.

[43]. Enver Hoxha, L'Impérialisme et la Révolution, op. cit., p. 465.

[44]. Précis de l'histoire de la Ligue des Communistes de Yougoslavie, publié par le CC du PCY, Prishtine, 1963, p. 156.

[45]Op. cit..

[46]Op. cit., p. 177.

[47]. Voir à ce sujet: L. Trotsky, The first five years of the Communist International, 2 vol., New York, 1945‑1953; I. Deutscher, Trotsky, 3 vol., Londres, 1954‑1963; P. Frank, La Quatrième Internationale, Paris, 1969.

[48]. J. Braunthal, Geschichte der Internationale, Hanovre, 1963 (Traduction anglaise: History of the International, tomes 1 et 2, New York, 1967); M. M. Drachkovitch, The revolutionary Internationals 1864-1943, Stanford, 1966; B. Lazitch, The Comintern. Historical Highlights, Hoover, 1966; J. Freymond, Contribution à l'histoire du Komintern, Genève, 1963; Gankin et Fischer, The Bolshevicks and the World War. The origin of the third International, Stanford, 1940; F. Claudin, La crise du mouvement communiste, en deux tomes, Paris, 1972, etc.

[49]. Enver Hoxha, Rapport au VIIIe Congrès du PTA, op. cit., p. 290.