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Patrick Kessel Pour une histoire du PCF |
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Le texte reproduit ci-dessous a servi de fil conducteur pour la Conférences présentée par Patrick Kessel le 13 janvier 1996, dans le cadre de l'Université Marxiste de Paris. |
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Source: Patrick Kessel: Maquette de la Conférence du 13 Janvier 1996, Université Marxiste de Paris Bulletin international |
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PRÉLIMINAIRE[1]Pourquoi étudier aujourd'hui l'histoire du PCFCette histoire n'est pas seulement celle d'un parti entre les autres ‑ elle nous concerne particulièrement dans la mesure même où notre travail s'effectue en France. C'est d'ailleurs le seul véritable internationalisme prolétarien que de lutter d'abord pour la Révolution dans son propre pays. Cette histoire fait également partie de l'histoire du mouvement ouvrier et communiste international, qui est notre histoire. Les Salves d'Octobre 1917 ne nous parviennent plus qu'assourdies. Comme si la Révolution d'Octobre n'avait été qu'un détail, dont il faudrait aujourd'hui se défaire. Comme si l'implosion, l'émiettement de l'URSS mettait en cause le marxisme, non pas celui des professeurs, mais le marxisme révolutionnaire. Ce qui est en cause, c'est une dépossession de notre passé. Que la bourgeoisie effectue ce travail n'a rien pour étonner. Ce qui est étonnant par contre, c'est que la propagande de la bourgeoisie contre l'idée même du communisme est, sinon reprise en propres termes, du moins digérée et assimilée par le PCF. L'histoire du communisme au XXe siècle lui brûle les doigts, toute référence à Lénine ‑ne parlons pas de Staline ‑ est oblitérée. Il y a comme un alignement du PCF sur les valeurs de la bourgeoisie: la violence révolutionnaire lui est devenue obscène. Comme toute mise en avant de la dictature du prolétariat. Le PCF aujourd'hui ‑ mais il ne s'agit pas seulement d'aujourd'hui ‑ se veut en quelque sorte "politiquement correct". Dans son Histoire de la Commune Lissagaray avait lancé cette dénonciation qui prend une valeur encore plus forte aujourd'hui: Celui qui fait au peuple de fausses légendes révolutionnaires, celui qui l'amuse d'histoires chantantes, est aussi criminel que le géographe qui dresserait des cartes menteuses pour les navigateurs[2]. C'est un avertissement qui s'adresse aujourd'hui à ceux qui promènent ce mot "révolutionnaire" dans leurs têtes sans donner de contenu réel à leur discours. Quant aux autres, ils ont même brûlé ces cartes menteuses. Elles pouvaient encore servir à quelque chose. Il faut donc se réapproprier notre histoire. Et ne pas répéter les erreurs des années 70 où c'est à reculons que l'on envisageait d'étudier le PCF pour savoir à partir de quand, 1956 - 1944 - 1936 il avait cessé d'être un véritable parti communiste. Sans bien savoir ce que l'on entendait par "véritable", par rapport à quoi, à quel modèle. On devrait mieux dire "à quelle mode". Revenons donc à 75 ans et quelques jours en arrière, au Congrès de Tours, en décembre 1920. Là où s'opéra la scission du parti socialiste unifié (unifié par référence au congrès de 1905 où Jaurès et Guesde se congratulèrent), Tours où fut votée à une grande majorité l'adhésion à la IIIe Internationale communiste. Il ne faudra certes pas s'en tenir à cela. En effet ce qui nous importe ‑ ce n'est pas d'une histoire "universitaire" dont il s'agit ‑ c'est de voir comment, de Tours à aujourd'hui, le parti communiste s'est transformé en son contraire et de comprendre pourquoi. Retournement qui ne s'est pas effectué sans heurts, provoqué certes sous la pression des événements extérieurs, mais également grâce au poids de traditions proprement liées à l'histoire du mouvement ouvrier français, traditions sous-jacentes, affleurant par moments, combattues ou exaltées avant de devenir dominantes. Pour simplifier on peut donner des noms à ces traditions, des visages, bien qu'il ne s'agisse pas des hommes en eux-mêmes, mais de leurs idées et sans séparer celles-ci du contexte dans lequel elles furent exprimées, de la position de classe dont elles étaient le reflet: on citera pêle-mêle et dans des registres différents Descartes, Babeuf, Sylvain Maréchal, Robespierre et ce que l'on a appelé le jacobinisme, Condorcet, Blanqui, Guesde et Jaurès. La liste n'est pas exhaustive! Grossièrement c'est que l'on peut appeler, pour reprendre le titre d'un livre de Roger Garaudy, Les Sources françaises du socialisme scientifique[3], Continuité ou non entre ces sources de chez nous et les sources étrangères ‑ Marx, Engels, Lénine, Staline, ou bien rupture, bond en avant. Synthèse de ces sources, opposition irréductible entre elles, primauté au marxisme, au léninisme? C'est une question essentielle et qui se pose dès 1920. Et qui se posera tout au long de l'histoire du PCF. De toute façon la Révolution, quelle que soit sa version, est-elle à l'ordre du jour dans cette France de 1920? C'est la première question à laquelle on essaiera de répondre. Dans la foulée, si je puis dire, on se demandera de quelle nature a été l'aide apportée par la classe ouvrière française et le parti socialiste à la Révolution d'Octobre menacée par l'intervention étrangère, la guerre civile, puis en 1920 même au moment de la guerre avec la Pologne. Il faudra ensuite voir les notions sur lesquelles s'opposent adversaires et partisans de la IIIe Internationale, que cela soit avant ou après l'exigence posée par le IIe Congrès de l'IC des 21 conditions. Et ceci tout aussi bien dans le cadre du Parti socialiste que dans celui de la CGT. Dernier point enfin: quelle est la nature du Parti qui sort du Congrès de Tours. Une courte parenthèse pour définir le sens donné ici à quelques termes. Il peut arriver que l'on emploie, pour des facilités de langue, prolétariat et classe ouvrière comme synonymes. Bien entendu il ne s'agit pas de la même chose. Et contrairement à certaines idées qui traînent encore ce n'est pas le prolétariat qui contient la classe ouvrière. L'emploi du mot prolétariat dans ce sens est lié au début du XIXe siècle et notamment à Blanqui[4]. Pour Lénine, le prolétariat est l'avant-garde de la classe ouvrière. On ne donnera qu'une courte définition: "La grande production et les machines, base matérielle et psychologique (souligné par Lénine) du prolétariat[5]." Il faut également rappeler ‑ contre tout ouvriérisme, qu'une classe ou fraction de classe n'est pas révolutionnaire en soi, par sa propre existence en tant que classe. Il faut qu'elle s'approprie sa mission, qu'elle devienne une classe pour soi. Il existe beaucoup de définitions pour caractériser ce qu'est une classe sociale. On choisira celle que donnait Lénine en 1919: On appelle classes de vastes groupes d'hommes qui se distinguent par la place qu'ils occupent dans un système historiquement défini de production sociale [pour nous le mode de production capitaliste, il n'y a rien de changé], par leur rapport (la plupart du temps fixé et consacré par les lois) vis-à-vis des moyens de production, par leur rôle dans l'organisation sociale du travail, donc, par les modes d'obtention et l'importance de la part de richesses sociales dont ils disposent. Les classes sont des groupes d'hommes dont l'un peut s'approprier le travail de l'autre, à cause de la place différente qu'il occupe dans une structure déterminée, l'économie sociale[6]. Et puis, il faut être bien clair sur un point: le Parti communiste n'est pas le parti d'une classe, il est le parti de l'avant-garde du prolétariat, et le parti doit entraîner l'ensemble du prolétariat et de la classe. C'est cela le parti selon Lénine. En 1920 Zinoviev est sur les mêmes positions. "Il convient de distinguer avec le plus grand soin entre classe et parti". Dans la classe ouvrière "de nombreuses tendances réactionnaires peuvent exister". "La tâche du communisme n'est pas de s'adapter à ces éléments arriérés de la classe ouvrière, mais d'élever toute la classe ouvrière au niveau de l'avant-garde communiste[7]". I. LA PRÉHISTOIRE1. Repères sur la période avant 1914Par nécessité on sera bref sur la période qui a précédé la Première Guerre mondiale. Encore que, comme l'écrivait Engels en 1887: Celui qui s'occupe quelque peu profondément du socialisme moderne doit également prendre connaissance des "points de vue dépassés" du mouvement. Plus d'un siècle après Engels, prendre simplement connaissance des "points de vue dépassés", de ceux qui étaient dépassés à son époque, de ceux qui l'étaient en 1920 et de ceux qui le sont aujourd'hui, demanderait un travail titanesque que seul un "véritable" parti communiste pourrait entreprendre. Toujours ce mot "véritable"... Mais il faudrait qu'il soit "véritable" pour se dépêtrer de ce qui est "dépassé" et de ce qui ne l'est pas. Pour la période qui précède la guerre de 14 nous nous contenterons d'une référence au livre de Losovsky sur Marx et les syndicats, publié en français en 1933 [8]. Losovsky a été secrétaire d'un syndicat à Paris, avant la guerre de 14, avant de devenir secrétaire de l'Internationale Syndicale Rouge. On a souvent entendu parler de "léninisme à la française", de "stalinisme français", de "communisme français", de "socialisme à la française" et ceci de part et d'autre. Losovsky, dirigeant de l'ISR, quant à lui, dénonce l´"exclusivisme" du marxisme français. Si Losovsky considère que Guesde a été le meilleur marxiste de France, c'est pour ajouter aussitôt que son marxisme ne provenait pas toujours de Marx. Il y mettait toujours quelque chose de son cru. [ses "balivernes" sur le salaire minimum - rationalisme]. Le marxisme français en la personne de Guesde, de Bracke et de quelques autres, a sanctifié la guerre de rapine comme la dernière guerre, comme la lutte de la démocratie contre le militarisme. [...]. Comment expliquer cela? C'est que le marxisme français, de même que tous les courants socialistes et anarchistes en France, était atteint de la maladie de l'exclusivisme. Les socialistes français se considéraient comme les héritiers de la "grande révolution" et voyaient toujours dans la France le nombril du monde. Le marxisme français devenait de plus en plus national, parallèlement à l'accroissement de l'impérialisme français, ce qui revient à dire qu'il a cessé d'être du marxisme. Cette castration de l'esprit révolutionnaire se faisait sous l'influence des mêmes causes qu'en Allemagne. Marxistes français et allemands ont fait faillite, ont trébuché le même jour et sur le même pavé patriotique; le marxisme français est devenu national, mais quand la nation refoule la classe, il n'y a plus de marxisme[9]. 2. Une lutte non révolutionnaire contre la guerreSelon Pierre SEMARD, cheminot syndicaliste qui deviendra secrétaire général du Parti communiste français: La parole de LÉNINE de 1914 annonçant la faillite de la IIe Internationale et la nécessité de créer une troisième Internationale fidèle à la première fondée par MARX, avait été entendue. En effet, dès le début de la guerre, un certain nombre de militants socialistes et syndicalistes révolutionnaires, isolés ou réunis en petits groupes, comme celui de la Vie ouvrière, s'étaient dressés courageusement contre le social-patriotisme et avaient cherché plus ou moins confusément la voie vers une Internationale nouvelle[10]. Un exemple: la lettre de démission du Comité confédéral de la CGT envoyée par Pierre MONATTE en décembre 1914 [11]. Il ne faut pas confondre ce mouvement avec l'opposition socialiste minoritaire (MAYÉRAS, LONGUET), qui commença à se manifester dans les conférences nationales et les congrès du parti socialiste à partir de mai 1915 (motion de la Haute-Vienne). Cette opposition ne dépassa jamais la simple revendication d'une conduite plus "démocratique" de la guerre et de l'ouverture de négociations en vue d'une paix "juste", "sans vainqueurs ni vaincus". En France, le mouvement d'opposition contre la guerre impérialiste fut toujours beaucoup plus pacifiste et sentimental que prolétarien et révolutionnaire[12]. Les deux conférences internationales de Zimmerwald et de Kienthal (1915‑1916), malgré la position anti-révolutionnaire des participants venus de France eurent un certain écho dans la classe ouvrière et au sein du parti socialiste. Elles contribuèrent à la croissance du mouvement minoritaire dans la vieille CGT, comme au renforcement de l'opposition pacifiste au sein du parti socialiste. Et à développer le Comité pour la reprise des relations internationales (août 1915) avec Merrheim, Monatte et Loriot, composée de syndicalistes révolutionnaires et de l'aile gauche du parti socialiste. Mais ce Comité se borna toujours à une simple propagande à l'intérieur de la CGT et du Parti socialiste. Il voulait éliminer les dirigeants les plus acharnés à la poursuite de la guerre. Il éditait bien quelques brochures clandestines (lettres aux abonnés de la Vie ouvrière), mais il ne les faisait parvenir qu'aux adhérents et sympathisants connus. Toutefois, la situation était telle que cette propagande sortait du cadre étroit qu'elle s'était fixée et rayonnait sur un assez grand nombre de soldats et de travailleurs. Il [ce Comité] ne joua aucun rôle dans les mutineries et les mouvements de grève de 1917, il ne s'adressa jamais directement à la masse des soldats et des ouvriers[13]. Ce qu'il ne faut pas oublier à propos de Zimmerwald et de Kienthal c'est que les délégués français qui y participèrent (CGT et Parti socialiste) vont s'opposer à Lénine, qui sera minoritaire en défendant la transformation de la guerre impérialiste en révolution, au prix de la défaite de son propre pays. En février 1918 la IIe Internationale réunit son Congrès à Berne. Le travailliste Ramsay MacDonald résume ainsi ses positions: "Pour Berne, le socialisme est l'État sous sa forme démocratique. En effet, la démocratie est devenue non seulement un mouvement réformiste, mais une idée constructive et économique[14]." La position de Berne par rapport à la Révolution d'Octobre 17 en Russie? "Toute la Deuxième Internationale est anti-bolchéviste." Ramsay MacDonald précise: "Elle est, en fait, la seule vraie défense contre le bolchévisme ‑ en dehors des exécutions militaires[15]." Au Congrès du parti socialiste qui se tient en octobre 1918, les minoritaires de tendance centriste l'emportent par 1544 voix (LONGUET-CACHIN) contre 1172 (RENAUDEL) et 152 voix données à la motion LORIOT, de gauche. FROSSARD devient alors le secrétaire du parti et CACHIN remplace RENAUDEL à la direction de l'Humanité. Ce changement de direction n'impliquait pas une condamnation du socialisme de guerre. En 1918, le Parti socialiste ne compte plus que 30 000 membres. Il en avait près de 80 000 en 1913. II. SORTIE DE LA GUERRE - 19191. La situation de la classe ouvrière française au lendemain de la guerreQuelques indications sommaires sur le contexte dans lequel vont se trouver, en 1919, la classe ouvrière et le parti socialiste. Le coût en hommes de la guerre de 14‑18 s'établit comme suit: environ 1 300 000 morts au combat ou suite de blessures. Trois millions de blessés, plus d'un million d'invalides. On peut déjà signaler que dans les années qui viennent il y aura un recours important aux travailleurs étrangers (comme en 1945) et un rejet de ces travailleurs dès les premières menaces de chômage. Les destructions ont été massives tant eu bâtiments civils qu'industriels (20 000 usines). Sans parler des infrastructures voies ferrées, routes et de la terre (3 millions d'hectares). Au niveau de la production, les effets sont catastrophiques: par rapport à 1913 l'indice est tombé de 50 %. Quant à la situation financière, elle est également désastreuse: emprunts massifs à l'étranger (les Américains détiennent 90 % de la créance), endettement vis-à-vis des particuliers, diminution des revenus extérieurs. On compte sur l'Allemagne pour payer. De fait elle paiera peu. On peut également noter que la France a perdu son indépendance de grande puissance: elle ne dépend pas seulement de l'Allemagne pour les réparations, mais aussi de ses Alliés qui vont d'ailleurs cesser tout de suite de l'aider. Les États‑Unis ne signent pas le Traité de Versailles et développent une politique protectionniste. Il lui faut compter de plus sur le désordre monétaire international et la prépondérance que les États‑Unis vont développer. En 1919, cependant, c'est l'euphorie de la victoire. Mais pas pour tout le monde. Les prix ont monté dès 1915 et les salaires n'ont pas suivi. Et le poids physique de la guerre a pesé principalement sur les paysans et les ouvriers. Dans quelle proportion, plus sur les épaules des paysans. Ce qui expliquera le vote des Fédérations rurales au Congrès de Tours contre le socialisme de guerre. La part du prolétariat dans la classe ouvrière. Du fait de la guerre, elle a augmenté, notamment dans la métallurgie, la construction des engins automobiles. Il ne faut pas oublier le rôle des femmes dans l'économie de guerre, leur combativité lors des grèves de 1917 et 1918. Ce qui est le plus étonnant, c'est leur "quasi disparition" en tant qu'actrices de l'histoire après le retour à la normale. De fait le travail des femmes est mal accepté: les conceptions proudhoniennes sont dominantes, les femmes doivent rester au foyer, la promiscuité du travail est mauvaise pour elles, etc. Et fait plus important pour le parti socialiste, elles ne votent pas. Il s'agit d'une population "mineure" dans tous les sens du terme. Quant au sort de la main d'oeuvre étrangère "importée", par exemple les 100 000 Vietnamiens, les 50 000 Chinois employés soit à nettoyer les tranchées des cadavres, soit plus massivement dans les usines, il n'en est guère question. Il n'y aura guère de références à la situation des étrangers, sinon en 1920, au Congrès de Strasbourg du parti socialiste, de la part de Charles Rappoport. Il suggère que les députés socialistes demandent à la Chambre l'abrogation de cette loi infâme, en vigueur dans tous les pays capitalistes, d'après laquelle un pays peut chasser de son sol un étranger, comme un chien, parce que ce pays dit: "C'est ma terre!"[16] Ce prolétariat, cette classe ouvrière sont-elles syndiquées? La CGT que dirige Léon Jouhaux depuis 1909 a vu ses effectifs diminuer pendant la guerre. Du fait de la mobilisation, du fait aussi de la politique de collaboration menée par les principaux dirigeants syndicaux. Il y a un socialisme de guerre. Il y a aussi un syndicalisme de guerre qui collabore avec le gouvernement sans états d'âme. 2. Réactions après la constitution de la IIIe Internationale, mouvement ouvrier et socialisteLa nécessité d'une IIIe Internationale, Lénine l'a envisagée dès le 1er novembre 1914 dans un article du Social-Démocrate. "À la IIIe Internationale revient la tâche d'organiser les forces du prolétariat en vue de l'assaut révolutionnaire contre les gouvernements capitalistes, de la guerre civile contre la bourgeoisie de tous les pays pour le pouvoir politique, pour la victoire du socialisme[17]!" L'Internationale c'est "le rapprochement (d'abord idéologique, et ensuite, le moment venu, sur le terrain de l'organisation)[18]". Lorsque la IIIe Internationale fut effectivement fondée en mars 1919, dix-huit mois après la Révolution d'Octobre il n'existe en France non seulement aucun parti communiste, mais même pas une organisation constituée qui se réclame des principes du bolchévisme[19]. En avril 1919 les syndicalistes révolutionnaires avec Pierre Monatte et Alfred Rosmer font reparaître la Vie Ouvrière pour promouvoir l'alliance du syndicalisme et du bolchévisme. C'est en quelque sorte la réponse politique au Programme minimum de la CGT présenté par Léon Jouhaux fin 1918. Son idée maîtresse est le productivisme dans le cadre de l'État-Nation. Sans qu'il y ait caractérisation de l'État. Au lendemain de ce Ier congrès constitutif de l'IC, le parti socialiste unifié votait dans son congrès de Paris, du mois d'avril, une résolution par laquelle il maintenait son adhésion "sous condition" à la IIe Internationale. En mai 1919 se constitue le Comité de la IIIe Internationale (Loriot, Monatte, Rosmer, puis Souvarine) dont la fraction socialiste décide d'oeuvrer dans le Parti. Ce n'est pas la succession directe du Comité pour la reprise des relations internationales. Ses bases idéologiques sont plus que floues. Le nouveau Comité regroupe anarcho-syndicalistes, socialistes de gauche, anarchistes et éléments jeunes nés de la guerre, sans expérience du mouvement ouvrier, sans liaison avec les masses. Ce Comité c'est le lieu de rassemblement des diverses forces résolument hostiles aux hommes de l'Union sacrée. Son objectif n'est pas de construire un parti communiste capable de diriger la révolution en France mais de détacher le parti socialiste de la IIe Internationale, de le lier à la IIIe. Il entend cristalliser l'espoir né de la Révolution d'Octobre pour changer la société en France. Mouvement socialFace à la création de la IIIe Internationale, à l´"agitation" sociale qui risque de se politiser, à sa crainte d'un Premier Mai révolutionnaire le gouvernement se résout à promulguer le 23 avril 1919 la loi sur la journée de 8 heures. (Généralement 10 heures.) Ce geste du gouvernement sur les 8 heures n'est pas suffisant, loin de là. Le 1er mai 1919 donne lieu à des manifestations qui, par leur nombre et leur violence, dépassaient de beaucoup celles d'avant la guerre. En juin et en juillet les luttes grévistes des métallurgistes, des ouvriers des transports et des mineurs effrayaient la bourgeoisie, qui faisait de nouvelles concessions. L'influence de la révolution russe devenait de plus en plus grande, et manifestement la classe ouvrière consciente était pour la IIIe Internationale sinon pour la Révolution. Il faut souligner que ce 1er Mai est revendicatif. Il demande l'application de la loi sur la journée de huit heures. Il n'y a pas de revendication politique. Échec de la grève du 21 Juillet 1919La journée du 21 juillet 1919 devait être une journée internationale d'action contre l'intervention de l'Entente en Russie, contre le soutien des pays capitalistes à la contre-révolution, aux armées blanches. Pour la défense de la Révolution bolchéviste. Il y a de grands meetings en Angleterre, de très fortes grèves et manifestations en Italie. En France, rien. La grève générale a été décommandée par la CGT et le Parti socialiste reste coi. Cette journée manquée, il faut le souligner, va marquer les relations entre les bolchéviks et la France. Lénine, dans ses Notes d'un publiciste (début 1920) évoque en réponse à Jean Longuet "l'échec de la grève du 21 juillet 1919". Pourquoi donc Longuet ne chargerait-il pas quelqu'un de constituer un dossier européen sur la question? Une véritable "éducation socialiste" ne serait-elle pas "la divulgation constante des fautes des leaders et des erreurs du mouvement". De Moscou il ne connaît qu'un extrait du journal l'Avanti ‑ du Parti socialiste italien ‑ "où se trouve divulgué le misérable rôle joué dans cette affaire par un des plus ignobles social-traîtres (ou anarcho-traîtres?), l'ex-braillard syndicaliste et antiparlementaire Jouhaux[20]". ÉlectionsLes premières élections législatives de l'après-guerre, le 16 novembre 1919 furent décevantes pour le Parti socialiste qui avait fait une campagne "bolchévisante", ce que la droite du parti reprocha. Ce fut le triomphe de ce que l'on a appelé le Bloc national. Échec au demeurant relatif puisque le parti socialiste recueille quand même 1 700 000 voix. Quant aux adhésions elles allaient atteindre un niveau record. Elles n'étaient cependant pas du goût de tout le monde. Adhésion sentimentale ou intéressée, écrira Frossard ayant quitté le Parti en janvier 1923. Il parle avec mépris de ces dizaines de milliers de jeunes adhérents. Ils sont "ignorants du parti, de sa doctrine, de son histoire, de sa tradition, de ce qu'il représentait d'efforts patients et pénibles, de dévouements obscurs et de sacrifices, d'influence morale, d'autorité politique". Ils sont "jetés sans préparation dans nos luttes intérieures. Naturellement, ils prennent tout de suite position et se portent aux extrêmes." Mais un révolté n'est pas un révolutionnaire. On ne naît pas socialiste, on le devient. La génération de l'armistice n'a ni le temps ni le goût de le devenir. [...] Elle traite le parti comme un pays conquis, et elle pousse à la scission. Nos réunions de section deviennent de véritables batailles rangées[21]. Trois InternationalesLes luttes intérieures dont parle Frossard, c'est la question des Internationales. Et ce qu'implique l'adhésion à telle ou telle. Début 1920, il y a trois Internationales en présence. La IIe qui réunit les dirigeants les plus compromis dans la guerre. On pourrait la qualifier de l'extrême droite du mouvement socialiste international. Celle que l'on va appeler par dérision l'Internationale II et demi. Elle rejette en paroles la IIe Internationale et rêve de se fondre avec l'Internationale de Moscou, si celle-ci change de caractère révolutionnaire. Il faut en effet que les partis qui la composent comptent avec la sympathie qu'inspire la révolution bolchévique à leurs adhérents, et encore plus à leurs électeurs. Et puis bien sûr il y a la IIIe Internationale. Ces clivages, ces oppositions se reflètent bien entendu dans le parti socialiste français. Il y a la droite (Deuxième Internationale), au centre les Reconstructeurs, et la gauche du Comité de la IIIe Internationale. C'est le centre, les anciens minoritaires, qui gouvernent le parti. Les adversaires les plus acharnés du bolchévisme, on peut les compter. Encore qu'il y ait des nuances entre eux. Disons Renaudel. Pour les Reconstructeurs du Centre (les anciens minoritaires), c'est plus difficile, certains rejoindront la gauche. En février 1920, au Congrès de Strasbourg du parti socialiste, ce sont encore les Reconstructeurs qui mènent le jeu. Il y aura un vote majoritaire pour quitter la IIe Internationale, mais sans pour autant adhérer à la IIIe. Et une mission d'enquête sera désignée pour aller, sur place, étudier le bolchévisme: sont désignés Longuet et Cachin. En fin de compte, c'est Frossard qui remplacera Longuet. La provocation vis-à-vis de Moscou était trop grande. De fait, selon certaines analyses, il y aurait eu une majorité pour l'adhésion immédiate si certains délégués avaient respecté leur mandat. III. MOUVEMENT OUVRIER
GRÉVISTE OU RÉVOLUTIONNAIRE
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[1]. Les pages qui suivent ont servi de fil conducteur pour la Conférence du 13 janvier 1996 à l'Université Marxiste de Paris. Il s'agit d'un condensé schématique issu d'un livre en préparation sur le PCF.
[2]. Prosper-Olivier Lissagaray, Histoire de la Commune, Paris, F. Maspero, 2 vol.
[3]. La première édition de ce livre (Paris, 1948, Ed. Hier et Aujourd'hui) ayant été critiquée en URSS, une deuxième édition "remaniée" devait être mise en vente en 1949, comportant de très importantes corrections.
[4]. Voir Patrick Kessel, Le Prolétariat avant Marx, Paris, Plon, 1969. Notamment l'Introduction.
[5]. Lénine, "Plan de discours au Congrès des syndicats"; 25 mai 1921.
[6]. La Grande Initiative, Oeuvres, vol. 29, p. 425 - 28 juin 1919.
[7]. Grigori Zinoviev, in: Les Questions les plus pressantes du Mouvement ouvrier international, Petrograd, 1920, Ed. de l'IC, p. 42‑43 (Feltrinelli reprint, 1967.)
[Note 321ignition:] Les phrases citées figurent dans le projet de thèses "Du rôle du Parti communiste dans la révolution prolétarienne", présenté au 2e Congrès de l'IC par le Comité exécutif. Ce texte est reproduit également in: Le Parti socialiste et l'Internationale - Rapport sur les négociations conduits à Moscou suivi des thèses présentées au 2e congrès de l'Internationale communiste, [par] Ludovic-Oscar Frossard, Paris, Librairie de l'Humanité́ et du Parti socialiste, 1920, p. 49.
[8]. Bureau d'Éditions. Réimpression en deux fascicules, Paris, 1983, Librairie Internationale.
[9]. Voir lettre d'Engels à Lafargue du 27 juin 1893 in: Friedrich Engels, Paul et Laura Lafargue, Correspondance, Paris, Ed. Sociales, 3 volumes 1956‑1959, vol. 3, p. 290.
[Note 321ignition:] Dans cette lettre, Engels commente la publication par le Parti ouvrier dans son journal Le Socialiste du 17 juin 1893, d'un manifeste "Socialisme et Patriotisme - Aux travailleurs de France" (signé notamment par Jules Guesde et Paul Lafargue, en date du 23 janvier 1893). Voici quelques passages de la lettre d'Engels:
Mais ni Français, ni Allemands, ni Anglais n'auront, à eux seuls, la gloire d'avoir écrasé le capitalisme; si la France PEUT-ÊTRE donne le signal, ce sera en Allemagne, le pays le plus profondément travaillé par le socialisme et où la théorie a le plus profondément pénétré les masses, que la lutte se décidera, et encore ni la France, ni l'Allemagne n'auront définitivement assuré la victoire tant que l'Angleterre restera aux mains de la bourgeoisie.
L'émancipation prolétarienne ne peut être qu'un fait international, si vous tâchez d'en faire un fait simplement français, vous la rendez impossible.
[...]
Vous parlez de ce que "la France relevait en 1889, dans son immortel Congrès de Paris, le drapeau etc.". Comme vous ririez, à Paris, si les Belges voulaient dire que la Belgique, dans SON immortel Congrès de Bruxelles de 1891, ou la Suisse dans SON immortel Congrès de Zurich... De plus, les actes de ces congrès sont des actes, non pas français, belges ou suisses, mais internationaux.
Le texte de ce manifeste est également reproduit par les Cahiers du Bolchévisme, n° 14, 15 juillet 1935, p. 807. En outre un extrait en est cité par Florimond Bonte dans un article intitulé "Unité d'action - Front Populaire - Union de la nation française", paru dans les Cahiers du Bolchévisme, n° 1, 15 janvier 1937, p. 28. Voici quelques extraits de cet article (p. 28‑30):
Le Parti communiste français, dont tous les actes tendent à servir le peuple, est le Parti de l'union de la nation française. [...] L'union de la nation française sauve le peuple et la nation en associant, contre une minorité infime de parasites, pour la richesse, la puissance, la prospérité et la gloire du pays, la masse anonyme des ouvriers, des paysans, des artisans, des savants, des artistes et penseurs. Il y eut malgré cela un beau concert de railleries, d'imprécations et d'attaques dirigées contre notre Parti communiste [...]. Comment, disait-on, voilà des communistes qui se mettent à parler de la France et de la nation française! [...] Lorsque le Parti communiste crie "Vive la France!", il ne fait que répéter les paroles de Jules Guesde et de Paul Lafargue, le 23 janvier 1893: [suivent ici des passages du texte de 1893].
[10]. Toutes les références à Pierre Semard sont extraites de Dix années de lutte pour la Révolution mondiale, Paris, mars 1929, Bureau d'Éditions. Édité par la revue l'Internationale Communiste. La contribution de Semard, p. 265‑274.
[11]. In: Syndicalisme révolutionnaire et communisme - Les archives de Pierre Monatte, Paris, 1968, F. Maspero, 462 p., p. 45‑49.
[12]. P. Semard. Dix années de lutte pour la Révolution mondiale, op. cit.
[13]. P. Semard. Dix années de lutte pour la Révolution mondiale, op. cit.
[14]. Paroles de Ramsey MacDonald citées in: L'Internationale communiste - Organe du Comité exécutif de l'IC, n° 7‑8, novembre-décembre 1919, p. 1177.
(D'après La Feuille du 9 août) "Je tiens à dire que le socialisme, pour autant qu'il a été défini à Berne, est l'État sous la forme social-démocratique [...] La démocratie est devenue maintenant non seulement un mouvement réformiste, mais une idée constructive et économique."
[15]. Paroles de Ramsey MacDonald citées in: idem, p. 1178.
(D'après le Labour Leader, cité par la Vie Ouvrière du 3 septembre): "Je n'ai pas de craintes au sujet de la Troisième Internationale. Elle n'a pas de racines. Elle est une création de période révolutionnaire. Si elle dure, ce sera notre faute... Toute la deuxième Internationale est antibolchéviste. Elle est, en fait, la seule vraie défense contre le bolchévisme ‑ en dehors des exécutions militaires".
[16]. Charles Rappoport, in: Parti Socialiste SFIO, 17e Congrès national tenu à Strasbourg, les 25, 26, 27, 28 et 29 février 1920 - compte rendu sténographique, Ed. Parti Socialiste, Paris (sd), 574 p., p. 354.
[17]. Lénine, Oeuvres, Paris, Ed. Sociales, vol. 21, p. 35.
[18]. Idem, p. 95.
[19]. P. Semard. Dix années de lutte pour la Révolution mondiale, op. cit.
[20]. Lénine, Oeuvres, op. cit., vol. 30, p. 364‑371. Publié dans L'Internationale Communiste, n° 9, avril 1920. Les explications de Frossard-Cachin lors de leur enquête en Russie (juillet 1920) ne semblent pas avoir été convaincantes. Voir également Jacques Duclos, Octobre 17 vu de France, Paris, Ed. Sociales, 1967, p. 224‑227.
[21]. L.‑O. Frossard, De Jaurès à Lénine, Paris, 1930, Ed. de la Nouvelle Revue Socialiste.
[22]. Il n'est pas question ici de l'aide apportée à la Révolution russe par les Français de Moscou, ni des mutineries de la flotte devant Odessa (Marty, Vuillemin et les autres condamnés). On doit cependant rappeler l'exécution de l'institutrice Jeanne Labourbe.
[23]. Éditions Sociales, Paris, 1967.
[24]. Publiée dans Mouvement Ouvrier international - Bulletin du Conseil International provisoire des Syndicats ouvriers, Moscou, janvier 1921.
La Lettre est reproduite également in: La Voix du peuple - organe de la CGT, Paris, n° 37, janvier 1922, p. 25‑29. Ce numéro du journal est entièrement consacré au thème de l´"Historique de la Scission dans le Mouvement Syndical Français".
[25]. Le problème de l'Internationale - controverse entre les citoyens Cachin-Frossard-Mayéras au Théâtre de l'Union de Lille (26 septembre 1920), Lille, Fédération du Nord du Parti socialiste, 1920.
Cf.: L'OURS, supplément au n° 215, décembre 1990.
[26]. L'Humanité, 3 octobre 1920.
Cf.: XXIe Congrès national corporatif (XVe de la C.G.T.) tenu à Orléans du 27 septembre au 2 octobre 1920 - compte-rendu sténographique des débats.
Alphonse Merrheim (p. 362):
Dans l'Union des Métaux, nous avons longuement établi le crime qui était commis par nos gouvernants contre la Russie révolutionnaire par le blocus; nous avons adressé un appel et un questionnaire à nos camarades métallurgistes. Ce questionnaire leur demandait ce qu'ils étaient capables de faire contre le blocus de la Russie, dans quelle proportion ils pouvaient nous aider. J'ai eu la douleur, moi ‑ parce que je ressens mon impuissance et que je voudrais créer de la puissance ‑ de recevoir, sur 410 syndicats qui existaient, 72 réponses dont 25 réponses seulement en faveur d'une action sur la Révolution russe.
Lettre des membres du syndicat des Établissements de la Guerre de la Seine (Section de Vincennes), 17 septembre 1920 (p. 34):
D'autre part ‑ il n'est pas superflu d'appeler votre attention sur ce pointage ‑ notre section, consultée par référendum pour savoir si nous devions, en cas de guerre, cesser la fabrication des munitions, la majorité du personnel intéressé repoussa cette indication. Sur 900 ouvriers et ouvrières environ: 129 votèrent pour la cessation de la fabrication; 318 votèrent pour la fabrication; 378 s'abstinrent; 65 bulletins nuls.
[27]. L'Humanité, 7 octobre 1920: "Aux ouvriers métallurgistes - Faites connaître au Syndicat les usines où l'on fabrique du matériel de guerre":
C'est un fait qui étonnera que le Syndicat des métaux de la Seine, ‑ bien qu'il ait maintes fois fait appel à ses membres pour le renseigner, ‑ ne connaît pas encore toutes les usines où l'on fabrique du matériel de guerre. Le syndicat s'adresse à nouveau aux ouvriers métallurgistes, dans les termes suivants:
"[...] Le syndicat des métaux de la Seine a déjà, à plusieurs reprises, demandé à nos camarades de lui signaler les maisons où s'accomplit ce travail. Nous espérons qu'ils feront diligence pour nous donner satisfaction; chaque jour écoulé nous rend complices de l'écrasement de la Russie révolutionnaire. [...]"
[28]. L'Humanité, 7 octobre 1920.
[29]. L'Humanité, 4 octobre 1920.
[30]. Communiqué du Bureau de l'Union des syndicats de la Seine: "Ni armes ni munitions contre la Russie?", L'Humanité, 13 octobre 1920.
[31]. Alexandre Losovsky, Le Mouvement Syndical International avant, pendant et après la guerre, Paris, Bureau d'Éditions, 1926, p. 56. Réimpression en 11 fascicules, Paris, NBE, 1980.
[32]. P. Semard. Dix années de lutte pour la Révolution mondiale, op. cit.
[33]. Parti Socialiste SFIO, 17e Congrès national, op. cit., p. 118‑119.
[34]. Idem, p. 290.
[35]. Idem, p. 378.
[36]. Le Parti socialiste et l'Internationale - Rapport sur les négociations conduits à Moscou, op. cit., p. 14.
[37]. L'Humanité, 3 octobre 1920.
[38]. Voir Bulletin International, n° 3, octobre 1995, CEMOPI.
[39]. L'Humanité, 3 octobre 1920.
[40]. Le problème de l'Internationale - controverse entre les citoyens Cachin-Frossard-Mayéras, op. cit.
Cf. aussi L'Humanité, 5 octobre 1920.
[41]. Le Phare, n° 9‑10, mai‑juin 1920, Chaux-de-Fonds, Suisse. Cette revue, dirigée par Jules Humbert-Droz, devient avec ce numéro l'organe officiel de la IIIe Internationale en Suisse Romande.
[42]. Parti Socialiste SFIO, 17e Congrès national, op. cit., p. 455.
[43]. Louis C. Fraina, in: Du Premier au Deuxième Congrès de l'Internationale Communiste, Paris, 1980, EDI, 510 p., p. 424‑427.
[44]. 5 février 1920.
[45]. 17 janvier 1920.
[46]. L. C. Fraina, in: Du Premier au Deuxième Congrès de l'Internationale Communiste, loc. cit.
[47]. G. Zinoviev, "Le Deuxième Congrès de l'Internationale et ses buts", L'Internationale Communiste, n° 11, 1er juin 1920, p. 1778.
[48]. Le Parti socialiste et l'Internationale - Rapport sur les négociations conduits à Moscou, op. cit., p. 14.
[49]. Ibidem.
[50]. Marcel Cachin, "Rencontre avec Lénine", Cahiers du Communisme, n° l, janvier 1949, p. 41‑42. Première version Le Parti socialiste et l'Internationale - Rapport sur les négociations conduits à Moscou, op. cit.
[51]. Nikolaï Boukharine, Le Programmé des communistes (bolcheviks), Moscou, 1918, Ed. du Comité Exécutif de l'Internationale Communiste, 79 p.
[52]. Lénine, Oeuvres, op. cit., vol. 29, sous le titre "La situation actuelle et les tâches immédiates du pouvoir des soviets", p. 460‑473.
[53]. Idem, vol. 30, p. 364‑374.
[54]. In: Lénine, Le Prolétariat el sa dictature, Paris, UGE-10/18, 1970, 511 p. Textes choisis et présentés par Patrick Kessel.
[55]. À titre indicatif. Et sans relever les publications anti-bolchevik.
[56]. Parti Socialiste SFIO, 17e Congrès national, op. cit., p. 285‑286.
[57]. L'Internationale communiste, n° 2, juin 1919, p. 270.
[58]. Il s'agit de la motion intitulée "Motion du comité de résistance socialiste", signée par Léon Blum, Alexandre Bracke, Barthélemy Mayéras, Dominique Paoli. Elle a finalement été retirée par ses auteurs.
[59]. 18e congrès national tenu à Tours les 25, 26, 27, 28, 29, 30 décembre 1920 - compte-rendu sténographique, Parti socialiste SFIO, 1921, p. 588‑589.
[60]. [Note 321ignition:] Après la Première guerre mondiale, se tient d'abord en février 1919 une conférence de partis socialistes à Berne, suivie d'une autre tenue à Lucerne, du 2 au 9 août 1919; puis en aout 1920 la 2e Internationale est reconstituée à Genève avec la participation d'un nombre réduit de partis. Elle établit son siège à Londres. Du 5 au 7 décembre 1920 a lieu à Berne une Conférence de partis socialistes centristes qui tentent de manoeuvrer entre la 2e Internationale socialiste et la 3e Internationale communiste. La position de Paul Faure et Jean Longuet à cette conférence de Berne préfigure la constitution, en février 1921 à Vienne en Autriche, de la “Communauté internationale de travail de partis socialistes” par un certain nombre partis n'ayant pas suivi la démarche de la 2e Internationale de Londres. Friedrich Adler et Otto Bauer jouent un rôle important dans ce cadre. Officiellement l'organisation est désignée aussi comme Internationale de Vienne, mais elle est couramment nommée “l'Internationale 2 1/2”. En mai 1923 durant un congrès tenu à Hambourg cette Internationale et la 2e Internationale créent en commun l'“Internationale ouvrière socialiste”.
[61]. Manifeste du Congrès de Berne, L'Humanité, 10 décembre 1920.
[62]. Ibidem.
[63]. [Note 321ignition:] Référence non identifiée.
[64]. Parti Socialiste SFIO, 17e Congrès national, op. cit., p. 417.
[65]. 18e congrès national tenu à Tours, op. cit., p. 566‑567.
[66]. Le Parti socialiste et l'Internationale - Rapport sur les négociations conduits à Moscou, op. cit., p. 22‑23.
[67]. Lénine, Oeuvres, op. cit., vol. 31, p. 42.
[68]. Parti Socialiste SFIO, 17e Congrès national, op. cit., p. 467.
[Note 321ignition:] Citation textuelle:
Camarades, je veux dire que notre doctrine et notre rôle ne peuvent inspirer le sabotage des intérêts généraux du pays, ni le sabotage des réformes, ni le sabotage de la prospérité économique nationale. Nous défendons le pays toujours. Il ne nous est pas indifférent que la France soit indépendante, prospère et riche. Quand nous sommes dans une usine, nous ne disons pas à l'ouvrier: Il n'y a pas d'intérêt ouvrier au travail dans la société capitaliste. Il y a une Défense nationale économique, c'est-à-dire un intérêt général d'où n'est pas étranger l'intérêt particulier, même celui de l'ouvrier. Nous répétons à l'ouvrier socialiste: [...] Il faut que tu sois dans l'atelier technicien émérite autant que tu le pourras, de façon à ce que tu aides, oui, que tu aides au développement économique de cette propriété qui n'est pas à toi, qui est aux capitalistes comme le pays est aux capitalistes, mais dont tu sais bien que, prochainement, quand tu le voudras, tu seras le liquidateur tout indiqué.
[69]. L'Humanité, 9 décembre 1920.
[70]. Jean Jaurès, La Petite République, 7 janvier 1902. Reproduit in Oeuvres, Paris, 1931, Ed. Rieder, vol. 1, p. 301‑303.
[71]. Parti Socialiste SFIO, 17e Congrès national, op. cit., p. 346 et 347.
[72]. L'Humanité, 22 novembre 1920.
[73]. Lénine, Que faire?, in: Oeuvres, t. 5, Paris-Moscou, p. 451.
[74]. Albert Mathiez, Le bolchévisme et le jacobinisme, Paris, Librairie du Parti Socialiste et de l'Humanité, 1920, p. 3‑4.
[75]. L'Humanité, 28 novembre 1921.
[76]. L'Humanité, 22 novembre 1920, article "La discussion sur la IIIe Internationale a continué hier au Congrès fédéral de la Seine":
Paul Louis prend la parole [...] pour défendre la motion Cachin-Frossard. [...] Notre camarade fait alors une analyse succincte des thèses de la IIIe Internationale et montre qu'elles reprennent les idées du vieux socialisme exposé jadis par Guesde et Vaillant.
[77]. L'Humanité, 6 novembre 1920.
[78]. Ibidem.
[79]. Paris, Ed. Sociales, 2 vol.
[80]. L'Humanité, 10 décembre 1920.
[81]. [Note 321ignition:] En 1919 se tiennent des conférences internationales à Bern (en février) puis Amsterdam (en avril) et Lucerne (en aout), qui aboutissent en été 1920 à la reconstitution, à Genève, de la 2e Internationale. Un certain nombre de partis social-démocrates ne s'y joignent pas, mais constituent en février 1921 l'Union des partis socialistes pour l’action internationale, dite "Internationale deux et demi". Finalement en mai 1923 les deux organisations s'unissent pour former l'Internationale Ouvrière Socialiste.
[82]. L'Humanité, 7 aout 1919. L'intervention de Bernstein n'est pas rapportée textuellement; c'est dans le résumé de celle-ci qu'on trouve la formulation: "Plus généralement, c'est tout le bolchevisme qui est une régression. Malgré son vocabulaire marxiste, il est essentiellement utopique et prémarxiste".
[83]. [Note 321ignition:]
À l'initiative de Bernstein, avait été constitué en janvier 1919 la Centrale pour l'union de la social-démocratie (Zentralstelle für Einigung der Sozialdemokratie, ZfE). Durant la conférence de Lucerne, au sujet de la question de l'adhésion à l'Internationale communiste, Bernstein pose la nécessité de choisir entre Marx ou Bakounine. À la suite de la conférence, il publie dans l'organe de la ZfE, Le Marxiste, deux articles dont un sous le titre "Non pas Bakounine, mais Marx!" ("Nicht Bakunin, sondern Marx!").
L'organe du Parti social-démocrate d'Allemagne, le Vorwärts, publie le 31 aout 1919 un texte de Bernstein "Lassalle et le bolchevisme", dont voici quelques extraits:
[...] En substance, ils [les bolcheviks] reconnaissent par là que le développement social de la Russie n'a pas du tout pour le moment suffisamment progressé pour la réalisation de la société socialiste. Alors, ils veulent porter ce développement au niveau requis en procédant par des interventions drastiques, à la manière d'une serre. [...] Inévitablement, ils retombent dans la méthode spéculative du socialisme prémarxiste. Et là, en matière de politique économique, il leur arrive quelque chose de semblable à ce qui est arrivé à Lassalle. Il se retrouva dans des contradictions du fait qu'il adopta le plan des coopératives productives travaillant avec le crédit d'État, tel que l'avaient concocté les socialistes des années 1840 encore coincés à moitié dans l'utopie. Le système des conseils dans l'économie nationale, tel que les bolcheviks l'ont d'abord proclamé, était en parenté étroit avec ce plan des coopératives productives. "Les ouvriers maîtres de l'usine", était le slogan ici, comme là le slogan était "Les travailleurs eux-mêmes entrepreneur". [...]
Et Bernstein dans un texte datant de 1922, intitulé "Le socialisme autrefois et maintenant - controverses autour du socialisme dans le passé et le présent" ("Der Sozialismus einst und jetzt - Streitfragen des Sozialismus in Vergangenheit und Gegenwart"):
Or, ignorer les limites concernant la puissance de la volonté est l'erreur de calcul fatidique dans la politique du bolchevisme. [...] Certes, dans les décrets et les ébauches des bolcheviks on trouve beaucoup de choses séduisantes: des projets grandioses en rapport avec le domaine de l'éducation et de la sécurité sociale, en rapport avec l'organisation de la production et de la circulation, en rapport avec l'extraction et la valorisation des ressources de la terre, et d'autres similaires. Mais de telles choses, on en trouve aussi ailleurs dans la littérature du socialisme. La littérature des socialistes utopiques du 18e et du début du 19e siècle est pleine d'idées souvent formidables et d'ébauches ingénieuses.
Ces considérations amènent Bernstein à caractériser les bolcheviks comme "prémarxistes" et "utopiques". D'ailleurs Karl Kautsky s'exprime dans le même sens. En 1919, dans "Terrorisme et communisme - une contribution à l'histoire naturelle de la révolution" ("Terrorismus und Kommunismus - Ein Beitrag zur Naturgeschichte der Revolution") il écrit:
Le vieux contraste entre realpolitik et politique scientifique, entre Lassalle et Marx, est réapparu après la révolution de 1917 en Russie. [...] Les modes de pensée prémarxistes ont prévalu, tels qu'ils avaient caractérisé un Blanqui, un Weitling, un Bakounine.
Ces attaques contre le Parti communiste (bolchevique) de Russie et l'URSS ne sont pas simplement circonstancielles. De façon générale, un des principaux axes qui guident Bernstein dans la formulation de ses positions révisionnistes fait intervenir des arguments au sujet du rapport entre le marxisme et certains prédécesseurs, en particulier Blanqui et avec lui Bakounine, ainsi que Ferdinand Lassalle. Et il insiste sur les justifications théoriques qui pour lui découlent de sa falsification de l'oeuvre de Marx et Engels.
En 1899, il publie un livre "Les présupposés du socialisme et les tâches de la social-démocratie" qui reprend une série d'articles qui avaient paru auparavant dans le Vorwärts. L'ouvrage a été édité en traduction française dont nous reproduisons quelques extraits provenant du chapitre sur "le marxisme et la dialectique hégélienne". Occasionnellement nous indiquons entre accolades {} une formulation plus conforme à l'original en allemand.
Le Manifeste proclamait en 1847 que la révolution bourgeoise était imminente en Allemagne. Il précisait même "qu'étant donné le degré d'évolution de la classe ouvrière et les conditions de la civilisation européenne, celle‑ci ne pourrait être que le prélude immédiat à une révolution prolétarienne." Une telle illusion relève de l'idéalisme le plus échevelé. [...] Marx [...] ne cessait d'être influencé par la dialectique hégélienne qui s'avère plus dangereuse encore dans les périodes d'effervescence générale.
[...] un sujet qui prête encore à confusion: les rapports du marxisme et du blanquisme {un sujet qui jusqu'ici n'a été que peu abordé, à savoir la relation intrinsèque originelle du marxisme avec le blanquisme}. [...]
En Allemagne, Marx et Engels élaborent à partir de la dialectique hégélienne {dialectique hégélienne radicale} une doctrine révolutionnaire très proche de celle de Blanqui. [...] Toutefois, ils continuent à être prisonniers de l'hégélianisme {... l'étayaient de façon économique-matérialiste, mais dans le matérialisme ils argumentaient quand même à nouveau de façon hégélienne}. [...] ainsi en arrivent-ils [...] à des conclusions politique assez semblables à celles des conspirateurs babouviste. [...] Ce point de vue le conduira directement au blanquisme. [...] Nulle part pourtant l'esprit blanquiste ne se manifeste avec autant de netteté que dans les circulaires qui émanent de la Ligue des communistes. [...] un programme conçu en de termes aussi illusoires. [...]
Le marxisme ne dépasse le blanquisme que sur un seul point: la méthode. Par ailleurs, il continue d'attribuer à la violence révolutionnaire un rôle de premier plan dans la transformation socialiste de la société moderne.
[84]. On trouve un résumé de ses thèses dans sa présentation du Congrès de Tours - Naissance du Parti communiste français, Paris, 1964, Ed. Julliard, Collection Archives.
[85]. L'Humanité du 18 novembre 1920.
[86]. [Note 321ignition:] La lettre telle que publiée par l'Humanité contient la phrase suivante:
Le couteau sur la gorge, il faut exiger une réponse de Longuet et de ses partisans, et selon cette réponse, selon qu'ils accepteront de bonne foi les thèses et les conditions de l'Internationale communiste et consentiront à les appliquer loyalement en fait, et non en paroles seulement, il sera pris une décision définitive à leur égard.
L'Humanité insère après la publication de la lettre l'annotation suivante:
Le texte en anglais qui a été adressé spécialement à l'Humanité par l'intermédiaire du Daily Herald et qui nous est parvenu hier soir après le précédent, est daté de Moscou 4 novembre. Au lieu de: Le couteau sur la gorge, il faut exiger une réponse de Longuet et de ses partisans, il contient la variante suivante: Les réponses à ces questions doivent être demandées avec insistance (insistently) à Longuet et à ses partisans.
[87]. Léon Trotsky, La Crise du Parti communiste français. Deux discours devant l'Exécutif de l'I.C. (19 mai 1922), Paris, Librairie de l'Humanité, 1922, p. 20.
[88]. Lénine, Oeuvres, op. cit., vol. 31, "À propos de la lutte au sein du Parti socialiste italien", p. 402.
[89]. Le Phare, n° 16, janvier 1921, p. 228.
[90]. 18e congrès national tenu à Tours, op. cit., p. 312‑313.
[91]. Parti Socialiste SFIO, 17e Congrès national, op. cit., p. 382.